La politique n’est ni  ma vocation initiale, ni ma fière compétence. J’écris ce texte pour soulager ma poitrine et réduire la pression qui s’exerce sur mes méninges. Peut-être, est-ce une thérapie personnelle à la tension qu’exerce la scène politique sur l’ensemble des segments de la société? Comme tout algérien jaloux de sa liberté, l’avenir du pays dont le présent est sombre et auquel bon nombre de gens tournent le dos, ne me laisse pas en paix, surtout qu’il a l’air compromis. Aussi, je ne prétends pas révéler une réalité qui crève les yeux depuis au moins une trentaine d’années.  Mais, j’essai de me retrouver dans ce paysage où chacun est, à la fois, dedans et dehors. Où souvent l’idéal varie. Où les hommes se haïssent, se battent, se tuent, pour enfin se  réconcilier ! Et, pour comble, sans tenir compte des morts, des handicapés, des déplacés, des disparus … ! Où l’événement se confond avec le non-événement. Où l’illégitime gouverne et légalise ; le légitime, éconduit, est mis à l’ombre.  Où  la démocratie est mise entre parenthèses tellement la frontière entre pouvoir et opposition est poreuse. Où beaucoup des acteurs politiques, pour le plaisir d’intriguer, s’entêtent, chacun dans son égoïsme, et se fournissent des ‘’prétextes solides’’(!) pour le maintien du statuquo. Comme si, en Algérie, le problème politique absolu- celui de la légitimité-  dans sa mise en équation, le paramètre « temps »  a fini par être dés-impliqué. Il semble parfois qu’il n’y ait plus de place pour l’esprit: celui qui n’a pas recours au mensonge, malmène ses mots, les  charges de flou, d’opacité et les vide de sens par ambigüité. L’effusion de sens et de non-sens sème  la confusion.  
  Pourtant la solution est claire. Limpide. Mais on parie sur la lenteur et la longueur du trajet qui nous en éloignent. Elles sont voulues pour et alimenter le désistement et empêcher une quelconque reprise de souffle. On construit l’effritement par l’usure des forces vives. Pour qu’elles ne laissent aucune trace. Tout se trouve déstabilisé et en difficulté avec le putsch fatidique ! Il nous a plongés dans un monde ravagé par l’absurdité, l’injustice et la mort. Mais, même éclipsée par les ténébreuses nouvelles qui  ravissent, absorbent nos écrans et envahissent, saturent nos journaux, une chose est sûre, il existe une vérité simple et sublime : quoi qu’en on dise, le peuple résiste ! 
Les moments où ce peuple s’est senti  véritablement heureux sont aussi rares que les étoiles dans un ciel couvert de sombres nuages. La situation actuelle est devenue inacceptable. Depuis 1962, les différents gouvernements qui se sont succédé ont toujours demandé au citoyen de les écouter, au lieu de l´écouter. Au lieu de résoudre ses problèmes, ils lui en ont rajouté. Ils ont toujours opté pour la manière forte pour exécuter leurs politiques. La catastrophe multidimensionnelle ou multicouche qui nous tenaille en est la conséquence funeste !  Imbu de ses prérogatives et privilèges acquis, le pouvoir affiche une surdité et un aveuglement qui favorisent la machine administrative et politique à tourner dans une routine démoniaque du déni alors que la violence des inégalités et des injustices s’accroit continuellement en broyant des franges diverses et multiples de la  société. Chaque jour que Dieu fait atteste l’incapacité du pouvoir de s’interroger sur la qualité et l’effectivité de ses « services’’ prétendus ‘’publics ». .   Dans son désarroi,  il a eu recours en ce début de siècle à un excès d’improvisation politique aux conséquences désastreuses : le tissu social, déjà très abimé par les amas dus à la médiocrité, se voit davantage livré à la dégradation. Une autorité, à la fois, avide, inefficace et onéreuse  qui accable toujours plus la collectivité, mais n’oublie guère d’être  à l’avantage de « la pouvoirosphère ». En se contractant sur elle-même, elle gère le pays comme est gérée une épicerie de village !  Sans logique apparente ou perceptible dans ses mouvements, ce régime, pourra-t-il envisager un quelconque changement de méthode ? Ou penser rénover « ses manières » de prise de décision ?  
  Un quart de siècle nous séparent du fâcheux coup d’Etat. Ses principaux instigateurs ont presque tous quitté les  commandes de l’Etat. Des vérités essentielles fusent par ci par là au gré des rixes que l’équilibre du pouvoir nécessite. Elles parviennent à éveiller les consciences et aident à éclairer les esprits même les plus indécis. Il est temps de remettre les pendules à l’heure.
Ce régime repose virtuellement  sur l’action politique à court terme, l’espace d’un mandat électoral. Réellement, le pays est livré aux décisions d’un pouvoir despotique occulte dont rien ne filtre depuis 1962. Le moins qu’on puisse dire c’est que l’intégrité morale n’est pas la vertu cardinale de nos politiques et encore moins de ses décideurs. La toile d’araignée tissée par la « Içaba » du haut de la pyramide jusqu’à la base  a touché  l’intouchable. La scène politique algérienne est si nauséabonde qu’elle est devenue, trop exigüe pour contenir ses acteurs : la rue ou le Harak, dans toutes ses dimensions, le pouvoir avec tout son potentiel et l’opposition avec toutes ses sensibilité mais que le Harak a mise au piquet après l’avoir vidée de son contenu. Le pouvoir et l’opposition courtisent la rue. Chacun à sa manière. Le pouvoir ne veut point se départir de ses deux béquilles : la carotte et le bâton. L’opposition bien nichée dans ses clivages n’a plus qu’un verbe caduc  à mâcher. Quant au Harak, il n’a que sa voix à offrir ; mais, c’est la légalité qu’il détient. Conscient de sa latitude de refus, il résiste à tout ce qui concourt à le dompter ou porter atteinte à la grandeur du peuple. Telle qu’elle se déroule aujourd’hui, l’interaction de ces deux éléments de base – le duel pouvoir-Harak – assurera-t-elle, au pays l’avenir rêvé ? Devant l’ampleur et la profondeur de la pourriture, les intelligences semblent exténuées, les méninges crispées et la raison trouble et égarée. Tout oscille aux quatre vents, il est nécessaire que les esprits qui se distinguent encore par leur sagesse et  leur sagacité  s’offrent un temps de réflexion pour asseoir des analyses, sur un socle ferme. Elles doivent bénéficier d’un optimum de validité pour éviter  que les sentiments passionnés ne viennent attiser cette violence qu’on a du mal à apprivoiser. Une première à l’actif du commandement militaire : en réponse à la « silmya » du Harak, il s’est engagé à ne pas avoir recours à la violence pour imposer une quelconque solution. C’est un grand pas. Le  thermomètre du changement monte. Arrivera-t-il au beau fixe ? Les données dirigent-elles les choses dans le bon sens ? Les protagonistes – qui sont des algériens, des frères sur le même vaisseau- n’ont qu’une seule issue : se dépasser ! Pour déjouer toutes les  manipulations, engager le dialogue et s’entendre sur le minimum faisable pour, ainsi, permettre la fluidité d’une transition sereine menant à l’Etat de droit.  Ce  temps de réflexion servira à affermir davantage l’identité nationale, magnifier les valeurs de la république qui assurent la dignité et la défense de l’Homme et normaliser et fixer les règles du jeu politique. Il sera le terreau fertile  de la netteté dans la pensée et de la lucidité  dans le jugement. L’avenir est l’affaire de tous. Il n’est pas l’objet de réflexion des seuls responsables. Il les dépasse pour atteindre l’ensemble des citoyens, jusqu’au dernier. Le sort du pays ne doit pas être abandonné à la seule classe politique !  Notre peuple aspire à grandir, vivre pleinement son humanité et à reprendre place dans le concert des nations. Cette aspiration à valoir davantage, à être davantage, est le signe de sa vocation historique et civilisationnelle. Il est du devoir des « chorafa » d’aller au-delà de leurs limites pour la faire révéler des actions qui l’ont caractérisée et la  caractérisent et des principes qui la motivent et la légitiment. C’est ainsi, qu’il manifeste son existence, sa nature et sa puissance de vie : créer pour le bonheur et par le bonheur. Le politique qui ignore la dimension historique de son rôle n’est qu’un « boulitique ». Des siècles entiers  d’histoire, dominés par l’algérien libre et libérateur, se heurtent, aujourd’hui,  à  ces dernières décennies qui veulent enterrer cette noble image en s’abimant dans leurs brumeuses cogitations. Ce ne sera pas un pouvoir illégitime qui va empêcher cette volonté ferme et déterminée de ne point vivre assujettie. L’endurance est le propre de ce peuple. Il aime le combat. La victoire l’aime.

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