Une fois n’est pas coutume, la position de l’union européenne (UE) ne va pas dans le sens souhaité par le régime algérien. Cela dit, bien qu’elle ne veuille pas cautionner une élection présidentielle, dont les résultats sont connus d’avance, il n’en reste pas moins que son refus d’envoyer des observateurs, pour le scrutin du 17 avril prochain,  ne remet pas en cause la crédibilité de la joute. D’ailleurs, pour ne pas mécontenter les inamovibles dirigeants algériens, l’UE va dépêcher deux experts. Leur mission se limitera à l’observation sans commenter les résultats.

Ainsi, malgré un passage en force, les puissances occidentales, dont les intérêts matériels éclipsent les valeurs démocratiques, ne veulent pas se mouiller. De toute évidence, cette position arrange parfaitement le régime algérien. Car, en 2012, les suggestions des observateurs européens ont irrité le ministre de l’Intérieur en place, Dahou Ould Kablia. Pour ce dernier, il était hors de question d’accéder à la demande des observateurs européens consistant à publier le fichier électoral. Pour balayer d’un revers de la main cette demande, le ministre invoquait alors « la protection de la vie privée des Algériens ».

Dans la réalité, ce fichier est utilisé pour mieux contrôler les chiffres de participation. Sinon, pourquoi les Algériens, eux-mêmes, ne peuvent pas accéder au fichier national ?  D’ailleurs, pour l’élection du 17 avril, on se demande d’où viennent les 23 millions d’inscrits ? Combien de morts vont-ils encore voter à cette élection, pourrait-on se demander ? Bien évidemment, tant que le régime actuel reste en place, ces questions ne trouveront pas de réponses. Et à moins que l’on soit naïf, on ne peut pas s’attendre à ce que l’UE pose le problème en ces termes.

Cependant, bien que la critique soit mesurée, le document, publié le 27 mars dernier par l’UE, met en exergue l’incapacité du régime algérien à mener les réformes. « Il n’y a eu aucun progrès visible dans la mise en œuvre des recommandations de la mission d’observation électorale de l’UE des élections législatives (précédentes) », souligne la commission européenne. En effet, bien que le chef de l’Etat se soit engagé à réformer le système afin d’éviter les explosions sociales, observées chez nos voisins en 2011, la commission européenne ne constate aucune avancée.

Quoi qu’il en soit, en dehors de la clientèle du régime, les Algériens, de leur coté,  constatent la dégradation de la situation politique de jour en jour. En effet, malgré la levée de l’Etat d’urgence à partir de février 2011, force est de constater que toutes les manifestations sont interdites. En gros, tout ce qui ne va pas dans le sens voulu par le régime est réprimé. Pour justifier cette terrible répression, les courtisans du régime invoquent une multitude d’arguments.

De l’intervention de la main étrangère à l’argument fallacieux selon lequel les Algériens ont de l’eau dans leurs robinets et ont de quoi se nourrir, tous les moyens sont bons pour discréditer les voix discordantes. Confondant le droit à la liberté et le réflexe « pavlovien», ils font volontiers abstraction des dangers qui guettent le pays. En fait, alors que l’Algérie peut-être une puissance mondiale en encaissant 800 milliards de dollars en une décennie, dans certaines régions du pays, des Algériens continuent encore à faire la queue pour avoir un sachet de lait.

En somme, bien que les partisans du quatrième mandat louent les réalisations de Bouteflika, il n’en reste pas moins que le résultat est en deçà des attentes. En fait, quand on sait que la reconstruction de l’Europe, après les dégâts de la seconde guerre mondiale, a nécessité environ 200 milliards de dollars actuels,  on peut dire que le bilan de Bouteflika en mobilisant les 800 milliards de dollars est négatif par rapport à ce qu’a été fait en Europe. Quant aux arguments selon lesquels les Algériens mangent à leur faim, on peut répondre ceci : quand on veut vivre dans l’honneur et la dignité, le matériel ne doit pas guider notre pensée. Ou alors, ces gens-là ont un estomac à la place du cerveau. En fin de compte, c’est cela qui nous sépare avec les partisans de Bouteflika, voire même avec ceux qui soutiennent Ali Benflis.

Boubekeur Ait Benali
4 avril 2014

Comments are closed.

Exit mobile version