Durant pratiquement deux siècles, la Chine semble suivre la consigne napoléonienne citée en titre : elle a demeuré  dormante tout en tenant lieu « grosso modo » d’arène politique où les autres grandes puissances ont pu exprimer leurs forces. Au XXème  siècle, le Japon,  jadis son imitateur, la surpassait dans la guerre comme dans la paix. En effet, durant la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis se sont alliés avec la Chine, lui apportant ainsi leur aide. A titre d’exemple, en 1945, ils lui accordèrent un siège au conseil de sécurité des Nations unies. En 1949, après la prise du pouvoir par les communistes, Washington et Pékin se transformèrent comme par enchantement en adversaires, et la Chine a de nouveau reculé. Mao Zedong  a entraîné le pays dans une série de contradictions catastrophiques  réduisant son capital économique, technologique et intellectuel en une échelle vraiment inquiétante. Par la suite, en 1979, le lion endormi a commencé à s’ébruiter.

La recherche d’une Idiologie

La Chine actuelle pend conscience de ses atouts démographiques, économiques, de son histoire, et de sa capacité à en tirer profit de son patrimoine culturel riche et diversifié. Elle se distingue par son propre idéologie placée en antipode de la culture occidentale sans s’opter pour une logique d’affrontement. Elle envisage un développement politique propre. Au cœur de son idéologie se trouve le principe de la Voie Royale qui donne une théorie politique légitimant le pouvoir ; il est basé sur une triple légitimité. La question d’assoir un régime politique sur une légitimité est primordiale puisqu’elle lui offre une capacité d’agir et une marge de manœuvre nécessaire pour exercer la fonction politique qui est la sienne. Les confucéens de l’école de Gongyang (1) avancent l’idée selon laquelle un Roi est celui qui peut unir le ciel, la terre et les hommes, ou encore que la voie Royale est celle qui relie ces trois dimensions. La triple source de légitimité est basée sur ce principe,  encore faut-il démonter de manière objective les éléments qui fondent son essence.

La culture chinoise prend en considération en premier chef ‘’le Ciel’’ qui représente une légitimité sacrée et transcendante. Cette source politique contient d’un côté l’idée d’une volonté personnelle, relativement dissimulée, de l’autre elle tient compte d’une divinité nécessaire à la conservation de l’harmonie et de la symbiose de l’ensemble de l’être ; elle pense, par ce biais, le remettre relation avec son émanation originelle. La Chine historique est un ensemble, voire un mélange parfait de dynasties, c’est pourquoi, l’appui sur la légitimité historique a trouvé toute sa raison d’être. La terre, deuxième source de légitimité, élément fondateur de la voie la royale, provient de l’histoire, celle de la culture, de la pensée et de la religion. Elle représente, une autre spécificité  puisqu’elle envoie à une légitimité d’un espace géographique déterminé. Enfin, l’homme, le dernier maillon de la chaine de la voie royale, est un élément essentiel bouclant la boucle de la légitimité.

Le Ciel, dit la sagesse de Confucius : «  voit, mais avec l’œil du peuple, elle entend, mais avec l’œil du peuple. La voie du peuple provient de la voie de Dieu. Ce qu’entend ou voit le ciel n’est que ce qu’entend ou voit le peuple, et ce que le peuple considère digne de récompense ou de châtiment, c’est ce que considère le ciel de la même sorte. Il existe un rapport étroit et permanent entre le ciel et le peuple, c’est pourquoi ceux qui s’en chargent de la question du pouvoir doivent prendre cette question en considération ». (2) L’homme, élément de base, si important pour la Voie Royale, évoque une légitimité basée sur un appui populaire : la démocratie. Ainsi, la légitime issue de la terre, du ciel et de l’homme détermine directement dans quelle mesure on obéit volontairement ou non à l’autorité ou au pouvoir politique. 8Le Zhongyong explique que pour celui qui règne sur le monde, trois éléments sont importants : « le gouvernement d’un prince sage a pour base la vertu du prince et se manifeste par ses effets sur tout le peuple. Si on le compare avec le gouvernement des fondateurs des trois dynasties chinoises, on trouve qu’il ne s’en écarte pas. Si on le compare avec l’action du Ciel et de la terre, on voit qu’il ne lui est pas contraire. Si on le compare avec la manière d’agir des esprits, il n’inspire aucun doute ». (3)

Le rapport du pouvoir politique à l’action du Ciel, de la terre et de l’homme fait naître une légitimité sacrée, transcendante, humaine et divine à la fois. La relation qu’entretient la Chine avec son propre histoire, plus particulièrement celui de ses anciennes dynasties exprime une légitimité historique enracinée dans sa culture politique.  Et même si la Voie Royale  se manifeste dans le comportement du peuple à travers son choix libre et démocratique, elle reste tout de même tributaire de la voie sacrée.  Si l’on prend la Voie royale comme base pour déterminer l’autorité politique, l’ont trouve forcement une trinité composée du : ciel, de l’histoire et du peuple. L’autorité de celui qui gouverne est donc attestée par une triple légitimité ; elle consiste, autant que possible, à faire en sorte que le pouvoir politique soit fondé en droit et que la simple obéissance du peuple se transforme en devoir.

11 Si le pouvoir politique ne s’appuis pas simultanément sur cette triple légitimité, son autorité serait considérablement rabaissée : le peuple ne lui serait pas pleinement loyal, ni obéissant, et ne le reconnaît pas complètement, ni peut adhérer à son projet politique. Cette situation peut déboucher sur une crise et l’ordre politique est menacé. C’est pour cette raison que la philosophie politique confucéenne s’attache à la question de la légitimité afin de créer un ordre politique harmonieux et stable sur le long terme. Si en reprend ses mêmes notions, on trouve qu’il s’agit d’instituer, dans la durée, un ordre politique marqué par la paix et conforme aux circonstances, à la loi et à l’ordre des choses. Si l’on se réfère encore à une  fois aux mêmes notions, le problème que le confucianisme tente de résoudre  est donc celui du politique et non pas celui de la politique, au sens des institutions et de l’art de gouverner (4). La légitimité du pouvoir ou l’autorité politique prime sur les institutions ; les dispositions institutionnelles au sens concret du terme, les pratiques gouvernementales auxquelles recourt le pouvoir politique pour exercer ses fonctions passent en second lieu. Il existe de fait une primauté du politique sur la politique puisque le premier est au fondement du second. La question de légitimité est primordiale puisqu’elle détermine les questions afférentes aux institutions, aux méthodes, aux procédures où à l’art de gouverner. La Chine d’aujourd’hui est à la recherche d’une idéologie propre et d’une légitimité. En d’autres termes, il s’agit de celle du politique et cette question conditionne tout le reste. Y répondre pleinement, est la mission principale que les confucéens de nos jours tentent d’assumer. L’enjeu fondamental, plus particulièrement dans le contexte international actuel où le conflit pour un leadership mondial s’accentue, n’est rien moins que de résoudre un problème resté en suspens depuis une centaine d’années. ;La question fondamentale n’est pas seulement de s’appuyer sur  ces trois légitimités, mais aussi de parvenir à établir un équilibre entre elles.  La démocratie occidentale, depuis l’époque des Lumières, a insisté pleinement  sur le principe de « séparation des pouvoirs ». Toutefois, ce principe aussi important soi-il, relève selon la perspective confucéenne de la Voie royale d’un équilibre au sein de la politique comprise comme institution et mode de gouvernement, et non d’un équilibre qui régirait le politique en tant que tel. Dans ce domaine, le système démocratique occidental est fondé sur la « souveraineté du peuple », laquelle renvoie à un pouvoir unique, supérieur, absolu, exclusif, non transférable et, pour toutes ces raisons, non susceptible d’être lui-même contrebalancé. La culture politique chinoise n’est pas tout à fait semblable. Elle veut qu’un équilibre ne soit pas seulement trouvé en matière institutionnelle mais aussi en matière de légitimité; en d’autres termes, il n’est pas seulement nécessaire au niveau de l’organisation institutionnelle du pouvoir, mais aussi à celui des normes fondant sa légitimité même.  En effet, la philosophie politique chinoise, inspirée du confucianisme, pense que l’appui majeur sur un seul type de légitimité, quel qu’il soit, ne peut que générer un état de conflit penchant dans un seul sens, le politique sera perverti, ouvrant ainsi la voie à des abus. Si la légitimité est fondée uniquement sur le transcendant, elle écrasera forcement la volonté populaire. La politique théocratique de l’Occident chrétien au Moyen Âge ou encore celle du fondamentalisme musulman aujourd’hui,  le démontrent sans conteste. À l’inverse, si la volonté du peuple vienne à dominer, elle niera alors les valeurs transcendantes et sacrées du politique, aboutissant à une sécularisation extrême et au diktat de la satisfaction des désirs humains, une question qui reste en suspens pour les démocraties occidentales. C’est pourquoi,  selon le fondement de la Voie Royale, la solution adéquate, celle de la légitimité, est sans doute de faire en sorte qu’aucune légitimité ne s’empare d’une position de monopole et que chacune puisse jouer un rôle complémentaire vis-à-vis des autres dans une relation « harmonieuse », le mot clé est celui la conservation d’un équilibre entre les différentes légitimités. La Voie Royale est un type d’idéal prôné par les confucéens pour régler la question du politique en prenant pour archétype historique le gouvernement de trois générations de sage-rois (5). Certes, l’histoire dans laquelle la Voie Royale s’ancre comporte sa part de mythe, mais certains éléments sont néanmoins réels. L’idéal qu’elle véhicule n’est pas sans assise, car constitué au fil du temps, à partir d’une structure historique donnée. En se référant particulièrement à histoire, la culture politique chinoise semble avoir une différence fondamentale avec la démocratie occidentale, celle-ci a comme fondement philosophique en matière de légitimité, la théorie du contrat social, résultat d’une conjoncture historique, d’un saut intellectuel qui a fait d’abord appel à la raison puis à la base populaire et finalement à des concepts pour établir l’origine de l’État et sa légitimité. En d’autres termes,  le contrat social a eu pour objectif de résoudre la question du politique. Ainsi,  la légitimité de la démocratie manque de réalité historique, elle est purement le fruit d’une construction intellectuelle. Ses idéaux, ses objectifs et fins dernières sont en dehors de l’histoire, ils la dépassent davantage qu’ils n’en sont véritablement le produit.  A l’inverse, la voie royale est un fait historique caractérisée surtout par son aspect concret, elle a pu prendre place parce qu’elle est un fait historique concrètement réalisé ; il est distingué comme l’a souligné Louis Rougier, de cette mystique ou illusion qu’est la démocratie (6).  Celle-ci est aussi un idéal archétypique qui ne serait réalisé que graduellement et de façon limitée, atteindre pleinement et finalement l’idéal démocratique ne peut être qu’un long processus. Au cours de l’histoire chinoise, la politique de la Voie royale a pu être réalisée concrètement à travers l’institution monarchique propre à l’Empire, qui reposait, en principe, sur la bienveillance et le non-agir. (7) De ce fait, on peut reconnaître une certaine légitimité à l’institution impériale mais de manière limitée : elle est légitime lorsqu’elle présuppose l’application, selon les termes traditionnels, d’une politique fondée sur « le sens de l’humain ».

Or, le confucianisme qui, tient également compte du facteur humain, s’approche malgré lui, au fondement de la démocratie occidentale. L’exaltation de l’homme est une vertu capitale du confucianisme, elle ne cesse, en revanche, d’être légitime que lorsqu’elle fait abstraction à ses propres principes. Une configuration institutionnelle donnée s’inscrit dans des phases historiques concrètes et peut donc changer. Elle n’est que le moyen ou l’instrument de réalisation d’un ordre politique pleinement légitime, lequel est pour sa part immuable. Si l’on examine la situation politique propre à la Chine, on trouve que le régime monarchique réalise uniquement le registre instrumental, il sert à faire circuler le pouvoir et organiser l’Etat au maximum. Au fil du temps, il s’est avéré être le seul choix naturel, concrétisé par l’histoire. Néanmoins, ce régime n’en est pas  immuable dans le temps, si  les circonstances historiques changent, la configuration institutionnelle peut aussi évoluer et selon l’impératif de la conjoncture. A vrai dire, différents systèmes ayant pris place un peu partout dans le passé-régimes monarchique, démocratique, aristocratique -ont pu contribuer à la réalisation de la Voie Royale.  Cependant, l’humanité est en perpétuelle métamorphose, si lesdits régimes ne suffisent pas à exprimer pleinement la légitimité du politique, la capacité intellectuelle de l’homme est ouverte, appelée à faire preuve de créativité pour inventer un nouveau système politique à partir d’éléments positifs, conformes à la nature humaine, ses conditions et ses circonstances sociales. Concernant la Chine, il nous faut  prendre exemple sur la sagesse de Confucius qui créa un système politique propre en synthétisant les acquis des trois anciennes dynasties (8).  L’apport des sages de l’Antiquité  a eu pour but d’en tirer profit des normes immuables qui président à la Voie royale. La Chine tente aujourd’hui de créer un système politique concrétisé par une institutionnalisation adéquate. Ce n’est pas seulement la mission historique des confucéens, mais aussi  celle de tous les courants de pensée.

Le développement politique

Des  théories comme celle de Lipset,  R. Dall, de Barrington Moore, ou même de Bertrand Badie (9), ont  précisé à biens des égards les traits de la société moderne. Cette dernière a conjugué le capitalisme et la démocratie parlementaires après une série de révoltions propagées de manière systématique : révolution puritaine à caractère religieux, révolution française et guerre de succession américaine. C’est la voie de la révolution bourgeoise qui a eu son dernier mot. La société européenne a crée son propre évolution par l’élection d’une classe créatrice de richesse et de  développement économique et sociale. C’était  là, où le dévoilement politique a commencé, le changement de mœurs, de mentalité, de mode de vie, le mérite, l’égalité et la compétence ont fait le terrain fertile de la justice sociale et de la démocratie. La Chine n’échappe pas à la règle, car même si la deuxième voie, celle du communisme, a imprégné fortement la culture politique chinoise, la chine a opté à travers sa politique économique envahissante, dopée par un dumping commercial largement argumenté, pour un développement de la société en créant un système de nivèlement par le bas. Et Même si, Deng Xiaoping, le président réformateur, a réitéré sans gêne son allégeance au communisme, la Chine a privilégié le choix libéral malgré tout. Lors de la réunion ‘’ opérationnelle théorique’’ appelée par le Comité centrale en mars 1979, le même président a emphatiquement affirmé que le pays devrait vivement s’attacher aux quartes principes de bases pour consolider le socialisme chinois qui sont ‘’ la ligne de conduite socialiste’’, la dictature prolétaire’’, ‘’ la  conduite du PCC ’’ et le marxisme Léninisme. Mais, la Chine souffre de la crise de la première société, elle a démontré une année auparavant, lors de la Troisième session plénière du Onzième Comité central en décembre 1979, son malaise des trois croyances : le marxisme, le socialisme et la primauté du parti. Les confucéens ont précisé que la retard que récuse leur pays est du aux choix du communisme. Les libéraux chinois considérèrent que la tradition culturelle chinoise, incarnée au premier chef par le confucianisme (10), constituait un obstacle de taille à la modernisation du pays tout comme à sa démocratisation. À cet égard, leur position était identique à celle des marxistes. Mais, tant pour les libéraux que pour les confucéens, la chute de la Chine continentale aux mains des communistes était à la fois un drame et un rude coup porté au processus de modernisation du pays. Aussi, les deux camps partageaient un dessein bien réel : promouvoir les valeurs de la démocratie libérale et s’opposer à l’expansion communiste (11). Il est tout à fait logique  que le communisme soit dénigré et critiqué de manière véhémente. Cette crise ou malaise chinois à l’égard du communisme est née, apparemment, des effets déstructurant de ce que le communisme l’a appelé le  ‘’ grand saut en avant’’, largement dopée par l’idiologie dogmatique de la révolution culturelle.  Outre la société, elle a perturbé même la conscience sociale de la sphère officielle. C’est ainsi que la crise s’est manifestée jusqu’au sein du PCC. Dans ‘’les décisions sur quelques problèmes historiques du parti depuis la fondation de l’Etat’’ adoptée par la sixième session plénière du onzième comité centrale du PCC en juin 1981, le grand saut en avant et la révolution culturelle ont été considéré comme des erreurs de gauches (12). La crise de la première société qui nécessite fortement une réforme appropriée pour faciliter la période transitoire a du imaginer des priorités où figure tout d’abord la réforme économique. La prise en conscience du dysfonctionnement du système socio-économique, le remise en cause de la domination dogmatique et l’aliénation pure et simple aux principes du parti, ont bien annoncé un changement d’orientation économique qui ne dit pas son nom. Il ne faut pas omettre d’autre part l’institutionnalisation de la vie politique et de préférence à travers une  gestion démocratique. Parlant d’économie, la gestion bureaucratique lourde et tatillonne n’a pas pris en compte comme il se devait les relations entre facteurs productifs et valeur relative des produits. Son calcul approximatif ou imprécis a eu un résultat peur reluisant. Démographie mal géré au lieu du travail, marché noir, mauvaise gestion, et tant d’autres anomalies ont été mis au compte du communisme. La volonté de chercher une nouvelle voie palpite aux tréfonds de la société, et la Chine semble se diriger malgré elle, vers un libéralisme qu’avait refoulé presque un siècle. La revoilà, de nouveau, prendre une position stratégique dans le monde. Les failles du système bureaucratique chinois ont généré une forme d’attitude  passive à l’égard du travail. Sur le plan de la gestion du parti, les réformes objectaient pour la suppression des effets négatifs de la centralisation excessive. Celle-ci a marqué une disparité notoire entre le secteur politique fortement centralisé, et les autres secteurs, particulièrement l’économie. En effet, la machine de la réforme consistait à remodeler le système économique dont le modèle a été présenté dans la décision adoptée par la troisième cession plénière du Douzième comité central du PCC en décembre 1984. Cette décision a défini le but de la politique de réforme comme ‘’ développement d’une économie planifiée des produit’’ basée sur la priorité publique. Au cœur de cette crise sociétale chinoise se trouve son rapport ambigu avec la sphère économique, un parti politique excessivement hiérarchisé chapotant la politique générale du pays et une volonté de se libérer des dogmes socialistes considérés comme néfastes et responsables du retard que récuse la Chine en matière de développement économique et social. L’essence même du contrôle social exercé par la PCC réside dans la mise en valeur du dogme de  la priorité du peuple entier qui prédomine sur toute autre  considération. Les entreprises d’Etat étaient jusqu’ici les piliers du socialisme chinois. En 1994, bien que leur nombre a représenté seulement 26,% des entreprises du pays, elles ont produit 48,% du revenu national total, usé 60% du capital total, et employé 42% de la manouvre nationale. (13) La masse salariale du secteur étatique est largement dominante : en 1995, elle représentait 76,9%, contre 15,1% pour celui de la propriété dite collective. Même si le nombre de produits programmés par la planification central a diminué radicalement de 256 en 1980 à 29 en 1990, les ressources importantes demeurent sous le contrôle de l’Etat.

Conclusion

« Ce n’est pas la conscience du peuple qui détermine leur existence sociale, mais c’est leur existence sociale qui détermine leur conscience »

Partant de ce fameux dicton de Karl Marx, l’on comprend que la question du réveil de la Chine revienne manifestement à la prise de conscience de sa réalité sociale. L’histoire de l’humanité retient d’une part la datte du 1492, comme la fin de l’empire arabe en Espagne, de l’autre, elle inaugure le réveil de l’occident par la fameuse expédition de Christophe Colomb aux Amériques. Mais, ce que l’on sait moins, que quatre-vingt sept ans plus, un amiral chinois, Zheng He, avait entamé la première d’une série de sept expéditions non moins ambitieuses. Les vaisseaux de Zheng étaient bien plus importants, et plus construits que ceux de Colomb ou de Vasco de Gama, ou d’aucun autre navigateur européen des quinze et seizièmes sicles (14).

La chine est une force historique non seulement du moyen âge mais de l’antiquité. D’ailleurs, la recherche d’une idéologie adéquate au développent politique trouve ses prémices de l’histoire confirmée par le système dynastique chinois. Dans la mesure où la chine puise dans ses forces pour trouver une idéologie propre susceptible de lui réaliser un décollage économique et sociale, cela veut dire que ce pays veut se confirmer non seulement comme superpuissance mais  comme civilisation à part entière, distinguée et prête à prendre la relève de l’occident.

Hammou Boudaoud
15 mai 2013

Notes de bas de pages

1- La tradition du Gongyang, dans laquelle se place Jiang Qing comme avant lui Kang Youwei, est d’abord une tradition exégétique portant sur l’un des grands classiques de l’Antiquité, les Annales des Printemps et Automnes (Chunqiu). Le commentaire du Gongyang considère que ce texte, loin d’être une simple chronique historique, véhicule en fait un enseignement ésotérique de Confucius. Des détails de ces chroniques, Confucius tirerait en fait des leçons pour le présent, parfois applicables de façon très concrète, notamment en matière juridique. Voir Anne Cheng, Études sur le confucianisme Han : l’élaboration d’une tradition exégétique des classiques, Paris, Collège de France, Institut des hautes études chinoises, 1985.

2- ARCELAN Salah, Introduction à la philosophie politique,  Le Caire 2001.

3- FILLIOUD Sébastien, « Le confucianisme de la « Voie royale », direction pour le politique  en Chine  contemporaine », Extrême orient-Extrême occident, Paris 2009/1 N :3 p.21

4- C’est de manière conventionnelle que l’on choisit ici de traduire zhidao et zhengdaorespectivement par la politique et le politique et le , pour traduire la différence entre ce qui constitue l’institution et la pratique politiques d’une part et les principes qui sont à leur fondement d’autre part. Bien que traducteur de quelques textes occidentaux relatifs à la « théologie politique», Jiang Qing ne fait pas allusion explicitement à cette distinction occidentale (et en particulier schmittienne),

5- Les fondateurs des anciennes dynasties : Yu le Grand, Tang, Wen et Wu.

6- ROUGIER Louis, La Mystique démocratique, ses origines, ses illusions, Paris,  Edition Flammarion, 1929

7- FILLIOUD Sébastien,  « Le confucianisme de la « Voie royale », direction pour le politique  en Chine  contemporaine », op.cit., p 23

8- Les dynasties des Xia, des Shang et des Zhou. N.d.T. Jiang Qing reprend ici l’idée avancée par la tradition Gongyang, et plus tard par Kang Youwei, d’un Confucius réformateur.

9- BARRINGTON Moore, Les origines sociales de la dictature et de la démocratie, Editions la Découverte, Paris 1983, ou BADIE Bertrand,  Le développement politique, Editions Economia, Paris 1984.

10- FILLIOUD Sébastien, «  Culture et démocratie : réflexions à partir de la polémique entre libéraux taïwanais et néo-confucéens contemporains »

11- Cet intérêt commun stimulait l’envie de collaborer. Il y eut dès lors des échanges, et les revues susmentionnées ouvrirent leurs colonnes à l’adversaire. Progressivement, les différences entre les deux camps devinrent néanmoins de plus en plus manifestes, jusqu’à provoquer une polémique ouverte. Le détonateur en fut une critique de Mou Zongsan à l’endroit du célèbre logicien Jin Yuelin (1895-1984), resté sur le continent, et dont il avait d’ailleurs suivi les cours alors qu’il étudiait à l’université de Pékin dans les années 1929-1933. Avec l’arrivée des communistes, Jin, tout comme nombre d’autres intellectuels, fut contraint de se livrer à des séances d’autocritique. Après avoir eu vent du contenu de l’une d’entre elles, Mou écrivit le 2 janvier 1952 un essai dans la revue de Hong Kong L’homme libre, dont le titre était précisément : « Un homme véritablement libre », cité par MAN Ho-Hoe, « Contrôle social et changement politique dans les sociétés communistes subsistantes : une application des cas Chinois et Est-Allemand à la Corée du Nord », Revue Internationale de Politique Comparée, volume : 9, 2 Paris 2003  p-p19 20

12- Ibid.

13- Idem. p 15

14- ZAKARIA Fareed, Le monde post-américain, Collection Tempus, Editions Perrin, paris, 2010.p 4

15- Voir  ZAKARIA Fareed, Le monde post-américain, op.cit., p 97 ou ATTALI Jacques, 1492, Editions Fayard, 1991

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