En les enfermant par milliers au fond du sahara algérien, les dirigeants algériens et tunisiens ont sans doute ralenti la longue marche des islamistes vers le pouvoir. Mais ils ne l’ont certainement pas interrompue. Depuis Nasser et l’écrasement des Frères Musulmans, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts du Nil et la manière forte, pour rayer du paysage politique un courant dont on sait désormais qu’il s’appuie, un peu partout dans le monde arabe, sur une large majorité de la population risque bien de ne pas suffire. Pour se préparer à une cohabitation devenue inéluctable, le Nord n’a fait pour l’heure que de bien petits pas. Les quelques semaines écoulées nous ont pourtant plus appris sur ces islamistes que bon nombre des milliers de pages écrites de longue date à leur sujet. Les militants ont fait une nouvelle fois la démonstration de la profondeur et de la solidité de leur ancrage populaire. Exit dès lors la fiction, érigée en dogme par le « Wishful thinking » occidental d’un groupuscule d’activistes d’autant plus tentés d’accéder au pouvoir par la force qu’ils redoutent d’en être écartés par les urnes.

Les « montagnards  démocrates » ensuite, ne sont nulle part parvenus à convaincre leurs frères des plaines. Exit encore la fiction d’une alternative autre qu’ethnique (car comment, sérieusement, qualifier le vote du FFS algérien) au vote islamiste. Une très large majorité des femmes, et pas seulement au fond des campagnes, parait avoir bel et bien choisi de « voter FIS ». Exit enfin, dans un dossier infiniment plus complexe, le raccourci simplificateur d’une mobilisation islamiste « contre les femmes ».

Qu’à cela ne tienne. A défaut de trouver dans le paysage politique la « troisième force » capable de combattre son ennemi supposé, le regard occidental, (singulièrement aidé, il est vrai, par les communiqués des ministères marghrébins, n’en poursuit pas moins sa quête désespérée du segment des sociétés arabe qui voudra bien le sauver du résultat …de leurs urnes. Les plus opiniâtres de non analystes en sont pour l’heure à sonder les bataillons des absentionnistes.

Existent-ils ? Sans doute. Constituent ils une majorité alternative ? Certainement pas ! Car comment oublier que les victoires du FIS sont, dans l’entière histoire algérienne (référendum d’indépendance excepté) le fruit des deux seuls scrutins que le régime n’a pas purement et simplement fabriqué le niveau de participation ?  Si l’on veut bien (mais qui l’a fait ?), les comparer à ceux (10, 15 %) qui réélisent régulièrement nos grands alliés « démocrates » de la région, les 50 % ou 60 % de votants de ces premiers vrais scrutins ont donc valeur, pour les islamistes, d’une formidable caution.

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