Le coup d’Etat en Egypte a révélé la situation d’une société scindée en deux sur la question de la légitimité démocratique, mais aussi sur les questions sociétales. C’est par bien des traits la même situation en Tunisie, comme cela s’était révélé auparavant aussi en Algérie.

Le clivage entre ces deux parties de la société est si marqué qu’on peut parler de deux sociétés. Comment caractériser ces deux sociétés? On peut le faire à partir des apparences à travers lesquelles elles se laissent voir, celles de leurs référents culturels: d’un côté une société profonde, où dominent les référents « arabo-islamiques », de l’autre une société où dominent les référents « occidentaux ou « occidentalistes ».

C’est en effet sous cette apparence qu’elles apparaissent spectaculairement aux yeux, sous toutes les formes par lesquelles s’exprime la culture, du mode de vie, des apparences vestimentaires à la langue, la religion, et les valeurs. Mais c’est aussi sous des formes culturelles qu’elles s’opposent ou s’affrontent sur le plan idéologique, le plus intensément. On verra cependant que les clivages culturels expriment au fond des clivages sociaux.

J’entends déjà les cris d’orfraie de ceux qui vont s’indigner qu’on divise ainsi nos sociétés. Et pourtant, c’est la réalité, elles sont profondément divisées et l’actualité elle-même le démontre chaque jour. D’ailleurs, si tel n’était pas le cas, nos sociétés ne seraient pas aussi vulnérables. Toute la problématique politique est là. Le mérite sera grand que celui des forces politiques qui sauront les unir.

La dualité

C’est dans l’existence de ces deux sociétés que se trouvent probablement l’explication, le secret des particularités des conflits dans les pays arabes, notamment de leur violence extrême et notamment de ce paradoxe qui fait que toutes les parties se réclament de la démocratie, qu’il y a semble-t-il unanimité sur la question, mais que celle-ci a tant de difficulté à s’imposer.

Cette dualité sociale remonte au système colonial. Il faut en effet revenir au colonialisme, à un conflit historique qui n’a pas été encore résolu, qui traîne, qui rebondit, qui se manifeste sous des formes inédites, pour comprendre cette dualité sociale.

Partout où il a existé, le système colonial a créé cette dualité: deux secteurs économiques, l’un moderne, l’autre traditionnel et rural, deux sociétés, l’une coloniale et l’autre autochtone, etc.. Les guerres de libération ont d’ailleurs été les plus violentes là où la dualité a été la plus intense et où le colonialisme a fortement influencé des secteurs plus ou moins larges de la population et des élites locales. En cela, la domination occidentale a été et est aussi interne. C’est ce qui explique que les guerres de libération ont pris aussi dans certains cas des aspects de guerre civile, déchirant souvent des familles, des communautés, des ethnies, ou que les luttes actuelles pour la démocratie basculent brusquement dans des guerres civiles, non seulement dans les pays arabes, mais aussi, disons-le au passage, en Afrique ou de nombreux pays sont actuellement à feu et à sang.

La dualité sociale n’a pas disparu avec les indépendances. Elle s’est même accrue. D’où le sentiment à la fois d’échec de l’indépendance et de la voie vers la modernité portée et proposée par les élites dirigeantes des mouvements de libération national du siècle passé. Celles-ci, de manière générale, malgré une phraséologie nationaliste ou socialiste, suivant les cas, n’entrevoyaient le développement et le progrès des pays arabes que sous la forme de l’accès à une modernité occidentale, enfin apurée de son péché originel, le colonialisme, et devenue donc, enfin, universelle, disponible à tous comme « un prêt à porter ». D’où le débat récurrent « sur les aspects positifs du colonialisme » qui ne pouvaient aller plus loin que celle de la reconnaissance par l’Occident de ses fautes par rapport à ses propres valeurs, et de retrouvailles enfin entre le colonisé et le colonisateur. Voilà comment ces élites voyaient le dépassement de la contradiction coloniale.

Mais l’Histoire en a décidé autrement. La dualité sociale mise en place par le colonialisme n’a cessé de s’aggraver, creusant le fossé et les tensions entre une société, apparaissant comme avoir pris la place de la société coloniale, et une autre, la société profonde, laissée pour compte ou marginalisée à des degrés divers suivant les ressources du pays. Ce n’est pas un hasard si les explosions, ou les endroits de plus forte contestation, sont aux alentours des zones modernes de l’économie touristique comme à Ismaïlia en Egypte, ou à Sidi Bouzid en Tunisie, ou à Marrakech au Maroc. Comme ces tensions peuvent exister aussi, autour d’ilots de modernisation économique, qui apparaissent d’autant plus étrangers qu’ils n’ont pas d’intégration locale, comme c’est le cas des enclaves pétrolières au Sud de l’Algérie et probablement d’autres pays arabes. Dés lors les tensions économiques deviennent aussi des tensions culturelles, comme la critique et la dénonciation de la société dominante s’appuiera sur des valeurs d’identité et rejettera une occidentalisation perçue comme la continuation de la domination coloniale.

En Egypte, comme au Maghreb, la dualité coloniale continue d’exister et s’est développée sous la forme d’abord de la dualité économique entre un secteur moderne utilisant la technologie et un secteur traditionnel peu développé principalement dans les campagnes mais aussi dans des secteurs du commerce. Mais cette dualité n’est pas seulement économique, elle s’exprime et se prolonge en même temps sur le plan socioculturel: au Maghreb, tout particulièrement, l’utilisation sociale d’une langue étrangère, qui est la langue du colonisateur, est un véritable marqueur social qui traduit l’appartenance à l’une ou l’autre des deux sociétés, qui anticipe sur les idées, la vision du monde, les valeurs bref la culture de chacun. Il n’est pas jusqu’à la division du travail qui n’épouse cette dualité linguistique et culturelle, le secteur moderne ( pétrole, informatique, nouvelles technologies, pharmacie etc..) utilisant la langue française, les secteurs traditionnels la langue arabe ou amazigh. Le résultat est une dualité socioculturelle généralisée: 2 élites, l’une en Arabe, l’autre en Français, 2 Universités, l’une en Arabe, dans les sciences sociales et le droit, l’autre en Français dans les sciences exactes, la médecine, deux presses, etc.. Cette dualité influe jusqu’à l’habitat, les quartiers riches ou aisés étant ceux où on parle Français.

En Egypte aussi, la dualité économique est très forte. Elle a une importance politique d’autant plus grande que c’est la haute hiérarchie militaire qui dirige une grande partie de l’économie. Quant à la dualité socioculturelle, si elle est plus discrète en Egypte, notamment sur le plan linguistique, elle n’en est pas moins réelle à travers des canaux particuliers de l’histoire de certaines élites égyptiennes et de ses rapports avec les colonialismes français ou britannique, puis les USA. A Alexandrie, jusqu’il n’y a pas si longtemps, l’état civil se faisait en Français. Le fait d’ailleurs que les télévisions publiques égyptiennes affichent en permanence sur leurs écrans, depuis le coup d’Etat, la mention en anglais « Egypt fights terrorism », un message qui s’adresse donc à l’Occident avant de s’adresser au peuple égyptien, en dit long sur cette extraversion culturelle. Il n’est donc pas étonnant que les clivages socioéconomiques apparaissent d’abord, ici comme ailleurs dans les sociétés postcoloniales, comme des clivages culturels, dont la religion est une dimension civilisationnelle essentielle. C’est bien moins le cas, dans les sociétés développées, homogènes culturellement, où les conflits apparaissent directement sous leurs formes économiques, comme des conflits de classe, et passent de façon bien moins intense par la médiation de la culture.

L’échec dans la réalisation des aspirations nationales est en résumé l’échec des élites occidentalistes postcoloniales, qui se sont révélée incapables de supprimer la dualité économique, culturelle et sociale coloniale et les tensions sociales énormes qui en résultent. C’est par contre, dans l’accomplissement de cette tâche, celle de supprimer la dualité sociale sur les plans économique et culturel, et de trouver une voie nationale vers la modernité, que réside très probablement le secret de la réussite des pays émergents, qu’ils se réclament d’une idéologie libérale comme la Corée du Sud entre autres, de l’islamisme comme la Malaisie, ou d’une idéologie socialiste comme la Chine ou le Vietnam.

Que ce soit le « nassérisme » en Egypte, le « boumédiénisme » en Algérie, le « bourguibisme » en Tunisie, « l’istiqlalisme » au Maroc, force est de constater, qu’indépendamment des références idéologiques- socialisme ou capitalisme- le résultat « en gros » a été le même, celui du maintien et du développement de la dualité économique et sociale. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, il ne faut pas s’étonner que ces pays aient en commun, avec d’autres d’ailleurs, de connaître, à travers la vague islamiste, la dénonciation de la voie occidentaliste vers la modernité et la remise en cause des élites qui la représentent. Soixante ans après, l’échec du Nassérisme s’exprime à travers le retour en force du parti des Frères musulmans, auxquels il s’était opposé, à l’origine, précisément sur la question du chemin vers le développement et la modernité. De la même manière, les auteurs du coup d’Etat, ainsi que les élites qui les soutiennent, se réfèrent de nouveau au Nassérisme, alors que la haute hiérarchie militaire, avec Sadate puis Moubarak, a, depuis plus de 30 ans, progressivement tourné, le dos à la dimension de libération nationale et antisioniste de l’héritage nassérien. Il faut noter aussi que dans bien des pays arabes, c’est l’armée, à travers des coups d’Etat militaires, ou au moins des « révolutions par le haut », qui a présidé à cette tentative de modernisation de la société, et l’échec de cette modernisation est donc perçu comme le sien.

Mais c’est aussi dans l’existence de ces deux sociétés, et leur antagonisme, qu’il faut chercher les racines de la violence extrême des conflits actuels dans bien des pays arabes.

La violence terrible de ces conflits recèle bien des traits de la violence coloniale comme s’ils opposaient deux sociétés étrangères l’une à l’autre, qui se nient mutuellement, qui ne partagent pas la même culture, les mêmes valeurs, la même histoire, c’est-à-dire tous ces éléments qui relient les classes sociales entre elles, adoucissent les conflits en les transcendant dans une solidarité plus grande qui est le sentiment d’appartenance à la même nation, au même devenir et qui rend précisément nécessaire la démocratie comme moyen de gérer les contradictions sociales, les conflits de classe, et donc de vivre ensemble.

C’est d’ailleurs dans le même moteur caché, masqué, qui est celui de toute violence historique, l’appétit de propriété et de richesses, qu’il faut chercher le mécanisme intime de cette violence.

Transfert de propriété et violence

Les périodes historiques de transfert de propriété sont les périodes d’extrême violence sociale. Il n’est pas possible d’expliquer ce qui passe actuellement dans bien des pays arabes si on n’a pas en vue cet aspect de la situation, et le sentiment qu’a une partie des classes possédantes (celle précisément comme on le verra qui a « hérité » de la propriété coloniale ou de la propriété d’Etat) que leurs intérêts sont menacés par la démocratie. Là est la clé de la compréhension de la brutalité sociale des conflits autour de la question de la démocratie. Les conflits sont donc fondamentalement des conflits de classe même s’ils apparaissent d’abord aux yeux sous leur angle socioculturel et qu’ils doivent leur spécificité au dualisme postcolonial, c’est-à-dire au fait qu’ils opposent les forces sociales, les classes de deux parties de la société.

La période coloniale fut une période de transfert de propriété d’une violence extrême. Vues sous cet angle, les guerres de libération nationale doivent aussi leur violence si caractéristique à la lutte pour la récupération de la terre de la patrie, et donc à un nouveau transfert de propriété au profit, en principe, des populations spoliées. Dans les pays arabes, qui avaient été colonisés ou dominés, cela s’est fait en général au profit d’une partie de la société, la plus proche le plus souvent de l’ancienne société coloniale, ce qui a prolongé ou maintenu le dualisme de la société.

Dans les pays arabes à « orientation socialiste » ou à capitalisme d’Etat, comme on voudra les nommer, le transfert de propriété postcolonial a d’abord été ajourné au profit de la propriété d’Etat. Mais l’écroulement de l’URSS et du système socialiste européen a déclenché ou accéléré le passage à la propriété privée. Ce tournant historique est aussi une période d’un gigantesque transfert de propriété avec la violence qui peut lui être liée. La coïncidence donc entre ce tournant historique et la crise actuelle dans les pays arabes n’est donc pas fortuite. Cette corrélation entre transfert de propriété et violence peut expliquer aussi que c’est précisément dans les pays arabes à économie d’Etat, où la propriété d’Etat était la plus étendue et où elle a été privatisée de façon accélérée, que la crise est la plus violente.

A cet égard le cas de l’Algérie est plein d’enseignements. A l’indépendance, le choix en faveur d’une « société socialiste » donne lieu à l’existence de la propriété publique sur un vaste secteur d’Etat dans l’agriculture, l’industrie, les services. L’immobilier lui-même, pour la plus grande part et pour sa part la plus riche, est propriété d’Etat sous l’appellation « des biens vacants » (biens abandonnés par la colonie française.). L’élément culturel – le capital culturel, le niveau culturel, et sa mesure le diplôme- vont alors jouer un rôle essentiel dans l’accès aux fonctions de l’Etat, aux fonctions administratives et économiques, et aux privilèges qu’ils assurent, notamment dans l’occupation des « biens vacants » immobiliers.

Dans les toutes premières décennies de l’indépendance, un diplôme, quel qu’il soit, était la clé d’entrée aux postes de direction dans les sociétés d’Etat ou la haute administration. Le facteur culturel, déjà important dans la hiérarchisation sociale dans toutes les sociétés, joue un rôle encore plus grand dans les sociétés où domine la propriété d’Etat. Il va être en Algérie survalorisé. De plus, en Algérie, dans les premières années de l’indépendance, son action va être d’autant plus intense qu’il faut remplacer l’appareil administratif et économique colonial, l’ « algérianiser ». Le facteur culturel va donc se transformer directement en facteur de domination économique et social. Et comme l’instruction, pour ceux qui pouvaient y accéder, s’est faite en langue française pendant la période coloniale mais aussi après l’indépendance, ce sont les élites francophones qui vont constituer l’essentiel des élites économiques, administratives et pour une part importante militaires. On comprend donc les raisons sociologiques de la coïncidence qui s’opère entre langue française et statut économique et social. C’est le cas pour les fonctions administratives et économiques mais c’est aussi le cas pour la jouissance de la meilleure partie des biens immobiliers de l’Etat car c’est à partir de ces fonctions que se fait l’accès à ces biens. Ceci explique que la langue française soit celle aussi des beaux quartiers des grandes villes, et l’existence de ce dualisme culturel et sociétal y compris dans l’espace urbain dont nous avons parlé plus haut.

Lorsque se fait, à la fin des années 80 et au début des années 90 le passage généralisé en Algérie de la propriété d’Etat à la propriété privée, du « capitalisme d’Etat  » au capitalisme privé, ce sont donc les mêmes élites qui en bénéficient. Elles vont s’approprier juridiquement, directement, ce dont elles jouissaient indirectement. La démocratie va alors être d’autant plus tentante, d’autant plus séduisante qu’elle va représenter pour ces élites la possibilité de donner la légitimité de l’Etat de droit à leurs nouveaux droits de propriété et de se libérer enfin du populisme égalitariste nationaliste de la guerre anticoloniale. Mais elle va représenter aussi le danger de donner le pouvoir à la majorité, aux masses de ceux laissés pour compte et qui désormais leur demandent des comptes. D’où leur hésitation permanente entre démocratie et régime autoritaire. Ce n’est pas un hasard, si les évènements d’Octobre 1988 en Algérie, qui ont annoncé la montée de l’islamisme politique, aient coïncidé avec la vente, bien souvent pour une bouchée de pain, des biens de l’Etat, notamment des biens immobiliers et des réserves foncières. Beaucoup des revendications populaires, dont on ne parle plus aujourd’hui, portaient alors sur l’exigence de révéler l’origine des biens de chacun et avaient créé une grande peur chez les nouveaux possédants.

On vérifie donc sous cet autre angle, les interférences culturelles et sociales signalées plus haut: en effet, dans ces conditions historiques et culturelles particulières de transfert de la propriété, les classes populaires vont assimiler occidentalisation, élites occidentalistes et discriminations économiques et sociales. Les questions d’identité culturelles, et à travers elles religieuses, vont alors prendre une signification sociale. Les contradictions de classe vont prendre le biais des conflits culturels pour s’exprimer. La question sociale va s’exprimer à travers la question nationale, c’est-à-dire à travers l’exigence populaire de parachever l’émancipation nationale, de réaliser les promesses du mouvement de libération nationale.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on retrouve des situations semblables dans les pays du Maghreb. On retrouve aussi en Egypte, probablement avec d’autres variantes, des interférences culturelles et sociales du même ordre, et en tout cas certainement cette violence diffuse ou directe de l’énorme transfert de propriété de l’économie d’Etat à la propriété privée.

Le reclassement

Les périodes historiques de transfert de propriété sont des périodes de reclassement social et donc de reclassement politique et idéologique.

La période de constitution des empires coloniaux en fut une. Des voix « démocratiques » comme celles, en France, de Lamartine et de Victor Hugo ont défendu le colonialisme qui apportait, selon eux, « la civilisation » aux pays conquis. Les révolutionnaires français des révolutions de 1830 et 1848, et plus tard de la commune de Paris, déportés en Algérie se sont peu à peu transformés en propagandistes de « l’œuvre civilisationnelle française », et en défenseurs de l’ordre colonial. Les avantages de la colonisation et de leur reclassement social les avaient fait changer de camp mais le discours humaniste et social était resté le même. C’est d’ailleurs par la suite devenu une tradition de la gauche coloniale française, en Algérie et au Maghreb de masquer la défense des intérêts les plus froids derrière une phraséologie humanitaire et de grands discours sur « la liberté, la tolérance, la défense de la civilisation » contre les « masses musulmanes fanatiques » et la « barbarie ». On retrouve d’ailleurs, sous une forme modernisée mais au fond sans grands changements, les grands traits de ce discours comme discours dominant dans les médias occidentaux .Plus prés de nous, le 8 mai 1945, des militants politiques français, mais aussi algériens, se définissant comme progressistes, qualifiaient les nationalistes algériens de « fascistes » pour ne pas vouloir renoncer au mot d’ordre d’indépendance et refuser de le subordonner à la politique des forces de gauche françaises.

L’Histoire se répète. De la même manière, les Frères musulmans sont traités en Egypte, par les partisans du coup d’Etat, de « fascistes » , et ceux qui soutiennent le principe de la légitimité démocratique de « traitres à la patrie », parce qu’il refusent de subordonner la démocratie à tout autre considération. . Un journaliste du journal français « Le Nouvel Observateur » note avec surprise lors d’un reportage en Tunisie que « la violence vis-à-vis d’Ennahdha, souvent traité de « fascistes » par l’opposition laïque, serait facilement assimilée en France à de l’Islamophobie ! » ( Jean Marcel Bouguereau, « Egypte, Tunisie, le spectre des années noires algériennes » Le Nouvel Observateur « , 28 juillet 2013 ).

Cette référence au « fascisme » est typique de l’arsenal de l’idéologie occidentaliste actuelle. Elle est d’abord hors de propos car le fascisme et le nazisme sont un produit historique, politique et culturel spécifique à l’Occident en tant que mélange complexe de racisme, d’intérêts financiers et impériaux et de concurrence entre puissances occidentales pour la domination mondiale. C’est ensuite une contre vérité historique car Hitler n’est jamais arrivé au pouvoir par les élections. Bien au contraire, il était minoritaire au parlement, et il n’a été nommé chancelier, avec seulement 3 ministres au gouvernement, que par la pression de milieux financiers allemands et d’une partie de l’armée sur le président de la République de Weimar : Hindenburg. Il en est de même de Mussolini qui ne prend le pouvoir que par un coup d’Etat, « la marche de Rome » des groupes fascistes, avec le soutien d’officiers supérieurs et des milieux industriels « désireux de rétablir l’ordre dans le pays ». Mais cette contre vérité a une fonction, celle d’étayer l’argument « que le peuple peut se tromper », et d’éviter aux faux démocrates leur cauchemar: celui du suffrage populaire.

C’est semble-t-il une tradition politique, héritée de la culture coloniale française, dans les pays du Maghreb mais aussi en Egypte à travers la forte influence culturelle et historique française, que de badigeonner d’un discours « de gauche » des intérêts particuliers.

Mais la raison fondamentale de telles positions est là aussi le transfert de propriété, le reclassement et le changement de statut social qui en ont résulté. Devenues propriétaires, les élites qui ont dirigé le pays pendant le socialisme d’Etat ont gardé de leur jeunesse politique le vocabulaire, et probablement la nostalgie sincère de cette période. La forme reste, mais le fond a changé. L’idéologie « de gauche » est recyclée au service de nouveaux intérêts sociaux. Il en a toujours été ainsi. Les patriciens romains gardaient, dans leurs discours, les accents égalitaristes et plébéiens des fondateurs de la République romaine, bien après s’être constitués en aristocratie.

Cet énorme reclassement social touche aussi et reconfigure les relations politiques, non seulement à l’échelle nationale mais aussi à l’échelle internationale. Les tournants historiques sont à l’origine de changements dans les alliances, dans les rapports entre Etats, dans les relations diplomatiques. Mais il faut du temps à chaque force pour évaluer la nouvelle situation, prendre la mesure des changements, prendre ses marques, avoir de nouveaux repères. A la faveur de la crise actuelle qui secoue le monde arabe, des alliances étonnantes se forment, qui semblent contradictoires, voire contrenature; elles se nouent, se dénouent au gré de l’évolution de la situation, aussi bien au niveau local qu’international. En Egypte, les USA hésitent entre le soutien et la critique du coup d’Etat, entre le vieil allié sûr que représente la hiérarchie militaire égyptienne depuis 30 ans, et un processus démocratique qui pourrait s’avérer aventureux pour leurs intérêts. Ils avaient déjà beaucoup hésité à abandonner Moubarak. L’Arabie saoudite est avec les Frères musulmans en Syrie mais soutient le coup d’Etat militaire en Egypte. Le Qatar et l’Arabie saoudite divergent fortement sur l’Egypte mais sont alliés sur la Syrie. Le parti des Frères musulmans dénonce le silence, voire la complicité occidentale concernant le coup d’Etat et la répression en Egypte. On se souvient cependant que c’est Mohamed Morsi, président de l’Egypte, qui avait aux côtés des pays du Golfe, rompu les relations diplomatiques avec la Syrie. En Lybie, les puissances occidentales se sont alliées avec des courants islamistes pour abattre à tout prix Maamar Gueddafi, puis ont agi de même contre le gouvernement syrien. Mais après les récentes attaques antioccidentales à Benghazi, elles ne sont plus du tout sûr de leur intérêt à une alliance avec les islamistes en Syrie, et craignent qu’elle ne se retourne contre eux. Un Bernard Henri Levy, partisan acharné d’Israël et des interventions militaires occidentales, pourra tout autant célébrer la « révolution démocratique » en Lybie, comme le font des courants islamistes, que s’enflammer devant ce qu’il appelle « le coup d’Etat démocratique » en Egypte, comme le font des courants arabes « laïques de gauche » . Le nouveau pouvoir tunisien pourra, tout autant, organiser à Tunis, avec les puissances occidentales, une conférence « des amis de la Syrie » que s’opposer aujourd’hui à une intervention militaire en Syrie etc.

Les tournants historiques sont des périodes d’hésitations, de grande confusion. C’est dans les bouleversements historiques actuels que se trouve, en profondeur, l’explication du désordre, du chaos qui semble régner dans le monde arabe, et non dans une main invisible et toute puissante qui l’aurait organisé.

Djamel Labidi
10 Octobre 2013

Article paru aussi dans Le Quotidien d’Oran


مصر.. بلاد و مجتمعان

بقلم جمال لعبيدي

ترجمة أحمد رضوان شرف الدين

كشف الانقلاب في مصر وضع مجتمع منشق شقين حول مسألة المشروعية الديمقراطية وكذلك حول المسائل المجتمعية. وهو، من أوجه عديدة، نفس الوضع الماثل الآن في تونس وسبق أن شاهدناه كذلك في الجزائر.

إن هذا الانشقاق بارز إلى حد يجيز الحديث عن مجتمعين. كيف نصفهما؟ يمكن الانطلاق من الأشكال التي يتجليان فيها، أي المرجعيات الثقافية: من جهة، مجتمع عميق تسوده المرجعيات « العربية الإسلامية »، ومن جهة أخرى،مجتمع تسوده المرجعيات « الغربية » أو « التغريبية ».

بالفعل،هذا هو المظهر الذي يتقدمان من خلاله في أوضح صورة،أي من خلال كافة أشكال التعبير الثقافي، من نمط العيش إلى اللباس ومن اللغة والدين إلى القيم.لكن هذه الأشكال هي أيضا التي يتم بواسطتها معارضة أو مصارعة بعضهما لبعض على الصعيد الأيديولوجي بحدة أكبر.إلا أننا سنرى فيما بعد أن التباينات الثقافية تعكس في الأساس تباينات اجتماعية.

ها نحن نستبق سماع صراخ المستنكرين لتقسيم مجتمعاتنا هكذا، ولكن هذا هو الواقع. إن مجتمعاتنا منقسمة انقساما عميقا تشهد عليه الأحداث الجارية، ولولاه لما كانت على هذه الدرجة من الهشاشة. هنا مكمن الإشكالية السياسية برمتها، وسوف يكون للقوى السياسية التي تنجح في توحيدها فضل عظيم.

الثنائية

يرجح أن يكون في وجود هذين المجتمعين تفسير خصائص النزاعات الناشبة في البلدان العربية، لاسيما منها العنف الشديد الذي يطبعها، وكذلك سر المفارقة المتمثلة في استناد كل الأطراف إلى الديمقراطية وإجماعها عليها على ما يبدو، من جهة، والصعوبة الكبيرة التي تواجهها الديمقراطية لفرض نفسها، من جهة أخرى.

تعود هذه الثنائية الاجتماعية إلى النظام الاستعماري.حقا يقتضي إدراكها أن نرجع إلى الاستعمار، إلى نزاع تاريخي لم تتم تسويته ولا يزال يجرجر ذيوله، يقفز إلى السطح من جديد ويرتدي لباسا غير معهود.

لقد أنشأ النظام الاستعماري هذه الثنائية أينما وجد: قطاعان اقتصاديان، واحد حديث والآخر تقليدي وريفي، مجتمعان، واحد استعماري والآخر أهلي، الخ.. واتصفت حروب التحرير بعنف أشد حيث اتصفت تلك الثنائية بحدة أكبر أي حيث كان تأثير الاستعمار قويا على قطاعات واسعة نسبيا من السكان ومن النخب المحلية. لذا كانت السيطرة الغربية،ولا تزال،سيطرة داخلية، ما يفسر كون حروب التحرير أخذت في بعض الحالات أشكال حروب أهلية مزقت أحيانا عائلات وجماعات وأقواما، أو كون الصراعات الراهنة حول الديمقراطية تنقلب فجأة إلى حروب أهلية في البلدان العربية (وفي إفريقيا أيضا حيث بلدان عديدة تعيش حاليا مواجهات دامية )  

وعندما نالت هذه البلدان استقلالها، لم تختف الثنائية الاجتماعية من الوجود وإنما راحت تنمو، وهو ما بعث شعورا بالإخفاق إزاء الاستقلال والتوجه إلى الحداثة الذي حملت لواءه واقترحته النخب القائدة لحركات التحرر الوطني في القرن المنصرم. فبصفة عامة، ورغم تبنيها معجما قوميا أو اشتراكيا، حسب الحالات، لم تكن تلك النخب ترى من سبيل إلى التنمية والتقدم في البلاد العربية سوى الالتحاق بالحداثة الغربية المطهرة من خطيئتها الأصلية- الاستعمار – والتي صارت أخيرا كونية وفي متناول الجميع كالبذلة الجاهزة.هذا هو أصل النقاش المتكرر حول خطاب « السمات الإيجابية للاستعمار » التي لا يمكن أن تتعدى اعتراف الغرب بغلطاته،قياسا على قيمه، من جهة،وحصول التلاقي – أخيرا -بين الاستعماري وبين المستعمر. تلك هي نظرة هذه النخب لكيفية إزالة التناقض الاستعماري.

غير أن التاريخ قرر شيئا آخر في هذا الشأن. فالثنائية الاجتماعية التي خلقها الاستعمار لم تتوقف عن الاحتدام،عن توسيع الهوة وزيادة التوترات بين مجتمع بدا وكأنه حل محل المجتمع الاستعماري، وآخر، المجتمع العميق، المتروك على قارعة الطريق و المهمش بدرجات متفاوتة حسب موارد البلاد. ليس من الصدفة في شيء إذا كانت الانفجارات أو أشد الاحتجاجات وقعا تحدث بالضبط في محيط المناطق الحديثة للاقتصاد السياحي، كسيناء والصعيد بمصر أو سيدي بوزيد بتونس أو مراكش بالمغرب الأقصى، أو حول جزر التحديث الاقتصادي التي تظهر غريبة عن محيطها لعدم اندماجها فيه، على غرار الأطواق النفطية في الجنوب الجزائري أو في شرقي السعودية أو في جهات أخرى من البلاد العربية.في هذه الحالة، تتحول التوترات الاقتصادية إلى توترات ثقافية أيضا كأن يقوم انتقاد المجتمع المسيطر والتنديد به على قيم من الهوية ويجري نبذ التغريب بوصفه استمرارا للسيطرة الاستعمارية.

في مصر، كما في بلاد المغرب، ظلت الثنائية الاستعمارية موجودة وتطورت على شكل ثنائية اقتصادية، في المقام الأول، بين قطاع حديث يستخدم التكنولوجيا وقطاع تقليدي ضعيف النمو يقع في الأرياف، بصورة رئيسية، إلى جانب بعض الفروع من التجارة. إلا أن هذه الثنائية لا تتوقف عند حدود الاقتصاد وإنما تمتد، في نفس الوقت، إلى الميدان الاجتماعي الثقافي. في بلاد المغرب بصفة خاصة، يعتبر الاستعمال الاجتماعي للغة الأجنبية، لغة المستعمر، علاما اجتماعيا حقيقيا للانتماء إلى أحد المجتمعين، يمكّن من التنبؤ بالأفكار وبالنظرة للعالم وللقيم، أي بثقافة كل واحد منهما. وتقسيم العمل نفسه يساير هذه الثنائية اللغوية والاجتماعية حيث القطاع الحديث (النفط، الإعلام الآلي، التكنولوجيات الجديدة، الصيدلة، الخ..) يستعمل اللغة الفرنسية، بينما القطاعات التقليدية تستعمل اللغة العربية أو الأمازيغية. ونتيجة ذلك ثنائية اجتماعية ثقافية معممة ماثلة في تخبتين، واحدة بالعربية وأخرى بالفرنسية، جامعتين، واحدة بالعربية للعلوم الاجتماعية والحقوق، وأخرى بالفرنسية للعلوم الدقيقة والطب، صحافتين، الخ.. بل تؤثر هذه الثنائية حتى على المجال السكني حيث الأحياء الغنية أو الميسورة هي أحياء الحديث بالفرنسية.

في مصر أيضا الثنائية الاقتصادية قوية جدا، ولها أهمية سياسية كبيرة كون القيادة العسكرية العليا تتحكم في قسم واسع من الاقتصاد.أما الثنائية الاجتماعية الثقافية، وإن كانت أقل بروزا هنا، لاسيما على الصعيد اللغوي، إلا أنها مع ذلك ظاهرة حقيقية، تكونت عبر قنوات خاصة من تاريخ بعض النخب المصرية وعلاقاتها مع الاستعمارين الفرنسي والبريطاني ثم مع الولايات المتحدة الأمريكية. الإسكندرية هي واحدة من عواصم الفراكوفونية حيث أقيمت جامعة سان غور الدولية للغة الفرنسية ، ومنذ الانقلاب، تبث قنوات التلفزيون العمومية المصرية باستمرار شعار » Egypt   fights terrorism  « ،الموجه للغرب إذن قبل الشعب المصري،والبليغ الدلالة على التوجه الثقافي الخارجي. بالتالي لانستغرب ظهور التباينات الاجتماعية الاقتصادية،هنا كما في غيره من مجتمعات ما بعد الاستعمار، على شكل تباينات ثقافية في المقام الأول، يتخذ فيها الدين بعدا حضاريا جوهريا. الأمر أخف بكثير في المجتمعات المصنعة، المنسجمة ثقافيا، والتي تبرز فيها النزاعات رأسا عبر أشكالها الاقتصادية، بصفتها نزاعات طبقية،وتتوسط الثقافة بكثافة أقل.

إن الفشل في تحقيق الطموحات الوطنية هو باختصار فشل النخب التغريبية لمرحلة ما بعد الاستعمار، التي أظهرت عجزا عن إزالة الثنائية الاقتصادية، الثقافية والاجتماعية الاستعمارية، والتوترات الاجتماعية الهائلة المتولدة عنها. وبالمقابل، يرجح أن يكون سر نجاح البلدان الصاعدة كامنا في تحقيق هذه المهمة بالذات، المتمثلة في إزالة الثنائية الاجتماعية على صعيدي الاقتصاد والثقافة وإيجاد طريق قومي إلى الحداثة، سواء بالنسبة للبلدان ذات الإيديولوجية الليبرالية، مثل كوريا الجنوبية، أو الإسلامية كماليزيا، أو الاشتراكية كالصين والفيتنام.

فسواء تعلق الأمر « بالناصرية » في مصر أو « البومدينية » في الجزائر أو « البورقيبية » في تونس أو « الاستقلالية » في المغرب الأقصى، الخ..،وسواء كانت المرجعية الإيديولوجية اشتراكية أو رأسمالية، لا مفر من التقرير بأن النتيجة واحدة بالمجمل، وهي ماثلة في بقاء ونمو الثنائية الاقتصادية والاجتماعية. وبما أن نفس الأسباب تخلف نفس النتائج، لا عجب كذلك في كون هذه البلدان (وغيره أيضا) تشترك في تعرض الطريق التغريبي إلى الحداثة المتبع فيها، وبالنخب التي تمثلها، للتنديد عبر الموجة الإسلامية. بعد مرور ستين عاما، ينعكس فشل الناصرية في العودة القوية للإخوان المسلمين الذين عارضوها أصلا حول نفس المسألة المتعلقة بالسبيل إلى التنمية والحداثة. ومن جانبهم، يعود زعماء الانقلاب وتعود معهم النخب التي تدعمهم إلى المرجعية الناصرية، لكن بعد أكثر من ثلاثة عقود دأبت خلالها القيادة العليا للجيش، على رأسها السادات ومبارك، على صرف النظر عن البعد التحرري الوطني والمناهض للصهيونية في الميراث الناصري. يجب أن نسجل كذلك أن الجيش قاد، عبر الانقلابات العسكرية أو « الثورات الفوقية »، محاولة تحديث المجتمع في أكثر من بلد عربي، وبالتالي هناك أيضا الشعور بأن فشل هذا التحديث هو فشله.

ومع ذلك، يجب البحث عن جذور شدة العنف، المميزة للنزاعات القائمة حاليا في العديد من البلدان العربية، في وجود المجتمعين المذكورين وفي تناحرهما أيضا.

ينطوي العنف الرهيب لهذه النزاعات على الكثير من سمات العنف الاستعماري وكأنه ناشب بين مجتمعين غريبين الواحد عن الآخر، يتنكران ولا تجمعهما نفس الثقافة، نفس القيم، نفس التاريخ، أي تلك العناصر التي تربط الطبقات الاجتماعية بعضها ببعض، تحد من قسوة النزاعات عبر السمو بها في تضامن أكبر هو الشعور بالانتماء إلى نفس الأمة، نفس الصيرورة، ويجعل الديمقراطية بالذات ضرورية لإدارة التناقضات الاجتماعية والصراعات الطبقية، وبالتالي ضرورية للعيش معا.

إذن يجب أن نفتش عن الآلية العميقة لهذا العنف في نفس المحرك الدفين والمقنّع لكل عنف تاريخي: شهوة الملكية والثروة.

انتقال الملكية والعنف

الحقب التاريخية لانتقال الملكية هي الحقب التي يبلغ فيها العنف الاجتماعي الحد الأقصى.لا يمكن تفسير ما يجري حاليا في العديد من البلدان العربية إذا غاب عنا هذا الجانب ومعه الشعور الذي ينتاب قسما من الطبقات المالكة (هو بالتحديد القسم الذي « ورث » الملكية الاستعمارية أو ملكية الدولة، كما سنرى) بأن مصالحه مهددة من الديمقراطية: هنا مفتاح إدراك سبب الضراوة الاجتماعية التي تطبع النزاعات حول مسألة الديمقراطية. فهي بالأساس نزاعات طبقية حتى وإن تكشفت لنا في الوهلة الأولى من زاوية اجتماعية ثقافية واكتسبت خصوصيتها من ثنائية ما بعد الاستعمار، أي من كونها تضع قوى اجتماعية، طبقات من طرفي المجتمع في تعارض.

كانت الحقبة الاستعمارية حقبة انتقال للملكية في غاية العنف. من هذه الزاوية، استمدت حروب التحرير الوطني هي كذلك عنفها المتميز جدا من الصراع لاستعادة أرض الوطن، أي مبدئيا من نقل جديد للملكية لفائدة السكان المسلوبين. في البلدان العربية التي جرى استعمارها أو فرض السيطرة عليها، تم ذلك، بصورة عامة، لفائدة طرف في المجتمع غالبا ما كان هو الأقرب للمجتمع الاستعماري السابق، وهو ما أدى إلى تمديد ثنائية المجتمع أو الإبقاء عليها. في البلدان العربية ذات « التوجه الاشتراكي » أو « رأسمالية الدولة »- كما تشاء تسميته – تم في البداية تأجيل نقل ملكية ما بعد الاستعمار لصالح ملكية الدولة. إلا أن انهيار الاتحاد السوفييتي والمنظومة الاشتراكية الأوربية أطلق حركة التحويل إلى الملكية الخاصة أو عجل من وتيرتها. كان ذلك المنعرج التاريخي حقبة انتقال ضخم للملكية أيضا مع ما يصاحبه من العنف المتصل به، ولم يكن التزامن بينه وبين الأزمة الراهنة في البلدان العربية وليد الصدفة إذن. هذا الترابط بين انتقال الملكية والعنف يفسر أيضا كون بلدان اقتصاد الدولة في العالم العربي، التي كانت ملكية الدولة فيها هي الأوسع ثم خضعت لخوصصة سريعة، هي بالضبط البلدان التي بلغت فيها الأزمة أشد درجات العنف.

في هذا الشأن حالة الجزائر مليئة بالعبر.

عند الاستقلال، تبدى الاختيار لصالح « مجتمع اشتراكي » في وجود ملكية عامة على قطاع شاسع للدولة في الزراعة والصناعة والخدمات، وبات الجزء الأكبر والأغنى من العقار نفسه ملكا للدولة تحت اسم « الأملاك الشاغرة » (أي تلك التي تركها الاستعماريون الفرنسيون). عندئذ راح العامل الثقافي – رأس المال الثقافي، المستوى الثقافي ومقياسه الشهادة– يؤدي دورا جوهريا فيما يتعلق بالالتحاق بوظائف الدولة، الوظائف الإدارية والاقتصادية، وبالحصول على الامتيازات التي توفرها، لاسيما شغل « الأملاك الشاغرة » العقارية.

أثناء الأعوام الأولى للاستقلال، مثلت الشهادة، مهما كانت، مفتاح الوصول إلى مناصب قيادية في شركات الدولة والإدارة العليا. العامل الثقافي، المهم بحد ذاته في الترتيب الاجتماعي عند كل المجتمعات، يؤدي دورا أعظم في المجتمعات التي تسيطر فيها ملكية الدولة.  في الجزائر منح قيمة أكبر و دور أقوى على قدر ما كان يتطلبه إيجاد بديل للجهاز الإداري والاقتصادي الاستعماري، « جزارته ». بالنتيجة، راح العامل الثقافي يتحول مباشرة إلى عامل سيطرة اقتصادية واجتماعية. وبما أن التعليم كان، بالنسبة لمن استطاع إليه سبيلا، يتم باللغة الفرنسية إبان الحقبة الاستعمارية ومطلع الاستقلال،آل إلى النخب الفرنكوفونية إذن تكوين الجزء الأساسي من النخب الاقتصادية والإدارية وجزء هام من النخبة العسكرية كذلك. هكذا ندرك الأسباب الاجتماعية للتوافق الحاصل بين اللغة الفرنسية من جهة، وبين المنزلة الاقتصادية والاجتماعية، من جهة ثانية. هذا حال الوظائف الإدارية والاقتصادية، لكنه أيضا حال التمتع بأفضل حصة من الأملاك العقارية للدولة، لأن الحصول عليها يتم انطلاقا من تلك الوظائف. وهو ما يفسر كون الفرنسية هي أيضا لغة الأحياء الراقية في المدن الكبرى، أي يفسر وجود الثنائية الثقافية والمجتمعية حتى على مستوى الفضاء الحضري، كما سبق أن ذكرنا.

عندما وقع نهاية الثمانينيات مطلع التسعينيات الانتقال العام في الجزائر من ملكية الدولة إلى الملكية الخاصة، من « رأسمالية الدولة » إلى الرأسمالية الخاصة، استفادت منه نفس النخب إذن، إذ استملكت قانونيا ومباشرة ما كانت تتمتع به بصفة غير مباشرة. عندئذ بدت الديمقراطية مغرية وفاتنة لتلك النخب على قدر ما كانت تمثله، من وجهة نظرها، من إمكانية إضفاء شرعية دولة القانون على حقوقها الجديدة في الملكية والتخلص أخيرا من الشعبوية المساواتية الوطنية الموروثة عن الحرب ضد الاستعمار. إلا أن الديمقراطية كانت تمثل أيضا خطر نقل سلطة الحكم إلى الأغلبية، إلى جماهير قارعة الطريق التي أخذت تطالبها بكشف الحساب. هنا منبع ترددها الدائم بين الديمقراطية والنظام المتسلط. وليس صدفة إن وقعت أحداث أكتوبر 1988 في الجزائر، التي كانت تنبئ بصعود الإسلامية السياسية، بالتزامن مع بيع أملاك الدولة- بما فيها العقارات – بثمن بخس في أحيان كثيرة. لقد كانت مطالب شعبية كثيرة – لا يجري الحديث عنها اليوم- تتمحور حينذاك حول ضرورة كشف مصادر أملاك كل واحد محدثة قلقا وفزعا لدى الملاك الجدد.

هكذا نتأكد من هذه الزاوية أيضا، من حقيقة التداخلات المشار إليها أعلاه بين الثقافي والاجتماعي: في ظل خصوصية هذه الظروف التاريخية والثقافية لنقل الملكية، تقوم الطبقات الشعبية بالمماثلة بين التغريب والنخب المتغربة وأنواع التمييز الاقتصادي والاجتماعي. عندئذ تتخذ المسائل المتصلة بالهوية الثقافية، ومن خلالها الدينية، مدلولا اجتماعيا.فتفصح التناقضات الطبقية عن نفسها عبر النزاعات الثقافية.وتتقدم المسألة الاجتماعية عبر المسألة الوطنية، أي عبر المطالبة الشعبية بإكمال الانعتاق الوطني، تحقيق وعود حركة التحرر الوطني.

بما أن نفس الأسباب تخلف نفس النتائج، نجد أوضاعا مشابهة في بلدان المغرب الأخرى. كما يمكن ملاحظة تداخلات ثقافية واجتماعية من نفس النوع في مصر – وإن بمتغيرات أخرى ربما –  لكن وجود العنف المتفشي أو المباشر لنقل الملكية الضخم من اقتصاد الدولة إلى الملكية الخاصة أمر ثابت فيها.

إعادة الترتيب

الحقب التاريخية لنقل الملكية هي حقب إعادة ترتيب اجتماعي، وبالنتيجة،إعادة ترتيب سياسي وإيديولوجي أيضا.

كانت حقبة تكوين الإمبراطوريات الاستعمارية واحدة منها. أصوات « ديمقراطية » كصوت لامرتين أو فكتورهيغو، في فرنسا، دافعت عن الاستعمار لأنه، حسبهم، يجلب « الحضارة » إلى البلدان التي يغزوها. كذلك تحول ثوار1848 ثم ثوار »بلدية باريس » في 1871، الذين تم إبعادهم إلى الجزائر،إلى مروجين

ل » المأثرة الحضارية الفرنسية » ومدافعين عن النظام الاستعماري. فقد جعلتهم امتيازات الاستعمار وإعادة ترتيبهم الاجتماعي يغيرون معسكرهم، لكن الخطاب الإنساني والاجتماعي ظل على حاله. و فيما بعد أصبح من تقاليد اليسار الاستعماري الفرنسي، في الجزائر وباقي المغرب، التمويه على أكثر المصالح وحشية بالإكثار من الكلام عن الإنسانية ومن الخطب المضخمة عن « الحرية، التسامح، الدفاع عن الحضارة » ضد « الجماهير المسلمة المتعصبة » وضد « الهمجية ».نجد بالمناسبة السمات الرئيسية لهذا الخطاب في قالب محدّث ولكن دون تغييرات كبيرة، كخطاب سائد في الوسائط الغربية الحالية. وهناك ما هو أقرب إلينا: في الثامن ماي 1945، أطلق مناضلون سياسيون فرنسيون وأيضا جزائريون،يعرّفون أنفسهم بالتقدميين، صفة « الفاشيين » على الوطنيين الجزائريين لأنهم رفضوا التخلي عن مطلب الاستقلال وإخضاعه لسياسة قوى اليسار الفرنسية.

التاريخ يعيد نفسه: كذلك اليوم في مصر يصف أنصار الانقلاب الإخوان المسلمين ب »الفاشيين » والمساندين لمبدأ المشروعية الديمقراطية ب »الخونة لوطنهم » لأنهم يرفضون  إخضاع الديمقراطية لأي اعتبار آخر.الصحفي جون مارسيل بوقرو نشر في جريدة « لو نوفيل أوبسرفاتور » الفرنسية (28 جويلية 2013) تحقيقا حول الوضع في تونس لم يخف فيه اندهاشه من أن « العنف حيال النهضة، التي تنعت أحيانا ب »الفاشية«  من قبل المعارضة العلمانية، لو حدث في فرنسا لجرت مماثلته بالفعل النابع عن هلع من الإسلام ». تعد هذه الإحالة إلى « الفاشية » إحدى سمات الترسانة الإيديولوجية التغريبية الحالية. وهي أولا في غير محلها لأن الفاشية والنازية منتوجان تاريخيان، سياسيان وثقافيان، خاصان بالغرب بصفتهما خليطين من العنصرية والمصالح المالية والإمبراطورية ذات الصلة بالتنافس بين القوى الغربية من أجل السيطرة على العالم. وهي ثانيا منافية للحقيقة التاريخية لأن هتلر لم يصل إلى الحكم عن طريق الانتخابات. بالعكس، كان أقليا في البرلمان، ولم يعين مستشارا بمعية ثلاثة وزراء في الحكومة سوى عن طريق الضغط الذي مارسته الأوساط المالية الألمانية وقسم من الجيش على رئيس « جمهورية  فايمار »(هندنبورغ). نفس الشيء بالنسبة لموسوليني، الذي لم يصل إلى الحكم سوى عن طريق انقلاب، أي « مسيرة روما » للمجموعات الفاشية المدعومة من ضباط سامين في الجيش ومن الأوساط الصناعية « الراغبة في استعادة النظام في البلاد ». غير أن لمنافاة الحقيقة هذه وظيفة معينة: دعم الزعم القائل بأن « الشعب قد يخطئ »، وتجنيب الديمقراطيين المزيفين كابوسهم المتمثل في التصويت الشعبي.

إنه تقليد سياسي موروث، كما يبدو، عن الثقافة الاستعمارية الفرنسية في بلاد المغرب، لكن أيضا في مصر عن طريق النفوذ الثقافي والتاريخي الفرنسي القوي: تقليد إصباغ مصالح خاصة بخطاب « يساري ».

غير أن السبب الأساسي لهذه المواقف يكمن هنا أيضا في نقل الملكية وما نجم عنه من إعادة ترتيب وتبدل في المنزلة الاجتماعية. بعد أن أصبحت مالكة، احتفظت النخب التي قادت البلاد إبان اشتراكية الدولة بقاموس شبابها، ملفوف ربما بحنين صادق لتلك الفترة. الشكل تغير لكن المضمون ظل كما هو، حيث جرت إعادة تأهيل أيديولوجيا « اليسار » لخدمة مصالح اجتماعية جديدة. هكذا دائما. نبلاء روما مثلا حافظوا على نبرات مساواتي وشعبية تعود إلى مؤسسي جمهورية روما وذلك بعد مرور مدة طويلة على تشكلهم كأرستقراطية.

إعادة الترتيب الضخمة تلك تمس أيضا العلاقات السياسية وتعيد صياغتها، ليس على المستوى الوطني فقط، بل على المستوى الدولي كذلك. تعد المنعرجات التاريخية منطلقا للتغيرات التي تحدث في التحالفات، في الروابط بين الدول، في العلاقات الدبلوماسية، لكن كل قوة بحاجة إلى وقت لتقييم الوضع الجديد، قياس التغيرات، الاستعداد للقادم، إيجاد معالم جديدة. من خلال الأزمة التي تهز العالم العربي حاليا، تتشكل تحالفات مدهشة، كأنها متناقضة وربما مخالفة لطبيعة الأشياء، تنعقد وتنفك بحسب تطور الوضع على المستوى المحلي كما على المستوى العالمي. في مصر، تتأرجح الولايات المتحدة الأمريكية بين تأييد الانقلاب وبين نقده، بين الحليف القديم والمأمون، المتمثل في القيادة العسكرية المصرية منذ أكثر من ثلاثين سنة، وبين سيرورة ديمقراطية قد تضع مصالحها في خطر. سبق لإدارتها أن ترددت كثيرا قبل تخليها عن مبارك. من جهتها العربية السعودية مع الإخوان المسلمين في سوريا، لكنها تؤيد الانقلاب العسكري في مصر، كما أنها في خلاف حاد مع قطر حول مصر، لكن كلاهما متحالفين في سوريا. حزب الإخوان المسلمين يندد بصمت الغرب بل بتواطؤه بخصوص الانقلاب والقمع في مصر، لكن محمد مرسي، بصفته رئيسا لمصر، قطع بصحبة بلدان الخليج العلاقات الدبلوماسية مع سوريا. في ليبيا، كانت القوى الغربية قد تحالفت مع بعض التيارات الإسلامية للإطاحة بمعمر القذافي بكل الوسائل، ثم أعادت الكرّة ضد الحكومة السورية، لكن ما إن وقعت الهجمات الأخيرة ضد المصالح الغربية في بنغازي حتى فتر اقتناعها بفائدة التحالف مع الإسلاميين في سوريا، وأبدت خشيتها من انقلابه عليها. برنار هنري ليفي، النصير الشرس لإسرائيل وللتدخلات العسكرية الغربية، احتفى ب »الثورة الديمقراطية » في ليبيا، على غرار بعض التيارات الإسلامية، ثم التهب حماسا بما أسماه « الانقلاب الديمقراطي » في مصر، على غرار بعض التيارات العربية « العلمانية اليسارية ».الحكم الجديدة في تونس نظم اجتماعا لما يسمى « أصدقاء سوريا »مع القوى الغربية وها هو اليوم يعارض التدخل العسكري في سوريا، الخ..

المنعرجات التاريخية حقب ترددات  وارتباك كبير.ومع ذلك، يكمن تفسير الاضطرابات، الفوضى التي تبدو سائدة في العالم العربي، في عمق التقلبات التاريخية الحالية،لا في  تآمر يد خفية وجبارة.

ج.ل


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