La presse nationale s’est faite l’écho à maintes reprises, de la flambée des prix des produits agricoles et des matières premières, sur le marché mondial. Pour les produits agricoles, ces hausses atteignent parfois, des seuils historiques. Le pouvoir d’achat des algériens, est mis à mal et fond comme neige au soleil. Une étude d’un organisme économique américain avéré, qui a fait une analyse de la situation économique en Algérie, sur la base de données d’organismes internationaux, dont la banque mondiale, a conclu à une détérioration grave, du pouvoir d’achat des Algériens, en 2007. Concernant les produits de large consommation, 2007, est l’année la plus chère depuis 1990. Cette étude, situe l’inflation au niveau de 12%, alors qu’elle est de 8%, pour le reste du Maghreb et le Moyen-Orient. Sur le plan statistique, elle est en contradiction avec l’ONS. Face à cette lame de fond qui n’a pas donné la pleine mesure de son impact, sur le moyen et le long terme, la question sociale émerge autour de la question du pouvoir d’achat, de la sauvegarde de l’emploi et pour une retraite digne.

Les observateurs avisés en la matière, estiment que la crise des produits agricoles est durable   (au moins pour la décennie, à venir). Ce qui provoque déjà un véritable chamboulement de l’économie mondiale. Celle-ci, est en phase de restructuration pour une nouvelle redistribution des cartes, à l’échelle du monde. Les cours du blé, vont rythmer l’activité économique mondiale, les émeutes du pain sont déjà là (Maroc, Egypte, Yémen), et selon le rapport de la FAO, l’Afrique sera la plus touchée. Selon ce rapport, l’augmentation des produits agricoles et alimentaires, touche essentiellement les familles des pays pauvres qui consacrent entre 60 et 90% de leur budget à ces produits, contre seulement 10 à 20% du budget familial, dans les pays riches.

L’agriculture algérienne est en net décalage, par rapport à cette réalité. Les augmentations prévues, du prix du blé à la production, restent une avancée timide. Et au-delà de la prise en charge de la question du statut des exploitations du secteur public, dans le cadre de la nouvelle loi sur l’orientation agricole, il faut engager l’agriculture dans une dynamique de transformation sociale, avec injection de savoir et de savoir-faire.

Dans le cadre du PNDA (plan national de développement agricole), une tentative de reconversion de la céréaliculture vers l’arboriculture, a été menée avec un certain volontarisme. La plantation d’arbres fruitiers, était la condition sine qua none, pour prétendre bénéficier de l’aide au développement agricole. Dans le cadre de ce programme, de 2000 à 2006, le pays a consacré 284 milliards de dinars, sur une enveloppe de 399 milliards de dinars (soit près de 30%, de reste à réaliser). Cet effort important en soi, n’a pas pour autant réduit la facture alimentaire qui s’est élevée à 27 milliards de dollars, pour 2007 (les prévisions pour 2008, sont de 30 milliards de dollars). Le pays, a importé plus de blé dur et de blé tendre, la production nationale ne couvrant que 50% des besoins. Depuis plusieurs années, le marché de la grande consommation, est caractérisé par les crises successives de la pomme de terre, de la semoule, du lait et de l’huile. Depuis 2002, la filière de la tomate industrielle, va vers la ruine. Sa disparition, va coûter 120 000 emplois (en amont et en aval), la mise en friche de 27 000ha, une perte de ressources fiscales, de plus de 1 milliard de dinars, avec une perte d’économie de plus de 80 millions de dollars. L’augmentation du prix du maïs qui sert à produire de l’éthanol à bon marché, a frappé de plein fouet les aviculteurs et les éleveurs. Le soja et l’orge, qui servent  à l’aliment du bétail, ont enregistré des hausses sur les marchés internationaux. Résultat : le prix du poulet et de l’œuf à la consommation, atteignent les sommets et l’élevage ovin et bovin est en crise et l’on assiste en Algérie fait inédit, à une poussée de la consommation de la viande congelée, (les éleveurs sont entrain de se débarrasser de leur cheptel et les cours de l’élevage ovin s’effondrent). Les Etats-Unis, ont décidé de produire plus de maïs pour fabriquer du biocarburant, pour moins de blé et moins d’aliment de bétail. La stratégie agricole qui consiste à produire le dessert et à importer du blé, reconduit le cycle de la dépendance. D’autant plus que la tendance des pays riches, d’aller vers les biocarburants fait peser de lourdes menaces sur les pays importateurs de blé.

Il faut par ailleurs, souligner le caractère extraverti de la politique agricole actuelle où l’on assiste à un retour aux cultures coloniales. Un projet déjà opérationnel, dans le cadre d’une société mixte algéro-française, pour relancer la culture du coton, dans les wilayates d’Annaba, Tarf, Guelma et Skikda, concernera à l’horizon 2015, 10 000 ha, pour une production prévisionnelle de 30 000 t/an. Autant d’hectares de perdus, pour la céréaliculture. D’autant plus que la dite société française, est connue en Afrique pour l’exploitation                       sauvage des enfants.

Les limites avérées du Plan national pour le développement agricole, mettent en évidence l’absence pour les exploitations agricoles, de financement en amont, qui relativise l’impact des subventions en cours de production. De même qu’elles soulignent l’absence d’accompagnement d’investissements importants, par un encadrement technique indispensable et une dynamisation des associations de producteurs, pour stimuler la production. La préoccupation de la sécurité alimentaire qui serait au centre du plan de développement rural (PNDR), devrait prendre en charge ces postulats. Le rapport 2007 de la FAO, relève que 1,5 million d’Algériens est sous-alimenté. Il considère que les niveaux de production atteints dans l’agriculture, sont loin de la moyenne et la superficie emblavée est en régression. Les sources donnent 120 000 à 170 000 ha, détournés vers la spéculation immobilière. Ainsi, les terres agricoles de Bordj El Kiffan et Bab Ez Zouar, dans l’algérois, ont été détournées à 100%.

La menace imminente, de déficit en céréales, à l’échelle mondiale, pose avec acuité le problème de la faim, surtout pour l’Afrique. En Europe, face à la flambée des prix des produits agricoles, les reclassements se font pour une restructuration de l’activité autour de la nécessité d’encourager les investissements, dans le secteur agricole des pays de l’Est et de l’ex URSS, pour exploiter les gisements de productivité dans ces régions.

Layachi Mahdi
7 novembre 2009

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