Je trouve particulièrement regrettable que le dernier document important de ce mouvement, portant Appel à mobilisation pour un compromis politique historique n’ait pas été le moindrement médiatisé sur la scène nationale. Ce mépris de la presse algérienne est d’autant plus triste, qu’il s’agit d’un document diffusé le 1er novembre 2010, pour faire la jonction avec la déclaration du 1er novembre 1954, qui a scellé l’histoire de la libération de notre pays, dont il s’inspire largement.
A un moment où l’Algérie est embourbée dans une crise dont les conséquences risquent d’être catastrophiques, tout citoyen algérien est investi du devoir de contribuer à tout projet ou initiative, qu’il juge en mesure d’aider son pays. Aussi, brimer cet engagement citoyen en le marginalisant et en lui refusant la parole, relève d’un déni du droit à l’expression. Et qui d’autres, mieux que les journalistes, savent l’importance de l’expression pour transmettre les idées et permettre aux citoyens de réfléchir ensemble pour résoudre leurs problèmes, et dégager les voies d’un meilleur avenir commun.
S’il est entendu que chaque titre a sa ligne éditoriale et par conséquent s’accorde le droit de refuser certaines plumes, il n’est pas concevable que tous les médias se mettent au diapason pour refuser la parole à des groupes de citoyens qui activent pacifiquement pour mettre fin à la dictature.
Il n’y a rien de plus triste que des journalistes, eux-mêmes brimés par un système politique oppresseur, se mettent à appliquer le même traitement à leurs concitoyens. Des femmes et des hommes interpellés par le malaise qui ronge leur société et qui décident de prendre leurs responsabilités, en appelant à la mobilisation citoyenne pour mettre fin au désordre de leur pays et contribuer à l’émergence d’une culture démocratique, prélude à l’Etat de droit. Leur projet de création d’un front national pour le changement démocratique présente une chance qu’on devrait compter au profit de l’Algérie. D’autant que de nombreux observateurs de la scène politique et sociale convergent aujourd’hui pour dire que seul un mouvement d’union nationale est en mesure de changer le système politique du pays. Et c’est justement dans cette perspective qu’intervient le projet de front pour le changement démocratique, qui depuis le début de ses activités ambitionne de sceller cette union entre les Algériens, et ce, par-delà, toutes les contingences dogmatiques qui s’interposent entre eux et cet État de droit qu’ils appellent pourtant, de tous leurs vœux.
C’est fort regrettable qu’un projet qui prône l’union des citoyens pour une Algérie meilleure soit frappé d’interdiction de parole, alors que les détracteurs de ce pays font la pluie et le beau temps en squattant à l’année longue les colonnes de nos journaux.
Zehira Houfani
5 novembre 2010
Texte publié aussi sur le Quotidien d’Algérie