Les pseudo démocrates ne sont pas au fait contre l’Islam politique, mais contre la démocratie. Ils savent que la démocratie intéresse tout le monde et que leur attitude anti-démocratique leur attirera la grogne de leurs concitoyens et qu’à ce titre ils ont peu de chance de drainer les foules pour faire bloc contre la légitimité par contre-révolution interposée.
C’est pourquoi, ils se voilent d’islamophobie et une fois au pouvoir, manifestent leurs vraies intentions pour gouverner par la terreur avec la bénédiction de ce qu’on appelle « la société civile » composée des rébus de la société ; un concept versatile qui prit forme au lendemain des attaques du 11 septembre 2001. La démocratie ne leur garantissant pas les avantages que leur procurent la corruption, le népotisme…
Les dictateurs arabes ont eux aussi, au départ, prêché la lutte contre « l’obscurantisme islamique », mais on a fini par constater que c’est le droit et la justice sociale qui les irrite et rien d’autre et que leur haine de la religion n’est qu’un leurre.
Sissi lui aussi a crié sur tous les toits qu’il est déterminé à éradiquer l’Islam politique et d’exterminer les Frères musulmans lorsqu’il avait demandé le 3 juillet 2013 le soutien de ses compatriotes pour combattre le « terrorisme ». Mais une fois président, il a levé le soutien de l’Etat aux profits des couches sociales défavorisées, permettant ainsi à la mafia de faire main basse sur l’économie et les rouages de l’Etat. Il fit de l’accession aux emplois publics une exclusivité réservée à la classe des notables et ce, aux frais d’un peuple qui rêva de liberté après les lourds sacrifices qu’il a consentis, augmenta l’impôt, multiplia le salaire des forces de sécurité par dix, construit d’avantage de prisons et interdit les manifestations. Il continue à se comporter en monarque absolu. Ce que Mohamed Morsi, Mouncef El Merzougui et les autres Hugo Chavez, Evo Moralez, etc. ne firent pas.
Jamais quelqu’un qui prétend sauvegarder la démocratie contre toutes les dérives ne s’en prend aux libres arbitres d’autrui par ce que le fait de contester aux autres leur confession est en soi une attitude antisociale et anti-démocratique et instruit d’une réalité incontestable, c’est qu’ils ne sont pas prêts à cohabiter ni à se soumettre à la loi de la majorité en tant que principe élémentaire de la démocratie.
Seulement, le problème de la société arabe est qu’elle est dupe et croit à toutes impostures. Tout cela est dû à ce que le concept de « terrorisme » n’est pas clair pour beaucoup et c’est pour cela que les dictatures ne rencontrent pas de difficultés à cultiver l’amalgame des sempiternels « dangers qui pèsent sur la nation » en exploitant à outrance la naïveté des populations habituées à obéir inconditionnellement aux leaders « woulates el oumour », ce vocable combien sacré chez certains musulmans, suivant certaines interprétations du texte coranique ; quitte à être des malfrats.
Et c’est là l’un des aspects de notre déchéance en raison de notre dépendance indiscutée de nos despotes faisant office de dirigeants.
Ce sont ces intellectuels faussaires, ces artistes et ses sportifs parasites et rentiers et ces politiciens véreux qui ont inspiré à la dictature une autre supercherie en les érigeant en éléments de la « société civile » comme credo substitut à la légitimité populaire.
Un credo dans lequel l’élite, nos artistes et nos notables se complaisent à merveille, caractéristique irrésistible de la société arabe. A l’inverse, partout ailleurs, l’élite n’ose pas hypothéquer son prestige en se rangeant vilement du côté des dictatures car, c’est une question de principes immuables que personne n’ose, par souci de dignité, enfreindre.
Mais il parait que dans nos sociétés la frontière entre la dignité et les intérêts est toujours imprécise. Et elle le restera tant que notre cupidité nous empêche de faire la distinction entre nos droits sociaux inaliénables et nos revendications politiques.
Le citoyen arabe traine toujours comme une tare son ambivalence entre son désir d’accéder à la démocratie et de s’intégrer dans l’élan libérateur des mouvements d’indépendance dans le monde et sa hantise des avantages dont il n’est pas prêt, curieusement, à s’en débarrasser.
C’est pourquoi, beaucoup ne s’embarrassent pas, lorsque l’occasion se présente, de tourner en dérision les sacrifices consentis par les braves gens qui continuent de croire, contre vent et marées, en leurs chances de pouvoir établir un jour un régime de justice et de droit.
C’est pourquoi, le dialogue qui aurait dû porter sur la perfection des méthodes de lutte contre le mal céda sa place à la nécessité absolue de convaincre les réticents, qui constituent un rempart infranchissable contre la subversion, à s’intégrer dans la logique de l’insurrection, à la grande joie de nos bourreaux…
Mahmoud Hammana
24 octobre 2014
Un commentaire
RE: Des pseudos démocrates, de la société civile et de l’Islam politique
Merci Mr Hammana pour ce sage discernement.
Le pseudo est ridicule et marrant mais hélas aussi nuisible.
Nos élites arabes démocrato-musulmanes, sont devenues désormais les maitres et disciples d’une nouvelle forme originale avancée de la laïcité, et sont donc plus royalistes que leurs modèles occidentaux quant à la séparation de la politique de tout le reste.
Pour eux la croyance idyllique suffit, et ne doit pas être souillée par des applications qui ne peuvent être que mauvaises et préjudiciables. La pratique réductrice et avilissante ne serait donc bonne que pour les sots et autres candidats au suicide.
Les musulmans non-pratiquants et démocrates non-pratiquants se hissent ainsi par cette nouvelle philosophie double-élitiste au dessus des querelles stériles des démocrates de gauche et droite, et des fetwas obscurantistes des malékites et salafistes.
Plus pseudo que cela tu meurs !
Une fois intégrés dans les sphères du pouvoir et ses butins, les pseudo-démocrates et pseudo-islamistes s’accommodent alors sans gêne ni embarras avec leurs contradictions loufoques, et finissent, avec un pragmatisme à toute épreuve et toute morale, par épouser les thèses des maitres de leurs maitres.
Il n’est pas si inoffensif que cela, il peut même parfois finir par tuer, mais à défaut de pouvoir neutraliser le ridicule, il faut au moins continuer sans cesse à le ridiculiser.
Salam.