Les risques qui menacent la stabilité du pays sont tels qu’aucun Algérien conscient ne peut se taire. Faut-il pour autant que nous pensions la même chose ? « Si nous pensons tous la même chose, nous ne pensons plus rien », a répondu François Bayrou aux sollicitations de l’UMP en 2002. Cela dit, le fait de ne pas penser la même chose ne veut pas dire que les divergences soient insurmontables. Tout cela me conduit à dire que la sortie médiatique de Mouloud Hamrouche ne constitue pas une panacée, mais on ne peut pas la rejeter non plus en bloc. L’histoire en Algérie nous a appris que « ceux qui rejettent les propositions dans le fond et dans la forme » sont des va-t-en-guerre. Rappelons-nous du rejet de la plateforme de Sant-Egidio par les éradicateurs et de la violence qui s’en est suivie. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la déclaration de Mouloud Hamrouche, cette semaine, a réveillé les vieux démons.

Cependant, pour revenir aux propos de l’ancien chef du gouvernement réformateur, la question qui taraude mon esprit est la suivante : si Mouloud Hamrouche décide de se présenter, le fera-t-il en allant à la rencontre du peuple algérien ou en cherchant à concilier les clans du régime ? S’il s’agit de la première alternative, et compte tenu du travail qu’il a effectué entre 1989 et 1991, l’espoir est permis. Mais, dans le cas où il choisit la seconde alternative, il ne réussira au mieux qu’à atténuer les effets de la crise. En l’état actuel des choses, il est probable que le plus honnête des enfants du système penchera pour la seconde alternative. « Pour que notre pays vive ces échéances dans la cohésion, la sincérité et la discipline légale et sociale, il est primordial que les différents intérêts de groupes, de régions et de minorités soient préservés et garantis », déclare-t-il.

Par ailleurs, bien qu’il soit très tôt de tirer les conclusions sur ses intentions, dans la déclaration de Mouloud Hamrouche,  ce dernier, me semble-t-il, a sans doute tenu compte de son éviction en juin 1991. Pour lui, s’il faut continuer les réformes, il faudra le faire sans remettre en cause le rôle politique de l’armée. D’ailleurs, a-t-il tort de penser cela ? La réponse est évidemment non. En effet, le retrait de l’armée le 4 mars 1989 de la vie politique ne l’a pas empêché de sonner la fin de la récréation politique en janvier 1992.

Dans quel cas alors la sortie médiatique de Mouloud Hamrouche est porteuse d’espoir ? Cette démarche est intéressante dans la mesure où le régime décide de desserrer la brise enserrant la société. Cela nécessite du coup une période de transition durant laquelle il y aurait le partage du pouvoir. Durant cette période de transition, l’institution militaire, qui constitue la colonne vertébrale du régime, lâchera petit à petit les rênes du pouvoir. Enfin, au terme de cette période, les réformes devront conduire à la démilitarisation du système. « C’est à ces conditions que notre Armée nationale populaire assurera sa mission plus aisément et efficacement et  nos  institutions constitutionnelles assumeront clairement leurs rôles et fonctions », pourrait-on attendre de cette transition négociée. En tout cas, bien que ce passage de la déclaration de Mouloud Hamrouche soit sorti de son contexte, une solution négociée, selon mon humble avis, doit conduire à cette finalité. Dans ce cas, il faudra que ce grand réformateur soit aidé par tous ceux qui souhaitent une transition sans effusion de sang.

Pour conclure, il va de soi que dans les systèmes opaques, l’exercice du pouvoir est un domaine réservé. En effet, depuis l’indépendance de l’Algérie, les Affaires du pays se traitent en privé. Ainsi, après avoir laminé la société, le régime occupe tous les espaces. D’ailleurs, même le plus réformateur des enfants du système ne compterait  pas s’appuyer sur le peuple algérien pour y arriver au pouvoir. Cela dit, étant un homme de principes, Mouloud Hamrouche jouit encore d’un capital de confiance. Et s’il doit y avoir une transition négociée, Mouloud Hamrouche devra surement jouer les premiers rôles.   

Boubekeur Ait Benali
22 février 2014

Un commentaire

  1. Abdelkader Dehbi on

    RE: Dans quel cas l’engagement de Hamrouche est-il porteur d’espoir ?
    Désolé de vous contredire Si Boubekeur Aït Benali, car, quand vous écrivez :

    «  »[…] et compte tenu du travail qu’il a effectué entre 1989 et 1991, l’espoir est permis. » »

    cela me fait irrésistiblement me souvenir du scandale ACT.Il faut rappeler que durant la période du tandem Hamrouche-Hidouci, certaines officines de pieds-noirs juifs installées à Paris ou à Genève, avaient bizarrement fleuri dans les couloirs de l’Administration pour glaner des contrats en tous genres, comme le Bureau d’Etudes ACT, alors dirigé par Raymond Benhaïm, – parent de Enrico Macias – que M. Hidouci présentait comme « membre de l’OLP !!! » et dont l’ « expertise » était requise comme par exemple, pour…l’achat de grosses quantités de sucre !

    Sans oublier les interférences bienveillantes dans ce genre d’affaires bidon, du ci-devant Gouverneur de la Banque d’Algérie, du temps de Hamrouche, je veux parler de M. Abderrahmane Hadj-Nacer, et son bref passage dans la Banque Lazard…
    Or, tout le monde connait les liens de la Banque Lazard avec les milieux sionistes, en particulier en France avec le CRIF. Et M. Hadj-Nacer, du temps où il était Gouverneur de la Banque Centrale, avait confié plusieurs contrats d’ « Etudes » bidon à cette même banque Lazard, dont on se demande bien, quelles compétences particulières elle pouvait avoir, pour venir mettre le nez dans les Comptes de la Nation, à travers les données, comptables et statistiques détenues par la Banque Centrale. — Sauf que les dirigeants sionistes de la Banque Lazard n’ont pas été ingrats, puisqu’ils ont su renvoyer l’ascenseur à leur bienfaiteur M. Hadj-Nacer, une fois qu’il a quitté ses fonctions : en lui confiant quelques « expertises »… En particulier comme VRP en direction du Sultanat d’Oman, qui comme chacun sait est un Etat d’obédience Ibadite.

    Et, Cerise sur le gâteau, pour ceux qui cherchent à vendre du Hamrouche… il faudra peut-être leur rappeler son fameux « Si Khaled, à toi de jouer !» – traduisez : à toi de massacrer – à l’adresse du criminel général Khaled Nezzar, lors des évènements de Mai-Juin 1991, durant lesquels M. Hamrouche était chef de Gouvernement.

    Le temps est venu, me semble-t-il, de laisser le peuple souverain, s’emparer de sa souveraineté au lieu de décider pour lui.

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