Il y a beaucoup d’Algériens (en particulier les universitaires eux-mêmes : étudiants et prof) qui ont une piètre opinion de l’université et des étudiants algériens.
 
Autoflagellation traditionnelle d’un peuple qui doute de lui-même, de ses élites et de son avenir.
 
Il est vrai qu’à voir le foutoir que nous avons sous les yeux tous les jours, il est difficile de ne pas douter. Surtout à la lecture des torchons quotidiens dont la raison d’être est de nous persuader que nous ne valons pas grand-chose et qu’en juillet 1962 nous aurions dû voter à 92% et de grosses poussières pour la continuation de notre asservissement, chez nous, au titre de « citoyens » de catégorie inférieure.
 
Et pourtant, il y a des motifs de satisfaction.
 
Information du jour : « 170 étudiants algériens ont été retenus pour poursuivre leurs études en France à la rentrée prochaine. Ils seront reçus, aujourd’hui à 19h, par l’ambassadeur de France à Alger, M. Bernard Emié. »
 
Dans le compte-rendu ci-dessous, il n’y a aucune information concernant l’insertion de ces départs dans la politique universitaire algérienne. Pas un mot de ce qu’en pense la « tutelle » ou les universités algériennes (facultés, instituts, laboratoires…).
 
Il y a même un sacré retour en arrière.
 
Au début des années 1970, l’Etat algérien a retiré aux ambassades étrangères le pouvoir d’attribuer des bourses, de choisir nos étudiants et de circonscrire leur projet de recherche, en dehors de l’expertise faite par le Ministère de l’Enseignement Supérieur. Que cette expertise ait pu connaître des défaillances (et le mot est faible), là n’est pas la question.
 
Au niveau du principe, c’est avant tout à l’Algérie de déterminer la pertinence d’un choix de recherche, en rapports avec ses besoins et ses axes de développement. Il n’est pas interdit à un étudiant d’entreprendre les études qu’il veut en dehors de ces choix. Sur les mœurs sexuelles des fourmis martiennes ou sur la structure de la parenté chez les princes saoudiens (actuellement en vacances sur la Côte d’Azur), par exemple. Mais alors il n’a qu’à le financer avec ses propres deniers.
 
Le choix de ces candidats est opéré par «Campus France Alger» sur la base de «leur niveau académique acquis en Algérie, la qualité de leur projet d’étude en France et leur projet professionnel».
 
Les autorités algériennes ne paraissent pas avoir eu droit au chapitre. Rien dans le papier ne l’indique.
 
Laisser l’ambassade de France court-circuiter les autorités universitaires algériennes (y compris les équipes pédagogiques et les laboratoires – quoi qu’elles valent), leur permettant de décider de la valeur des choix de nos étudiants pour les autoriser à entamer des recherches en France, c’est le comble de l’aliénation et de la perte de souveraineté. Et je persiste : une belle régression !
 
Si ces départs sont le médiateur d’une coopération qui vise à développer et à approfondir la recherche et la qualité de la formation universitaire. Si la sélection était coordonnée avec les universités de départ et dans le cadre d’un programme de recherche. Alors bravo !
 
Mais si c’est le moyen de faciliter ce que Sarkozy (le président qui adore l’Algérie et n’est obsédé que par tout bien qu’il lui veut) appelle « l’émigration choisie », alors l’Algérie est mal partie.
 
Pour ce qui est des conventions de coopération signées entre les deux pays, c’est du pipeau tant qu’un bilan circonstancié n’aura pas été exactement dressé. Et là aussi on est loin du compte.
 
«Le nombre d’accords et de conventions signés entre les universités algériennes et françaises approche de 800 » précise l’article.
 
Or, nous savons que de nombreuses conventions sont signées et très vite oubliées. Elles permettent juste que tel ou tel petit malin puisse aller faire ses courses dans les hyper de Panam ou passer quelques jours de vacances avec sa famille aux frais du budget de son université.
 
Que fait le gouvernement algérien pour retenir et organiser ce qui a tant coûté au budget du pays ?

Et dire qu’il y a de nombreux chercheurs bloqués dans leurs travaux par des administrateurs incompétents et corrompus, qui gaspillent une part importante de leur temps à remplir des dossiers de fous, à se perdre dans des démarches labyrinthiques, à mendier des vises improbables…
 
Récapitulons : l’ambassade de France fait ses courses dans nos universités. Choisit les meilleurs de nos étudiants et chercheurs, leur offre des bourses et se barre avec.
 
Que notre ministre est en vacances après un ramadhan très reposant, que les recteurs de nos universités (certains recteurs, inamovibles, de droit divin) chacun de son côté ait d’autres chats à fouetter se dorent la pilule les doigts de pied en éventail, et que tout le monde s’en fiche (et j’entends même certains dire : « après tout c’est très bien que certains puissent enfin avoir les moyens d’effectuer des recherches intéressantes et échapper à ce pays de m… »)… que tout cela représente des vérités incontournables, ne devrait pas réduire l’espace de notre responsabilité.
 
Et aussi notre liberté de dire il suffit !
 
Ou alors on ne vaut pas plus que les hitistes assis sur leur c… se contentant de commenter les caravanes qui passent et pleurnicher sur l’absence de démocratie, de liberté d’expression et se demandant quand enfin un Comte de Bourmont ne viendrait pas enfin nous délivrer de nous-mêmes.
 
Djeha,
27 juillet 2015

170 étudiants algériens retenus pour des études en France

R. N., Le Quotidien d’Oran, 27 juillet 2015

Près de 170 étudiants algériens ont été retenus pour poursuivre leurs études en France à la rentrée prochaine. Ils seront reçus, aujourd’hui à 19h, par l’ambassadeur de France à Alger, M. Bernard Emié.
 
Selon un communiqué de l’ambassade de France, c’est «la première fois», que «les meilleurs étudiants de Campus France Alger seront reçus personnellement par l’ambassadeur de France dans le cadre d’une rencontre à l’occasion d’une réception à la Résidence de France». Concernant le choix de ces candidats par «Campus France Alger», le communiqué indique qu’ils «se sont distingués par leur niveau académique acquis en Algérie, la qualité de leur projet d’étude en France et leur projet professionnel».
 
Les 170 étudiants retenus «ont obtenu avec succès une pré-inscription dans un établissement d’enseignement supérieur français, principalement en master et doctorat, dans le cadre d’un complément d’une formation initiale acquise en Algérie ou d’une spécialisation», indique-t-on également. L’ambassade de France explique que «l’organisation de cette rencontre fait écho» à l’entretien de l’ambassadeur de France avec le ministre l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, M. Tahar Hadjar, qui «se sont félicités de l’importance de la coopération algéro-française dans le domaine de l’enseignement supérieur».
 
Selon la même source, «le choix de ces étudiants de poursuivre leurs études en France» s’inscrit «dans la dynamique de la relation bilatérale entre la France et l’Algérie en matière de formation et en faveur de l’employabilité des jeunes diplômés». Il est rappelé que «le nombre d’accords et de conventions signés entre les universités algériennes et françaises approche de 800 ». Quant à la coopération entre la France et l’Algérie, elle a été matérialisée par de «nombreux programmes tels que le PHC Tassili et Maghreb pour le rapprochement des laboratoires de recherche et la formation doctorale, le Réseau Mixte des Grandes Ecoles entre les écoles d’ingénieurs françaises et algériennes, le PROFAS B+ pour la formation des doctorants, les Instituts technologiques pour la formation des cadres intermédiaires des entreprises».
 
Il est également indiqué que la «France (…) est de très loin le premier pays d’accueil des étudiants en provenance d’Algérie. Leur nombre est de 23 000 et ils représentent près de 8% du total des étudiants étrangers». Et « la France consacre à l’Algérie son premier budget de coopération universitaire et de recherche : plus de 2 millions d’euros», selon le communiqué. On y apprend également qu’un «nouveau réseau social français destiné aux anciens étudiants étrangers ayant fait des études en France», dénommé «France Alumni», sera lancé prochainement en Algérie, et auquel seront conviés à s’inscrire les étudiants invités à la rencontre d’aujourd’hui.

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