Les premiers écrits journalistiques de Bennabi sont des réponses à des articles parus dans la presse algérienne.

             Le premier, qui ne paraîtra que de nombreuses années plus tard, en 1991, est une réponse à l’article de Ferhat Abbas, « La France, c’est moi » dont la lecture lui provoqua un « choc ». L’article de ce dernier est paru le 23 février 1936 dans le journal l’Entente franco-musulmane[1].

            Le Cheikh Abdelhamid Ben Badis s’était insurgé contre cet article où dans sa réponse, parue en avril 1936 dans son journal Ech-Chihab, il écrit notamment « le peuple algérien n’est pas la France, ne peut être la France et ne veut pas être la France ». Estimant cette réponse insuffisante, Bennabi décide de répliquer à son tour. Il forge à cette occasion le néologisme d’« intellectomane » pour fustiger les faux intellectuels produits par l’école française qui se gargarisent plus de mots qu’ils ne se soucient de construire une lucide réflexion sur leur société. Le titre de son article est un condensé de sa réplique : Intellectuels-Intellectomanes. Le crépuscule des idoles. Nous remarquons que ce sous-titre dénote une forte influence de Nietzsche dont il emprunte l’intitulé d’un de ses plus fameux ouvrages. Bennabi envoie son article à Lamine Lamoudi, secrétaire général de l’Association des Oulémas musulmans algériens et directeur-fondateur du journal la Défense qui refuse sa publication arguant qu’il ne voulait pas briser la carrière politique de Ferhat Abbas.

             L’ironie du sort est que son premier article à être publié le fut le 6 juin 1948 dans Egalité-République algérienne de …Ferhat Abbas ; La langue arabe à l’Assemblée algérienne était une réponse courtoise et historique à un Européen d’Algérie qui contestait l’utilisation de la langue arabe, celui-ci voulait la cantonner à la liturgie religieuse ou à la poésie, dans les débats de cette institution créée par le statut de l’Algérie de 1947 et qui remplaçait les Délégations financières de sinistre mémoire. Bennabi rappelle que la langue arabe était le vecteur de découvertes scientifiques et de grandes réflexions philosophiques. Il est à remarquer que tout comme son premier article publié concernait la langue arabe, ses deux derniers traitaient aussi du même sujet, à savoir la langue arabe. En reprenant in extenso dans le premier des deux articles, Langue et Culture paru dans Révolution Africaine du 12 mai 1968, celui de 1948, il souligne la permanence des attaques contre la langue arabe menées cette fois-ci non pas par le colonialisme mais par ses élèves indigènes. Toujours dans Révolution africaine, son dernier article, les avatars de l’arabisation paru le 26 mai 1968, Bennabi montre comment l’enseignement de la langue arabe était bâclé et saboté par diverses coteries au sein du pouvoir. Ce n’est, au fond, que les conséquences de la trahison des idéaux et objectifs du Premier Novembre dont il date le début au congrès de la Soummam du 20 août 1956 et qu’il n’eut de cesse de dénoncer. Ces idéaux et objectifs se sont imposés aux hommes du Premier Novembre car portés alors par tout le peuple algérien conscient de son identité profonde. Ahmed Taleb qui fut ministre de Houari Boumediene durant tout son règne, occupant de 1965 à 1970 le portefeuille de l’éducation nationale qui comprenait à cette époque l’enseignement supérieur a, dans ses mémoires, été obligé de reconnaître que son chef lui avait intimé l’ordre de faire une « pause » dans l’arabisation de l’enseignement et ceci malgré un portrait très flatteur qu’il brossa de son responsable.

           Le coup d’état du 11 janvier 1992 fut l’occasion d’asséner un nouveau coup à la langue arabe où les nouveaux maîtres du pays avaient persuadé Mohamed Boudiaf de reporter sine die l’arabisation totale des institutions qui devait entrer en vigueur le 5 juillet 1992 à l’occasion du trentième anniversaire du recouvrement de l’indépendance de l’Algérie. La nouvelle mouture du régime inauguré en 1999 par Abdelaziz Bouteflika accentue la marginalisation de la langue arabe par une utilisation immodérée de la langue française dans l’enseignement et l’environnement public. Les bouffons à la manœuvre ne s’embarrassent d’aucune contradiction. Ils accusent la langue arabe de son retard sur l’évolution du monde alors qu’ils nous créent une langue artificielle à base de dialectes moulée dans des signes cabalistiques dont uniquement une partie relève de la préhistoire de notre région alors que l’autre fut forgée et que seuls des initiés connaissent. A l’évidence, cette langue artificielle n’est que la feuille de vigne de la langue française et de la marginalisation de la langue arabe.

            Dans sa décision de se lancer dans l’arène journalistique, Bennabi ne se soumettait jamais à la conjoncture mais apportait toujours une vision pénétrante à portée lointaine. Ses articles sont toujours d’actualité, pour peu qu’on sache les replacer dans le contexte nouveau. L’actualité est cette matière dont il se sert pour traiter des problèmes inhérents à notre société comme nous pourrons le constater dans les quelques exemples qui vont suivre.

            Le 10 février 1949, il publia dans la République algérienne une adresse à la conscience chrétienne dont il nous livre, dans ses mémoires, la grille de lecture : « …j’écrivis à Massignon et adressai un article intitulé « A la conscience chrétienne » simultanément à « La République Algérienne », où j’avais commencé une collaboration désintéressée l’été précédent, et à « Témoignage chrétien ». Mais cet organe de la conscience chrétienne me fit savoir par le truchement du Dr. Khaldi qu’il ne pouvait pas publier mon papier parce que ses lecteurs ne le comprendraient pas bien. Il me semble que s’il avait dit juste le contraire, il eût été presque dans la vérité. D’une part, je sais la peur maladive de l’Eglise de voir les chrétiens trop bien comprendre le fond du « problème musulman » et, d’autre part, un Appel signé d’un « indigène » mais où s’exprime assez correctement une pensée d’une certaine élévation, cela cadrerait très mal avec toute la thèse colonialiste sur « l’infériorité de l’indigène ».

              Devant la chape de plomb que l’Administration imposait en Algérie sur les mécanismes de sa domination sans partage, Bennabi, utilisant la tactique de Montesquieu dans ses Lettres persanes, abordait la situation algérienne en évoquant les problèmes en Egypte, en Tunisie ou au Maroc par exemple.

            Le 26 septembre 1952 paraît dans la République algérienne « La révolution agraire en Egypte » : « J’écrivis le premier article apologétique qui parut en Algérie sur la révolution égyptienne. Jusque-là, en effet, cette presse se contentait de publier les communiqués des agences étrangères. Et voici que « la République algérienne » publie un article infâme de R. Miette sur la réforme agraire entreprise par Néguib. Le nationalisme algérien, chez les dirigeants, est toujours partagé entre l’esprit de lourdeur et l’esprit de trahison. R. Miette a certainement écrit son article sous l’inspiration de l’Administration indisposée et de la grande colonisation épouvantée. Le coup est double : on veut ternir le prestige de l’homme par lequel la révolution égyptienne tourne les regards de l’Algérie musulmane et on veut discréditer le point capital de cette révolution : la réforme agraire. Néguib ignore la bombe atomique qu’il a lancée en Afrique du Nord où l’Administration a étouffé par tous les moyens les idées exposées dans « les Conditions de la renaissance », les voit maintenant comme parvenues à leur avènement avec la révolution égyptienne et où, de son côté, la haute colonisation redoute comme conséquence de tout cela de voir se poser le problème du sol. Je devine tout cela dans l’article de R. Miette, et -comme pour répondre d’un autre côté à la provocation policière-, je décide de répondre. Mon article fit sensation dans les milieux musulmans –non pas d’ailleurs tant par son côté technique que par son ton pro-néguibien- et dans les milieux européens. »

             Le souci constant de Bennabi est de forger notre lucidité dans l’analyse des évènements et de nous faire entrer dans les arcanes subtils de la lutte idéologique dont les meilleures tromperies font appel à nos défauts comme la suffisance et l’auto glorification ou en annihilant notre réflexion par nos sentiments.

Le 7 décembre 1952, l’armée française aidée par les ultras français du Maroc commettent un des plus grands massacres au Maroc où 400 musulmans sont tués à Casablanca. Le 13 février 1953, « le Jeune musulman » publie « De conscience à conscience » : « Les évènements de Casablanca ont signalé une fois de plus à l’opinion du monde la barbarie de l’administration française. Si bien que l’opinion française elle-même s’émeut parce que sans doute il fallait … sauver la face. Le « Comité France-Maghreb » est créé à Paris où, se doutant probablement que le nom de Massignon ne dupe plus personne, on donne le nom plus intact de Mauriac qui mène d’ailleurs le combat avec infiniment plus de loyauté que ne le put jamais le professeur du Collège de France. Khaldi et moi-même jugeons nécessaire de faire écho à l’appel de « France-Maghreb ».

            Sur l’affaire de la déposition du sultan du Maroc Mohamed ben Youcef le 20 août 1953 -cette date du 20 août fut choisie en 1955 par le chef de la wilaya II du Nord-Constantinois, Zighoud Youcef en hommage au sultan déchu, pour le lancement de la plus grande offensive des moudjahidine algériens contre le colonialisme français-, Bennabi remet à la République algérienne les 11 septembre et 2 octobre 1953, ainsi que le 14 mai 1954 trois articles dont il nous donnera la clé de compréhension sur la collusion entre la colonisabilité et le colonialisme dans un commentaire ajouté à la traduction en arabe du premier article intitulé l’Anti-islam et un autre dans ses Mémoires. Le premier commentaire se trouve dans le recueil des articles traduits en arabe « FI Mahab el Ma’araka » (Dans le souffle de la bataille).

             Il démontre comment la manipulation des sentiments populaires agit : « [Le colonialisme] a tout simplement confié l’affaire [de la déposition du sultan] à un dirigeant politique [ici Bennabi vise Ferhat Abbas]. Celui-ci a rédigé un article à ce sujet, publié exactement une semaine après mon article et dans le même journal –journal qu’il doit à l’argent du peuple- dont voici les extraits : « Ils sont libres, s’ils le veulent, d’expliquer cette affaire à notre peuple qui a parfois tendance à simplifier les choses, que celle-ci a trait à la race et à la religion. Quant à nous, nous rappelons que des personnes comme El Glaoui et El Kittani appartiennent eux aussi à leur race et à leur religion. »…ce dirigeant veut réduire tous les faits en simple conflit entre le Roi et El Glaoui et El Kittani. » Alors que Bennabi avait montré dans son article que la déposition du sultan était une manœuvre du colonialisme et que les dignitaires cités n’en sont que les suppôts. Continuant son commentaire : « Plus grave encore est lorsque nous avons essayé après la publication de cette réponse de publier notre article en langue arabe afin qu’il produise son effet de manière directe. Je l’ai donc envoyé au journal de l’Association des Ouléma à laquelle j’ai confié la mission de traduction et de publication. Cependant, il n’en fut rien car son système journalistique en langue arabe et française était à la disposition d’agents que nous connaissons et que nous avons voulu dénoncer dans notre discussion avec le Cheikh Larbi Tebessi en diverses occasions mais en vain, car son excellence le Cheikh malgré la noblesse de caractère que nous lui reconnaissons, ne comprenait pas le sens de cette forme de lutte idéologique, dût-elle être exprimée dans le style le plus clair. »

Le second commentaire démonte les mécanismes de la lutte idéologique qui fait appel à la confusion des phases historiques pour obscurcir les esprits. Au moment de la déposition du sultan marocain, l’Espagne était en délicatesse avec la France. Elle soutint donc le sultan et laisse faire les manifestations en sa faveur organisées par le représentant du sultan à Tétouan, chef-lieu du Maroc occupé par l’Espagne. Pour flétrir le soutien espagnol, aux yeux des musulmans, on fera appel à la mémoire de la grande figure de l’Emir Abdelkrim El Khettabi, le Lion du Rif, président du Comité de libération du Maghreb arabe, le vainqueur d’Anoual en juillet 1921 qui a écrasé les forces espagnoles occasionnant à l’Espagne sa plus grande défaite depuis son occupation par les armées napoléoniennes.

« Au lieu d’exploiter contre lui [le colonialisme français] la manifestation de Tétouan, on [la République algérienne et les dirigeants de l’UDMA] trouve plutôt là l’occasion de vitupérer contre l’Espagne…République algérienne annonce un article apologétique sur l’Emir Abdelkrim sur le prochain numéro d’ « Afrique-Orient » qui est une publication de la même maison. Comme il est évident qu’Abdelkrim symbolise la lutte contre l’Espagne, et qu’il sera certainement question dans l’article annoncé, on comprend à quelle opportunité précise répond cet article. »

Bennabi écrivait ses articles en français mais a toujours eu le souci que ses idées parviennent au lectorat en langue arabe avec un souci pédagogique rigoureux : « Je fais parvenir de temps en temps à El Bassaïr un article –le mien ou celui d’Azzouz- que je traduisais à dessein et auquel le cheikh El Ghassiri –une noble figure de jeune alem algérien- donne le dernier tour de main pour lui donner du lustre littéraire. Je suis étonné que la « culture arabe » qui se pratique en Algérie soit encore à ce point prisonnière des formes, des formes qui, d’ailleurs ne sont pas d’un effet esthétique heureux. Je voudrai (mais sans trop insister auprès du sympathique cheikh El Ghassiri que je ne veux pas choquer) que la correction ne touche pas à l’allure générale de ma phrase arabe qui est à dessein âpre, directe, convergente, c’est-à-dire condensant au maximum l’idée qu’elle exprime. Je voudrai que les lecteurs d’El Bassaïr goûtent à ce style dynamique. Mais le cheikh El Ghassiri mets plutôt les articles qu’on lui remet au goût du lecteur. C’est toute une formation à changer. »

            Lors de son installation au Caire à partir de 1956 et à Alger à partir de 1963, Bennabi fera face à un ennemi beaucoup plus redoutable que le colonialisme et son valet la colonisabilité ; il fera face à cette dernière se présentant seule mais au fond manipulée par le colonialisme. Malgré une arrogance apparente suscitée par les indépendances, elle est plus attachée qu’auparavant au colonialisme car il a plus de prises sur elle étant empêtrée dans ses manœuvres de domination sur les peuples et de la défense de la rente économique. Il nommera« l’impôt du 19 juin » le tribut à payer pour continuer à rester l’éveilleur des consciences et des intelligences des musulmans : « Quand j’écrivais sous le règne de Ben Bella, j’étais obligé pour introduire certaines idées dans le milieu algérien de les placer sous le parrainage du personnage. J’étais presque obligé de dire que c’était lui qui les avait pensées. C’était l’impôt dû au « zaïm » dans le domaine des idées dans un pays où l’on ne peut pas exprimer ses idées, même en payant cet impôt. D’ailleurs, je le payais aussi au Caire quand j’étais obligé de dire que toutes mes idées m’étaient inspirées par le « zaïm » des « « zaïms » : Nasser. Et aujourd’hui, je suis obligé dans chacun de mes articles que je publie en ce moment dans « Révolution africaine » de parler du 19 juin…Et même à ce prix, toutes les idées ne passent pas : chaque fois que la critique devient sérieuse, et par conséquent nécessaire et utile, elle est barrée… »

             Dès son retour en Algérie, il a fait l’expérience de la censure en collant de trop près au domaine que se sont réservés les responsables du pouvoir entre autres les manœuvres politiciennes avec le voisin marocain et comme nous l’évoquions plus haut sur l’historique de la révolution algérienne. On lui refuse par deux fois un article sur « les évènements algéro-marocains » de 1963 et un article en 1967 sur la déviation de la révolution algérienne qu’il avait pressenti dès 1956 alors qu’elle était en train de se réaliser : « … j’ai remis mon article « Retour aux sources » dans lequel j’attaquais la pièce maîtresse de l’œuvre de sape du colonialisme contre la Révolution : la ZAA [Zone Autonome d’Alger] et sa première conséquence, le Congrès de la Soummam. [Le lendemain] Khaldi vient me voir avec le numéro d’El Moudjahid de ce matin qui annonce froidement qu’une réunion s’est tenue hier qui a décidé de célébrer cette année l’anniversaire du Congrès de la Soummam. »

Bennabi continue néanmoins d’utiliser Révolution africaine pour déployer une pensée en action touchant tous les aspects de la société.

            La cessation de la parution périodique de ses articles dans cette revue marque pratiquement la fin de sa présence dans la presse algérienne.

     Le 21 décembre Bennabi note dans ses Mémoires : « Ce matin, Khaldi m’a envoyé sa voiture qui m’a emmené au Bureau politique où nous avons eu notre premier entretien avec Kaïd Ahmed [qui venait d’être nommé « responsable de l’appareil du parti » et à ce titre directeur de Révolution africaine].Visiblement, ce dernier voulait qu’on prenne la direction de « Révolution africaine », en nous faisant sentir les défaillances de sa direction actuelle. Cette méthode indirecte de me proposer quelque chose me laisse froid. »

Et au 30 mai 1968 : « Je sors d’un entretien avec le responsable du parti…Sur le plan immédiat, il est clair que Kaïd Ahmed travaille à son insu à mettre fin à ma collaboration à « Révolution africaine » pour deux raisons qui lui échappent totalement :

  1. Mes articles dans RA dérangent plus que le responsable du Parti ne l’imagine les services sous obédience sioniste
  2. Surtout dans la phase actuelle, mes articles suspendent une épée de Damoclès sur le réseau de trahison

Il s’agit de supprimer cette épée…Mon entretien avec Kaïd Ahmed marque visiblement la fin de ma collaboration avec RA. »

Effectivement un article de Bennabi, la leçon des évènements traitant de mai 68, de ses soubassements sur le plan géopolitique et de l’offensive américano-sioniste contre le Général de Gaulle, est refusé.

Que s’est-il passé entre ces deux dates ?

             Le premier entretien cité plus haut a eu lieu une semaine après l’échec d’un coup d’état qui a vu des centaines de morts tant militaires que civils. Nous pensons que la proposition faite à Bennabi et Khaldi étaient celle d’un régime apeuré qui voulait agréger autour de lui le maximum de potentialités y compris intellectuelles. Cependant après les purges dans l’armée et l’échec de l’assassinat du chef du régime le 25 avril 1968, le régime, plus rassuré sur sa pérennité, a changé de tactique et ne voulait plus autour de lui que des laudateurs.

             Dans une note intitulé le barrage psychologique du 22 juillet 1968, Bennabi nous livre la raison qui a entraîné sa mise à l’écart de la tribune journalistique : « Je viens d’avoir un entretien avec Kaïd Ahmed au sujet de ma lettre à Boumediene…Au lieu de me demander quelques précisons, quelques informations complémentaires, il a entrepris de me convaincre de deux choses :

  1. Que je traite le problème partiellement, et non dans le fond,
  2. Que lui l’a entrepris dans le fond

Et il se lance dans un exposé intarissable sur ses méthodes, ses propres erreurs, son retour en arrière pour mieux repartir. Non, ce n’est pas de l’orgueil. C’est sûrement l’infatuation de soi que donne le pouvoir à un esprit simple. Je l’ai laissé parler tout son saoul. Je suis désormais convaincu d’une chose : avec un responsable algérien, il ne faut pas discuter. Je comprends mieux maintenant pourquoi le pouvoir peut se permettre tous les défis à la loi. C’est que son maître sait parfaitement que le responsable algérien ne peut même pas être frôlé de l’idée de l’existence d’un effort de « pourrissement » scientifiquement planifié par ces spécialistes étrangers qui neutralisent au fur et à mesure, toutes ses initiatives, tous ses efforts. C’est derrière ce mur psychologique que fait tranquillement son travail le pouvoir parallèle. C’est ce mur que tous mes efforts ne sont pas arrivés à percer pour faire un peu de lumière dans la politique algérienne ou dans la politique égyptienne quand j’étais au Caire. Ce mur est fait d’une ignorance imperméable et d’une infatuation qu’aucun raisonnement ne peut ébranler. Je dois constater que je ne puis y faire aucune brèche. »

                                                                                                        Abderrahman Benamara

                                                                                                        Alger, le 29 octobre 2018


[1]Plus connu sous le seul nom de l’Entente, journal fondé par le docteur Mohamed Salah Bendjelloun, président de la fédération des élus du département de Constantine

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