{magictabs} Presse::

Le Monde du 14 septembre 1995

Jean-Louis Debré interdit un livre dénonçant le pouvoir algérien.

Le ministère de l’Intérieur français justifiera la décision en qualifiant le livre de « véritable danger », car « il y a une tonalité anti-française sous-jacente, mais surtout un réquisitoire contre le régime algérien tellement violent qu’il peut être compris comme un appel à la haine. Sur le plan intérieur en Algérie, ce n’est à la limite pas notre problème. Mais ici, sur des publics susceptibles d’être sensibles à ce prosélytisme, cela peut entraîner des passages à l’acte propres à troubler sérieusement l’ordre public.

 


Libération du 14 septembre 1995

La place Beauvau [ministère français de l’Intérieur] se montre ouvertement partisane dans le conflit algérien.

 

La diffusion du Livre blanc a été interdite en France le 17 août 1995 par la Direction française des libertés publiques et des Affaires juridiques (DLPAJ) « en raison de l’appel à la haine qu’il contient, sa diffusion est susceptible d’avoir des incidences sur l’ordre public. Son admission sur notre territoire est inopportune.

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Décision d’interdiction::

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Communiqué de Hoggar::

 

Communiqué des Editions Hoggar au sujet de l’interdiction en France de la diffusion du Livre blanc

Les Éditions Hoggar

  • ont été consternées par la décision du Ministère français de l’intérieur du 17 août 1995, refusant l’importation du ‘livre blanc sur la répression en Algérie’ en France.
  • affirment que les raisons invoquées ne sont pas fondées. En effet, l’ouvrage n’appelle à aucune haine si ce n’est celle des tortionnaires et des commanditaires du génocide d’un peuple. Il ne menace en aucune manière l’ordre public en France.
  • regrettent une telle attitude qui considère le peuple français comme mineure, incapable de jugement.
  • tiennent à réitérer leur reconnaissance à tous ceux qui leur ont apportées leur soutien : éditeurs, journalistes et autres intellectuels et qui ont prouvé qu’il existe encore en France des hommes et des femmes qui, lorsqu’ils traitant de la question algérienne, savent garder leur lucidité.
  • constatent avec satisfaction que les articles parus dans la presse française, notamment dans le quotidien Le Monde du 14 septembre, et qui ont eu un large écho positif dans la presse suisse (notamment les documents de TSR/FR3 et du Nouveau Quotidien), et internationale ont soulevé un problème fondamental de liberté d’expression et engagé un débat sur la nécessité d’une information équilibrée.
  • regrettent cependant l’attitude de certains médias comme la chaîne de télévision France 2, qui au lieu de se tenir à une objectivité dans l’information, s’est livrée à une analyse partiale soutenue par des propos diffamatoires.

Les Éditions Hoggar apportent les clarifications suivantes :

  • l’auteur du livre blanc, le Comité algérien des militants libres de la dignité humaine et des droits de l’homme, est composé d’hommes et de femmes vivant en Algérie, de différentes sensibilités politiques ou sans appartenance politique aucune. Ils sont d’horizons professionnels divers : médecins, juristes, universitaires… Le comité n’a donc aucun lien organique avec le FIS.
  • contrairement à ce que certains veulent laisser entendre, l’intégralité du livre blanc a été réalisée en Algérie, dans des conditions difficiles, parfois périlleuses pour les membres du comité.
  • il est étonnant de constater avec quelle virulence, le livre blanc a été accusé de partialité, alors que personne n’a dit un mot au sujet des publications qui circulent depuis des mois en France et ailleurs, et dont le discours et des plus partiaux et haineux envers le peuple algérien. FIS de la haine de Rachid Boudjedra, De la barbarie en général et de l’intégrisme en particulier de Rachid Mimouni, Vivre traquée de Malika Boussouf, Une femme à Alger de Fériel Assima, Rebelle de Lounès Matoub et Une femme debout de Khalida Messaoudi sont des exemples probants.
  • les plus de mille noms cités dans le livre blanc se rapportent à des Algériens de tous bords. Il se fait que les témoignages de détenus ou de suppliciés de sensibilité islamiste sont majoritaires, mais ceci représente une réalité algérienne incontestable.
  • le comité est ouvert à tout témoignage sur les atteintes aux droits de l’homme sans exclusive, pourvu que le témoignage soit supporté par les éléments nécessaires à sa crédibilité.

[…]

Genève, le 19 septembre 1995

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Réactions::

Condamnation de l’interdiction par les editeurs français

François Gèze, La Découverte
Jean-Claude Guillebaud, Arlea
Jérôme Lindon, Editions de Minuit
Olivier Mongin, Esprit

11 septembre 1995

[Les éditeurs signataires du communiqué] s’élèvent vigoureusement contre l’interdiction de ce livre et demandent au Premier ministre de prendre les dispositions nécessaires pour permettre la diffusion de cet ouvrage dans notre pays. […] Parce que interdire un livre est un acte grave. […] Il s’agit sans conteste d’un livre partisan. Ses auteurs revendiquent la victoire électorale du FIS, [mais] la réalité des témoignages qu’il produit ne semble pas contestable. […] Les témoignages et les ouvrages dénonçant les exactions et les violences islamistes en Algérie sont très largement diffusés, et n’ont fait — à juste titre — l’objet d’aucune restriction de la part du gouvernement.

Dès lors que son contenu n’enfreint aucune des lois en vigueur, il n’est pas acceptable, au nom de la liberté d’expression garantie par la Constitution, que ces témoignages ne puissent être portés à la connaissance du public français. […] A l’heure où notre pays est atteint par des attentats terroristes inacceptables attribués à des extrémistes islamistes, l’interdiction d’un livre dénonçant les excès tout aussi inacceptables de la répression en Algérie irait manifestement à l’encontre des déclarations de neutralité dans le conflit algérien exprimées à plusieurs reprises par le président de la République.

Extraits publiés dans Le Monde, Libération et Le Figaro du 14 septembre 1995.

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