L’annonce des « réformes profondes » en Algérie a permis à l’ancien personnel politique, ayant notamment empêché le processus démocratique, de revenir sur la scène politique. Depuis 1992, le pays vit une crise politique abyssale. Et l’arrivée de Bouteflika au pouvoir, le 15 avril 1999, n’a fait qu’envenimer la crise. Bien qu’il ait gouverné avec une constitution limitant le nombre de mandat présidentiel à deux, le chef de l’État, au mépris de toute l’opinion nationale et internationale, décida en novembre 2008 d’abroger la loi lui interdisant de briguer un troisième mandat. Résultat des courses : le président algérien ne quittera pas le pouvoir que dans un cercueil, pour paraphraser Albert Memmi. Par ailleurs, le vent de liberté qui a soufflé sur les pays de l’Afrique du nord a menacé le pouvoir de Bouteflika. Il trouve alors la parade en promettant notamment des réformes profondes. Bien que le proverbe dise « il vaut mieux tard que jamais », il n’en reste pas moins que les personnes chargées du dossier ou celles consultées laissent l’observateur dubitatif. En effet, l’éradicateur Mohamed Touati est chargé de seconder l’enfant du système Ben Salah dans l’accomplissement de cette mission. Quant aux invités, leurs noms évoquent beaucoup d’amertume pour leur gestion de la crise des années 1990. Ainsi, dans une déclaration, publiée par TSA, Khaled Nezzar estime qu’« Il [le dispositif mis en place par Bouteflika] est susceptible de hisser la République algérienne au niveau d’un État de droit attendu depuis l’aube de l’indépendance ». Du coup, les usurpateurs du pouvoir, qui sont à vrai dire à la tête de l’État depuis 1962, se réveillent en 2011 pour se rappeler de la nécessité d’édifier un véritable État. Toutefois, en dépit de la procédure suscitant méfiance et désaffection, les mêmes personnes, qui ont berné le peuple, jurent que cette fois-ci c’est le moment approprié. Mais que vont nous proposer ces décideurs ? Une chose est certaine : le pouvoir ne doit pas changer de main. En tout cas, les Algériens ne sont pas dupes. Ils n’oublient pas de si vite sur quoi déboucha la promesse d’organiser des élections « libres et honnêtes », en 1991. Et la personne qui dirigeait le gouvernail de la nation à ce moment-là ne fut autre que Khaled Nezzar. En intervenant militairement pour arrêter le processus démocratique, ce général à la retraite se demande aujourd’hui le sens à donner au « non aboutissement de nos aspirations vers plus de liberté et vers une quête d’une meilleure gouvernance… » Or, en 1992, l’Algérie aurait eu peut être la chance de rentrer définitivement dans une ère de démocratie. Cependant, et il faut apporter un bémol, les vainqueurs ne pouvaient pas être tous considérés comme des anges ou des chantres de la démocratie. Et les Algériens auraient probablement souffert de leur gouvernance. mais au moins, dans ce cas là, le choix du peuple aurait été accepté, bien qu’il ait pu déboucher sur de multiples restrictions. Et après tout, le peuple est souverain, dit-on. Cependant, en lisant les propositions de Nezzar, on pourrait se demander comment l’Algérie n’ait pas pu se démocratiser plus tôt ? En effet, la quatrième proposition du général est formulée de la manière suivante : « La primauté de la légitimité pour toute question touchant au temporel et aux droits du citoyen ». Hélas, celui qui fait cette proposition a quitté le pouvoir. Mais au moment où il fut aux responsabilités, il avait opté pour une gouvernance ne laissant aucun espace à l’opposition de s’exprimer. En somme, si le pouvoir a la volonté de changer quoi que se soit, il faudra d’abord qu’il se remette en question. Les Algériens, depuis 1962, n’ont jamais exercé véritablement leur droit de choisir eux-mêmes leurs responsables. Ainsi, la meilleure réforme est avant tout l’organisation des élections libres en Algérie, et ce en dehors de toute contrainte. A ce moment-là, les nouveaux représentants du peuple choisiront la nature du système. Et l’Algérie retrouvera toute sa splendeur.

Boubekeur Ait Benali
29 mai 2011

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