Madame Christiane Taubira,
Ministre de la Justice et des Libertés, Garde des Sceaux.
13, Place Vendôme 75042 Paris Cedex 01
France

Alger, le 23 mai 2012

Madame la Ministre,

Les engagements moraux et politiques de Monsieur François Hollande, aujourd’hui Président de la République française pour une meilleure Justice, digne de la France de 1789, berceau des Droits de l’Homme, m’encouragent à me joindre aux milliers de pétitionnaires, mais surtout, aux millions de citoyens algériens qui n’ont cessé de dénoncer l’arrestation à Paris, le 16 Janvier 2012, pour le compte du pouvoir en place à Alger, du physicien algérien le Dr Mourad Dhina, militant des Droits de l’Homme et opposant farouche au régime des généraux putschistes qui exercent le pouvoir réel, derrière la piètre façade de leurs complices civils.

Cette arrestation quasi arbitraire, s’est en effet abusivement appuyée sur un mandat d’arrêt international, déjà examiné par la Justice Suisse – pays de résidence du Dr Mourad Dhina, depuis plus de 20 ans – qui l’a définitivement classé, après l’avoir jugé totalement infondé, au bout de 6 années d’enquête. Un mandat d’arrêt international de nature purement politique, émis qui plus est – faut-il le rappeler ici – à la demande d’un pouvoir lui-même frappé d’illégitimité, en tant qu’il est issu d’un Coup d’Etat, celui du 11 Janvier 1992, par lequel les généraux d’Alger et leurs complices civils des partis politiques perdants, ont foulé aux pieds la souveraineté du peuple algérien, qui venait d’élire une large majorité de députés du parti du Front Islamique du Salut aujourd’hui dissous ; un Coup d’Etat à l’origine de la terrible « décennie noire » et de son bilan humain et matériel désastreux pour notre pays, et dont certains crimes imprescriptibles documentés et caractérisés continuent de poursuivre certains généraux criminels parmi ceux-là mêmes qui ont osé émettre des mandats judiciaires contre leurs opposants politiques, réduits à l’exil forcé pour échapper, à la folie des exécutions sommaires, des disparitions forcées, des arrestations arbitraires et de la torture systématique.

Ce sera à l’honneur du Gouvernement de la France, de rompre définitivement avec cette longue et sinistre période des collusions et des complaisances, des compromissions et des manipulations orchestrées par les « Services » de nos deux pays respectifs, en revenant à la norme saine et respectable, celle des relations loyales entre Etats, celle des rapports d’amitié entre peuples, pour les intérêts mutuels de nos deux pays qui partagent une si longue page d’Histoire qui, pour avoir été et demeure, souvent douloureuse, n’en porte pas moins d’immenses potentialités humaines, socioéconomiques et culturelles, l’Algérie redevenant – ainsi que l’a affirmé l’un de vos illustres hommes d’Etat – « la porte étroite » de l’Afrique autant que du monde Arabe, aux yeux de la France, tandis que la France solderait courageusement son passé colonial en regardant désormais le peuple algérien comme un peuple digne, qui a acquis de haute lutte, son droit à la liberté, à la considération et au respect.

Je vous prie de croire, Madame la Ministre, en la sincère considération du simple citoyen algérien ordinaire, que je suis, qui saisis par ailleurs cette occasion, pour vous souhaiter beaucoup de succès dans la conduite de cette mission redoutable pour laquelle vous avez été si pertinemment désignée, au seins du Gouvernement français.

Abdelkader Dehbi

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