Ces derniers temps, les initiatives politiques se multiplient, en Algérie. Au lieu de soutenir ou d’en porter un autre projet, certaines personnalités se contentent de les démolir. Mais, quand l’élite ne propose pas de solution, c’est que le pays touche vraiment le fond. C’est le cas de la contribution, signée par quatre personnalités (Madjid Benchikh, Ahmed Dahmani, Aissa Kadri et Mouloud Boumghar), parue dans les colonnes du journal « El Watan », le 27 février dernier. Bien que l’on puisse partager leur constat sur l’emprise du commandement militaire sur la vie politique, nos intellectuels ne suggèrent aucune voie de sortie de crise. Pour eux, les initiatives entreprises par la classe politique n’ont aucune chance d’aboutir.

Dans le même ordre d’idée, ils considèrent qu’il n’existe aucune différence entre la conférence nationale de consensus, proposée par le FFS, et le projet porté par la CNTLD. Bien qu’ils aient le droit de ne pas croire à ces initiatives, ils ne peuvent pas ignorer leur approche différente voire leur caractère ambivalent. Car, s’il y a une revendication qui ne fait pas partie du vocabulaire du FFS, c’est l’appel au coup d’État, et ce, quelle que soit sa finalité.

En tout état de cause, si le régime réel peut repousser aisément la proposition de transition reposant sur l’intervention de l’armée, il n’en est pas de même de son refus de dialoguer. D’ailleurs, toute la question est de savoir si on peut demander à l’armée de perpétrer un coup d’État et, en même temps, prétendre porter un projet démocratique ? Du coup, si la proposition de la CNTLD risque de plonger le pays dans le chaos, il n’en est pas de même de la  proposition du FFS visant à rassembler les acteurs politiques autour d’une même table.

Cependant, dans une lecture simpliste, nos intellectuels confondent les deux initiatives. Volontairement ou pas, ils font une présentation erronée de l’initiative du FFS. Alors que la conférence nationale de consensus n’a pas pour but de chasser des dirigeants pour les remplacer  par d’autres –aucun ordre du jour ni aucune priorité ne sont préalablement définis –, les signataires de la contribution du 27 février brouillent les cartes.

Pour eux, le régime n’a aucun intérêt à dialoguer pour qu’on le chasse ensuite du pouvoir. « Comment compte-t-on amener les détendeurs du pouvoir à décider de transformer le système qui leur permet de régner », se demandent-ils. Dans la réalité, deux scénarios peuvent inciter le régime à vouloir dialoguer. Tout d’abord, pour éviter une chute brutale en cas de scénarios comparables à ceux de 2011. Enfin, un refus de dialoguer avec l’opposition contribuera à le discréditer davantage aux yeux de l’opinion.  

Néanmoins, là où nos intellectuels ne peuvent pas être contredits, c’est lorsqu’ils évoquent les conditions qui permettent « de construire les partis politiques, des organisations syndicales et des associations réellement autonomes ». Pour eux, « ceci passe par la dissolution des différents rouages qui organisent la surveillance et le contrôle politique, en particulier la police politique sous toutes ses formes. » Sans le dire de façon implicite, ils pensent qu’une telle transformation ne peut intervenir sans la participation massive de la population. Or, hormis les quelques révoltes sporadiques, et surtout non coordonnées, le peuple algérien dort sur ses deux lauriers. Et pourtant, la réussite de l’une ou de l’autre initiative dépend directement de sa mobilisation et de sa prise de conscience.  

Boubekeur Ait Benali
8 mars 2015

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