Vendredi 23 décembre 2016, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté une résolution contre la colonisation des territoires palestiniens conquis après la défaite de juin 1967. Indéfectible soutien de l’entité sioniste, les États-Unis se sont contentés de s’abstenir et non de bloquer, comme à leur habitude, le vote de la résolution en y opposant leur veto.
Un premier texte devait être présenté par l’Égypte, avec le soutien de la Ligue arabe, mais Abdel Fattah al-Sissi a reculé suite aux pressions de l’entité sioniste et du nouveau président états-unien, Donald Trump. Finalement, malgré la volte-face du docile maréchal égyptien, le texte de la résolution a été repris par la Nouvelle-Zélande, le Venezuela, la Malaisie et le Sénégal qui ont permis son adoption. La résolution, qui reprend les grandes lignes d’une précédente résolution votée en 1979, exige l’« arrêt immédiat et complet des activités israéliennes de colonisation dans les territoires palestiniens occupés », y compris la partie est d’al-Quds.
Immédiatement, les médias mainstream ont parlé de « revers » ou de « camouflet » pour l’entité sioniste et son Premier ministre, Benyamin Nétanyahou. Le numéro deux de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), Saëb Erakat, a même affirmé qu’il s’agissait « d’un jour historique » et d’une « victoire (…) du droit international ». Certains analystes sont allés jusqu’à évoquer de possibles « sanctions » politiques et économiques si la colonisation « des territoires palestiniens » se poursuivait.
Mais nous savons que cette résolution a été votée uniquement parce que l’administration Obama en fin de course souhaitait présenter un visage un peu plus équilibré de sa politique « moyen-orientale ». Elle espérait peut-être faire oublier la conclusion, au mois de septembre dernier, d’un accord d’assistance militaire en faveur de l’entité sioniste d’un montant de 38 milliards de dollars pour les années 2019-2028. Nous savons également que Donald Trump est hostile au vote de cette résolution et que son administration s’opposera au vote de la moindre sanction conte ses fidèles alliés sionistes.
N’ignorant pas cette réalité, l’entité sioniste a annoncé qu’elle « attend avec impatience de travailler avec le président élu Donald Trump et avec tous nos amis au Congrès, Républicains comme Démocrates, pour neutraliser les effets néfastes de cette résolution absurde ». Comme un pied de nez à ce vote, l’entité a déjà averti qu’elle « rejette cette résolution anti-israélienne honteuse des Nations unies et ne s’y conformera pas ».
De fait, cette résolution, comme toutes les résolutions précédentes qui égratignaient l’entité sioniste, restera lettre morte, et tous les analystes sérieux le savent pertinemment. Car, en raison de sa composition et de ses modalités de fonctionnement, le Conseil de sécurité de l’ONU n’a jamais été, et ne sera jamais, un instrument de libération des peuples colonisés. Il est, et il restera, un instrument de légitimation des politiques des puissances dominantes.
Alors au lieu de reprendre le discours dominant et de se féliciter de cette résolution ou d’appeler au respect du « droit international », les véritables soutiens de la Palestine devraient se souvenir que ce soi-disant « droit » n’est qu’un instrument de domination inventé par l’Occident impérialiste pour asservir les peuples non-occidentaux.
Ainsi, c’est le « droit international » qui a légalisé la colonisation de la Palestine et la création de l’entité sioniste, le 29 novembre 1947. Ce jour là, dans le plus grand respect du « droit international », l’Assemblée générale de l’ONU a adopté la résolution 181 c’est-à-dire un plan de partage de la Palestine entre les Palestiniens et les colons juifs alors que les villes d’al-Quds et de Bethléem devaient passer sous statut international.
Lorsque nous connaissons le rôle de l’ONU et du soi-disant « droit international » dans la colonisation de la Palestine, comment peut-on avoir la moindre confiance en cette institution ? Comment l’organisation qui a voté la spoliation de la terre du peuple palestinien pour la réalisation du projet sioniste de création d’un État juif pourrait-elle être l’instrument de son émancipation ?
Critiquant les contradictions du discours légaliste se référant exclusivement au « droit international », le juriste égyptien Tariq al-Bishri concluait que « nous ne pouvons réclamer nos droits que dans le cadre « légal » esquissé par nos agresseurs. C’est pire qu’une défaite, c’est une reddition humiliante pour l’esprit et une honte pour l’âme ». (1)
La réalité est que, de la révolte du cheikh Izz ad-Din al-Qassam dans les années 1930 à l’intifadha al-Quds depuis l’automne 2015, ce n’est pas le « droit international » mais la résistance palestinienne et arabe qui a fait reculer l’entité sioniste. Car la libération de la Palestine se fera uniquement en dehors de la légalité coloniale.
Youssef Girard
25 décembre 2016
Note de référence:
(1) Tarek El-Bechry, Les Arabes face à l’agression, Beyrouth, Ed. Albouraq, 2009, page 80.