Je n'ai malheureusement pas le talent d'un chroniqueur sportif, mais je ne peux pas ne pas réagir au petit jeu odieux  de M. Elkabbache, avec ses  insinuations venimeuses distillées tout au long de son émission "Spéciale Europe1" de ce matin du 10 Juillet, contre le grand champion Zineddine Zidane. Interrompant souvent ses invités de marque, dont M. Delanoë, le Maire de Paris ou  M. Thieriez Président de la Fédération française de football qui défendaient Zidane, – et c'est tout à leur honneur – M. Elkabbache n'a pas cessé de rappeler qu'il s'agissait tout de même d'une "faute" de Zidane et que moralement, cette "faute" risquait de créer un mauvais précédent sur les terrains sportifs, etc. etc.

Comme si M.Elkabbache s'était senti subitement ce matin, dans les habits d'un apôtre de la morale et de la "non violence"; dans la tunique d'une espèce de nouveau Mahatma Gandi. Un Procureur des Assises eût peut-être prononcé un réquisitoire plus clément contre Zidane. Cela sentait la haine sournoise, la vraie, cette terrible haine ordinaire nourrie par certains "anciens petits blancs" issus eux,  des Décrets Crémieux, contre les "nouveaux petits blancs" – ou les blacks-blancs-beurs comme on dit aujourd'hui – surtout quand ils ont le tort de sentir le musulman ou l'arabe, le kabyle ou le noir.

C'est d'ailleurs sur ce registre de la haine raciste ordinaire qu'a dû se jouer hier soir, le regrettable épisode du coup de nerfs de Zidane, cet enfant des quartiers pauvres de Marseille qui sait, lui,  de quoi on parle, quand il s'agit des insultes et des rebuffades, des "sale arabe" et des "ratons" distribués comme de la mitraille, au moindre accroc ou même gratuitement souvent, par les émules des Le Pen, des de Villiers et autres Sarkozy.

Comme hier avec ce maudit Materazzi de l'équipe italienne dont le quotidien britannique "The Guardian" a rapporté ce matin qu'il aurait traité Zidane de "terroriste" pour l'avoir acculé au penalty. D'autres sources – comme M. Guy Roux – ont parlé d'insultes graves. Une chose est absolument certaine: l'insulte devait être suffisamment offensante pour ébranler le calme de Zidane et le faire revenir sur ses pas, après les échanges rugueux qu'il eût avec Materazzi. Dieu merci, le coup de tête de Zidane était balancé seulement – si je puis dire – à hauteur de la poitrine, autrement c'était le visage entier du joueur italien qui explosait, quand on connaît la force que dégage le joueur franco-algérien. De plus, qui peut garantir que la provocation n'était pas calculée? Et qui pourra reprocher à Zidane d'avoir fait passer son honneur d'homme avant les enjeux – quels qu'ils soient – d'un match, fut-il un match de Coupe du Monde ? Il n'est pas italien lui ! Il ne connaît rien au répertoire des échanges  orduriers mais sans suite virile qui ont souvent lieu dans les artères de Rome ou de Milan, de Naples ou de Turin…

"Tu insultes, tu encaisses, comme on dit dans la Casbah"  Materazzi a insulté. Il a encaissé. Un point c'est tout !

Il suffisait  d'ailleurs, d'entendre les hurlements hystériques des foules hier à l'issue du match, dans les rues des villes italiennes pour se convaincre de la haine charriée par les "Tifozzi" contre Zidane. Ils hurlaient comme une horde à la curée: "Zidane il a perdu ! Zidane il a perdu !", des cris entremêlés de quelques slogans néo-fascistes du genre "Forza Italia ! Forza Italia !" comme si cet homme, tout de talent, de courage et d'humilité qu'est Zidane représentait  à lui tout seul, le symbole de tous les complexes que traînait l'équipe italienne vis-à-vis de l'équipe de France !

Bah ! Soyons fair-play un moment et laissons à l'équipe nationale d'Italie, au demeurant très professionnelle, – reconnaissons-le – le temps de savourer sa victoire. Même si c'est par tirs aux buts, et même si les Bleus auront largement dominé. Cette équipe avait grandement besoin en effet, d'exorciser son complexe vis-à-vis de l'équipe de France et surtout,  de faire oublier, – ne serait-ce que l'espace d'une petite semaine d'euphorie – les inextricables affaires judiciaires en cours, que traîne le football italien comme une casserole, avec leur lot de matchs truqués, de détournements de fonds, d'escroqueries, de délits de dopage, et autres peccadilles de faux en écriture.

Mais revenons une dernière fois à cette vitrine opaque et fêlée de la "non violence" que ce cher M. Elkabbache tentait de nous vendre ce matin pour cracher son venin contre Zidane, en prenant bien soin de passer sous silence le fait qu'aucun média en France n'a fait quartier de ses critiques contre l'Equipe de France et son entraîneur M. Domenech; Qui aurait osé en effet, en ce début Juin  parier un seul kopeck sur l'accession de cette équipe au quart de finale seulement? Assurément pas l'"Europe1" de M. Elkabbache, qui hurlait encore plus fort que les autres cassandres ?

Bien entendu, comme il n'est pas correct de mélanger les sujets et les genres, je me réserve pour une autre occasion, pour suggérer à M. Elkabbache, – puisqu'il s'est institué homme de morale et de non violence – de condamner clairement la violence d'Etat qui s'abat depuis plus de deux semaines, au moyen des chars et des avions de l'armée israélienne, contre les populations civiles palestiniennes. Une violence d'Etat que sa station périphérique "Europe1" s'obstine toujours à qualifier d'"opérations militaires de tsahal contre des activistes palestiniens" (sic)  Il deviendra alors beaucoup plus crédible quand il abordera les questions de morale et celles de la non-violence.

Abdelkader Dehbi
10 juillet 2006

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