L’Algérie du peuple commémore un évènement historique et fondateur dans l’histoire du mouvement indépendantiste national qui s’est déroulé à Bruxelles au Palais d’Egmont. En ce lieu, le 10 février 1927, lors du congrès organisé par la ligue internationale contre l’impérialisme et l’oppression coloniale, fut prononcé pour la première fois l’Indépendance de l’Algérie. Au moment où le colonialisme français préparait l’exposition universelle du centenaire de l’occupation de l’Algérie de 1930 et se considérait comme le maître absolu des lieux et au moment où l’élite politique algérienne de l’époque ne pouvait imaginer l’avenir de l’Algérie en dehors de la présence française, une voix du peuple, une voix populaire, dans un discours retentissant proclama l’indépendance de l’Algérie. Ce discours radical et révolutionnaire de Messali sous la bannière de l’Etoile Nord-Africaine a divisé l’histoire coloniale en deux : il y a un avant et un après. Ce discours a signé le début de la fin du colonialisme français car il a posé le problème central : qui est souverain en Algérie ? Le colonialisme français ou le peuple algérien ?

Ce problème politique est-il définitivement résolu en Algérie ? Force est de constater, que le 5 juillet 2019 à Alger, en pleine effervescence populaire, retenti le mantra « le peuple veut l’indépendance ! ». Et le 12/12/2019, par son refus politique des élections avec les gangs car elles sont un non-sens politique, l’Algérie du peuple a rejeté le système politique dominant depuis 1962. Les élections n’existent que pour permettre aux nouveaux maîtres-Les Généraux, de faire main basse sur l’Algérie en toute légalité et la vider de ses forces vives en semant la non-vie et n’offrant pour horizon à la jeunesse que l’appauvrissement, l’asservissement, l’emprisonnement ou l’exil.

Comme le fut le discours de1927, le « Non aux élections avec Al Isabates- les Gangs en 2019 » coupa à son tour, l’histoire de l’Algérie indépendante en deux : l’Algérie du Peuple et l’Algérie des Généraux. Deux Algérie se font face. Une Algérie des privilèges et une Algérie en détresse.

Une Algérie de Club des Pins prospère et arrogante et une Algérie de la Casbah paupérisée et en ruine.

Le problème posé en 1927 s’invite et s’impose à nous : qui est souverain en Algérie ? L’Algérie du peuple où l’Algérie des Généraux avec son système oppressif et désuhmanisant ? Au nom de la civilisation, le colonialisme français nous a expropriés et traités comme des bagnards et des étrangers sur notre propre terre et au nom du nationalisme, le colonialisme des Généraux assassine le présent en asphyxiant l’émergence de la citoyenneté; se sentant de nouveau étranger dans son pays, l’Algérien du peuple ne conçoit l’avenir que dans une vie ailleurs.

L’expropriation dont l’Algérie a été victime lors de la conquête française a été à l’origine de la grande vague d’émigration de nos pères en France, et de cette émigration est née la Culture indépendantiste : le discours de 1927 en est l’illustration parfaite. Depuis le soulèvement populaire de février 2019, nous sommes en train de revivre : jamais, dans l’histoire de l’Algérie indépendante, à part ce bref moment de la joie exaltée et volée en juillet 62, « Tahya Al jazair » n’a rempli le ciel de l’Algérie. L’Algérianité revit en nous et à l’image de ces vendredis glorieux, elle nous assigne à traduire l’esprit du « vendredire » dans la réalité afin que l’Algérie de demain fasse corps et redevient à jamais et pour toujours l’Algérie du vendredire : l’Algérie du Peuple.

De « Tahya Al Jazaïr » en 1962 à « Algiré piyé fotu ! » en 2002. Ce graffiti mural, plus qu’un cri. Ecrit en pleine nuit à Bab El Oued, il n’exprime pas une détresse individuelle mais nous raconte la tragédie d’une nation [1]. Cette main anonyme est une main algérienne qui perd son sang : l’Algérie sous cette colonisation des Généraux se meurt…

Allons- nous subir indéfiniment ce régime odieux et mafieux ? Peut-on admettre que ce régime antinational décide de qui peut rentrer en Algérie et en sortir ?

A qui apparient l’Algérie ? Peut-on accepter que cette terre glorifiée par le sang de nos martyrs soit souillée par les bottes de l’Algérie des Généraux qui opprime et asservit le peuple ?

« Cette terre n’est pas à vendre » cette voix libératrice, cette voix puissante, cette phrase immortelle, dite ce 2 août 1936 au stade municipal d’Alger par le leader de l’Etoile Nord-Africaine vit toujours en nous. Mais cette terre qui n’est pas à vendre, mes sœurs, mes frères, elle a ses héritiers.

Peux-ton accepter que ses héritiers sont cette Algérie des Généraux qui opprime, terrorise, emprisonne : sème la non-vie et nous oblige à l’exil ?

Nos pères, poussés vers l’exil pendant le colonialisme français, se sont structurés en France et ont fondé en coordination étroite avec l’intérieur une pensée révolutionnaire libératrice. Nous sommes des millions qui se sont retrouvés sur le chemin de l’exil et l’Algérie ne cesse de se vider de toutes ses forces vives et s’affaiblir [2]. Ce régime représente une véritable menace pour l’Algérie. L’existence de l’Algérie en question.

Les véritables héritiers, mes sœurs, mes frères, c’est nous : l’Algérie du peuple. Ce régime des généraux n’a aucune légitimité : ni historique, ni politique, ni morale.

Le vrai visage de cette Armée des frontières qui s’est imposée par les armes s’est dévoilé maintenant : c’est une force d’occupation [3].

L’Algérie nouvelle dont on n’a pas cessé de nous la promettre depuis 1962 a révélé sa vraie physionomie : la seule nouveauté est celle du visage du colon.

Hélas mes sœurs, mes frères, force est de reconnaître que l’Algérie n’est pas gouvernée mais occupée. Nous avons libéré l’Algérie du colonialisme français mais nous avons failli dans la construction de l’Etat national. La culture militaire, culture de spoliation et non celle de l’édification ; au lieu de bâtir n’a fait que prendre la place du colon.

L’exil subi pendant la colonisation française et celui d’aujourd’hui est la conséquence d’une même réalité : la logique coloniale.

Cette vérité, nous devons l’affronter de face. Libérer l’Algérie de ce système antinational [4] est notre mission. La mission de l’Algérie du peuple née le 12 décembre2019. Quoique fasse ce régime, sa défaite est certaine et inéluctable.

Cette mission nous est connue. A nous de choisir : l’accomplir ou la trahir. L’histoire nous jugera.

Mahmoud Senadji
Algérie du Peuple

Références

[1] Sid Ahmed Semiane Au refuge des balles perdues Chronique des deux Algérie, La Découverte, p.72, Paris 2OO5

[2] Ali Bensaad, Qui finance qui ?
https://radio-m.net › qui-finance-qui-blog-par-ali-bensaad

[3] Hocine Ait Ahmed en 1963 « Les troupes de Boumediene se comportent comme une force d’occupation » Ali Mécili « Je meurs pour avoir vu mourir l’Algérie au lendemain même de sa naissance et pour avoir vu bâillonner l’un des peuples de la Terre qui a payé le plus lourd tribut pour affirmer son droit à l’existence. Lettre non datée : https://algeria-watch.org/?p=20021

[4] Mouloud Hamrouche, « le système algérien est antinational » El Watan, 4 septembre 2019.

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