Quant au Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), c’est-à-dire le parti qui a opté pour la démocratie des chars et fait la promotion de la culture de l’éradication de l’Autre, il déclare à propos de ces événement que «l’intégrisme vole au secours du régime, n’hésitant pas, dans certaines régions, à terroriser et à tétaniser, notamment le segment féminin de la société.»[11]
Rien de surprenant quand on sait que les patrons militaires de Saïd Saadi sont les génocideurs Mohamed Touati, Saïd Bey et Fodhil Cherif, des généraux bouffis de leurs titres éradicateurs et résolus à saborder tout pas, aussi petit soit-il, vers une solution politique. Rejeté par le verdict des urnes libres et inepte à contribuer un tant soit peu à la construction d’une démocratie représentative, Saïd Saadi s’est fait une carrière dans le « vol au secours du putschisme permanent » en échange de quelques restes de la rente et de quelques bribes de prestige et de strapontins pour ses disciples.
Ce qui est surprenant c’est l’abysse de cynisme d’une telle déclaration. Saadi a n’a pas seulement transformé son parti en un repaire de fascistes schizophrénés où il y est naturel d’appeler le coup d’Etat militaire « devoir démocratique », où il y est cartésien de prôner une décennie durant l’éradication politique et physique du FIS et de sa base sociale, dont la moitié est constituée de femmes, tout en hurlant se préoccuper du segment féminin de la société.
Saadi a même exclu de son parti Khalida Messaoudi, la porte-parole d’une variante algérienne de féminisme unique au monde : le féminisme militariste[12]. Pierre Guillard dit que « Mme Messaoudi représente ce que Freud appelait la peste émotionnelle, cet amas de fantasmes hystériques qui couvre toujours la pratique de l'abomination. »[13] Mais même cette fanatique de l’éradication à parlé d’« illusions improductives » après que les manifestantes de Tizi-Ouzou lui aient dit les quatre vérités, le 24 mai dernier, sur ce qu’elles pensent de ses impostures au nom des femmes et au nom de la Kabylie et de sa complicité des génocideurs. Ce bref moment de désillusion a permis de révéler au grand jour l’intérêt que porte Saadi et ses disciples fascisants à la condition féminine. Déplorant la culture sexiste dont elle a été la cible au sein du RCD, Messaoudi fait, dans la sa lettre de départ, le deuil d’avoir été « renvoyée au statut de ‘femelle’ inapte, incapable d’accéder au rang de l’être politique à part entière. »[14]
Autre exemple de l’instrumentalisation politique des événements de Hassi-Messaoudi, les réactions des organisations dites de la société civile (eg. CCDR, CCIC, CNOT) dont certaines prétendent défendre la cause féminine (eg. RAFD, RACHDA). Même rhétorique de la terreur imputant les horreurs à l’islamisme, agitant le spectre d’autres épouvantes et horreurs à venir, et mettant vigoureusement en garde tout le monde contre toute solution au conflit algérien autre que l’éradication prônée par leurs meneurs militaires.
A force d’être attroupés pour faire plier ou torpiller les présidents ou pour fustiger ou bourrer le crâne des organisations internationales, à force de rabâcher ad-nauseum les mêmes formules abominatoires, ces groupuscules islamophobes sont devenus tellement prévisibles que personne ne leur prête une attention sérieuse, exceptés en tant qu’indicateurs utiles pour déchiffrer en sens inverse les schémas de force entre les militaires qui les agitent.
La prétention de la division féministe de ces groupuscules à se préoccuper du sort des victimes des crimes de Hassi-Messaoud ne trompe personne.
Tout le monde sait en Algérie que ces mercenaires de « la cause féminine au service des généraux » ont été les premiers à se dresser contre l’Etat de droit et à demander l'annulation des élections de décembre 1991 et l’intervention sanglante de l’armée. Ils ont tout le temps cautionné les fraudes électorales et aidé au maintien du coup d'Etat permanent. Ils n’ont pas cessé de prôner la haine envers une bonne partie de leurs concitoyens et concitoyennes et se sont fait porte-voix des éradicateurs les plus extrémistes de l'armée.
Nul n’ignore en Algérie que ces mystificateurs du mouvement féminin ont toujours perdu leur langue pour dénoncer les violations graves et massives des droits de la personne humaine (homme, femme et enfant). Ils ont au contraire employé toute leur énergie pour tenter de dédouaner des généraux des crimes qui leur sont imputés, notamment les massacres à grande échelle, affichant ainsi leur soutien inconditionnel à une entreprise que l'histoire jugera de génocide. Comble de la contradiction, ces féministes qui prétendent défendre la cause des femmes algériennes face à l'obscurantisme, mènent une guerre féroce contre les organisations internationales des droits de l'homme qui oeuvrent pour la vérité, la justice et la paix et contre l’impunité.
En Algérie, on aurait bien aimé voir ces imposteurs du féminisme se préoccuper réellement de la condition tragique de la femme algérienne. On aurait bien aimé les voir organiser des marches à la mémoire des Algériennes massacrées ou lancer des pétitions de soutien aux femmes, mères et filles de disparus. On aurait aimé les voir prendre la défense de leurs concitoyennes injustement détenues et torturées, ou montrer leur compassion à l’égard des veuves et orphelines. On aurait aimé les voir se révolter par solidarité avec ces Algériennes qui fouillent quotidiennement les poubelles des marchés pour disposer de quoi préparer une soupe à leurs enfants. On aurait bien aimé les voir protester en faveur des Algériennes qui se font violer dans les centres de détention par des membres des forces de répression ou des groupes infiltrés par l’armée de Médiène, ce général « défenseur des femmes », selon ceux et celles légitiment sa terreur, qui serait prêt à éventrer une mère devant son enfant, si ce dernier refusait ses consignes. On aurait aimé les voir s’émouvoir devant la condition de ces Algériennes cantonnées dans des bordels militaires et celles abusées au quotidien par les gradés du régime putschiste. On aurait aimé les voir s’inquiéter du sort de leurs concitoyennes se livrant à la prostitution dans les grands hôtels des villes algériennes afin de manger à leur faim, et celles sillonnant les trottoirs de Paris, Londres, Madrid, Rome, Berlin ou Genève, pour échapper à la misère dans leur pays. On aurait aimé les voir agir effectivement pour que l’on accorde à la femme algérienne – et à l’homme algérien – du respect et une vie décente dans un Etat de droit de justice et de paix.
Mais en réalité, ces « féministes alibi », qui ne quittent leurs bunkers de Club-des-Pins qu’en service commandé en vue de propager l’épouvante, sont tellement éloignés des femmes algériennes qu’ils sont incapables de les comprendre et de sentir leurs souffrances. Des souffrances auxquelles ne sera donnée voix que lorsque ces femmes opprimées auront droit à la parole.
On dit que la politique de la peur est une arme molle, quand on l’agite trop longtemps elle commence à se mouvoir comme une vipère et se retourne contre ses manipulateurs.
Les « mokhs » à la tête du gang éradicateur feraient bien de réviser les instructions que leurs maîtres leur ont appris pour pratiquer une politique de la peur efficace. La condition nécessaire de l’alarmisme dicte que les tactiques de fabrication de la peur doivent impérativement rester dissimulées et insondables. La condition nécessaire de la sécurisation impose que les forces de sécurité doivent être probes pour que l’offre de sécurisation, visant à conjurer l’angoisse collective instiguée en cachette, reste crédible.