Le président algérien a déclaré le 17 avril « la colonisation a réalisé un génocide de notre identité, de notre histoire, de notre langue ».

Le ministre Douste-Blazy lui a répondu [voir ci-bas] qu’il y a deux moments : le moment de la conquête qui est toujours un moment d'horreur puis il y a des instituteurs français qui travaillent, des architectes qui ont fait leur travail, les médecins qui ont soigné. Eh bien, M. Douste-Blazy a tout faux.

Même si nous savons que le président algérien tient à travers ses paroles à donner des gages aux USA – sous le protection desquels il a désormais placé l'Algérie, à l'enseigne de la « diversification diplomatique » et au nom de la « croisade contre le terrorisme », qui se traduit par une chasse aux fantômes du soi-disant GSPC à travers le Sahara – afin de mieux se placer dans la course aux marchés plus ou moins juteux, nous devons quand même reconnaître qu'il a raison, et pas uniquement pour l'Algérie. Car la colonisation a détruit des pans entiers de civilisations, coutumes, organisations sociales, familiales et claniques ainsi que les langues des différentes communautés opprimées et exploitées par les jougs coloniaux et pas uniquement français.

Quand Monsieur Douste parle des infrastructures construites, dont les routes afin de relier les fermes des colons entre elles, les écoles afin de scolariser les enfants des colons, des hôpitaux afin de soigner les métropolitains il oublie que cela voulait dire détruire les infrastructures existantes, la culture et l'éducation autochtones et également casser les médecines et surtout les agricultures traditionnelles.

Bouteflika, dont je déplore par ailleurs la politique de réconciliation nationale basée sur une amnistie aveugle car occultant la responsabilité des militaires dans les massacres de la population depuis 1992, ainsi que la façon cavalière dont il traite les familles des milliers de disparus durant cette période a raison sur le fond, mais nous doutons de sa bonne foi.

Surtout que l'arrêt du processus électoral en Algérie, organisée par les militaires avec le soutien implicite du gouvernement français était responsable de cette guerre larvée et meurtrière parce que le peuple avait mal voté (dixit la gauche française, Verts compris). Ce genre de putsch électoral, jamais condamné ni jugé par aucun gouvernement ou tribunal algérien, risque de se reproduire aujourd'hui en Palestine parce que là aussi le peuple a « mal voté » car il a cru que la démocratie concernait aussi les exploités.

Monsieur Douste nous bassine avec les bienfaits secondaires du colonialisme. Nous préférons lui répondre que les pires plaies que l'humanité a connues sont : le colonialisme, l'esclavage et la déportation et il faudra bien qu'un jour on en paie les conséquences. Déjà que ceux des enfants des colonisés, esclavagisés et déportés qui vivent parmi nous, quand ils ne brûent pas des inendies « accidentels », sont rejetés de nos sociétés et expulsés dans des charters qui sont la honte de la France, alors que la dette que nous avons envers eux n’est même pas évoquée.

Ginette Skandrani
Paris, 20 avril 2006

1 2

Comments are closed.

Exit mobile version