« Les grands meurent, mais c’est l’élément terrien seul qui se disloque et retourne à son origine »

Une larme sur le savant encyclopédique, notre éminent professeur, le Docteur El-Hachemi Tidjani
(1918-2002), Président de l’Association «El-Qiyam» (Les Valeurs), premier Mouvement Islamique après l’indépendance, en souvenir de sa disparition.

Mohamed Mustapha HABES : Genève/ Suisse

Avec le début de la nouvelle rentrée scolaire et sociale, ces jours-ci, occupé que j’étais pendant des heures à fouiller dans ma petite bibliothèque éparpillée ici et là, en quête de quelques références, j’ai croisé du regard des coupures de journaux très anciens, et j’ai trouvé un de mes articles que j’avais publié il y a une vingtaine d’années sous le titre : «Une larme sur le savant encyclopédique et professeur El-Hachemi Tidjani» (1)
Un texte écrit à l’occasion du décès de notre éminent Professeur – qu’Allah le comble de Sa miséricorde – le président de l’Association historique « El Qiyam» (Les Valeurs) et président du conseil scientifique à l’Institut des fondements de la religion (Usul-Eddine), dans les années 1990.
Et me voici revenant au sujet dans le dessein de propager le bien surtout dans l’intérêt de ceux qui désirent connaître de près l’itinéraire de cet homme illustre, au sein des générations nouvelles.
J’avais écrit à l’époque, non sans amertume: «Le trépas a causé la disparition d’un des symboles du travail islamique, c’est en vérité, l’une des étoiles de l’Originalité (Al-ASSALA), qui s’est effacée du ciel du monde musulman : c’est le savant encyclopédique le Docteur El-Hachemi Tidjani, qui a répondu à l’appel du très haut, un dimanche (7-7-2002) pour rejoindre la caravane bénie des savants et martyrs de la communauté (l’Oumma).
Et ces hommes illustres qui ont laissé un énorme vide qu’il sera assez difficile de combler en ces temps difficiles où les forces de la médiocrité, de l’occidentalisation, et du travail de sape, s’attellent pour combattre le bien et les hommes droits, et vider la patrie du million et demi de martyrs de leurs bonnes œuvres.

La mort des grands hommes est en vérité une vie pour leurs communautés
L’heure qu’Allah a prescrite est venue pour prendre notre professeur sans que je puisse le voir depuis presqu’une décennie. Lui qui a tant rêvé d’un printemps du monde non seulement arabe, mais aussi musulman un jour au cours de sa vie !! Son prédécesseur Cheikh Bachir El-Ibrahimi, a dit : « La mort des hommes illustres est considérée comme une vie pour leurs communautés. Si cela se fera en terre d’exil, ces communautés redoubleront d’honneur, si c’est la conséquence d’injustices subies, alors elles augmenteront de prestige, et si c’est pour le bien de leurs patries, elles seront auréolées des deux qualités.
S’il y’a en plus usurpation de la fierté et de la liberté, il se verra auréolé, et ses qualités accomplies ».
De mon côté, je me suis adressé à son âme en disant : « que la patrie endeuillée soit consolée, Ô savant de l’Algérie ! Que les cœurs blessés suite à cette perte soient guéris ! La récompense que tu auras dans ce monde, c’est la haute renommée et un précieux don de la part du Très Haut !
Tes étudiants ne pourront jamais te rendre les grands services que tu nous as légués et la Oumma ne pourra jamais assez te récompenser. Cette Oumma pour laquelle tu as tracé le noble chemin de l’honneur et montré les lois de noble sacrifice, tirant exemple des martyrs de la révolution pour la libération bénie ; vous lui avez appris cette grande leçon de persévérance et de rigidité, de grandeur d’âme, malgré les adversités et les douleurs !
Vous voilà ainsi que vos amis qui nous ont déjà quitté, en nous apprenant comment meurent les lions de faim et suite aux injustices subies, tout en refusant de goûter à l’amertume du déni comme nous enseigne le sage proverbe amazigh : « Anarraz wa la neknou » ! (On peut nous casser et briser mais jamais nous abaisser et nous humilier) !
IL a lutté contre le colonialisme français sous toutes ses formes, refusant son enrôlement forcé dans les rangs de l’armée française.
Professeur Hachemi Tidjani a combattu le colonialisme français sous toutes ses formes. Il fut un militant farouche de la libération de l’Algérie.
IL s’est cloitré en 1938 pendant une année entière dans une mosquée à Rabat au Maroc, refusant d’être enrôlé dans les rangs de l’armée française après l’avènement de la Seconde Guerre mondiale.
IL rejoignit le Comité Central du F.L.N dès sa création, et occupé la fonction de journaliste au sein de la radio « La voix de l’Algérie », devenant responsable de la section de langue française en son sein et ce jusqu’à l’indépendance de l’Algérie en 1962.
Le Docteur Hachemi Tidjani a occupé de nombreuses hautes fonctions au Ministère de l’Agriculture, des Affaires de l’interprétariat, et au Ministère des affaires religieuses.
IL a été promu Directeur de l’institut National Agronomique d’El-Harrach près d’Alger.
J’ai insisté ici sur ces qualités qui caractérisaient notre éminent professeur, car le destin nous a liés au temps où j’étais avec des étudiants dans les années 1980-1990 du siècle passé, en travaillant à rassembler en vidéos et audio les œuvres historiques de l’Association des Oulémas Algériens par le biais de ses hommes illustres encore en vie, des témoignages de vive voix.
Nous avons eu avant lui de riches entretiens avec l’avocat Hamza Boukoucha (2), le Cheikh Abderrahmane Chibane, le Cheikh écrivain Mohammad Salah Ramadhan, le Cheikh Ibrahim Mezhoudi, ancien ambassadeur d’Algérie en Égypte, et Président d’honneur de l’Association des Oulémas et Grand imam à la mosquée El-Rahma d’Alger dans les années 1980-99.
Nous avons rendu visite à l’époque, au Dr Tidjani chez lui au quartier Debussy à Alger-Centre, non loin du domicile de mes grands-parents, et enregistré un long entretien télévisé avec lui qui a duré plus de 3 heures.
Il a commencé, en premier, à nous reprocher notre retard car il fallait arriver une demi-heure avant le rendez-vous prévu. Nous lui avons dit de jeter un coup d’œil depuis son balcon pour voir l’embouteillage du boulevard, il s’est alors calmé.
Il nous a surtout raconté qu’il a vécu des moments extraordinaires et compris le sens exact du verset de la Sourate Louqman, verset 34: « Et personne ne sait dans quelle terre il mourra », eu égard à ses nombreux voyages à travers le monde.

Introduit en Palestine par erreur en 1948, avec la première vague d’immigrés juifs français sans le savoir.
Il nous a raconté entre autres, que le destin l’a dirigé vers plusieurs pays du monde pendant l’ère coloniale et même jusqu’en Palestine, s’en en avoir l’intention! Il a en effet entamé un voyage en 1948 de Marseille vers l’Egypte sur un bateau qui transportait la première vague de juifs français immigrant vers la Palestine via l’Egypte.
Le bateau en question se divisait en deux étages : l’étage du haut, réservé aux Arabes se dirigeant vers l’Egypte, et l’étage d’en bas, réservé aux juifs sans que les Arabes le sachent et le Dr Tidjani en premier.
Lorsque le bateau accosta au port d’Alexandrie, notre docteur était plongé dans un profond sommeil étant très fatigué. Les Egyptiens ne l’ont pas réveillé pour descendre en Égypte, et dès que le bateau a poursuivi son chemin vers la Palestine, les juifs sont monté vers l’étage du haut et il s’est retrouvé au milieu de gens en euphorie, chantant et dansant, heureux qu’ils étaient de regagner « la terre promise » c’est-à-dire Israël.
Dr Tidjani a posé la question à l’un des passagers : « Où sommes-nous »? On lui a répondu qu’après quelques heures, le bateau accostera sur la nouvelle terre hébraïque. C’est alors qu’il a compris et les dangers qu’il pourrait rencontrer s’il soufflait un seul mot de ses origines et ses intentions. Mais Allah Tout Puissant l’a protégé jusqu’à ce qu’il descende du bateau et prenne un autre chemin pour enfin revenir après quelques jours sain et sauf en Égypte.

Savoir-faire et modestie : qualités que nous avions remarquées à l’occasion de la fête d’adieu de l’ambassadeur d’Allemagne en Algérie, le Dr Mourad Hoffmann.
J’avais rencontré le Cheikh Hachemi Tidjani maintes fois au cours de conférences. Nous observions aussi la prière collective en fin de semaine, à la mosquée Omar Ibn al-Khattab au quartier du Plateau proche de chez mes grands-parents, pas loin du ministère de la culture, rue Didouche Mourad. Notre dernière rencontre eut lieu à la fin des années 1990, à l’occasion des festivités d’adieu de l’ambassadeur d’Allemagne en Algérie le Docteur Mourad Hoffmann (1931-2020), au Ministère des affaires religieuses. C’était notre grand professeur, le défunt Abdelwahab Hammouda, alors secrétaire général au ministère, qui animait la rencontre. Je me rappelle de ces quelques mots qu’il a prononcés en accueillant l’ambassadeur : « Votre Excellence, voilà l’Algérie libre et indépendante avec ses jeunes et ses vieux qui vous accueille » ! Il voulait insinuer par le qualificatif de « vieux », le Dr Tidjani, et par celui de « jeune » l’étudiant et le plus jeune de ceux qui ont assisté à cette célébration, à savoir moi-même.
Le Dr Tidjani fut le premier intervenant, usant d’une langue française très raffinée, ce qui a énormément plu à ceux qui l’avaient connu à la mosquée d’El-Biar, au centre de la Capitale, et apprécié ses prêches d’une verve et d’une éloquence forçant l’admiration, dans une langue arabe classique très riche et limpide.
J’avais cité cet événement au Dr Hoffmann lors de notre entretien en 2001 à la conférence des « Nouveaux convertis » en Suisse. Il s’en est souvenu au détail près, en me disant : « A l’époque, tu étais un enfant plein de grâce, mais aujourd’hui, ta tête chauve te donne l’allure d’un intellectuel de haut niveau qui ne cache pas son chagrin pour la disparition du vrai grand intellectuel que fut le Docteur Tidjani a l’âge d’or de ses dons intellectuels les meilleurs. »
Pour ceux qui ne le savent pas, Cheikh Tidjani fut un sportif de premier plan, de par la force de ses muscles et son intellect. Il s’adonnait à la boxe, et était parmi les vétérans de ce noble art comme aimait à le répéter notre professeur Abdelwahab Hammouda en maintes occasions.

Il est demeuré fier et honorable malgré la politique de marginalisation et d’exclusion dont il fut victime au cours de sa vie ; il ne s’est pas abaissé devant l’apanage des biens de ce monde et les hautes fonctions du pouvoir.
L’Algérie profonde a célébré sa mémoire comme étant un de ses rares éléments, un de ces homme caractérisés par la modestie, la culture, des principes d’éthique immuables, le sens de la noble mission, ainsi que la fermeté dans l’engagement : ce fut le cas de notre cher disparu, le savant Cheikh Hachemi Tidjani, considéré comme un des rares savants engagés dans le droit chemin, côte à côte avec le peuple algérien dans le meilleur comme dans les heures difficiles, par sa pensée, ses écrits et ses prises de position.
Malgré la politique de marginalisation et d’exclusion dont il fut victime au cours de sa vie, il ne s’est pas plié au pouvoir des intérêts mondains ni aux postes et fonctions de l’Etat.
Une longue vie florissante vouée au service de l’Islam, la langue arabe et l’Algérie. Il a eu l’honneur de présider la première association islamique après que le colonialisme usurpateur français a quitté la terre de l’Algérie.
C’est l’association « El Qiyam» (Les Valeurs) qui a constitué le noyau du premier mouvement islamique d’après l’indépendance nationale. Le mérite de sa fondation revient au professeur Tidjani ainsi qu’une élite d’intellectuels fidèles nationalistes et quelques hommes issus de l’Association des Oulémas Musulmans au tout début des années 1960, c’est-à-dire tout de suite après l’indépendance de l’Algérie; comme le Docteur Zoheir Ihdaden (1929-2018), le professeur Chérif Kassar, l’avocat Hamza Boukoucha (1907-1994), l’écrivain et Cheikh Abdellatif Soltani (1902-1984), l’auteur du livre Siham Al-Islam et le Mazdéisme est à l’origine du Socialisme, œuvres qui lui ont coûté sa vie, sans oublier le Cheikh Omar Larbaoui (1907-1984), l’imam Mosbah Hwidhak, le Cheikh Mohammad Kheyreddine (1902-1993), le Cheikh et poète Ahmad Sahnoun (1907-2003) président de la Ligue de la Prédication Islamique – qu’Allah les comble de Sa Rahma – le professeur Ammar Talbi, ancien Recteur de l’Université des Sciences Islamiques Émir AbdelKader à Constantine qui a écrit une monumentale œuvre consacrée à Ibn Badis, l’écrivain Lakhal Chourfa (1925-2015 ) surnommé le Sayyid Qotb algérien, le Dr Abbassi Madani (1931-2019) professeur à l’Université de Bouzaréah, le professeur Abdelwahab Hammouda (1939-2017) Secrétaire Général au Ministère des affaires religieuses, le Moudjahid Ahmad Bouda (1907-1992), le penseur Rachid Ben Aïssa, élève de Malek Bennabi, et plusieurs autres.

En créant l’association Al-Qiyyam, et la revue Humanisme Musulman, il avait jeté une pierre à la figure des visées laïques, occidentalisantes françaises.
Le Docteur Tidjani a enrichi la Bibliothèque arabo-musulmane avec ses recherches et était un écrivain intransigeant ne faiblissant jamais devant les adversités. Il a fondé la revue Humanisme Musulman, voix de l’association Al-Qiyyam, en arabe التّهذيب الإسلامي , et en français. Cette revue, qui a eu le mérite de lutter contre l’invasion laïque et l’occidentalisation, a pris en considération ses prises de positions courageuses à travers son combat pour défendre l’identité arabo-musulmane du peuple algérien, en faisant face aux efforts de francisation et d’occidentalisation par le travail de sape de nombre de propagandistes au service du colonialisme à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Algérie.
La revue d’Al-Qiyyam fut censurée après l’arrêt de l’association et l’incarcération de ses leaders ou leur mise en résidence surveillée en 1965, suite à son opposition aux arrestations extra-judiciaires au sein de la confrérie des Frères Musulmans Égyptiens et l’envoi d’une missive accusant la décision du tribunal militaire égyptien condamnant à mort lu martyr Sayyid Qotb (1906-1966), auteur du volumineux Tafsir (Exégèse) Fi Dhilal Al-Qur’an) (في ظلال القرآن) A l’ombre du Coran, d’injuste et de partiale (3).
La missive en question a été livrée à l’ambassadeur d’Egypte à Alger a l’intention des Services Généraux Égyptiens et au président Gamal Abdel Nasser le jour de l’arrestation de Sayyid Qotb le 9 août 1965. Il fut condamné ainsi que sept autres Frères musulmans en 1966 et assassiné à l’aube du lundi 29 août 1966 (13 djoumada 1 1386 de l’hégire).

L’une des causes apparentes de la dissolution d’Al-Qiyyam :
Dix numéros avaient étés édités déjà de la revue d’Al-Qiyyam dans les deux langues arabe et français.
Dix numéros de التهذيب الإسلامي et onze numéros de l’édition en français Humanisme Musulman.
Le numéro 12 était corrigé et prêt à être imprimé, lorsque l’imprimerie de l’Armée a mis au courant le Dr Tidjani qu’elle a reçu ordre d’arrêter l’impression de cette revue et sa diffusion.
Le motif était probablement une réponse à Bouteflika (n°2 du pouvoir à l’époque), qui avait dit : « Un groupe qui s’érige en fervent défenseur de l’Islam, mais en vérité, ses membres utilisent la religion musulmane comme un étendard pour des visées politiques, et n’ont pas droit à faire de la politique ! »
Il ne faut pas oublier de remercier à l’occasion ceux qui ont veillé à la sortie des revues en question comme le disait le Dr Tidjani au cours d’une rencontre. Il évoqua son ami le regretté Abbas Tourki, né en 1901 à Médéa, « qui a été très généreux en aidant les écrivains débutants pour les encourager à éditer leurs ouvrages, et les diffuser, comme le brillant penseur Malek Bennabi (1905-1973), et son ami Ismail al-Arabi (1919-1997) ».
Le professeur Tidjani a imploré la clémence pour le regretté Abbas Tourki, au jour de son décès le 26 Mars 1983, a Tébessa à l’occasion du 26e anniversaire du décès du Martyr Cheikh Larbi Tebessi (1891-1957), disant : « Ce croyant sincère et dévoué, généreux, a combattu financièrement et à travers ses efforts et son zèle pour élever tout haut la cause d’Allah »
Il avait déjà dépensé beaucoup d’argent au profit du P.P.A avant et après sa nouvelle dénomination en Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques ou Parti du Manifeste, et surtout pour l’Association des Oulémas Algériens, de ses écoles musulmanes indépendantes, tout comme sa participation financière à la révolution pour la libération comme l’avait dit le Dr Hachemi Tidjani a plusieurs reprises en évoquant ce bienfaiteur anonyme.

Son rôle illuminateur d’avant-garde pour faire face au déracinement de civilisation et la poussée occidentalisante, afin de servir l’Islam, la langue arabe, et l’Algérie.
Le Dr El-Hachemi Tidjani fut élevé au Palais Royal du royaume du Maroc avec le prince Hassan II (1929-1999), où son père a exercé la fonction de conseiller du roi Mohamed V (1909-1961). Il avait habité au Maroc à l’époque où l’Algérie était sous le joug du colonialisme français.
Le père du Dr Tidjani était doté d’une double culture, et fut proche du roi Mohamed V, Allal El-Fassi (1910-1974), Abdelkrim El-Khettabi (1882-1963), et bien d’autres leaders du royaume chérifien frère. Qu’Allah les comble tous de Sa vaste miséricorde.
Quelques années après l’indépendance de l’Algérie, l’Association Al-Qiyyam, a été dissoute en 1966, et c’est le professeur Tidjani qui la présidait. C’est alors que sévit l’emprisonnement d’une partie des éléments de l’association, une deuxième partie avait été contrainte à l’exil, et une troisième mise en résidence surveillée, bien que le président de l’époque était convaincu que l’association avait un caractère éducatif, car issue de la fameuse Association des Oulémas Algériens, et sachant que parmi les buts de Al-Qiyyam, selon ses statuts, sa mission était de « veiller à propager une prise de conscience musulmane par le biais de la revue التهذيب الإسلام / Humanisme Musulman, l’organisation de cercles d’études et conférences afin d’approfondir l’indépendance nationale, contrer le déracinement et l’aliénation de civilisation, la ruée occidentalisante, facteurs qui menaçaient la société de l’intérieur comme de l’extérieur, notant que l’Algérie sortait de l’ère coloniale d’une date récente.
Ces nobles buts que l’association œuvrait à mettre en pratique étaient un facteur majeur pour expliquer le contrôle sévère de l’association pour enfin la liquider complètement.

Le Docteur Tidjani a poursuivi ses activités intellectuelles et éducatives :
En plus de sa fonction de professeur d’université, et bien avant, il exerça la fonction de président du secrétariat général de l’Université, la présidence du conseil scientifique de l’institut des fondements de la religion (Usul Al-Din).
A l’Université d’Alger il dirige les mémoires de ses étudiants, maîtrisant plusieurs langues étrangères comme le français, l’anglais, l’allemand et même l’hébreu !
Il aimait nous dire qu’il était sur le point de maîtriser oralement et par écrit la langue hébraïque.
Sa maîtrise des langues lui a donné la capacité à traduire le livre de Chakib Arslân (1869-1946) intitulé Cause du déclin des musulmans et du progrès d’autres peuples.
لماذا تأخر المسلمون ولماذا تقدم غيرهم
Il a soutenu à Paris une thèse sous le titre De l’abrogeant et de l’abrogé, édité sous le titre Le rite de l’abrogation dans l’exégèse du Coran et ses visées sociétales.
On lui doit aussi Histoire générale du sport ou encore La Mecque et Médine dans les temps présents de l’écrivain d’origine daghestanaise Haïdar Bammate (1889-1965), résidant en France, ami de notre Cheikh Mahmoud Bouzouzou (1918-2007) qui traduisait ses articles en arabe et les publiait dans la revue du Centre islamique de Genève Al-Mouslimoun, en plus d’articles en arabe et dans plusieurs autres langues.
Il avait requis cette capacité de traduire et de rédiger des textes en plus de ses études supérieures de père en fils. Car n’oublions pas que son père Ahmad Tidjani [1815-1981] a fait la traduction intégrale du sens des versets coraniques de l’arabe au français en collaboration avec le juriste français Octave Pesle (1889-1947).
Il signait en outre ses articles dans le journal Al-Bassair en 1936 du nom de Abul Abbas Ahmad ibn El-Hachemi, comme le cite notre professeur Al-Hadi Hassani dans un article paru dans le journal Al-Chourouk sous le titre: « Ahmad Tidjani ? (12/01/2017)

Le prédicateur et écrivain dévoué et sincère, n’écrit qu’à travers une larme et un soupir pour exprimer son chagrin et les douleurs dont souffre sa génération et son peuple.
Un grand homme de la trempe du Dr El-Tidjani, caractérisé par sa rigueur, et son immuabilité dans ses principes directeurs, méritait bien plus qu’un bon nombre de personnes, propulsées dans de hautes fonctions à l’échelle des autorités, afin que la OUMMA tire un grand profit moral de leur génie. Cette situation négative a poussé l’écrivain, le prédicateur, l’homme de lettres algérien intègre et honorable à n’écrire qu’à travers une larme et un soupir pour exprimer ses douleurs et les amertumes dont souffre sa génération et son peuple. C’est pourquoi le ton du désespoir et de la frustration a pris le devant dans la période post-coloniale (après l’indépendance), chez un grand nombre de nos écrivains engagés car la fidélité et la reconnaissance sont devenues une denrée rare chez la plupart des humains ! Et le meilleur des fidèles est bien le reconnaissant pour les morts et les nobles principes, pour lesquels ils ont donné leur vie pour que vive la Communauté du bien et du juste et qu’elle progresse, car l’oubli et l’ingratitude approfondit le fossé entre les morts et les vivants qui ne reconnaissent pas leurs mérite, sachant que la concrétisation de l’expérience des hommes droits est un critère de vérité par lequel doivent être mesurées les grandes œuvres des hommes et des femmes, ainsi que leur prise de positions honorables.
Notre vénère Prophète (S.A.A.W.S) nous a appris à faire l’éloge à ceux qui le méritent, sans outre-mesure, ni démesure avilissante ; car les hommes ne valent que par leur essence: les œuvres et les qualités éthiques.
En effet, lorsque nous citons l’œuvre de l’ouvrier, nous ne voulons nullement parler du terme mineur utilisé par les juristes (fuqaha’), mais nous voulons parler tout simplement de ces œuvres utiles dans la globalité, œuvres qui contiennent les éléments essentiels comme l’eau et la lumière, éléments comprenant la nourriture, la force et la vie des communautés et qui comme le facteur temps, avec tout ce qu’il y a comme continuité et extension.
Lorsqu’arrive le jour où nos institutions pédagogiques se souviennent des hommes de science et de mérite, pour bien les honorer, en leur rendant justice – je tiens à mentionner cela maintenant – car un homme de cette catégorie reste dans l’indifférence totale des moyens d’information en Algérie jusqu’à aujourd’hui, où la ministre de la culture Mme Khalida Toumi, porte-parole du gouvernement, a essayé de camoufler – au jour du décès plus précisément – l’évènement par sa joie quand le chanteur Cheb-Khaled est arrivé en Algérie, qualifié de « Géant de l’Art », « d’exemple » pour la jeunesse algérienne qui a du succès » selon ses propos.
Elle présenta le chanteur comme une image de marque et un exemple à suivre. J’avais écrit ce jour-là une colonne dans le journal londonien Azzaman, et elle a été reprise par le journal algérien Al-Fadjr sous le titre « Ainsi se perdent les justes critères dans mon pays, mais ceux à qui tu t’adresses ne sont pas vivants ».
“هكذا تقلب الموازين في بلادي.. ولكن لا حياة لمن تنادي” .. !!

C’est ainsi que les principes immuables de la OUMMA sont poignardés dans le dos ! Alors qu’il fallait – au minimum – que les établissements éducatifs et les institutions culturelles s’honorent et adoptent le nom de l’illustre et cher regretté le Dr El-Hachemi Tidjani. Je ne sais pas à ce jour si une institution de la République algérienne porte le nom du défunt Dr El-Hachemi Tidjani.

Nous sommes avec vous dans l’attente d’honorer l’esprit du défunt et les sacrifices du maître et l’éducateur des générations.
Nous attendons à chaque fin d’année scolaire et sociale, lorsque commencent les célébrations d’honneur et le choix de nouveaux noms pour des institutions pédagogiques, universitaires, culturelles et autres, ainsi que pour les nouveaux diplômés dans diverses branches du savoir, qu’elles soient civiles, militaires, ou encore sportives.
Peut-être organisera-t-on une festivité pour honorer un des symboles de l’éducation et de la réforme à savoir, entre autres, notre brillant professeur Hachemi Tidjani en souhaitant du plus profond de mon cœur, que soit comblée cette grosse lacune vis-à-vis des savants de l’Algérie et ses symboles de la science et de la droiture à travers les générations.
En attendant la venue de ce jour, nous disons à notre cher défunt: « Repose dans la paix et la sérénité, les vers de poésies que ton compagnon de route Mohammad Laid Al-Khalifa (1904-1979) a écrits à l’occasion du décès du Cheikh Ibn-Badis (1889-1940), suffisent. Il avait dit si bien :
« Repose en paix et sérénité car le peuple après toi est mature et sage, il a tracé son chemin que tu lui a montré, bien guidé, et marche !
N’ai pas peur, ce que tu as légué comme héritage ne sera jamais perdu, car les héritiers de ton noble legs sont nombreux ! »
Nous nous adressons à toi Ô notre Cheikh vénérable !
Repose en paix! Salam à toi parmi les nobles martyrs, les hommes et femmes sincères !
Nous te rencontrerons dans le vaste paradis qu’Allah a réservé pour les pieux. Allah a dit la vérité en révélant :
« Ceux dont les anges reprennent l’âme – alors qu’ils sont bons – les anges leur disent: « Paix sur vous ! Entrez au paradis pour ce que vous faisiez!»[Sourate An-nahl, verset 32]
الَّذِينَ تَتَوَفَّاهُمُ الْمَلَائِكَةُ طَيِّبِينَ ۙ يَقُولُونَ سَلَامٌ عَلَيْكُمُ ادْخُلُوا الْجَنَّةَ بِمَا كُنتُمْ تَعْمَلُونَ)

Félicitations cher Professeur El-Hachemi, c’est Allah seul qui est dans la mesure de te donner la récompense que tu mérites, pour ce que tu as fait de bien à ceux que tu enseignais et encourageais.
Salam à toi parmi les premiers ainsi qu’aux derniers des pieux et nobles vertueux..
Salam à toi parmi les prédicateurs et enfin Salam à toi jusqu’à la fin des temps !
NOUS SOMMES À DIEU ET À LUI NOUS RETOURNONS !
إِنّا لله و إِنّا إليهِ راجِعون
M.M.H.

REFERENCES :
1. Notre article in ://elbassair.dz/21290
« دمعة على العالم الموسوعي والأستاذ الرباني، الدكتور الهاشمي التيجاني »

2- El-Hachemi Tidjani : Quelques titres de ses ouvrages : traduction du livre de Chakib Arslân (1869-1946) intitulé Cause du déclin des musulmans et du progrès d’autres peuples.
ترجمة كتاب: »لماذا تأخر المسلمون ولماذا تقدم غيرهم. » لشكيب أرسلان
– thèse sous le titre De l’abrogeant et de l’abrogé, édité sous le titre Le rite de l’abrogation dans l’exégèse du Coran et ses visées sociétales.
الناسخ والمنسوخ» والتي نشرت كتابا بعنوان: « مذهب النسخ في التفسير وأبعاده الاجتماعية»
On lui doit aussi Histoire générale du sport ou encore La Mecque et Médine dans les temps présents de l’écrivain d’origine daghestanaise Haïdar Bammate (1889-1965), ami de notre Cheikh Mahmoud Bouzouzou (1918-2007)
«و«التاريخ العام للرياضة البدنية» و« مكة والمدينة اليوم
In Le jeune Musulman Magasine, n°48, novembre/décembre 2022.

3- Hamza Boukoucha, ou Chennouf Hamza Boukoucha, est né le 19 octobre 1907, correspondant au 12 du mois de Ramadhan de l’année 1325 à Oued Souf (Sud Algérien). Il est décédé le 18 novembre 1994 à Alger. C’est un érudit (critique littéraire, poète, théologien, journaliste et homme de droit algérien) Voir notre interview avec lui / Audio.

4- Sayyid Qotb (1906-1966), Auteur du volumineux Exégèse Tefsir ( A l’ombre du Coran /في ظلال القرآن)
Fi Dhilal al-Qur’an est un commentaire du Coran, écrit entre 1951 et 1965 par l’Egyptien Sayyid Qutb, un leader au sein des Frères musulmans. Il a écrit la plupart des 30 volumes originaux alors qu’il était en prison à la suite d’une tentative d’assassinat du président égyptien Gamal Abdel Nasser en 1954

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