Il semblerait que la liberté et le droit à l’information, ne font plus bon ménage avec un des piliers de la démocratie, le « quatrième pouvoir » ! Et pour cause ?

Les révélations de Wikileaks ne sont plus au goût d’une certaine presse, qui, pourtant se targue d’être non seulement un « modèle » en matière de transparence, mais surtout très souvent donneuse de leçons à la presse africaine ou arabe ! Ainsi, dans son édition du 8 décembre, le journal Le Figaro ne s’en cache même plus : « Incarcéré, Assange conserve son pouvoir de nuisance » !, laissant du coup incrédules les nombreux commentateurs pourtant lecteurs de ce journal, et qui ne comprenaient plus la tournure de sa ligne éditoriale et sa posture de dénigrement…

Ce titre a dû certainement trouver écho dans les propos du secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, qui ne cachait pas sa satisfaction suite à l’arrestation du fondateur de Wikileaks : « Cela me semble être une bonne nouvelle», a-t-il « lâché », écrit le journal. Avant de préciser que les Etats-Unis « menacent Assange de poursuites et de représailles ».

On oublie presque que l’avènement de la presse, au 19ème siècle, était un facteur décisif dans sa contribution au développement de la démocratie. Au point d’être qualifiée de « quatrième pouvoir » pour marquer son importance politique.

De quoi est-elle vraiment gênée cette presse ? Que ces « fuites », qui n’étaient accessibles qu’aux seules ambassades des grandes puissances, et aux seuls membres du Conseil de sécurité, soient aujourd’hui du domaine public ? Et pour parler crûment, « nos populations » (du tiers monde) ne devaient donc pas savoir ce que les ambassades américaines « cuisinent » sur le dos des millions de personnes qui ne représentent qu’un « troupeau de bétail » aux yeux de leur « tonton » Sam ? Ils préfèrent que nos moyens d’informations (officiels ou d’oppositions), ne diffusent que les propagandes officielles et les communiqués de la police politique, que nous restions fidèles à l’image qu’ils veulent bien nous coller encore à la peau, « peuples du tiers-monde » et « sous-développés »… A moins qu’ils ne veuillent tout simplement continuer de soutenir dans « l’ombre » et dans les coulisses les dictatures qu’ils ont mis en place partout en Afrique et ailleurs (Amérique latine) ?

Il y a encore quelques jours on se demandait pourquoi aucun des médias arabes ou africains n’a été désigné pour relayer les « câbles ». Et bien nous y voilà ! L’information n’est bonne à diffuser que pour renflouer et hypertrophier certains « égos » mis à mal par la crise mondiale et l’émergence de nouvelles puissances économiques, culturelles et même militaires bien réelles.

Incrédule, sidéré, les mots risquent de me manquer pour décrire le sentiment de dégoût et d’amertume, lorsqu’on tombe sur des émissions dans certains médias (publics ou privés), entre soi-disant « spécialistes » pour débattre de l’importance de l’événement (ou pas !) et « à qui profite ces télégrammes ? » Et encore ! Lorsqu’il ne s’agit pas tout simplement de « condamnation »…

Selon le Canard enchaîné (hebdomadaire satirique français), le Président Sarkosy, se serait même emmêler les pinceaux, lors du Conseil des ministres du 30 novembre, en commettant un lapsus « Au lieu de condamner Wikileaks, le chef de l’Etat Français a parlé de ‘l’irresponsabilité’ de Wikipédia »! En vérité, lorsqu’un président d’un pays membre du Conseil de sécurité confond Wikileaks avec l’Encyclopédie en ligne (Wikipédia), il y a de quoi ne pas trop sombrer dans l’auto-flagellation.

Les responsables de certaines démocraties occidentales ne valent pas mieux que nos « sympathiques gros nounours » dirigeants ! Cette presse aux allures honteuses et hypocrites, qualifiera-t-elle encore de « nuisance » les révélations de Wikileaks, quand celles-ci, auront à démasquer les systèmes de corruption généralisée et d’absence d’un minimum d’éthique au sommet de quelques unes des plus grandes banques d’Amérique ? N’est-ce pas donc le « partage » d’un flot de secrets de polichinelle qui rend ces fuites plus gênantes ?

Dans ce cas, force est de reconnaître que le « retour du refoulé » bien spécifique aux doctrines impérialistes aux odeurs nauséabondes est encore de rigueur… Je veux dire qu’on aura encore à faire – une énième fois dans l’histoire – à la vision ethnocentrique, tant dénoncé par une « autre » presse, bien heureusement, que nous souhaitons voir vivre longtemps et faire face aux lobbies hyper-financiers qui voudront museler les petites consciences encore vivantes qui continuent d’éclairer les chemins des derniers « damnés de la terre »…

Samy Khoukoum
9 décembre 2010

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