En août 2015, Anne Hidalgo et son adjoint Bruno Julliard nous vendaient « Tel-Aviv sur Seine » dans le cadre de Paris-Plage alors qu’à peine un an avant le gouvernement de Tel-Aviv faisait plusieurs milliers de victimes en bombardant Gaza. Mais le sang des Palestiniens n’avait visiblement pas beaucoup ému l’édile de Paris et son équipe qui préféraient apporter leur soutien à une puissance coloniale.

Quatre ans plus tard, mercredi 12 juin 2019, le Conseil municipal de Paris a décidé d’attribuer la dénomination « place de Jérusalem » à un square situé dans le XVIIe arrondissement de la capitale.

La future « place de Jérusalem » se situe à l’endroit où sera inauguré le Centre européen du judaïsme. Cet emplacement se conforme au souhait exprimé par le président du Consistoire,  Joël Mergui, lors de la réception du président de l’entité sioniste, Reuven Rivlin, à l’Hôtel de Ville de Paris en janvier dernier.

L’inauguration de cette place doit se faire le dimanche 30 juin en présence d’Anne Hidalgo et du maire sioniste de Jérusalem, Moshe Lion, comme l’a indiqué Joël Mergui dans un communiqué où il qualifie la ville sainte de « capitale d’Israël ».

Par cette décision, la maire PS de Paris feint d’ignorer que la ville d’al-Quds n’est pas uniquement un lieu saint du judaïsme mais qu’elle possède également un caractère sacré pour le christianisme et l’islam.

Anne Hidalgo feint également d’ignorer la réalité coloniale de la ville d’al-Quds dont la population palestinienne, chrétienne comme musulmane, est victime d’une politique de judaïsation, c’est-à-dire d’un nettoyage ethnique visant à expulser la population non-juive de la ville. Le but de ce nettoyage ethnique est d’annexer à l’État sioniste la partie encore palestinienne de la ville afin d’en faire la « capitale d’Israël ».

En prenant cette décision Anne Hidalgo et son équipe viennent apporter leur caution à l’annexion d’al-Quds par l’entité sioniste et à la politique de nettoyage ethnique que cette entité coloniale mène. Ils apportent également leur caution à toutes les mesures racistes et discriminatoires mises en place par l’entité sioniste contre la population palestinienne d’al-Quds afin de l’obliger à quitter la ville de leurs ancêtres pour en faire une ville juive « ethniquement pure ».

Mais cette nouvelle prise de position en faveur de la colonisation dont est victime la population palestinienne est-elle vraiment étonnante de la part d’une maire membre du Parti Socialiste ? Est-ce véritablement nouveau de voir le PS défendre des politiques racistes, anti-arabes, islamophobes et coloniales ?

En réalité, cette nouvelle prise de position n’est qu’un énième avatar d’une longue tradition politique coloniale partagée car les socialistes français sont depuis longtemps une incarnation de cette gauche coloniale qui défend des positions progressistes en Occident tout en menant une politique colonialiste et suprémaciste vis-à-vis des peuples non-blancs.


Dès les années 1930, à la demande de Haïm Weizmann, alors à la tête de l’Organisation sioniste mondiale, le socialiste Léon Blum s’est impliqué dans la colonisation sioniste de la Palestine durant le mandat britannique (1922-1948). En France, le gouvernement du Front populaire dirigé par le même Léon Blum fit dissoudre l’Étoile Nord-Africaine – organisation qui luttait pour la libération de l’Algérie et de l’ensemble du Maghreb –, le 26 janvier 1937, et emprisonner ses militants.

Après la guerre 1939-1945, l’ancêtre du PS, la SFIO, a continué de soutenir le mouvement sioniste tout en s’efforçant de préserver l’empire colonial français, notamment en approuvant les massacres de Sétif et de Guelma en Algérie suite à la célébration du 8 mai 1945.


Le 29 novembre 1947, au moment du vote de la partition de la Palestine et de la création de l’entité sioniste aux Nations Unies, approuvées par la France, la IVème République était présidée par le socialiste Vincent Auriol et la SFIO participait au gouvernement. Durant la même période, la IVème République massacra plus de 80 000 Malgaches qui s’opposaient à la colonisation française. De 1946 à 1954, elle mena également un guerre coloniale, qui a fait des centaines de milliers de victimes, contre les Vietnamiens, les Cambodgiens et les Laotiens qui luttaient pour la libération de l’Indochine.


Le 15 mai 1948, au lendemain de la proclamation de l’État d’« Israël », l’organe de la SFIO, Le Populaire, souhaitait « bonne chance » au « nouvel État » parce qu’il était « essentiellement démocratique » et parce que « le socialisme y a implanté des racines solides ». Le Populaire précisait que « la plupart des postes-clés du gouvernement provisoire » sioniste étaient tenus par « des socialistes membres de notre internationale ». L’article du Populaire se terminait par un appel lancé au « monde » pour accueillir le nouvel État colonial par un : « Que la paix soit avec toi »[1].

A cette date, la Palestine était déjà occupée par les colons sionistes et les Palestiniens étaient en grande partie expulsés de leur terre. Le Populaire n’a nullement évoqué ce nettoyage ethnique car pour cet organe colonial la vie d’un Arabe restait dénué de valeur.


Reprenant les rênes du pouvoir le 1ier févier 1956, le gouvernement dirigé par le socialiste Guy Mollet a préparé avec ses alliés sionistes et britanniques l’agression tripartite contre l’Égypte en octobre-novembre 1956 pour contrôler le canal de Suez qui venait d’être nationalisé par Gamal Abdel-Nasser. Pour les socialistes français, qui avaient voté les « pouvoirs spéciaux » à l’armée, le 12 mars 1956, pour mater la Révolution algérienne, c’était l’occasion de renverser un gouvernement arabe qui soutenait activement le FLN algérien. Cette politique coloniale  concordait parfaitement avec celle de l’entité sioniste qui consistait à mettre à genoux le seul État arabe menaçant son hégémonie au Machrek.


Le même gouvernement du socialiste Guy Mollet a mis en œuvre la collaboration nucléaire entre la France et l’entité sioniste, avec la construction du réacteur nucléaire à Daymona dans le désert du Néguev. Jusqu’à aujourd’hui, l’arme atomique est utilisée par les sionistes pour maintenir l’ensemble du Machrek sous la menace d’une attaque nucléaire avec le soutien des puissances occidentales.


En 1991, la France gouvernée par les socialistes entra en guerre contre l’Irak pour démanteler ce pays, affaiblir un des plus puissants pays arabes de la région, mettre la main sur ses richesses et ainsi protéger son allié sioniste.

Au regard de cette histoire, nous ne pouvons que constater l’alliance indissoluble entre les socialistes français et les sionistes. Mais sur quelles valeurs reposent cette alliance indissoluble ?

Dans un article publié récemment, Joseph Massad a cherché à déterminer les fondements de l’alliance indéfectible entre les États occidentaux et l’État sioniste qui est une émanation de l’Occident. En conclusion de son article,  l’intellectuel palestinien affirmait :

« Les objectifs démocratiques du peuple palestinien et son engagement à mettre fin au racisme et au colonialisme israéliens sont des valeurs que les gouvernements occidentaux refusent de partager. Les valeurs que partagent ces gouvernements avec Israël, contrairement à leurs fausses affirmations, ne sont pas la démocratie et la liberté pour tous, mais plutôt l’élimination pure et simple des peuples non blancs et autochtones.[2] »

Suivant la perspective tracée par Joseph Massad, nous pouvons affirmer que l’alliance indissoluble entre les socialistes français et les sionistes repose sur les valeurs partagées du colonialisme, du racisme, notamment du racisme anti-arabe, et de l’islamophobie. Cette alliance possède donc des racines historiques profondes qui plongent dans l’humus des valeurs partagées du suprémacisme blanc que la gauche coloniale, à commencer par le PS, défend avec une force souvent sanguinaire.

Aujourd’hui, le Parti Socialiste semble en voie de dégénérescence accélérée. N’ayant rien à attendre du PS, et plus généralement de la gauche coloniale, nous devrions hâter le plus possible le processus de putréfaction en cours car ce parti colonialiste, anti-arabe et islamophobe reste certainement un de nos pires ennemis historiques.


[1]    Jacques Dalloz, La création de l’État d’Israël, La Documentation française, 1993

[2]    Joseph Massad, « Israël et l’Occident : ‘Des valeurs partagées’ de racisme et de colonialisme de peuplement », ISM-France, 18/06/2018

Comments are closed.

Exit mobile version