L’opinion publique nationale est internationale a été orientée par les faiseurs d’opinions (commentateurs, acteurs politiques, figurants au pouvoir et dans l’opposition) vers un détail de « l’élection présidentielle » du 9 avril passé. Ce détail était le taux de participation des électeurs à ce rendez-vous électoral, ou son opposé le taux d’abstention ou de boycott. Ces taux sont des indices de confiance des électeurs dans le processus lui-même, mais ils n’ont la force légale de l’annuler.

De même pour les taux obtenus ou octroyés à chacun des participants à cet évènement national s’il faut le qualifier comme tel. Ils  sont aussi des indices de confiance accordée par les électeurs à chacun des participants. Mais ils ne peuvent annuler le processus lui-même qui est régi par des dispositions légales contenues aussi bien dans la constitution que dans la loi électorale.

Que dit la constitution ? Dans son article 71, elle énonce ceci : «  Le président de la République est élu au suffrage universel, direct  et secret. L’élection est acquise à la majorité absolue des suffrages exprimés. Les autres modalités de l’élection présidentielle sont fixées par la loi. »

Par cet article, la constitution n’a pas fixé un seuil du taux de participation, mais un seul seuil pour gagner cette élection : la majorité absolue des suffrages exprimés. Pour simplifier les choses, s’il n’y a que 20 voix qui se sont exprimées et qu’un candidat ait obtenu 11 voix, il est déclaré vainqueur. Mais qui le déclare vainqueur ?

La réponse est donnée aussi par la constitution dans son article 163 dans son aliéna 2 qui énonce ceci : «  Le conseil constitutionnel veille, en outre à la régularité des opérations de référendum, d’élection du président de la république et d’élections législatives. Il proclame les résultats ».

Ayant défini avec précision le pouvoir du conseil constitutionnel dans la surveillance, le contrôle, la vérification du processus électoral, la constitution lui a accordé aussi le pouvoir de proclamer les résultats.

Chaque juriste sait que toute requête, pour être acceptée par une juridiction, doit respecter aussi la forme ou la procédure que le fond. Une fois ces deux conditions remplies, la juridiction peut statuer.

Une question se pose par elle-même. Le conseil constitutionnel a-t-il veillé, comme le stipule la constitution à la régularité de l’élection du président de la république ? Jusqu’à preuve du contraire, la réponse est non, car ce pouvoir a été usurpé par la soi-disant commission politique de surveillance des élections dépendante du pouvoir exécutif et dont la création n’est dictée par aucun texte de loi.

Comme le conseil constitutionnel n’a pas veillé à la régularité du scrutin, il est dans son pouvoir de déclarer nuls et non avenus ses résultats. Or, le conseil constitutionnel n’a rien fait et a accepté le fait accompli.

Pire encore, la constitution lui a accordé le pouvoir de proclamer les résultats. Or, il ne l’a pas fait non plus. C’est le ministre de l’intérieur, en violation de cet article de la constitution qui a proclamé en premier les résultats. Le conseil constitutionnel n’a fait que valider les données du pouvoir exécutif. Il n’a pas annulé le processus pour violation de la loi, il a validé la violation de la constitution.

Là, se pose la question suivante : d’où proviennent les chiffres et les taux annoncés par le ministre de l’intérieur ? A-t-il le droit de les avoir ? La réponse est donnée par les articles de la loi électorale.

L’article 165 de la loi électorale stipule, dans son aliéna 5 que la commission électorale de la wilaya « transmet aussitôt (à la fin de ses travaux) les procès-verbaux correspondants, sous plis scellés au conseil constitutionnel. »

Cet article est aussi clair. Les commissions électorales de wilaya envoient leurs procès-verbaux exclusivement au conseil constitutionnel et sous plis scellés. D’où le ministre de l’intérieur a obtenu les résultats qu’il a proclamés ? Il y a non respect de la procédure et le processus aurait dû être annulé par le conseil constitutionnel qui a le pouvoir de proclamer les résultats de l’élection présidentielle au plus tard  10 jours après avoir reçu les procès-verbaux des commissions électorales de wilaya en vertu de l’article 167 de la loi électorale.

Or, le conseil constitutionnel n’a pas exercé son pouvoir octroyé aussi bien par l’article 163 de la constitution que les articles 165 et 167 de la loi électorale.

La procédure de proclamation des résultats a été violée, les résultats sont nuls de droit. Le communiqué laconique du conseil constitutionnel ne donne pas les résultats définitifs de l’élection présidentielle, au niveau national et au niveau de chaque wilaya et pourquoi pas au niveau de chaque commune et de chaque bureau de vote, mais confirme et valide les chiffres avancés par le ministre de l’intérieur avec des rectificatifs mineurs pour prouver qu’il a étudié les résultats, alors qu’il n’a apporté aucune preuve de cela.

A titre d’exemple, quand les procès-verbaux de chaque commission électorale de wilaya sont-ils arrivés au conseil constitutionnel ? Par quelle voie ? Le jeudi et vendredi étant journées fériées, la poste commence à travailler le samedi. Quand le courrier de la wilaya de Tamanrasset est arrivé au conseil constitutionnel pour prendre un seul exemple.

A titre de rappel, les commissions électorales de wilaya sont composées d’un président désigné par le ministre de la justice ayant le grade de conseiller, d’un vice-président et de deux assistants désignés par le wali parmi les électeurs de la wilaya….en vertu de l’article 88 de la loi électorale.

Dans les faits, la presse n’a jamais rapporté un fait relatif à ces commissions et leurs travaux. Ont-elles été installées ? Etaient-elles opérationnelles ? C’est au conseil constitutionnel de répondre.

Tenant compte du non respect de la procédure de contrôle de la régularité de l’élection présidentielle et de la proclamation des résultats, c’est-à-dire de la violation de l’article 163 de la constitution et des articles 165 et 167 de la loi électorale, les résultats proclamés sont nuls.

De là découle la conclusion finale : Bouteflika n’est pas élu, mais désigné. C’est un usurpateur du pouvoir. Tel a été le cas lors des deux premiers mandats. Prêter serment est une tartufferie de plus.

Maamar Boudersa
19 avril 2009

Comments are closed.

Exit mobile version