« Que des partis qui étaient il y a encore quelques mois de cela au gouvernement ne partagent pas la démarche du FFS est tout à fait compréhensible. Qu’ils oublient leur histoire récente pour lui donner des leçons d’opposition relève de l’incongru. » (édito de K. Selim, du Quotidien d’Oran)

De toute évidence, pour qu’il y ait un changement de régime, il existe essentiellement deux voies pour y parvenir. La première consiste à créer les conditions d’un débat inclusif et la seconde consiste, quant à elle, à créer un rapport de force en vue d’imposer ce changement au pouvoir. En critiquant de façon éhontée la démarche du FFS, la CNTLD devrait assumer logiquement la seconde voie. Cela dit, la question qui taraude l’esprit est de savoir si ces anciens alliés du régime [certains ont quitté le gouvernement au début de l’année en cours] ont les moyens de leur politique ?

En tout état de cause, pour qu’ils puissent y parvenir, il faudrait au moins qu’ils comptent sur une mobilisation citoyenne à l’instar de ce que l’on a vu à la place El-Tahrir. Or, les animateurs de la CNTLD ont dû annuler des meetings faute d’autorisation. Du coup, on peut conclure aisément que leur discours radical ne concorde pas avec les actions de terrain. D’ailleurs, même s’ils voulaient tenter un quelconque forcing, avec les horreurs vécues en Algérie dans les années 90, un projet portant des germes d’affrontement aurait-il la moindre chance d’aboutir ? En 2011, lors des soulèvements nord-africains, les Algériens ont donné leur réponse en refusant de suivre l’exemple égyptien, libyen et syrien. Encore une fois, on peut affirmer que de la CNCD à la CNTLD, le déficit de crédibilité est tel qu’aucun appel ne pourra soulever les grandes foules. Non pas que les Algériens ne veuillent pas le changement, mais ils ne croient pas à l’épreuve de force.

Cependant, puisque le changement n’est envisageable que par le dialogue, on se demande pourquoi les membres de la CNTLD choisissent volontairement l’exclusion ? Pire encore, ils s’attaquent à tous ceux qui prônent un changement englobant toutes les meilleures volontés nationales. En outre, bien que le FFS ne veuille pas polémiquer en considérant que l’intérêt du pays prime sur les bisbilles, les attaques de la CNTLD ne s’estompent pas pour autant.  Plus grave encore, ils reprennent les anciennes formules du régime pour disqualifier la démarche du FFS. « Ils rejettent, pour reprendre une expression du pouvoir, « globalement et dans le détail », son initiative de recherche d’un consensus national. Un consensus national auquel le même pouvoir aurait pris part. Incroyable « opposition » qui s’oppose au doyen des opposants, au motif de rechercher le dialogue avec le pouvoir. Indécrottable opposition qui invente du coup l’opposition à l’opposition », écrit Noureddine Khelassi, le 18 novembre 2014.

En tout cas, en refusant de recourir à une solution radicale et en s’attaquant au FFS pour avoir préconisé un débat inclusif, la CNTLD s’exclut, elle-même, du processus de sortie de crise. Et si elle parvient à saborder l’initiative du FFS, elle contribuera fortement au maintien du statu quo. Et pourtant, écrit K. Selim, « les membres de la CNTLD, avec ses opposants anciens ou de fraiche date, partagent avec le FFS que le système en place a abouti à l’impasse. Constat devenu d’ailleurs une banalité que même des hommes du régime admettent en aparté. » Hélas, en choisissant une méthode qui a peu de chance d’aboutir, la CNTLD  rend un grand service au pouvoir. En effet, l’article 88 étant inapplicable à cause du verrouillage du jeu politique – à moins que les membres de la CNTLD comptent sur le coup d’État militaire – et la mobilisation de la rue risquant de leur faire défaut, la CNTLD s’oppose au seul projet de l’espoir, la conférence nationale de consensus. Pour toutes ces raisons, le FFS doit aller jusqu’au bout.

Pour conclure, il va de soi que la crise actuelle nécessite une analyse intelligente. La culture du coup d’État doit disparaitre pour laisser place au débat politique. Sans réclamer le moindre monopole, le FFS propose modestement cette voie. Hélas, cette démarche est vigoureusement combattue par une fausse opposition qui se croit détentrice de la vérité. Pour elle, il suffit d’élaborer une plateforme de revendication pour que l’Algérie sorte de la crise. Malheureusement, il est peu probable que le régime se plie à leurs desiderata. En revanche, en l’associant en tant qu’acteur, au même titre que l’opposition et la société civile, dans une conférence sans préalable, cette initiative peut déboucher sur un changement pacifique.     

Boubekeur Ait Benali
24 novembre 2014

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