« Le petit Uruguay, dont les lois anti-tabac comptent parmi les plus strictes au monde, tente de se défendre contre le géant Philip Morris International, deuxième cigarettier mondial, qui l’accuse de violer un accord commercial avec la Suisse. Montevideo a reçu le soutien de pays tiers et du richissime maire de New York, Michael Bloomberg, fervent partisan de la lutte anti-tabac.
Avec un produit intérieur brut (PIB) annuel de 44 milliards de dollars, l’Uruguay est un « petit pays », comme le souligne son président José Mujica. Face à lui, Philip Morris International (PMI) affiche une capitalisation boursière de 108 milliards de dollars.
PMI accuse l’Uruguay de violer son accord commercial avec la Suisse, où la multinationale possède un siège, et en a appelé à l’arbitrage de la Banque mondiale. « Le gouvernement uruguayen a fait quelque chose qu’aucun autre gouvernement n’a fait, qui nous paraît n’avoir aucun sens du point de vue de la santé publique et a clairement porté préjudice à nos investissements », explique Peter Nixon, porte-parole du cigarettier.
PMI réclame une compensation financière « substantielle ». M. Nixon n’a pas précisé de montant, mais l’Uruguay pourrait être contraint de verser des millions de dollars si la firme obtient gain de cause. Le président uruguayen, ancien guérillero qui a passé près de 15 ans en prison sous la dictature militaire, s’est inquiété publiquement d’avoir à engager des avocats à 1.500 dollars de l’heure à l’étranger pour mener la bataille juridique.
Mais José Mujica, dit « Pepe », a aussi pu constater que de nombreux pays soutiennent Montevideo. Il a également reçu un appel du maire de New York, le milliardaire Michael Bloomberg, qui lui a promis que sa fondation aiderait à payer les frais liés à la procédure.
M. Bloomberg, un ancien fumeur devenu un ardent partisan de la lutte anti-tabac, a interdit de fumer dans les bars et restaurants de New York et souhaite étendre la mesure aux parcs et places de la ville. Il a déjà dépensé des millions de dollars dans 42 pays en faveur de la lutte anti-tabac. « L’industrie du tabac prend pour cible l’Uruguay car les dirigeants de ce pays ont fait ce qu’il fallait avec une loi musclée sur l’emballage (des paquets) », estime Michael Bloomberg dans un communiqué.
Lui-même ancien fumeur, M. Mujica estime que son combat personnel contre la cigarette « n’est pas fini ». « De nombreuses addictions menacent la vie, et elles sont toutes multipliées par la grande addiction de notre temps: l’amour excessif de l’argent », a-t-il également déclaré lors d’une conférence de presse.
PMI a déjà attaqué en justice d’autres pays, mais l’Uruguay se distingue par sa réglementation particulièrement ferme sur les images choc devant figurer sur les paquets. La plupart des autres pays exigent que les avertissements sur les méfaits du tabac couvrent la moitié ou moins de la surface des paquets, contre 80% en Uruguay.
L’an dernier, il s’est vendu dans le monde 5.680 milliards de cigarettes, un chiffre en baisse de 1%, pour un total de 901 millions de fumeurs, selon le cabinet d’études des marchés Euromonitor International.
N°2 du secteur derrière le chinois China National Tobacco, PMI se concentre désormais sur les marchés émergents. Au troisième trimestre, le groupe a annoncé une hausse de ses livraisons de cigarettes de 4,5% sur un an, à 229,2 milliards d’unités. Il a notamment enregistré une progression importante en Asie.
Philip Morris International, qui possède des sièges à New York et Lausanne, est née d’une scission en 2008 avec Altria, multinationale américaine propriétaire du cigarettier distinct Philip Morris USA. PMI opère hors des Etats-Unis, contrairement à Philip Morris USA. » (Associated Press, V. 19/11/2010 à 19:14)
Le pot de terre contre le pot de fer ?
La capitalisation boursière de PMI représente le double du PIB de l’Uruguay. Ces données ne sont pas comparables mais cela donne une idée sur le poids respectif des Etats-Unis et de l’Uruguay à l’ONU. De plus, sauf peut-être en cas d’OPA, la capitalisation boursière est purement fictive, car le calcul se fait à partir d’une infime partie du capital échangé sur les marchés.
La taille (en l’occurrence le PIB de l’Uruguay) n’a rien à voir avec le respect de soi quand on a des hommes qui se tiennent debout à la tête de leur pays. On peut se demander si c’est le cas chez nous où on ne compte pas les victimes (directes et indirectes) d’AFRAS, de l’ex-SNTA et de toutes les saloperies qui traversent allègrement nos frontières.
Qui a entendu parler d’une campagne nationale sérieuse anti-tabac en Algérie ? Des condamnations fermes de toute personne qui s’avise de fumer dans les lieux publics, dans les hôpitaux, les salles de classes, les halls des postes, des administrations publiques, dans les enceintes où séjournent des malades, des enfants, des personnes âgées… ?
Que fait le ministère de la santé publique ? Alors que nos dirigeants préfèrent aller se soigner à l’étranger, signe de la confiance qu’ils accordent à la médecine de leur pays.
Il ne s’agit pas ici de verser dans des délires incriminant les fumeurs, c’est-à-dire les victimes réelles ou potentielles en oubliant les vrais criminels : à savoir les transnationales qui fabriquent et qui commercialisent les cigarettes. Ces machines à fric qui réduisent leurs activités en Amérique du Nord et en Europe de l’ouest pour jeter leur dévolu sur les pays pauvres. Là où la corruption est plus facile entretenir.
En 2009, Philip Morris USA, filiale d’Altria, a été condamné par un tribunal de Floride à verser 300 millions de dollars à une ancienne fumeuse de 61 ans, atteinte d’une maladie des voies respiratoires. Ce n’est évidemment pas en Uruguay qu’une telle condamnation aurait pu être envisagée et encore moins exécutée. C’est la multiplication de ce genre de procès qui a incité les empoisonneurs US à aller intoxiquer le reste du monde.
Djeha
19 novembre 2010
PS : Ne vous laissez pas abuser par le sieur Bloomberg, maire de NY. Le soutien qu’il apporte à l’Uruguay s’adresse à ses électeurs New-yorkais. Ses autres activités sont pire que les effets du tabac sur les pays d’Amérique Latine.