« Un homme perché sur le sommet d’une montagne peut se croire plus grand que tous les hommes, mais qu’un séisme vienne à faire trembler cette montagne, et le voici à terre. Mais un homme porté par des idées et des actions discutées avec d’autres hommes peut construire une maison qui résiste au séisme. Ce parti et ce pays sont notre maison à bâtir envers et contre tous les séismes », extrait du message d’Ait Ahmed à la convention nationale.
Qui peut imaginer que cette citation puisse être utilisée, un jour, contre des réfractaires du FFS ? Car, au préalable, elle fut destinée à la famille du FFS pour que ses membres gardent les pieds sur terre. Cependant, bien que chaque membre ait le droit d’émettre, sans ambages, son avis, les critiques ne doivent pas, tout de même, sortir du contour partisan. En effet, attaché plus que quiconque à la démocratie, Hocine Ait Ahmed a souhaité, avant d’engager le parti dans la bataille législative, qu’il y ait un débat transparent au sein du parti. « C’est en toute sérénité que le parti doit aborder cette étape de son parcours, et dans le respect de tous ceux qui, hors du parti, défendront de manière respectable d’autres visions que la nôtre », a-t-il noté à propos du choix de la participation ou du boycott.
De toute évidence, un président qui respecte les avis des autres formations politiques ne peut pas être soupçonné de vouloir verrouiller le débat au sein de son propre parti. Par ailleurs, bien qu’on ait fait des appréciations diverses sur la situation politique, le président a insisté sur la solution algérienne afin de parvenir à une alternative sans effusion de sang. « La voie de la violence a échoué à libérer l’Algérie de la dictature, du sous-développement et des menaces extérieures et doit laisser place à la lutte politique au sens le plus sérieux du terme », a-t-il suggéré aux militants la voie à suivre.
D’une façon générale, après une concertation avec la base [certains camarades estiment que la direction n’a pas été à la hauteur. Mais ils n’ont rien fait non plus pour qu’il y ait une large concertation.], l’ensemble de la famille du FFS a été d’accord avec le principe d’une participation tactique. « D’abord parce que notre but ne réside pas dans un quota de sièges à atteindre », a argué Hocine Ait Ahmed. Toutefois, bien qu’il ait pu y avoir des insuffisances dans l’organisation du débat avec les militants, il n’en reste pas moins que le consensus a été, en fin de compte, dégagé par les instances du parti. 116 membres du conseil national sur 120 ont opté pour la participation. Du coup, un observateur, même averti, de la vie du parti aurait du mal à parier sur une éventuelle crise interne.
Dans une interview accordée au journal El Watan du 29 mai 2012, Ali Laskri, premier secrétaire national, nous éclaire sur les motivations des camarades cherchant à provoquer une cassure dans le parti. Selon Ali Laskri, et jusqu’à preuve du contraire, le principe de la participation n’est pas remis en cause. De la même manière, le principe de la constitution des commissions a été également en conformité avec les statuts du parti. « Est-ce le choix des listes électorales et surtout les classements des candidates et candidats qui ont été contestés ? Certainement, et c’est parfaitement compréhensible », tente le premier secrétaire, pour sa part, de situer la pomme de discorde au sein du parti. En tout cas, cette attitude aurait pu être comprise par les militants, si les candidats non retenus avaient exprimé leurs mécontentements d’une façon sincère. On aurait dit qu’il s’agissait uniment d’une réaction humaine.
Malheureusement, certains camarades se sont livrés, pendant la campagne électorale, à un travail de sape. Auraient-ils contesté le choix du parti, s’ils avaient été retenus comme candidats ? Sans qu’il y ait une ombre de doute, ils auraient trouvé le choix du parti formidable. En tout état de cause, la remise en cause du parti prouve, si besoin est, que les frondeurs ont placé l’intérêt électoral au dessus de l’intérêt politique. Ainsi, au moment où le président du FFS déploie tous ses efforts en vue de réhabiliter l’action politique en Algérie, les frondeurs l’interpellent afin qu’il prenne « les mesures urgentes, utiles et nécessaires à même de rétablir et de consolider la confiance entre notre parti et la population.» Ils oublient seulement que ce sont eux qui ont entravé et entravent encore ce travail. En effet, Hocine Ait Ahmed n’a pas attendu qu’on le sollicite sur cette question pour assigner au parti une telle mission. « Notre but est dans la remobilisation politique et pacifique de notre parti et de notre peuple. C’est là l’essentiel de notre décision. Remettre du mouvement dans le statu quo », a-t-écrit dans son message du 2 mars 2012.
Encore une fois, il se peut que la direction n’ait pas joué pleinement son rôle. Mais est-ce une raison pour discréditer l’action du parti ? « La mainmise sur le parti par une équipe et à l’opposé de sa ligne stratégique vise à l’inscrire dans un processus de normalisation pour mieux atteindre leurs objectifs inavoués », écrivent encore les frondeurs. Quoi qu’il en soit, la manœuvre est habile puisqu’ils incriminent le parti tout en ménageant le président, Hocine Ait Ahmed. Or, cette direction a été investie par Hocine Ait Ahmed le 18 novembre 2011. Celle-là est, quoi que les mauvaises langues puissent dire, est responsable devant le président du FFS. Par conséquent, toute remise en cause de la direction est, me semble-t-il, une façon sous-jacente de contester le président. Par conséquent, l’allégation selon laquelle la direction a emprunté « une démarche glissante (tendance de droitisation) très apparente dans le discours actuel du parti » est une critique visant le président Ait Ahmed qui n’a pas su maitriser les agissements de sa direction. Dès lors, comment demander au président de dénoncer la direction qui applique avant tout ses directives. Au contraire, le président devrait les remettre au plus vite à leur place.
Cependant, les frondeurs vont jusqu’à accuser la direction actuelle, avec la bénédiction, sans qu’ils le disent directement, d’Ait Ahmed, de se compromettre avec des cercles du pouvoir. « Aujourd’hui, le FFS est géré à l’extérieur par certains cercles du pouvoir. Dans quelle perspective ? Dans quel but ? Toute la question est là », s’interroge le représentant du FFS à l’étranger, Samir Bouakouir. Ce grand militant du FFS, que j’ai soutenu personnellement tout au long de la campagne électorale, a décidé de faire cavalier seul. Bien qu’il ait raison, au départ, de s’en plaindre à propos des dépassements observés au consulat de Nanterre, son initiative lancée sur BRTV consistant à réunir les cadres du parti ne fut pas, selon mon humble avis, la plus appropriée. De la même manière, la disparition du malaise, selon Ali Laskri, en allant aux élections locales me parait chimérique. Tout compte fait, les militants du FFS ne peuvent pas se regarder en chiens de faïence jusqu’à la tenue des élections municipales. Et comme, par enchantement, les malentendus s’évaporeront avec une supposée mobilisation qui naitra ex nihilo. En somme, la direction nationale doit engager le plus large dialogue avec tous les militants. Et si un groupe n’est pas d’accord avec une option politique quelconque, le président du parti arbitrera entre les deux voire plusieurs choix. Mais une fois la position est finalement arrêtée, les contradicteurs devront s’aligner ou s’en éloigner. Tel est, du moins, l’avis du militant de base que je suis.
Boubekeur Ait Benali
30 mai 2012