Le général Nezzar, communément appelé Gezzar par une contraction ad hoc, persiste et signe. Il sort une deuxième version – à usage externe – de ses sanguinaires « Mémoires ». Il s’est laissé prendre au jeu des confidences* :
Question: Général, on vous dit démocrate impénitent, donnez-nous un exemple pour justifier pareil éloge?
Gezzar: Nous étions prêts à accepter que le FIS participe à l’Assemblée à hauteur de 30 % des sièges.
Q : En bon démocrate, vous fixez donc le taux de réussite de vos adversaires. Au delà, vous les tuez ?
Gezzar: Je peux vous assurer qu’aucun innocent n’a été touché.
Q : Beaucoup d’indices montrent que les généraux d’Alger ont commis des atrocités incomparables…
Gezzar: Quand je lis leur portrait sous la plume de Souaïdia, je me dis : si cela est vrai, si tous ces officiers sont ce qu’il en dit, c’est moi le responsable. Si j’ai formé des monstres pareils, alors c’est que je suis un monstre moi aussi !
Q : Mais personne n’a jamais dit le contraire! Revenons un peu en arrière dans le temps : regrettez-vous vos « excursions » dans les villages fellaga au cours des années 54-58 ?
Gezzar: Ce serait à refaire, je le referais.
Q : On dit que des dizaines d’officiers coupables à vos yeux de « propagande intégriste » ont été passés par les armes, sur votre ordre…
Gezzar: J’ai reçu dans mon bureau certains de ces officiers, dont un a été réintégré dans les rangs de l’armée par mes soins.
Q : Un seul ! Et tous les autres ?…ont-ils réussi à sortir vivants de votre bureau?
Gezzar: à ma connaissance, un seul cas de désertion a été signalé…
Q : Que pensez-vous de généraux algériens, allez, en toute franchise?
Gezzar: Les généraux algériens sont des pourris, ils ont des comptes partout.
Q : Combien gagne un général, officiellement?
Gezzar: l’équivalent de 5 400 FF.
Q : Combien gagnent les généraux, officieusement?
Gezzar: ils se partagent la rente pétrolière.
Q : quelle méthode préconisez vous pour réduire la forte croissance démographique des indigènes en Algérie?
Gezzar: A mon sens, il n’y en a qu’une : l’éradication.
Q : 200 000 morts à ce jour, le compte n’y est toujours pas selon vous? êtes vous favorable à ce que l’extermination continue ?
Gezzar: J’y suis d’autant favorable d’ailleurs que ce sont des militaires, notamment le général Smaïn Lamari, qui l’ont engagée.
Q : Pourquoi avez-vous décidé de liquider Boudiaf ?
Gezzar: Boudiaf était résolument opposé à tout partage du pouvoir.
A ce moment, on appela Gezzar sur son portable. C’était le président de l’académie Khmers Rouges des droits de l’homicide.
Gezzar interrompt brusquement son interlocuteur: En aucun cas !
Gezzar venait de refuser le prix Nobel de la paix des cimetières… Il se sent honoré, mais en disciple de Massu, il ne conçoit pas que l’on récompense quelqu’un qui n’a fait que son devoir…
* P.S. Les réponses de Gezzar sont reprises verbatim à partir de l’interview qu’il a donné au Figaro Magazine du 21 Avril 2001. Les questions sont « reformulées » pour mieux épouser les « idées » de l’interviewé.
24 avril 2001