Dans la vie, il y a des combats qui ne s’estompent pas. Celui d’Ali Mecili en fait incontestablement partie. Bien que son promoteur ne soit pas de ce monde, grâce à la mobilisation de Hocine Ait Ahmed et de sa famille, son sacrifice n’est ni oublié ni abandonné. À ce titre, chaque année, sa famille, le FFS et tous ceux qui sont épris de justice commémorent l’anniversaire de l’assassinat d’Ali Mecili par les services secrets algériens. Cette année, un rassemblement est prévu demain, le 7 avril 2013,  à 14 heures 30 au cimetière Pierre Lachaise.

De toute évidence, malgré les 26 ans qui nous séparent de cet ignoble meurtre, la plaie est toujours béante. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle a du mal à cicatriser, car tout est fait, du côté français comme du côté algérien, pour que la vérité ne se sache pas. En tout cas, par sa couverture d’un assassinat perpétré sur son sol, la France, au nom de la raison d’État, a couvert et couvre encore les auteurs de la sale affaire. Malheureusement, la France a choisi le camp des tyrans, en étant peu regardante sur les valeurs qui sont les siennes. En effet, un pays qui affirme son attachement à la justice, au respect des principes humanistes, peut-il bâcler l’enquête en livrant l’assassin au pays qui a planifié une liquidation d’un opposant politique sur son propre sol ?

À moins que le combat d’Ali Mecili pour le changement de régime en Algérie contrarie des desseins occultes. Et pourtant, le combat d’Ali Mecili pour l’instauration de la démocratie en Algérie ne devait pas a priori poser un cas de conscience à un pays qui s’apprêtait à l’époque  à fêter les deux cents ans de la chute de la monarchie. En tout cas, pour Ali Mecili, une Algérie libérée par le sang de ses meilleurs fils ne méritait pas de sombrer dans le chaos. Le compagnon de lutte de Hocine Ait Ahmed ne voulait pas assister, après avoir contribué à mettre fin au joug colonial, à une autre forme de domination de son peuple.

Cette probité le rapproche naturellement de Hocine Ait Ahmed, dont le combat pour une Algérie libre, heureuse et épanouie n’est  plus à présenter. D’ailleurs, dès l’automne1962, les deux hommes se sont engagés pacifiquement dans un combat politique en vue de restituer sa dignité au peuple algérien. Quoi qu’il en soit, le combat politique à l’intérieur des institutions ayant montré ses limites, ils ont créé, en compagnie d’autres grands militants, le front des forces socialistes, le 29 septembre 1963. Et durant sa riche carrière politique, la devise d’Ali Mecili était la suivante : « la démocratie d’aujourd’hui est également la garantie de la démocratie de demain. »

De toute façon, la persévérance d’Ali Mecili dans son combat est perçue comme une menace sérieuse par le régime d’Alger. D’autant plus que, dans les années 80, Ali Mecili œuvre pour le rassemblement de l’opposition algérienne. Créant son organe de presse, en l’occurrence Libre Algérie, Ali Mecili dénonce les abus du régime algérien et les mesures iniques des autorités françaises à l’égard des opposants algériens en France. Dans ces conditions, comme le feraient tous les régimes dictatoriaux, la liquidation physique devient une nécessité en vue d’éteindre la voix dénonciatrice. Dès lors, le sort d’Ali Mecili est scellé, selon Hocine Ait Ahmed. « « Ali André Mecili a été tué par la conjuration des barbouzes et des maquereaux contre le rapprochement des hommes au sein d’un même peuple et le rapprochement entre les peuples au sein d’un même monde. C’est parce que le FFS s’est inscrit dans la logique d’union nationale, de convergence démocratique, de la lutte pacifique en Algérie et de rapprochement entre les peuples français et algérien dans le respect mutuel qu’Ali André Mecili a été tué », déclare-t-il à l’occasion du 23ème anniversaire de l’assassinat de son ami.

En somme, il va de soi que l’assassinat d’Ali Mecili résulte de la bêtise humaine. En un mot, les usurpateurs du pouvoir en Algérie, dès 1962, ne voulaient pas que quiconque les contrarie. Quant aux autorités françaises de l’époque, leur arrangement avec le régime d’Alger en vue d’étouffer l’affaire s’est fait au détriment des valeurs fondatrices de l’État français. Dans ce cas, et en dépit des difficultés tous azimuts, il ne reste aux proches d’Ali Mecili et à sa famille politique, à travers des cérémonies annuelles, qu’à perpétuer son combat, et ce, jusqu’à ce que la lumière soit faite sur ce lâche assassinat. « Nous allons donc continuer et comme chaque année, en avril, nous retrouver pour nous recueillir sur la tombe d’Ali et redire notre espoir de voir un jour la vérité venir d’une Algérie enfin démocratique », écrit en 2010 Annie Mecili, veuve d’Ali Mecili. Enfin, ce jour, où la vérité jaillira, interviendra, espérons-le, avec la réalisation du vœu d’Ali Mecili inhérent à la fin de la dictature en Algérie.   

Boubekeur Ait Benali
7 avril 2013

2 commentaires

  1. RE: L’assassinat d’Ali Mecili: un crime politique couvert par la raison d’Etat
    MECILI, VICTIME « SAINTE-ALLIANCE » ALGER-PARIS !

    Il n’est pas exigé d’être politologue ou expert pour le déceler tout de go: Mécili était victime de la Sainte-alliance Alger-Paris ». Les Généraux sanguinaires ont éliminé un Opposant très gênant, lui qui s’employait de toutes ses forces pour la fondation d’un Front uni contre le Régime militaire, et les Services français se sont vengés contre l’héroïque Lieutenant de l’ALN, engagé jusqu’à la moelle pour l’indépendance de l’Algérie qu’il portait dans toutes les fibres de son âme. Ces « liaison dangereuses » ou Raisons d’Etat entre les deux rives ont fauché par le passé deux monuments de la Révolution algérienne: Ben M’Hidi assassiné par Bégeard et Aussaresses, et Abbane liquidé par les Clan d’Oujda (Les 3 B, Boussouf-Bentobbal-Belkacem.K), le Clan fort (car amarré au MALG), il y’a alors un lien dialectique entre le Régime militaire colonial et le Régime militaire algérien, les Colonels algériens ont remplacé les Généraux français : le joug colonial était évidement cassé, mais les survivances, les pratiques et les perversions demeurent, l’indépendance était confisqué par la « ruse et la force » dès Juillet 1962….

  2. RE: L’assassinat d’Ali Mecili: un crime politique couvert par la raison d’Etat
    26 ans après, une importante bibliographie est disponible qui donne tous les éléments connus sur cette affaire. A vrai dire, la Justice française dispose de toutes les pièces, preuves et témoignages qui démontrent la culpabilité d’Amellou, le tueur de la Sécurité militaire, et de son commanditaire, le Comandant Hassani, tous deus arrêtés, puis relâchés et renvoyés à leurs Maitres de la Gestapo d’Alger, alias le DRS (ex-SM).

    Pour comprendre la « nature militaire » et la « structure clanique » du Régime dictatorial sanguinaire et mafieux d’Alger, tenu d’une main de fer par les Généraux criminels et prédateurs……voici certains titres intéressants :

    -L’Affaire Mécili : http://www.algeria-watch.org/fr/article/just/affaire_mecili/affaire_meci

    -Annie GARIBALDI, L’opposition en Kabylie, 1963-1965, Mémoire de DEA en Sciences politiques, Université Paris-2 Sorbonne-Panthéon,

    -Michel Naudy, Un Crime d’États : l’Affaire Mécili, Albin Michel, I SBN 2-226-06228-9 ,

    -Hocine Aït Ahmed, L’Affaire Mécili, La Découverte, ISBN 978-2-7071-5134-6,

    -Mohammed Samraoui, Chronique des années de sang, Éditions Denoël, ISBN 9782207254899,

    -Lounis Aggoun et Jean-Baptiste Rivoire, Françalgérie, crimes et mensonges d’États, La Découverte, ISBN: 9782707147479

    -H. Souaidia, La Sale guerre, La Découverte, 978-2-7071-7150-4

    -H. Souaidia, Le Procès de la « Sale guerre », La Découverte, 978-2-7071-3900-9,

    -RSF, Le Drame algérien, un peuple en otage, La Découverte, 978-2-7071-2472-2,

    -RSF, Algérie, le livre noir, La Découverte, 978-2-7071-4100-2

    -N. Yous, Qui a tué à Bentalha ? La Découverte, 978-2-7071-3332-8,

    -Dj.Malti, Algérie, 10 clès pour comprendre, La Découverte.

    -Affaire Mécili : les écoutes qui accusent un agent algérien….http://www.rue89.com/2010/08/26/affaire-mecili-les-ecoutes-qui-accusent-…,

    -Annie MECILI, TRIBUNE 13/10/2008 à 12h20 , Lettre ouverte à Sarkozy : l’affaire Mécili contre la raison d’Etat….http://www.rue89.com/2008/10/13/lettre-ouverte-a-sarkozy-laffaire-mecili

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