Moi je réponds : je condamne, avec « Mais » sans gêne ni complexe.

Me situant parmi ceux qui condamnent l’abomination d’où qu’elle vienne, sans faire ni dans l’exclusion ni dans la stratification des victimes ni la hiérarchisation des assassins, qu’ils soient des individus, des groupes ou des Etats, je condamne ces atrocités sans réserve et sans sélectivité. Car je juge qu’il n’y a pas de victimes « worthy » (de première zone et d’importance) et des victimes « unworhy » (des laissés pour compte). De même, il est immoral de taire les crimes des auteurs de meurtres « civilisés » et « républicains », le plus souvent en masse, pour peu qu’ils soient perpétrés par des bombardements « chirurgicaux » du haut de l’arsenal « high tech » qui calcine les corps d’enfants, de femmes et de civils, sans qu’on trouve un semblant de compassion pour les pleurer.

A l’instar des carnages des drones étatsuniens au Yémen et en Afghanistan, ou par des bombardiers russes en Syrie, ou même les victimes de Beyrouth, pourtant perpétrés par l’EI, c’est-à-dire le même auteur supposé des attentats de Paris, qui n’ont pas trouvé une once de compassion parmi les « pleureurs sélectifs ». Ces victimes « naturelles » ne trouvent pas d’âmes sensibles pour les pleurer et condamner leurs assassins, et personne ne va jusqu’à condamner ceux qui ne les pleurent pas et encore moins condamner leurs assassins. Par contre, celles de Paris, qui ont toute notre compassion morale et légitime, se voient noyées dans un raz de marée de compassion, jusqu’à la surenchère, au point d’accuser quiconque ose ne serait-ce que de poser des questions légitimes quant au contexte et du pourquoi ce double standard, se voit manu militari accusé de sympathie sibylline avec les auteurs de cette horreur !

Je le dis et je le réitère, et ce n’est pas la première fois, qu’indexer « mais » à la condamnation de la barbarie et l’horreur sans exclusion ni sélectivité, ne constitue ni une sous-estimation de l’ampleur de l’acte horrible des attentats de Paris ou d’avant, ni une justification et encore moins une apologie comme préfèrent le laisser entendre une certaine caste de bien-pensants qui caressent dans le sens du poil. Ce « Mais » incite par contre à une réflexion froide lucide et loin des passions ravageuses du type que nous avons connues au lendemain des attentats du 11 septembre à NY. Ce sinistre et non moins fameux « avec nous ou contre nous » de Bush qui ne laisse aucune place à la raison et qui a engendré le « Patriot Act » qui a justifié tout l’arbitraire et bafoué les valeurs fondatrices mêmes des USA. Sans parler de la salve de guerres injustes et dévastatrices qui en ont suivi, et que maintenant la quasi-totalité de leurs parrains reconnaissent la fausseté des arguments qui les ont justifiées et qui ont coûté la vie à des millions de victimes.

Cette condamnation ne doit pas être synonyme d’un chèque à blanc pour répondre au actes de terreur des individus par des actes de terreur des Etats, ni à aliéner des communautés entières pour le crime d’individus, citoyens pour la plupart et produit du système de gouvernance français. Elle ne doit pas imposer une camisole morale à tous ceux qui refusent l’aliénation et l’uniformisme sous le choc et la compassionaria et leur interdire de poser des questions que semblent éviter les responsables. Elle ne doit pas museler toute voix dissonante qui se met en travers de la thèse « mainstream » n’acceptant aucun bémol, sous couvert du devoir sacro-saint de compassion qui ne laisse aucune place à la réflexion, à l’image de l’après 11 septembre, et qui cache en dessous des agendas inavoués bien que connus de tous.

En fait, cette psychose en chaine qui suinte la haine enfouie, comme le révèlent certaines voix qui affichent maintenant ouvertement et au grand jour leur aspiration à une France sans arabes, sans musulmans, sans noirs, une France blanche. Cette haine qui sévit est entrain de cloner des brigades entières de candidats à des prochains attentats à Paris et ailleurs, et que ces « politiques » aveugles et hypocrites fournissent le principal ingrédient de la violence, et offrent sur un plateau en or aux réseaux de l’horreur des recrues prêtes à l’emploi.

Rachid Ziani-Cherif
15 novembre 2015

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