Expliquant pourquoi il interdirait toutes les manifestations dénonçant les atteintes à l’islam et aux musulmans, Manuel Valls déclarait le 16 septembre 2012 sur le plateau de France 2 : « Je ne permettrai pas que […] des slogans hostiles à des pays alliés, à nos valeurs, puissent se faire entendre dans nos rues » [1].
Suivant les directives du pouvoir socialiste, les manifestations du 22 septembre 2012 contre l’islamophobie furent systématiquement interdites au nom des possibles « troubles à l’ordre public » qu’elles auraient pu susciter. Dans certains lieux de la capitale française totalement interdits aux « musulmans d’apparence », la volonté de bannir toutes les manifestations a tourné à la chasse au faciès. Les métèques furent systématiquement expulsés du parvis des Droits de l’Homme au Trocadéro [2].
Interdire le parvis des Droits de l’Homme aux seuls musulmans était déjà une manière de tracer distinctement les contours de ce que le pouvoir français considère être l’humanité. Les bannis musulmans n’ont manifestement pas la chance de faire partie de cette humanité à laquelle s’appliquent les Droits de l’Homme. A défaut d’être des êtres humains à part entière, les musulmans demeurent des sous-humains entièrement à part, pour paraphraser A. Césaire.
Avant cette chasse au faciès, nous nous posions déjà la question desdites valeurs que le ministre de l’Intérieur refusait de voir dénoncées publiquement, lorsque l’on connaît sa propension à déplorer le manque de Blancs à Évry [3] ou à organiser la chasse aux Roms.
Nous apprenons maintenant que la préfecture de police de Paris a donné son autorisation aux Jeunesses Nationalistes de défiler dans les rues de la capitale française. La manifestation devrait débuter samedi 29 septembre à 14h place de la République, pour se disperser vers 17h au niveau de la fontaine Saint-Michel. Un des slogans de cette manifestation autorisée par la préfecture est « Islam hors d’Europe » pour bien montrer le caractère islamophobe du défilé.
Aux questions posées au sujet des manifestations contre l’islamophobie interdites le week-end du 22 septembre 2012 alors qu’elles défendaient des revendications bien moins provocatrices, le service de communication de la préfecture de police de Paris rétorque : « C’est une décision politique, je ne peux pas vous répondre » [4].
Inaugurant la Mosquée de Strasbourg le 27 septembre 2012, en signe d’amitié et de bienveillance, Manuel Valls le promoteur de la race blanche, le chasseur de Roms, le traqueur de « musulmans d’apparence », le délivreur d’autorisation pour manifestation de haine islamophobe est revenu sur la question de la défense desdites valeurs précédemment évoquées en affirmant : « Je n’hésiterai pas à faire expulser ceux qui se réclament de l’islam et représentent une menace grave pour l’ordre public et qui, étrangers dans notre pays, ne respectent pas nos lois et nos valeurs ». Le ministre de l’Intérieur ajouta : « Les prédicateurs de haine, les partisans de l’obscurantisme, les intégristes, ceux qui veulent s’en prendre à nos valeurs et à nos institutions, […] ceux-là n’ont pas leur place dans la République » [5].
A la suite de l’interdiction de toutes les manifestations contre l’islamophobie, de la chasse au faciès organisée autour du parvis des Droit de l’Homme blanc le 22 septembre dernier et de l’autorisation par la préfecture de police de Paris d’une manifestation ouvertement islamophobe, nous en savons un peu plus sur lesdites valeurs que le ministre de l’Intérieur refuse de voir dénoncées publiquement en France. Manuel Valls s’oppose clairement et avec la plus grande fermeté à toute dénonciation des valeurs racistes et islamophobes qui sont à la base de la République coloniale dont il est l’un des plus fidèles représentants.
Durant la Révolution algérienne, Frantz Fanon avait déjà décrit la réaction du colonisé face au discours sur « les richesses des valeurs occidentales » qui reste hégémonique en France : « Il se trouve que lorsqu’un colonisé entend un discours sur la culture occidentale, il sort sa machette ou du moins il s’assure qu’elle est à portée de sa main. La violence avec laquelle s’est affirmée la suprématie des valeurs blanches, l’agressivité qui a imprégné la confrontation victorieuse de ces valeurs avec les modes de vie ou de pensée des colonisés font que, par un juste retour des choses, le colonisé ricane quand on évoque devant lui ces valeurs. Dans le contexte colonial, le colon ne s’arrête dans son travail d’éreintement du colonisé que lorsque ce dernier a reconnu à haute et intelligible voix la suprématie des valeurs blanches. Dans la période de décolonisation, la masse colonisée se moque de ces mêmes valeurs, les insulte, les vomit à pleine gorge » [6].
Au regard des pratiques séculaires de la République coloniale, les partisans autoproclamés de la « liberté d’expression » et de la « démocratie » devront apprendre à ne plus s’étonner de nos ricanements, de nos insultes et de nos dégueulis lorsqu’ils fanfaronnent en invoquant fièrement leurs putrides et nauséabondes valeurs.
Youssef Girard
27 septembre 2012
Notre de renvoi :
[1] « Enquête ouverte après la manifestation islamiste de Paris », URL : http://fr.reuters.com/article/topNews/idFRPAE88F04M20120916
[2] Ghita Ismaili, « Islamophobie en France : Des femmes voilées délogées du Trocadéro par la police », URL : http://www.yabiladi.com/articles/details/13046/islamophobie-france-femmes-voilees-delogees.html
[3] Martin Julien, « Manuel Valls aimerait plus de « blancs » dans sa ville d’Evry », URL : http://www.rue89.com/2009/06/10/manuel-valls-aimerait-plus-de-blancs-dans-sa-ville-devry?page=11
[4] « La préfecture de police autorise la manif des Jeunesses Nationalistes », URL : http://www.streetpress.com/news/54634-la-prefecture-de-police-autorise-la-manif-des-jeunesses-nationalistes
[5] « Valls prêt à expulser ceux qui troublent l’ordre public au nom de l’islam », URL : http://www.liberation.fr/societe/2012/09/27/manuel-valls-inaugure-la-grande-mosquee-de-strasbourg_849201
[6] Fanon Frantz, Les damnés de la terre, Paris, Ed. Gallimard, 1991, page 74.