Le meurtre de Djamel Bensmail est un assassinat politique. Un assassinat théâtralisé pour jeter l’opprobre sur la Kabylie martyrisée par des feux criminels et la discréditer aux yeux des Algériens.

Cette région, foyer de résistance à ce pouvoir assassin fondé en 1962, par la voix d’un patriote historique, Hocine Ait-Ahmed, qui a eu la clairvoyance et le génie politique de déceler dans cette armée des Frontières une force fascisante affirme dans une déclaration que Les troupes de Boumediene se comportent comme une force d’occupation. Dans l’exercice du pouvoir, cette force a dévoilé sa véritable nature et le peuple a réellement pris conscience de celle-ci quand en juillet 2019, en plein sursaut de renaissance nationale a scandé « Le Peuple veut l’indépendance » ; le Peuple atteste et signe que l’Algérie est encore un pays sous-occupation.

Cette Armée n’est pas l’héritière de l’Armée de Libération nationale mais celle de l’Armé des Frontières et celle-ci a définitivement enterré l’esprit et les valeurs du Moudjahid (plus de deux-milles moudjahids ont été éliminés physiquement lors de la prise du pouvoir à Alger à l’été 62. Ce fût la deuxième conquête d’Alger après 1830). En substituant le militaire au Moudjahid, l’armée des frontières, une armée de conquête et de pouvoir a répandu sa culture de spoliation, de corruption, d’injustice, d’arrogance et du mépris du peuple. Cette culture militaire, de l’été 62 à l’été 2022 a fini par défigurer l’Algérie et dénaturer l’Algérien.

De quoi Djamel Bensmail est-il le nom ? Djamel Bensmail est le nom de la générosité des Algériens, de leur sens du sacrifice, de leur amour à notre maison commune qu’est l’Algérie. Un amour forgé par un siècle de lutte contre une occupation inhumaine qui a tenté de déposséder l’Algérien de sa terre et de son Histoire.

Il incarne par son sacrifice la synthèse de la berbérité et de l’arabité : l’Algérianité.

De qui Djamel Bensmail est-il héritier ? Comme l’ensemble des Algériens qui portent en eux l’Histoire de leurs ancêtres, il se sent l’héritier de l’esprit de résistance. La résistance à l’occupation, à la criminalisation du frère et du voisin. Il est le condensé de l’Emir Abdelkader, de Cheikh Al Haddad, de Cheikh Bouamama, de Messali et d’Ait-Ahmed. Un Algérien habité par l’esprit de justice qui a toujours fait défaut à cette terre depuis 1830 malgré les valeurs de ces glorieux personnages qui ont jalonné notre histoire.

De quoi le meurtre de Djamel Bensmail est –il le nom ? Il porte le nom de l’horreur et de la terreur. L’horreur et la terreur d’un pouvoir qui expose pour toujours sa véritable philosophie politique et son seul véritable programme politique qu’il a institutionnalisé depuis 1962 : « Plus d’un demi-siècle de terreur ! Et la gestion de la terreur est sûrement le seul programme politique « sérieux » et réellement « réfléchi » que le régime a su mettre en place pour résoudre sa propre angoisse existentielle : comment prendre le pouvoir sans jamais le restituer ? (1)

Quelle Leçon ? Nous avons d’un côté Djamel Bensmail et de l’autre côté l’orchestration de sa mort. La même équation depuis 1962. Deux Algérie se font face (2) : l’Algérie du Peuple, celle des opprimés, des désespérés, des Harragas, des résistants, des exilés, des expatriés et l’Algérie des Militaires, des Généraux mafieux et leurs affidés, celle des arrogants, des persécuteurs, des voleurs, des jouisseurs et des corrupteurs. Une Algérie appauvrie et humiliée et une Algérie des privilégiés, arrogante et persécutrice. Un véritable Apartheid spatial et politique sévit en Algérie.

Pour l’Algérie des Galons, un seul mot d’ordre : Tout sauf la souveraineté du peuple.

Pour l’Algérie du Peuple : La Dignité ou la mort.

Le sang de Djamel est un sang algérien versé sur une terre algérienne. Ce sang algérien a irrigué la naissance de l’Algérie moderne depuis 1830. En Algérie, il n’y a pas des Kabyles et des Arabes mais un peuple Algérien. Nous sommes devenus Algériens car le sang Kabyle et le sang arabe ont fécondé la naissance de notre Algérie actuelle.

Notre mission, à nous, Génération du 22 février est de sauvegarder pour toujours cet esprit de l’unité d’un seul peuple, cette unité pour laquelle le sang de toutes les composantes de l’Algérie a été versé et faire de l’esprit de résistance qui jalonne notre histoire un socle constructeur d’une Algérie juste, rayonnante et qui parle au monde car telle est sa vocation. Mais pour cela l’Algérie des Généraux, l’élite des privilèges, les ventrus restent l’écueil majeur à écarter car ils sont les sentinelles du chaos, les gardiens de la politique de la terre brûlée. Ayant la haine du peuple et pour seul programme politique que la terreur et sa gestion ils ne peuvent que nous promettre que le pire est encore à venir.

L’Algérie n’est pas gouvernée mais occupée. Le mode d’occupation est toujours le même : la terreur, la peur, l’intimidation, l’appauvrissement, la séquestration, la torture, le bannissement, la torture, les massacres, l’assassinat. Avons-nous vécu depuis 1962 libre et indépendant dans cette terre libérée ? Ou sommes-nous sur la scène Maghrébine et Historique ? Sommes-nous des acteurs historiques qui possèdent la décision politique d’un peuple souverain ou un simple jouet dans les mains des puissances du présent car nous sommes occupés par un pouvoir qui n’a aucune légitimité : ni historique, ni politique ni morale.

Exister sur la scène historique pour les Algériens passe nécessairement par l’instauration de la souveraineté populaire. Il n’existe pas une autre voie. Nous sommes dans l’urgence. Le temps est à l’action révolutionnaire. L’Algérie des humiliés, des damnés doit se redresser et renouer avec son histoire et féconder cette Algérie nouvelle dont nos pères ont rêvé. C’est notre mission : l’accomplir ou la trahir. La trahir c’est l’Algérie qui se disloquera. Et face à cette perspective plausible, nous préférons la mort à la honte. La honte d’voire été incapable de sauvegarder un héritage si précieux que nous ont légué nos pères : l’unité de l’Algérie

Mahmoud Senadji
Vigilance populaire –Strasbourg

Notes :

(1) Sid–Ahmed SEMIANE : Crimes d’État : la terreur et la mort, outil de gestion social, Au refuge des balles perdues, édition la Découverte (2005) pages 111 à 166. Plus est rajouté par nos soins pour faire de cette vérité non seulement une vérité historique mais aussi philosophique car l’assassinat politique est corollaire à la naissance de ce pouvoir mafieux des militaires.

(2) Au temps de la colonisation française, la ville européenne et les quartiers et bidonvilles arabes se faisaient face, séparés par une ligne de chemin de fer ou par une rue. La frontière était visible ; nos pères avaient accès le matin comme travailleurs mais pas pour s’y promener. Mais dans la colonisation intérieure, la séparation est marquée par une frontière bunkérisée dans la marque extérieure est une mitrailleuse ou un char. Pour les premiers colons ils ont bâti cette ville européenne pour rivaliser Paris la métropole et les nouveaux colons n’ont fait qu’occuper les biens vacants laissés par les premiers avec l’esprit des prédateurs et des jouisseurs.

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