Cette lettre ouverte à l'Abbé Pierre a été diffusée en 1996 lors de la campagne honteuse orchestrée par les sionistes. Cette lettre a été dénoncée par les verts Paris (qui voulaient déjà m'exclure) et a également causé un sacré débat dans toutes les associations de défense du logement. J'ai toujours la réponse de l'Abbé Pierre qui m'a félicité pour ce courrier. Je voudrai la diffuser après avoir entendu "certains faux amis" de l'Abbé Pierre le critiquer sur son amitié avec Roger Garaudy qui paraît-il ferait tâche dans sa longue carrière humaniste et carritative.

Courage l'Abbé!

Nous sommes de tout coeur avec vous pour ce combat, comme nous étions à vos cotés pour tous ceux que vous avez menés jusqu'à présent : pour les exclus, les sans logis, les pauvres, les immigrés, les sans papiers, et nous en oublions certainement.

Nous resterons à vos côtés malgré toutes les pressions, les insultes, les accusations éhontées et cette campagne sordide qui vous diabolise dans les médias ainsi que dans toute la presse de gauche comme de droite.

Ce dernier combat, votre soutien à Roger Garaudy et votre engagement à côté d'autres exclus, les Palestiniens, est certainement le plus dur de tous ceux que vous avez mené, car vous remettez en question les fondements de notre système de pensée occidental, défini une fois pour toute, oubliant que le monde change, qu'un mur s'est écroulé, qu'un peuple banni, exclu, déporté, oublié depuis plus de quatre décennies dans les camps de l'UNRWA (Organisme des Nations Unies pour les Réfugiés Palestiniens) nous interpelle. Ce peuple aussi, comme tous les peuples du monde, a le droit de vivre sur sa terre historique et selon les lois qu'il se donnera. Oui, l'abbé, vous avez cent fois raison quand vous dites : ce peuple est victime de notre histoire et du soutien inconditionnel de l'Occident à l'état sioniste.

Vos prises de position, qui sont aussi les nôtres, vous amènent à un isolement complet. Ce qui est fort dommage, car, même vous, qui êtes connu et respecté pour votre probité et votre générosité, êtes privé de parole et ne pouvez même pas répondre au lynchage médiatique qui vous poursuit Où est la liberté d'expression? Où est la tolérance? Dans quelle société vivons nous? Où est la démocratie?

Vous avez souvent dérangé le monde politique et associatif, et sous différents gouvernements, mais on ne vous a jamais coupé le son et envoyé vous reposer comme un écolier qui a mal récité sa leçon.

Nous avons honte pour ceux qui vous traitent comme quelqu'un qui ne sait pas ce qu'il fait, mais nous avons bien compris que c'est sutout pour éviter que vous puissiez expliquer dans la sérénité votre soutien à Roger Garaudy, et par extension à la défense du droit du peuple palestinien.

Nous avons tout entendu : l'abbé est vieux, il ne sait plus ce qu'il dit, il n'a pas analysé la portée de ses paroles. "Quand on veut tuer son chien, on l'accuse de la rage " Ce qui est pire, c'est qu'on essaie de décrédibiliser ce qui a toujours été votre raison d'être : votre indépendance intellectuelle et votre capacité de dénoncer les injustices, toutes les injustices, d'où qu'elles viennent.

Vous avez eu raison de continuer à témoigner votre amitié à Roger Garaudy, cet ami de toujours. Vous avez toujours eu des différences politiques : Garaudy, étant un intellectuel de gauche, votre famille politique se situant plutôt à droite. Ce qui ne vous a pas empêché, chacun dans votre domaine, de vous battre contre les injustices et les dogmes établis qu'ils soient de droite ou de gauche. Ceci, il est vrai est plutôt rare, dans la conception politique française qui veut toujours classer les gens dans des cadres bien précis . Vous nous avez appris qu'une amitié était possible entre des personnalités issues de milieux politiques différents.

Roger Garaudy, il est vrai a pris du retard à dénoncer le stalinisme, mais il a su reconnaître ses erreurs passées. Ce n'est pas parce qu'il a embrassé la religion musulmane, qu'il est tout à coup devenu intégriste; ce serait encore faire tous les amalgames comme aiment si bien les faire nos sociétés occidentales bien pensantes et prêtes à lyncher ceux qui osent penser différemment.

Nous pensons que le rôle de tout intellectuel digne de ce nom est de se poser et de poser des questions sur les grands problèmes de nos sociétés. Roger Garaudy n'a joué que son rôle d'intellectuel en posant certaines questions qui dérangent et en même temps figent les débats d'idées. Ces idées qui, pour avancer, ont besoin de contradictions et ne doivent pas être monolithiques. Ceux qui le contredisent ou qui ne sont pas d'accord avec l'ensemble des questions soulevées peuvent et doivent lui répondre.

Nous aimerions bien que quelqu'un puisse prouver à Roger Garaudy qu'il a tort et argumenter sans insultes et sans anathèmes. Surtout que la majorité de ceux qui accusent l'écrivain n'ont pas lu son livre et sont donc dans l'incapacité d'en juger objectivement. Il est trop facile d'extraire des phrases de l'ensemble et de les balancer, en enlevant le plus souvent les points d'interrogation, pour que ces écrits deviennent des slogans. Nous l'avons déjà vécu dans d'autres occasions pas si lointaines.

C'est en débattant démocratiquement et librement qu'on fait avancer la démocratie et non en fermant les portes sur des insultes et des non-dits.

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