Le mercredi 4 juillet 2012 en début d’après midi une trentaine de personnes attendaient la décision de la présidente de la chambre d’instruction de la Cour de Paris concernant la demande d’extradition du Dr Mourad Dhina formulée par le régime militaire algérien aux autorités françaises, l’accusant d’avoir commis de prétendues actions terroristes en Suisse durant les années 1997-1999. A noter que la Confédération suisse avait déjà reçu plusieurs demandes similaires d’extradition présentées par le régime militaire algérien à l’encontre de Mourad Dhina qui réside dans le Canton de Genève depuis une vingtaine d’années et qu’elle a toujours refusé d’y donner suite.
L’audience était soulagée d’entendre la présidente de la chambre d’instruction prononcer le rejet de la demande d’extradition, considérant qu’elle n’était pas fondée. Mourad Dhina aura donc passé presque six mois (1% de sa vie) confiné dans une cellule de la Prison de la Santé à Paris, pour une accusation sans fondement.
En fait cette demande était incohérente et non conforme avec la convention bilatérale d’extradition et les dispositions pertinentes du Code de procédure pénale français, selon les déclarations mêmes de la présidente de la Chambre d’instruction et du représentant du ministère public. Elle n’était pas circonstanciée, ne comportait ni la date ni les lieux des faits et se référait à des documents contradictoires.
Dès le départ, les autorités françaises auraient dû suivre les Suisses et n’auraient pas dû donner suite à cette demande. Elles ont préféré la soumettre à l’examen judiciaire qui a suivi son cours normal. Il faut relever cependant que la Cour a rejeté cinq ou six demandes de mise en liberté provisoire et d’assignation à résidence de Mourad Dhina, malgré les garanties présentées par la défense. L’avocat de Mourad Dhina, Maitre Antoine Comte, n’a d’ailleurs pas manqué de noter lors d’une conférence de presse qu’au cours de l’audience du 4 juillet, un justiciable rwandais suspecté de crimes contre l’humanité, de crime de génocide, et d’assassinats multiples, faisant l’objet d’une demande similaire d’extradition de son pays, comparaissait libre, bien habillé en costume cravate. On ne peut donc ne pas évoquer la dimension politique de l’arrestation de Mourad Dhina, le rôle des réseaux de la Françalgérie dans cette affaire, et la volonté d’immobiliser un opposant algérien dans un contexte doublement électoral (présidentielles françaises et législatives algériennes de mai 2012).
Fut inattendue la question du journaliste de la chaîne France-24 à Mourad Dhina à sa sortie de prison. Que pensez-vous de la découverte au CERN du boson de Higgs, annoncée le même jour de votre libération ? Enorme satisfaction pour cette énorme découverte, fut la réponse. C’est qu’il y a plus de vingt ans, Mourad Dhina faisait partie du groupe de physiciens des hautes énergies qui étaient à la quête du Boson de Higgs. En 1992-1993, il avait déjà plusieurs publications scientifiques sur le sujet à son actif, avant de quitter le CERN et la France voisine pour échapper au gang de Pasqua qui se lançait en 1993 dans une chasse aux Algériens qui s’opposaient au coup d’Etat de janvier 1992.
Le hasard du calendrier a voulu que le dernier épisode de cette saga judiciaire se passe la veille du jour de commémoration de l’indépendance de l’Algérie (5 juillet). A une question d’un journaliste, Mourad Dhina a fait part de ses sentiments mitigés : sa satisfaction d’être libéré et sa tristesse de constater l’état de délabrement de l’Algérie cinquante ans après une « indépendance confisquée », paraphrasant le premier président algérien Ferhat Abbas. Pour Mourad Dhina l’Etat algérien est inexistant, car un Etat de non droit et dont la justice est aux ordres n’est pas un Etat. Et ce ne sont pas les seize pages publiées dans un cahier publicitaire du quotidien Le Monde le 4 juillet, payées cent mille euros par page, qui vont changer la réalité du pays.
Ghazi Hidouci, ancien ministre algérien de l’Economie et des Finances, présent à la conférence de presse tenue suite à la libération de Mourad Dhina, interrogé par un journaliste de Rachad TV sur sa lecture de cette libération a répondu : « A la date du cinquantième anniversaire [de l’indépendance], une énorme publicité, y compris dans les journaux français, a été faite pour montrer que c’est une grande victoire [du régime algérien]. La justice française nous a fait un grand cadeau puisqu’elle a crevé l’abcès et montre que ces honnêtes intellectuels algériens qui sont dans l’opposition ne sont pas comme le dit la presse algérienne des terroristes et des criminels, mais que ce sont de braves gens. C’est une énorme victoire au cinquantième anniversaire contre le système judiciaire algérien et contre le pouvoir algérien. »
Abbas Aroua
8 juillet 2012
3 commentaires
Beau résumé
Ceci est un beau résumé de la situation: le soleil est en train de se lever sur notre pays. La colonisabilité vit ses derniers jours. L’avenir nous appartient, inshaAllah!
RE: Découverte du Boson de Higgs, libération de Mourad Dhina et indépendance de l’Algérie
Merci cher Si Abbas, d’avoir partagé – avec nous autres « exilés de l’intérieur » – l’ambiance de ces premiers moments de libération de notre frère Si Mourad.
L’autre « coïncidente » et pas des moindres, c’est que, par un effet de Justice Immanente, la fin du calvaire de Si Mourad, coïncide avec le début de la descente aux enfers d’un certain Sarkozy Nicolas, un délinquant potentiel, lui, le ci-devant Chef de l’Etat français et serviteur obligé des généraux putschistes d’Alger et autres expéditeurs de valises…
Douga douga dans la gadoue Nicolas !
Aux dernières nouvelles – http://www.alterinfo.net/Sarkozy-demande-l-asile-au-Canada_a78909.html – Sarkozy Nicolas aurait demandé l’asile politique, non pas en Hongrie d’où il est originaire, mais au Canada, chez son ami l’octogénéraire et richissimes hommes d’affaires canadien Desmarais. Remarquez au passage qu’on n’est pas sortis des « marais » puisque le nom-même de Sarkozy veut dire en hongrois : marais… et même, marécage. C’est dire que ce triste sire n’en aura pas fini de patauger dans son marécage nauséeux à tous points de vue. Ne soyons donc pas trop tristes, nous algériens : nous ne sommes pas les seuls à avoir des gouvernants boueux…