A propos de «La troisième mi-temps»

Ahcène Amarouche, Le Quotidien d’Oran du 13 janvier 2010

Le Quotidien d’Oran a publié samedi 2 janvier une contribution de Djamel Labidi sous le titre «La troisième mi-temps» où l’auteur se saisit des événements entourant le match Algérie-Egypte pour dénoncer les excès de certains journalistes francophones concernant la question de l’identité algérienne.

L’auteur met en cause la presse francophone parce que, selon lui, elle débouche, «sur des attaques centrées sur la dimension arabo-islamique de l’identité algérienne et sur la langue arabe». Il accuse ces journalistes de verser dans ce qu’il appelle l’auto-racisme qui consiste à «se voir avec les yeux de l’autre». Selon lui ces journalistes, et à travers eux, comme on s’en rend compte à la lecture de l’article, l’élite francophone, continueraient de porter le complexe du colonisé. En en appelant à Frantz Fanon pour appuyer ses dires, il écrit: «l’aliénation coloniale a la vie dure». Nous voudrions lui porter ici la contradiction sur sa conception de l’identité algérienne et montrer qu’il est doublement victime de l’aliénation qu’il croit déceler chez ses concitoyens francophones.

Amalgames, confusions et jugements de valeur Par quelle saugrenue association d’idées l’auteur fait-il le rapprochement entre les manifestations de l’identité algérienne à travers tout le pays à l’occasion du match Algérie-Egypte, que la presse francophone – et arabophone, ce qu’il omet bien inconsidérément de signaler-n’a fait que relayer, et le débat sur l’identité nationale lancée en France par Nicolas Sarkozy ? Il y aurait dans les deux cas, et par on ne sait quelle «ironie de l’histoire» (l’expression est de l’auteur), la même cause: l’islamophobie et l’arabophobie. Au vu de l’ampleur des manifestations suscitées par les outrages commis par les Egyptiens à l’encontre de l’équipe nationale de football (joueurs blessés par des jets de pierre) et contre les symboles de l’Algérie combattante (martyrs offensés) et de l’Algérie indépendante (drapeau brûlé), ce serait tous les Algériens qui feraient ainsi preuve d’islamophobie et d’arabophobie-plus que les Français de l’Hexagone chez qui l’auteur trouve des voix courageuses pour dénoncer ces phénomènes ! L’aliénation coloniale ne concernerait donc pas seulement les journalistes francophones. Contre ces derniers qui pratiqueraient le dénigrement de tout ce qui est arabe «sans éprouver le besoin de soumettre ce qu’ils disent au contrôle des faits», l’auteur se laisse aller à des accusations gratuites d’une gravité exceptionnelle, doublées de jugements de valeur où transparaît un mépris sans nom. A leur intention en effet, il rappelle le vieil adage: «Il n’y a que l’âne qui renie ses origines». Une ligne auparavant, il claironnait: «Je suis fier d’être arabe» sans référer d’aucune manière à l’identité algérienne dont il se veut être le Chevalier Servant, contre ces aliénés de la colonisation. Chacun comprendra que par cette formule il renvoie à l’être dans ses déterminations ethno-géographiques et sociales, non à la langue, qui n’est qu’un élément de l’identité d’un peuple. 

Peut-être aurait-il dû nous préciser tout de même, pour notre édification, de quelle tribu yéménite ou du Hedjaz il est le descendant ! Je dis cela parce qu’une thèse courante chez les tenants d’un arabisme à tous crins auxquels Djamel Labidi fait de toute évidence une allégeance éhontée, voudrait que les habitants d’Afrique du Nord viendraient de l’Arabie Heureuse: n’a-t-on pas entendu un jour un ancien président de la République algérienne saluer ses ancêtres yéménites à l’occasion de la visite du chef de l’Etat du Yémen dans notre pays ? Ne s’embarrassant pas plus que cela de considérants historiques ni des faits (dont il reproche pourtant au journaliste du Quotidien d’Oran incriminé de ne pas tenir compte), l’auteur énonce, en jouant sur la polysémie du terme arabe, que «si l’Algérie parle l’arabe, c’est qu’elle est quelque part arabe». Bien sûr, il récuse quelques lignes plus loin la vision ethnocentriste de l’identité qui confine au racisme-en se référant à cette fin au cas de la France. Mais la dimension linguistique suffirait-elle donc pour définir l’identité d’un peuple ? A supposer que ce soit le cas, peut-on ignorer superbement, comme le fait Djamel Labidi, l’autre dimension linguistique du peuple algérien-la dimension berbérophone qui, soit dit en passant, est bien antérieure à toutes les autres ? Car enfin quelle serait dans cette logique l’identité des Algériens qui ne parlent pas l’arabe ? Hormis ceux d’entre eux qu’il qualifie de francophones sans se donner la peine de resituer leur trajectoire dans le cours forcé de l’histoire pour les accuser sans nuance d’être des aliénés de la colonisation, l’auteur ne se pose pas la question au sujet des Algériens berbérophones qui peuplent plusieurs régions du pays depuis la nuit des temps-et qui ne connaissent de l’arabe que l’apport de cette langue à la leur, au terme de plusieurs siècles d’acculturation. Ceux-là aussi seraient-ils sous la subjugation de la colonisation ? Il serait vain de renvoyer l’auteur aux faits, qu’il connaît parfaitement au demeurant-notamment à ceux de la guerre de libération nationale qui a vu se soulever les masses arabophones et berbérophones dans tout le pays, à l’instigation et sous la conduite de personnalités éclairées des deux cultures, dont beaucoup ont payé de leur vie leur engagement pour la libération de l’Algérie du joug colonial. Sans doute l’auteur de cette contribution dira que je lui fais un mauvais procès car il n’incrimine pas les Algériens berbérophones mais seulement les francophones. La question ne se pose pas moins en creux dans son texte précisément parce qu’il ne prend pas la peine de la poser-ou plutôt parce qu’il évite de la poser. Quant aux Algériens francophones, Djamel Labidi sait bien, lui qui ne l’est pas moins qu’eux, qu’ils ne le sont qu’en tant que le français est leur langue de travail, non dans leur être ethno-social constitutif de leur identité nationale. Il en est de même des Algériens arabophones relativement à l’arabe classique- langue qu’il prend bien soin (et à raison) de dissocier de l’arabe parlé algérien mais pour glorifier l’une et vilipender l’autre.

D’une aliénation à l’autre Puisque ce sont les francophones qui sont la cible de l’auteur, restons dans sa problématique et essayons d’y voir clair. Kateb Yacine (dont on ne peut mettre en cause le patriotisme exprimé dans une oeuvre aux dimensions universelles écrite en français) disait du français qu’il était un tribut de guerre. Pourquoi n’en serait-il pas ainsi en effet en ces temps d’interpénétration des langues et des cultures imposée par la mondialisation ? Excepté peut-être dans les pays anglophones en raison de la domination planétaire de l’anglais comme langue de travail, la nécessité de maîtriser plusieurs langues s’impose à présent aux citoyens de tous les pays comme le passage obligé de la survie économique de leurs nations. En Europe, on se met à étudier le chinois pour contrer l’agressivité économique de la Chine sur son propre terrain. Les Chinois, comme les Coréens avant eux et les Japonais plus avant encore, se sont mis depuis longtemps à l’étude des langues européennes pour réunir les meilleures conditions du transfert des technologies dont ils ont acquis à présent une grande maîtrise dans tous les domaines. Partout l’étude des langues étrangères est à l’honneur et — chose nouvelle mais non moins importante — l’étude des langues régionales (dont certaines sont en passe de disparaître) trouve un regain d’intérêt dans tous les pays. On se rend compte que, tout comme la biodiversité est la condition de la pérennité de la vie, la diversité linguistique et culturelle est la condition de la revivification des nations. En Algérie, c’est l’inverse qui s’est produit depuis une trentaine d’années: la langue française qui nous était accessible et que même les moins instruits de nos parents comprenaient tant bien que mal, a été vouée aux gémonies puis abandonnée- y compris à l’école où elle n’est parfois pas enseignée. Sous la pression des tenants d’une arabisation intégrale de l’école, non seulement l’amour des langues s’est complètement émoussé, mais les facultés développées par les Algériens des générations antérieures pour leur apprentissage se sont évanouies. Il en a résulté ce que Djamel Labidi dénonce comme un sabir élevé au rang de langue vivante.

Djamel Labidi sait pourtant, lui qui, francophone de formation, a été amené à écrire en français son article contre l’aliénation coloniale des francophones, combien la langue française a aidé les Algériens contre la colonisation à s’ouvrir sur le monde.       Aurait-il d’ailleurs pu produire son article en arabe classique ? J’en doute, le connaissant, en dépit des efforts louables qu’il a fournis pour parler en cette langue. Mais pouvait-on en attendre moins de quelqu’un qui a été dans le staff de ceux qui ont décrété l’arabisation forcée des sciences sociales à la fin des années 1970 ? J’y reviendrai.

Jouant donc sur l’ambivalence du terme «arabe» (comme langue et comme être ethno-social exprimant une identité irréductible à la dimension linguistique), l’auteur ne se rend même pas compte (à moins qu’il ne soit de mauvaise foi, ce dont je ne lui ferai pas l’injure de l’accuser) de l’énorme contradiction dans laquelle il s’englue en donnant des contre-exemples à l’appui de ses propres dires où la langue et l’être ne font pas un: après avoir affirmé que si l’Algérie parle l’arabe, c’est qu’elle est quelque part arabe, il prend en effet le contre-pied de son assertion en citant le cas des Brésiliens qui parlent le portugais sans être portugais, des Suisses qui parlent français, italien ou allemand sans être français, italiens ou allemands. Pourquoi donc les Algériens seraient-ils arabes parce qu’ils parlent l’arabe ? Question d’ordre principiel bien sûr, que je ne pose ici que pour montrer l’inanité logique du raisonnement de l’auteur.

Sans doute un article (un seul) paru dans les colonnes du Quotidien d’Oran, lui a-t-il donné l’occasion de relever ici ou là des excès quant à la qualification de l’arabe comme langue de colonisation (il ne dit mot des articles parus en arabe dans le journal Echourouk par exemple où leurs auteurs ont mobilisé l’histoire antéislamique-donc antérieure à l’arrivée des Arabes – pour rappeler aux Egyptiens l’apport des habitants de l’Afrique du Nord à leur civilisation).

Biaisant avec les faits, prenant des libertés avec les concepts, il tente d’imposer sa vision monolithique d’une Algérie arabe à laquelle les citoyens non arabophones de ce pays ne seraient pas partie prenante. Qu’est-ce qui l’autorise donc à traiter les francophones d’aliénés de la colonisation ? Que cherche-t-il à prouver par ses références récurrentes à l’histoire de France sinon qu’il reste au fond de lui-même un aliéné de la colonisation ? (Notez encore ici l’amalgame entre les concepts renvoyant à la langue-le latin en l’occurrence – et ceux renvoyant à l’être ethno-social – le gaulois en l’occurrence). Tout ce qui ressort de ce galimatias est une extraordinaire extension de sens du mot colonisation dont il veut tirer une conclusion bien arrangeante pour sa thèse: à savoir que l’Algérie n’a pas connu durant quatorze siècles (sic) de guerre contre le colonialisme arabe [entendez: celui-ci n’a donc pas existé]. Soit. Mais pourquoi donc serait-elle devenue arabe du seul fait qu’on y parle l’arabe alors que les Brésiliens qui parlent portugais ne sont pas devenus portugais et que les Suisses, qui parlent français, italien ou allemand ne sont pas devenus français, italiens ou allemands ? Ignorant superbement le cours de l’histoire universelle, l’auteur ne se rend pas compte de sa propre aliénation à des catégories cachées productrices du mythe de la Umma arabe unifiée par la langue arabe de la Mauritanie au Yémen (manière pour l’auteur de dire: voyez, l’identité que je défends n’est pas d’essence ethnique). Or, dans le monde contemporain (et le débat sur l’identité nationale qui a lieu présentement en France a au moins l’intérêt de le rappeler aux tenants d’un certain ethnocentrisme), l’identité est consubstantielle à la NATION comme creuset du vivre ensemble, comme mode d’existence d’un lien social en construction permanente qui transcende les déterminations ethniques et linguistiques, structure les activités humaines, les mentalités et les comportements. C’est cette identité-là – d’essence NATIONALE-qu’a révélée le match Algérie-Egypte chez les Algériens de toutes conditions, de toutes obédiences politiques, de tous référents culturels, de toutes pratiques linguistiques. Et c’est cette identité-là que Djamel Labidi s’évertue à nier, lui qui, parlant de ceux qu’ils qualifient d’aliénés de la colonisation, dit de l’aliénation qu’elle consiste à se regarder avec les yeux de l’autre. Lui se regarde avec les yeux d’un Arabe générique, n’existant que dans son esprit. Vous avez dit aliénation monsieur Labidi ?

Poursuivant dans son entreprise négatrice de l’identité algérienne, l’auteur s’en prend à l’arabe parlé qu’il reproche à l’auteur de l’article incriminé de vouloir ériger en langue autonome de l’arabe classique. Passons sur ce qu’il dit de juste (mais sans s’interroger sur les causes du phénomène) concernant cette sorte de créole algérien fait d’un mélange d’arabe et de français qui a fini par s’imposer dans la communication de tous les jours (notamment entre les jeunes). Mais pourquoi donc l’arabe parlé traditionnel dont il dit (à tort au demeurant) qu’il est authentiquement de l’arabe (celui-ci comprenant en réalité un nombre impressionnant de mots berbères arabisés) ne serait-il pas digne d’être promu au rang de langue nationale à part entière ? Le pays s’en trouverait-il moins bien loti culturellement, scientifiquement et techniquement si, au lieu de tout miser sur l’enseignement de l’arabe classique (dont on doit évaluer au préalable la capacité à appréhender les catégories de la science et de la technique modernes), on avait favorisé aussi la promotion par l’école de l’arabe algérien et développé la recherche académique pour son accession au statut de langue écrite ? La même interrogation vaut évidemment aussi pour tamazight décidément vouée à s’imposer par le sang et les larmes aux tenants du régime, subjugués par la langue du Coran mais aussi peu instruits dans l’arabe classique qu’en français.

J’entends par avance les cris d’orfraie de Djamel Labidi, un des artisans de l’arabisation forcée des sciences sociales à l’université, du temps où il était conseiller du ministre de l’Enseignement supérieur. Trente ans après que cette opération a été menée au mépris de tous les écueils objectifs, le fiasco est total. Il porte une part de la responsabilité écrasante de cet échec, lui qui, francophone de formation, aurait dû mesurer les difficultés de l’entreprise. Le résultat est que, fortement fragilisé par son arabisation totale qui avait eu lieu peu auparavant, l’enseignement primaire et secondaire a fourni à l’université des étudiants n’ayant pas même les pré-requis logiques de l’enseignement universitaire, par ailleurs dispensé au rabais à cause du nombre de plus en plus grand d’entrants et des facilités d’accès au statut d’enseignant universitaire dans ces filières. On sait ce qu’il est advenu de certains sortants du système éducatif ainsi formatés (y compris des universitaires qui se sont mis sous le commandement d’émirs incultes, anciens exclus de l’école): des fous de Dieu qui ont pris le maquis contre leur peuple et qui se sont rendus coupables de massacres inqualifiables de populations sans défense pendant près d’une décennie. Eux aussi se réclamaient d’une identité transcendante, d’étendue plus vaste il est vrai, puisque référant à une Umma islamique qui jure avec l’existence des Etats-nations modernes – et donc avec l’identité nationale en construction dans chaque pays.

L’arabisation des sciences sociales a-t-elle eu d’autre effet que de généraliser l’idéologisation de la société ? Djamel Labidi, devenu enseignant-chercheur à l’université, connaît l’état de la production scientifique en sciences sociales dans notre pays. Il sait parfaitement que, sans la documentation en français qui d’ailleurs se raréfie dramatiquement sous l’effet de la politique délibérée de sa limitation, aucun étudiant en magister ou doctorant ne peut mener à bien le moindre travail de recherche dans notre pays. Les étudiants de graduation eux-mêmes, après avoir milité en force pour l’arabisation de l’université, ont à présent déchanté, confrontés qu’ils sont au marché du travail dont la loi est dictée par les puissances dominantes qui travaillent en anglais, en français, en espagnol et bientôt peut-être en chinois. Sait-il que de plus en plus nombreux sont les étudiants des sciences sociales (pour ne rien dire des étudiants d’autres disciplines) qui, pour se donner quelque chance de réussir, se mettent à étudier en accéléré le français et l’anglais dans les écoles privées, quitte à saigner leurs parents à cette fin? Au lieu de méditer la leçon de l’échec de l’université algérienne auquel il a contribué, Djamel Labidi cherche à culpabiliser ceux qui, en dépit de tous les maux que l’arabisation forcée a infligés à celle-ci, ont assumé avec conscience et professionnalisme leur part de responsabilité dans le maintien du lien social fondamental par l’exercice de leur métier d’informer (pour les journalistes francophones) et dans la transmission d’un savoir minimum (pour les enseignants universitaires francophones). Même l’Administration ne tient dans certains cas que grâce au personnel francophone encore en poste.

Lahouari Addi a montré, dans sa réponse à Djamel Labidi parue ce jour (7 janvier) dans le Quotidien d’Oran, combien le discours de ce dernier sur l’arabité est biaisé, vide de sens historique parce que réifié. Pour cette raison même c’est un discours porteur de division car il procède par l’exclusive. L’aliénation ne consiste-t-elle pas aussi à être «sous le charme de catégories réifiées» ? Conclusion que Lahouari Addi tire, à l’adresse de Djamel Labidi, de la contribution de ce dernier. A l’auteur de cette malencontreuse contribution de méditer la leçon !

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Arabité et identité : réponse à Djamel Labidi
Lahouari Addi, Le Quotidien d’Oran du 7 janvier 2010

Dans son édition du 2 janvier 2010, Le Quotidien d’Oran a publié une opinion virulente de Djamel Labidi suite à une chronique de Kamel Daoud où ce dernier remettait en cause l’arabité de l’Algérien.

Dans ce qui a été appelé la troisième mi-temps du match Algérie-Egypte, il y a eu, il est vrai, des dérives verbales de beaucoup de journalistes, mais il ne faut pas les prendre au premier degré.

Ce qui a déchaîné la passion de ces derniers, francophones et arabophones, ce sont les insultes des TV égyptiennes à l’endroit des martyrs de la guerre de libération. Exprimant une conviction partagée par toute la jeunesse, les journalistes considèrent le respect pour les martyrs comme la valeur suprême, comme la norme fondatrice de l’Algérie nouvelle qui donne sens au destin commun des Algériens. D. Labidi n’a pas vu cet aspect dans la colère de Kamel Daoud qui, après tout, a écrit une chronique, un « billet » d’humeur et non une réflexion sociologique sur l’arabité. K. Daoud est apprécié par les lecteurs du Quotidien d’Oran pour ses propos iconoclastes qui tournent en dérision l’Algérien, la société et le régime dans un souffle d’autocritique rafraîchissante et salvatrice. « Quand j’achète Le Quotidien d’Oran, m’avait dit un ami récemment, c’est cinq dinars pour le journal et cinq dinars pour Kamel Daoud ». La société a besoin de la critique et de l’autocritique, sinon elle se sclérose. Si l’on venait à multiplier les tabous, aucune discussion et aucun journalisme ne seraient possibles. Ce qui a fait effondrer l’Union Soviétique, ce sont les commissaires politiques du Politbureau qui, en gardiens du temple, n’admettaient aucune critique. L’Union Soviétique était le type même de société construite sur les tabous. Le seul tabou que nous devrions avoir est le respect de la vie humaine : Dieu seul donne la vie et Lui seul la reprend. Le reste, ce sont des constructions historico-culturelles sujettes à des transformations et des évolutions. Et, précisément, sous la plume de D. Labidi, l’arabité et la langue arabe apparaissent comme des tabous au-dessus de l’histoire des Algériens. Ce n’est pas mon avis.

L’arabité des Algériens est une construction algérienne

En 2010, il ne suffit pas d’affirmer que l’Algérie est arabe ; il faut montrer que ce sont les Algériens qui ont construit leur arabité avec le fond berbère, la langue arabe et l’islam. Que ce processus se soit déroulé dans la fausse conscience n’est pas important parce que le destin des hommes est de faire l’histoire avec des idéologies et la fausse conscience. L’essentiel est de montrer que l’Algérien a été acteur de son histoire, c’est lui qui la produit tout en créant une culture qui donne sens à son existence. Dans cette perspective, l’arabité de l’Algérie n’est pas un produit importé ni une culture imposée par une domination politique. Les Maghrébins ont participé de manière active à la civilisation arabo-islamique en fournissant des penseurs, des théologiens, des mystiques, des hommes de lettres et des guerriers. L’arabité des Algériens n’est pas subie ; elle est construite par eux avec leurs pratiques sociales, leur éthos et leur psychologie collective. Ce fondement historique de l’arabité autorise que nous la discutions, la questionnons pour l’enrichir et la dépasser. Il s’agit surtout de prendre conscience que l’identité collective est souvent le résultat d’un accident historique. J’évoquerais deux anecdotes à portée anthropologique pour éclairer le caractère historique de l’identité. Un jour, un collègue à moi, professeur de science politique à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon, m’a posé la question suivante :

— Lahouari, pourquoi vous avez accepté les Arabes et vous avez refusé les Français ?

— Parce que les Arabes, j’ai répondu, en venant en Afrique du Nord, ne se sont pas appropriés les terres des autochtones ; ils ne les ont pas exclus de l’exercice du pouvoir politique ; ils n’ont pas établi une inégalité de race et surtout ils ont accepté de se fondre dans la population locale. Ce qui n’était pas le cas des Français qui avaient créé une société inégalitaire qui n’avait aucun avenir dans le long terme.

— Ce sont donc les colons, me dit-il, qui ont empêché que l’Algérie devienne en partie française ?

— Je te laisse la responsabilité de la conclusion, j’ai répondu.

Il faut ajouter que la revendication de l’arabité par les Algériens sous la colonisation est un effet dialectique de la domination coloniale. A force d’écrire et de répéter que les Algériens sont des primitifs et que leur société est archaïque, ces derniers ont mis en avant leur arabité pour dire qu’ils appartiennent à une riche civilisation.

L’autre anecdote, je l’ai vécue en été 1974, dans la wilaya de Mascara, où j’étais parti comme étudiant volontaire pour expliquer les textes de la Révolution agraire aux paysans. Lors d’une assemblée avec ces derniers, l’un d’eux posa la question suivante :

— Loukane el akria [les paysans de l’Oranie appelaient la France el akria en référence à la couleur kaki de l’armée française] avait marié ses filles à vos parents, est-ce que vous auriez pris les armes pour chasser vos oncles maternels ?

J’étais resté perplexe en entendant la question qui expliquait le caractère éphémère de la colonisation française en Algérie. Ce paysan de la région de Mascara, tout analphabète qu’il était, avait montré plus d’intelligence en matière de contact d’un peuple avec un autre que Robert Montagne, professeur au Collège de France, anthropologue de la conquête française au Maroc. Ces deux anecdotes sont instructives au sujet des processus identitaires et montrent que l’identité n’est pas une essence ou une substance anhistorique ; c’est une construction des acteurs eux-mêmes. Tout comme il y a un islam berbère caractérisé par les confréries et le soufisme, il y a une arabité maghrébine différente de celle du Machrek. C’est ce qui fait que le Maghrébin est différent de l’Egyptien ou de l’Irakien, et que la langue parlée aussi y est différente.

La question de la langue

D. Labidi soulève le problème de la langue classique avec la même démarche qui réifie la catégorie d’arabité vidée de son contenu historique. C’est ainsi qu’il vénère l’arabe classique — parlée nulle part dans le monde arabe qu’il le veuille ou non — tout en méprisant l’arabe parlé sur lequel il a des préjugés inacceptables de la part d’un sociologue, surtout de sensibilité de gauche. La langue parlée est celle du peuple, celle de la vie quotidienne de Mdine Jdida et Bab el Oued, celle avec laquelle il exprime ses joies et ses souffrances. Le mépris élitiste (el khassa) pour cette langue du peuple (el amma) ne sied pas D. Labidi, ancien dirigeant de l’UNEA pour qui, comme étudiants, nous faisions grève pour le faire libérer des prisons de Boumediene. Avec d’autres, il fait croire que le dialectal est apparu à la suite de la domination européenne qui aurait appauvri culturellement la société. Pourtant le chi’r el melhoune (poésie orale) au Maghreb, qui s’exprime en darija, date au moins du 16èm siècle comme l’attestent les poèmes de Sidi Lakhdar Bekhlouf en Algérie et Sidi Abderahmane el Majdoub au Maroc. (Je renvoie aux travaux sur le turath de l’équipe de recherche du CRASC, Université d’Oran, menés par Ahmed Amine Dellai, Rahmouna Mehadji et Hadj Méliani, publiés dans Les Cahiers du CRASC n° 2 et 4, 2002, n° 10, 2005 et n° 15, 2006, consacrés à des auteurs du melhoun comme Sidi Lakhdar Benkhlouf, Abdelkader Khaldi, Mestfa Ben Brahim et d’autres encore. Outre les qualités littéraires des documents exploités (poèmes, contes, récits), ce travail montre que l’arabe dialectal est antérieur à la colonisation, remettant en cause le mythe selon lequel il est une forme dégradée de l’arabe classique apparue au XIXème siècle). Le mépris pour cette langue permet à D. Labidi d’éviter le problème de la profonde diglossie dans les pays arabes : la langue écrite n’est pas parlée et la langue parlée n’est pas écrite. Tout le monde reconnaît que cette diglossie est le principal problème culturel des pays arabes. Et ce n’est pas en encensant la langue écrite et en méprisant la langue parlée que la question sera réglée. Cette question a été débattue dès la fin du XIXe siècle en Egypte et jusqu’aux années 1930, à une époque où ce pays avait des intellectuels dignes de ce nom. Lotfi Sayyid avait préconisé la voie nationale, c’est-à-dire la promotion de l’arabe égyptien en créant des mots nouveaux et en faisant des emprunts aux langues étrangères, après avoir formalisé la grammaire. Taha Hussein s’était opposé à cette perspective, craignant que l’Egypte ne se coupe du riche patrimoine de la civilisation arabo-islamique véhiculée par la langue classique. Il a alors proposé de rénover celle-ci, de la simplifier pour en faire un outil de la modernité et de la vie quotidienne. S’appuyant sur le travail qu’avaient déjà fourni les journalistes Syro-libanais qui avaient créé Al Ahram, il a appelé à la généralisation d’un enseignement moderne qui, à terme, aurait fait disparaître la diglossie.

C’est cette solution de Taha Hussein qui a été retenue par les mouvements nationalistes au Machrek et au Maghreb, rejetant la proposition de Lotfi Sayyid qui compromettait, pensait-on, l’unité future du monde arabe.

La langue arabe utilisée dans l’enseignement et par la presse est une langue moderne, capable de véhiculer les sciences les plus abstraites, mais elle a été desservie par les politiques culturelles des régimes arabes qui ne lui ont pas permis de véhiculer un savoir moderne, faute de traduction des grands penseurs de la modernité. Comptant 12 millions d’habitants, la Grèce traduit plus que le monde arabe qui en compte trois cents millions ! Kamel Daoud, que D. Labidi traite d’aliéné et d’auto-raciste, est né après l’indépendance et est le produit de l’école algérienne. Il faut s’en prendre à l’école et au bilan du régime du parti unique pour avoir dévalorisé la langue arabe auprès des jeunes. Déjà en 1970, Jacques Berque constatait que la manière avec laquelle l’Algérie menait l’arabisation survalorise la francité. La question de la langue arabe est celle du contenu qu’elle véhicule et qu’elle exprime. Djamel Labidi cite la France qui avait créé les Ecoles Normales pour former des instituteurs dont la mission était de « normaliser » la pratique linguistique des jeunes écoliers Français élevés dans différentes langues régionales. C’est juste, mais il oublie l’essentiel : dans les Ecoles Normales françaises, ce n’était pas Saint Augustin et Saint Thomas d’Aquin qui étaient enseignés, mais plutôt Descartes, Montesquieu, Rousseau… Ce qui a porté atteinte à la langue arabe, c’est le contenu qu’elle véhicule. La langue arabe, par sa beauté, est un patrimoine de l’humanité et les Algériens y sont attachés. Ils seront encore plus attachés à elle lorsqu’elle offrira à la jeunesse étudiante la pensée de Hobbes, Kant, Foucault, Geert… Les Algériens font partie de l’Humanité et leur élite a besoin de débattre des idées des plus grands penseurs de la modernité. Avec la langue arabe seule, ce n’est pas possible de mener une telle réflexion. A qui la faute ? A Kamel Daoud ? Non, la faute incombe au système du parti unique dont les effets néfastes se feront encore sentir pendant plusieurs années. La conclusion qui s’impose est que Kamel Daoud est attaché à son peuple et Djamel Labidi est encore sous le charme de catégories réifiées du discours nationaliste de la période coloniale.

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La troisième mi-temps
Djamel Labidi, Le Quotidien d’Oran du 2 janvier 2010

Le match Egypte-Algérie n’en finit plus, de prolongations, en prolongations. Certains s’acharnent même à siffler une troisième mi-temps consacrée à un débat sur l’identité algérienne. Ironie de l’Histoire, au même moment se déroule en France un débat sur l’identité française, lequel s’est transformé en une campagne anti-islam et anti-arabe.

Chez nous, c’est le match Egypte-Algérie qui est le prétexte à imposer un débat sur l’identité algérienne. Et de la même façon, le débat débouche, sous la plume de quelques journalistes algériens d’expression française, sur des attaques centrées sur la dimension arabo-islamique de l’identité algérienne et sur la langue arabe, voire sur des formulations qui frisent le racisme, ou plus exactement l’auto-racisme.

Coïncidence ? Je ne crois pas. L’aliénation coloniale a la vie dure. Le simple rapprochement entre ces deux faits, la simultanéité et le contenu de ces deux débats devraient donner à réfléchir sur la persistance de ce phénomène d’aliénation, et son résultat: l’auto-mépris.

Il faut reconnaître qu’en France ce dévoiement du débat vers l’araphobie et l’islamophobie a tout de suite trouvé des forces généreuses et puissantes, notamment intellectuelles, pour le dénoncer et le contrer.

Mais chez nous, tout se passe comme si s’agissant de tout ce qui est arabe, certains s’autorisaient à dire n’importe quoi, à pratiquer le dénigrement systématique, et à ne même pas éprouver le besoin de soumettre ce qu’ils disent au contrôle des faits ou de la simple logique.

De la pathologie linguistique

Il y a des choses qu’on ne peut laisser passer. Ainsi, par exemple, de cet article paru dans le Quotidien d’Oran sous le titre «L’inévitable décolonisation horizontale» (K. Daoud, Le Quotidien d’Oran du 17 décembre 2009). Je vous parlais plus haut de racisme. On peut penser que j’exagère. Pas du tout. Dans cet article, le mot Arabe est mis à dessein entre guillemets. Ainsi que le mot Maghreb. On doute, on se dit qu’on a mal vu, qu’on a mal lu, que c’est trop gros, qu’un Algérien ne peut faire ça, que les guillemets ont dû être utilisés dans une autre signification. Mais non, c’est bien du mépris. L’auteur confirme lui même le sens qu’il donne à ce mot car il dit qu’il faut le comprendre comme, je le cite, «la désignation coloniale et occidentale (les Arabes sur la rime de «travail arabe» ou sur le mode de l’Arabe de Camus)». A Paris, un jour, une dame française m’avait indiqué la librairie Avicenne que je cherchais en disant c’est «une librairie arabe» pour rapidement s’excuser d’avoir employé ce qualificatif. Je lui avais dit doucement : «Je suis fier d’être Arabe». Il y a un proverbe chez nous qui dit qu’«il n’y a que l’âne qui renie ses origines». J’ai toujours trouvé ce proverbe bien dur avec l’âne.

Mais continuons : l’auteur de l’article répugne même à utiliser le mot arabe pour parler de la langue parlée en Algérie. Il préférera la nommer «l’algérien» plutôt que de dire arabe parlé. Evidemment, il ne pouvait pas car il aurait été alors en contradiction avec lui-même puisque si l’Algérie parle arabe, c’est qu’elle est quelque part arabe. C’est comme si certains perdaient toute cohérence dès qu’ils traitent de la question de l’arabe.

Nous découvrons, le monde découvre ainsi, qu’il y a une langue qui s’appelle «l’algérien». Il doit y avoir aussi probablement le suisse, pour les suisses francophones, le belge, le brésilien comme langue du brésil et non le portugais, l’américain au lien de l’anglais, etc.

De cette langue, «l’algérien», il dira encore sans se soucier de la contradiction «que ce n’est pas encore une langue et ses mots sont rares, difformes». Ceci, déjà, n’est pas vrai car l’arabe parlé est authentiquement de l’arabe, à condition de le parler réellement et non ce sabir infâme fait d’un mélange réduit de mots français et arabes à quoi certains voudraient réduire le peuple algérien pour l’enfermer dans un bégaiement permanent et l’empêcher de s’exprimer, mais nous y reviendrons.

Mais en attendant, si «ce n’est pas encore une langue», comme le dit l’auteur de l’article, dans quelle langue s’exprime-t-il donc ? Evidemment en français. Nous y voilà donc. Que de contorsions pour cacher ce problème qui apparaît d’autant plus qu’il le cache et qu’il n’en dit pas un mot dans tout l’article. Ce problème qui fait que tout ce qu’il dit, que tout ce qu’il écrit sur l’arabe, il le fait en français et que ceci peut expliquer cela. Je ne dis pas qu’il ne faut pas écrire en français. La preuve je le fais. Il est même très possible de défendre la langue arabe en français. Mais c’est tout autre chose que de se servir du français pour théoriser une aliénation, pour s’évertuer à cacher ce problème fondamental pour tout intellectuel, celui de son rapport avec sa langue, et donc avec sa société, et donc avec son peuple.

Là est la source du malaise permanent, des incohérences, dont je viens de signaler quelques-unes, des contradictions, de la véritable pathologie entourant, dans certains milieux, la question du rapport avec la langue. Et puisque nous y sommes, disons nous nos quatre vérités en tant qu’Algériens. Il y a chez nous des milieux socioculturels, et je parle en connaissance de cause puisque j’en viens, qui vivent dans un inconfort, un malaise permanent concernant la question de la langue. L’Algérien francophone a développé une véritable névrose concernant la langue arabe. Il est supposé par définition la connaître puisqu’ils est par définition Arabe, comme on le lui rappelle, aussi bien ici qu’à l’étranger, or il ne la connaît pas. Il est supposé être bilingue, mais il est en réalité monolingue, ne pouvant écrire, penser, réfléchir qu’en français. Il parle chez lui et dans son milieu en français, il travaille en français, il pense en français, il aime même en français. Cependant il doit aussi parfois descendre, dans la rue, côtoyer le peuple, l’Algérie profonde. Or parler en français, dans une Algérie qui hait le colonialisme, c’est se mettre au-dessus du peuple, c’est réveiller des hostilités, c’est risquer des tensions dans les relations sociales. L’Algérien francophone va alors faire semblant de la baragouiner l’Arabe, introduisant ici et là des mots arabes dans son français ou arabisant des mots français, d’où ce sabir, ce bégaiement continuel. Il vit, en Algérie comme à l’étranger, dans un mensonge permanent sur son identité culturelle, non pas celle du peuple algérien, mais la sienne. La solution serait simple : se libérer, se réapproprier sa langue. C’est celle choisie par les meilleurs des Algériens francophones, notamment pendant la Révolution nationale au moment où l’enthousiasme national était très fort. Techniquement, apprendre une langue ne pose aucun problème. Le même Algérien francophone, qui pendant 10 ans, 30 ans, n’a pas appris l’arabe, notamment littéraire, peut apprendre en quelques mois l’anglais ou le russe quand il a vécu dans ces pays. Pourquoi ? Il y a probablement une raison psychologique: il n’apprend pas l’arabe, car il est supposé le connaître. Mais surtout, il y a des raisons sociales: la langue, c’est aussi le pouvoir et la langue française continue à donner bien des privilèges et influencer la hiérarchie sociale. La tentation est alors grande de défendre le statu quo, de combattre et même de haïr ceux qui veulent le remettre en question. La schizophrénie n’est alors pas loin, mais une schizophrénie sociale, à laquelle on apporte les ressources de l’idéologie: il déclarera alors qu’il n’est pas Arabe pour ne plus avoir à le prouver. Il érigera son sabir, ou le sabir à l’emploi duquel il encourage le peuple, en langue nationale, comme la véritable langue vivante, puisqu’elle est celle de la rue, de la «vie réelle»: «One, two, three, viva l’Algérie (prononcer «l’Algérrrréé»)», voilà la langue étrange, «incroyable» pour laquelle il versera une larme de tendresse et tout le programme culturel qu’il proposera au peuple. Tant pis si la jeunesse ne pourra pas s’exprimer, il lui suffira que lui puisse le faire, et exprimer des idées complexes et abstraites en… français. Et qu’importe là que son français si châtié, si littéraire, ne soit pas la langue de la vie réelle en Algérie. Il théorisera alors, proclamant que le français est «un élément de notre identité culturelle», que «l’Algérie est pluriculturelle, plurilinguistique», bref une idéologie sur mesure pour lui. 

De l’aliénation

Il érigera son aliénation culturelle en acte libérateur. C’est ce que fait d’ailleurs l’auteur de l’article dont nous parlons lorsqu’il décrète que le rejet de l’arabe est «un acte de décolonisation horizontale». Pourquoi horizontale ? Mais passons. L’anachronisme de l’affirmation est évident: c’est employer une catégorie relative à un phénomène de l’Histoire contemporaine, le colonialisme, à un processus vieux de 14 siècles, celui de l’enracinement de la dimension arabo-islamique de notre identité. C’est comme si quelqu’un niait que la France soit latine parce que les Gaulois ne l’étaient pas ou que les Francs étaient une tribu germanique. Ou que l’Angleterre est bretonne puisque les Anglo-Saxons (dont une tribu germanique les Angles a donné son nom à l’Angleterre) y sont arrivés après les Bretons entre les 5e et 7e siècles. Y a-t-il eu durant quatorze siècles une guerre de libération anticoloniale contre «le colonialisme arabe» ?

Tout cela est évidemment absurde. Et pourtant, on est obligé de le relever car certains n’hésitent pas à répéter cette affirmation ridicule historiquement, comme cela a été le cas ces dernières semaines dans quelques journaux d’expression française.

Le ridicule devient dangereux lorsque l’appartenance identitaire est réduite à une appartenance ethnique, voire raciale: «les Arabes, c’est l’Arabie Saoudite, c’est la péninsule Arabique et pas nous», avec l’opposition comme on a pu le lire dans certains journaux entre arabité et amazighité. On sait à quelles dérives racistes a pu conduire, là où elle a été encouragée, cette vision ethnique. Or on sait que les Arabes s’identifient par des liens linguistiques, culturels et historiques. Il ne reste plus alors qu’à identifier les Egyptiens aux conquérants arabes, et la boucle de la haine est bouclée.

C’est ainsi que les clichés sur les Egyptiens «qui nous auraient imposé l’arabisation dans les années 60″ et même «exporté l’islamisme» sont réapparus et ont été martelés dans divers écrits dans des journaux, sur des forums algériens d’expression française. Ce serait donc une énorme coïncidence que la langue arabe soit la langue nationale et officielle du Maroc, de la Tunisie, de la Libye, de la Mauritanie, des Sahraouis ? Ce serait donc les Egyptiens qui leur auraient imposé, à eux aussi, «l’arabisation» ?

Quant à l’islamisme, c’est un phénomène mondial, qui ne concerne pas que l’Algérie, et dont l’analyse est donc bien plus complexe. Il reste qu’il est inquiétant que de telles incohérences puissent trouver un écho et arriver à dresser les uns contre les autres des Algériens.

L’aliénation est productrice de haine. Comme son nom l’indique, elle consiste à se regarder avec les yeux de l’autre, à lui être subordonné. La France voulait naturellement justifier le colonialisme et légitimer sa présence en disant qu’elle n’était arrivée en Algérie qu’après d’autres occupants (les Romains, les Byzantins, les Turcs, etc.) dont les Arabes. Le colonisé aliéné va reprendre la même affirmation sans remarquer qu’elle est suspecte du fait même qu’elle vient du colonisateur. Fanon, dans «Peaux noirs et masques blancs» a bien décrit ce processus de l’auto-racisme, de l’auto-mépris, où le colonisé intègre les valeurs et la culture du colonisateur, où il se déteste lui-même, et où il déteste dans l’autre colonisé l’image qu’il lui retourne, et comment alors les colonisés se déchirent entre eux, comme nous l’avons fait pour le match Egypte-Algérie à la grande satisfaction de ceux qui nous dominent. Ainsi, chez nous, «l’arabisant» et le «francisant» (appellations bizarres et affreuses qui nous ont été transmises par le colonialisme) sont un couple infernal, produit par le colonialisme, où l’un ne peut pas exister sans l’autre, et où chacun déteste le reflet que lui renvoie l’autre.

Le comble, c’est lorsque notre partisan de «la décolonisation horizontale», après avoir mis des guillemets au nom «Arabe», et prouvé ainsi sur lui-même la pertinence de l’analyse de Fanon sur l’aliénation, tente de détourner cette analyse en appelant à la libération de l’aliénation «à la colonisation arabe». Il va même jusqu’à pasticher le titre du livre de Fanon en le transformant en «peaux algériennes, masques «arabes» (les guillemets sont encore de lui). Ainsi donc, après la langue qui s’appelle «l’algérien», on découvre qu’il y a aussi une «peau algérienne».

Et puis il y a l’affirmation que la langue arabe classique, littéraire, «la langue de l’école» est une «langue morte», discours combien de fois entendu. Morte, par rapport à quoi ? Par rapport à cette langue, l’«algérien» dont il parle. Je demande à chaque lecteur d’essayer de dire en «algérien» (au sens de sabir) ou même en arabe parlé tout ce qui vient d’être écrit ici, ou, dans n’importe quel article en langue française. C’est évidemment impossible. Le résultat est clair, et le but avec: nous contraindre au silence, à ne pas pouvoir écrire, penser dans notre langue, raisonner scientifiquement, exprimer une pensée fine, nuancée, abstraite, élégante, courtoise, civilisée. Il n’y a pas de civilisation sans langue littéraire.

Et qui a dit qu’il fallait enseigner à l’école la «langue de la maison», la «langue maternelle» ou la langue de la rue. Cela n’a existé dans aucun pays. De telles affirmations n’ont de succès que parce qu’elles sont basées sur l’ignorance de beaucoup de gens sur le processus de développement linguistique. C’est au contraire la langue de l’école, la langue littéraire qui est devenue partout la «langue de la maison», la langue maternelle grâce au développement de l’enseignement et sa généralisation. En France, ce n’est qu’au 19e siècle et au début du 20e que ce processus s’est opéré: des Ecoles normales ont été créées alors, précisément, comme leur nom l’indique, pour «normaliser» le français, pour enseigner le même français, le français littéraire partout. Et le corps des instituteurs a été parallèlement créé dans le même but, comme référence de la langue, comme institution (d’où son nom) pour diffuser la langue littéraire et unifier la langue de la nation. En Italie, c’est la langue littéraire de Rome qui est celle de l’école et le processus n’est pas achevé, avec une diglossie qui subsiste notamment avec l’italien du Sud, etc.

Et comment peut-on qualifier la langue arabe littéraire de «langue morte», alors qu’elle est celle de milliers de journaux, de centaines de radios, de dizaines voire de centaines de chaînes de télé, de dizaines de milliers de sites Internet, que des chaînes étrangères comme France 24 et d’autres savent l’importance d’avoir une chaîne de télé en arabe, que la langue arabe est l’une des langues principales de l’ONU, que Microsoft, pour des raisons commerciales (350 millions de consommateurs arabes), sort son Windows en arabe avant le français, que Google donne la plus haute importance à son moteur de recherche en arabe et a racheté dans ce sens Maktoob, le grand moteur de recherche arabe.

L’Algérie serait-elle le seul pays où l’on puisse dire et écrire des énormités sur la langue arabe ?

Retour a la colonisation ?

En réalité, cette affirmation que la langue arabe classique est une langue morte comme toutes les autres affirmations remettant en cause notre identité n’ont rien de nouveau.

Il est faux de dire, comme on a pu le lire dans plusieurs journaux algériens francophones, que le match Algérie-Egypte a été «l’étincelle», le déclencheur de la «prise de conscience de notre véritable identité et que nous ne sommes pas arabes». Les arguments présentés dans ce sens sont répétés, rabâchés, ressassés depuis longtemps. Le match n’a été que l’occasion de les ressortir dans une campagne médiatique et de leur chercher une justification émotionnelle.

Ils n’ont rien de nouveau aussi au sens où ces arguments font partie de la panoplie de l’idéologie coloniale sur la langue arabe et la question de l’arabité de l’Algérie. La France coloniale avait décrété l’arabe littéraire langue morte pour la raison que c’était la langue qui pouvait concurrencer le français. L’arabe parlé ainsi que l’amazigh ne lui faisaient pas peur car ils ne pouvaient évidemment remplacer le français dans la vie administrative, économique, etc. C’est la raison aussi qui explique qu’aujourd’hui c’est l’arabe littéraire qui est régulièrement attaqué. Une méthode diabolique avait été utilisée par le colonialisme français pour suggérer que l’arabe classique était une langue morte: celle de permettre le concernant l’usage du dictionnaire dans les lycées en Algérie, de la même façon que pour le latin. Ainsi s’est établi un élément de l’argumentaire linguistique colonial, à savoir que l’arabe parlé est la langue nationale de l’Algérie et qu’il est issu de l’arabe classique comme le français du latin.

Après l’indépendance, la politique «d’arabisation» (encore un mot perfide puisqu’il sous-entend que nous sommes à arabiser et donc pas Arabes), cette politique n’a eu d’autre but que de rechercher un équilibre entre l’arabe et le français, une coexistence entre ces deux langues, si on s’en tient aux faits, et si donc on analyse cette politique à travers ces résultats et non les intentions proclamées. Le résultat a été que tout est en double chez nous, avec la dichotomie, et les conflits qui en découlent : 2 élites, l’une en arabe, l’autre en français qui ne communiquent pas entre elles, 2 universités l’une en arabe, l’autre en français, 2 administrations, 2 presses, etc. Comment la nation peut-elle garder ainsi son équilibre mental.

Là est l’explication de cette pathologie dont nous souffrons dans la communication entre Algériens. La situation atteint parfois des sommets dans l’incohérence: le 9 novembre, je l’avais noté, le ministre de l’Intérieur s’est exprimé en français à la télévision à la chaîne arabe, nationale, mais, comme d’habitude, pas de traduction de son propos. De même le ministre des Affaires étrangères devant le corps des ambassadeurs algériens va parler en français, le 8 novembre, et même au Caire le 13 novembre. Toujours pas de traduction à la chaîne nationale, comme chaque fois qu’un Algérien parle français. Mais il suffit que ce soit un étranger qui parle en français à la télé et aussitôt la traduction en arabe se déclenche. C’est pourtant dans les deux cas du français. On nage dans l’absurde. Par contre, à Canal Algérie, tout propos en arabe est traduit en français.

Nos deux langues nationales sont brimées dans leur propre pays : l’arabe et l’amazigh. C’est plus facilement perçu pour l’amazigh que pour l’arabe. Et pourtant, le statut de langue officielle et nationale de l’arabe n’est souvent que théorique. Beaucoup de hauts responsables n’en tiennent pas compte même dans leurs interventions en public. Elle aussi est victime. Dans la haute administration et la plupart des ministères, la langue de travail est le français. De même, dans la plupart des secteurs d’activité économique, notamment modernes (télécommunications, informatique, énergie, etc.). La publicité est presque toujours en français, etc. Le parcours de la jeunesse instruite en arabe, et c’est la grande majorité des jeunes, s’apparente à un parcours du combattant: dans les réunions administratives et même officielles, le français sera utilisé et le jeune se taira. Il ne pourra pas remplir la plupart des formulaires. Dans les restaurants de qualité, on lui tendra un menu en français et on lui parlera en français, et il préférera ne pas y aller, etc. On imagine les complexes, les frustrations et donc la révolte qui peuvent en découler. Exclu, marginalisé car instruit, cultivé mais… dans la langue de son pays. Ce n’est pas ce que voulait notre Révolution nationale. Qu’on examine bien et on verra que bien des tensions, bien des non-dits, bien des conflits ouverts ou masqués, bien des particularités de la vie sociale de notre pays s’expliquent par ces tensions culturelles.

***

L’inévitable décolonisation horizontale
Kamel Daoud, Le Quotidien d’Oran du 17 décembre 2009

Depuis le «Match» du 18 novembre dernier entre l’Algérie et Le Caire capitale de l’arabité alimentaire, et depuis la vague d’insultes des médias égyptiens, beaucoup d’Algériens (sur la voix de la guérison) se sentent singulièrement légers et presque convalescents : nous avons compris, brusquement, pour beaucoup, que nous n’étions pas «Arabes».

Pas «Arabes» au sens généalogique du terme et encore moins au sens culturel exclusif, malgré des décennies de conditionnement, de déni et de violence. Nous ne l’étions même pas au sens panarabique, ni au sens de l’histoire de chacun depuis longtemps déjà. Nous l’étions par la langue officielle, l’école, la désignation occidentale et coloniale (les arabes sur la rime de «travail d’arabe» ou sur le mode de l’Arabe de Camus). Nous l’étions parce que nous y croyons avec violence sur soi. Puis, brusquement, nous avons compris que… nous ne l’étions pas ! Que l’arabité n’est pas une nationalité : au mieux, c’est un héritage, au pire, elle peut être une maladie nombriliste comme en Egypte ou un prétexte politique pour une colonisation par les pairs. C’est une attitude face au monde et pas une nationalité fixe. Les médias égyptiens et leurs insultes nous y ont donc obligés : nous sommes «Autre». D’abord parce qu’être Arabe à leur ressemblance nous incommode violement aujourd’hui, ensuite, parce que nous avons ressenti le besoin d’être nous-mêmes puisque nous ne pouvions pas être quelqu’un d’autre que nous-mêmes. Ensuite, parce que c’était vrai : nous n’avons pas besoins d’être Arabes pour être musulmans, ni d’être musulmans pour être Algériens.

Mais, bien des jours après avoir coupé cette corde de soumission, que l’on prenait affectueusement pour un cordon ombilical à cause du panarabisme et de la langue «sacrée», mais très morte, nous flottons, heureux mais désemparés. Tous autant que nous sommes. Avec, pour chacun, une forme et formule pour une unique question : si nous ne sommes pas Arabes, qui sommes-nous alors ? Pas Arabes, c’est sûr : se dire Arabe, aujourd’hui, ce n’est d’abord pas une nationalité, ensuite, ce n’est pas vrai, ensuite c’est presque mendier quelque chose à la porte de gens qui se croient plus Arabes les uns par rapport aux autres et qui ne veulent pas de nous, nous «casent» dans le «Maghreb», sorte de banlieue confessionnelle et de quartier périphérie du centre «Moyen-oriental».

Et, c’est pourquoi, chaque fois que je rencontre, depuis des jours, un fanatique de cette arabité présumée, cela me rappelle le colonisé aliéné de Frantz Fanon, le portrait du «malade» en mal d’émancipation, l’indigène au rêve musculaire de fuite en avant. «L’indigène est un être parqué, l’apartheid n’est qu’une modalité de la compartimentation du monde colonial. La première chose que l’indigène apprend, c’est à rester à sa place, à ne pas dépasser les limites. C’est pourquoi les rêves de l’indigène sont des rêves musculaires, des rêves d’action, des rêves agressifs. Je rêve que je saute, que je nage, que je cours, que je grimpe. Je rêve que j’éclate de rire, que je franchis le fleuve d’une enjambée, que je suis poursuivi par des meutes de voitures qui ne me rattrapent jamais. Pendant la colonisation, le colonisé n’arrête pas de se libérer entre neuf heures du soir et six heures du matin.» a écrit ce visionnaire. Etrange portrait de notre victoire sportif sur le «centre idéologique égyptien». Etrange similitude entre le rêve «musculaire» de la nouvelle Algérie et la mollesse de ses élites rêvassant encore sur l’assimilation identitaire. A relire l’œuvre de Fanon en remplaçant (avec abus certes) négritude par algérianitude. Sauf qu’il s’agit d’une colonisation horizontale cette fois-ci. Latérale. La verticale a été celle des Français et l’oblique celle des Ottomans. L’aliéné qui vit le drame de sa peau noire avec masque blanc. A reformuler : peaux algériennes, masques «arabes».

Mais si je ne suis pas Arabe, qui suis-je alors ? Berbère ? Berbériste ? Autonomisme ? Culturaliste ? Non. Là aussi, je me sens comme une brebis capturée par un chant de sirène non comestible : je ne suis pas Arabe et je n’aime pas ceux qui se disent Amazighs à ma place et mieux que moi parce qu’ils parlent amazighs alors que moi, la colonisation horizontale m’a transformé en arabophone. Si je n’ai pas aimé être un Arabe de seconde classe, je n’aime pas aussi me sentir un Amazigh de seconde classe. Encore une fois, à cause de la langue, d’une langue mal partagée. La colonisation horizontale arabe a produit des colonisés de l’arabité, revendiquée par l’assimilé comme une constante nationale, mais a produit aussi un autre mal dérivé : des maquis de l’identité, poussés vers la montagne et le radicalisme, promptes à l’exclusion et fascinés par des retours impossibles vers des origines privatisées, folklorisées.

Pourquoi est-ce toujours au passé (numide ou «arabe») de définir mon Présent ? Pourquoi je ne peux pas me dire «Algérien» alors que j’habite l’Algérie et que je parle algérien ? Pourquoi lorsqu’on parle de l’amazighité des Algériens on tourne le regard automatiquement vers la Kabylie et pas vers le sud ou l’ouest ou le reste du pays et des Algériens ? Pourquoi je devrais avoir honte de ne pas être Kabyle et me sentir mal quand je me dis ne pas être Arabe ? Parce que la réponse était sous mes yeux et je ne l’ai pas compris : je suis Algérien et ma langue officielle est l’algérien. C’est la langue de la majorité qui n’exclut personne, contrairement aux autres langues concurrentes. Et mon algériannité est comme une parcelle de terre nouvelle : dedans, il n’y a encore ni palmiers, ni oliviers, ni contes, ni traces, ni cimetières d’ancêtres, ni signes exhumés. Mais c’est à moi. Ce n’est pas encore une langue et ses mots sont rares, difformes, venus de partout et pas encore sculptés, mais c’est moi et c’est à moi et dans ma bouche et mon corps, dans la langue de ma mère et de mes enfants. Je n’en ai pas honte et j’en suis fière. Un jour, elle s’écrira. Deux histoires pour conclure : un coopérant européen me raconta sa rencontre avec le recteur d’une université de l’ouest à qui il demanda où il pouvait apprendre l’algérien «comme on le fait en Tunisie ou au Maroc» ? Le recteur lui répondit offusqué : «mais l’algérien n’est pas une langue !!!». Ne remarquant pas que c’est une nationalité dont il a honte tout en s’en revendiquant dans son hyper-nationalisme alambiqué, adepte du «Vive l’Algérie et à bas l’Algérien» !

La seconde histoire ? Elle est heureusement plus belle et plus triste. C’est le fils de l’auteur de ces lignes qui posa la question à son père il y a deux semaines : «comment s’appelle la langue que nous parlons ?» «Quelle langue ?» j’ai interrogé curieux : «Celle de l’école ?». «Non, m’expliqua l’enfant, notre langue de tout les jours, toi et moi, pas celle des livres et de l’école. La langue qu’on parle ?». C’est l’algérien, ta langue, j’ai répondu. Etrange crime contre soi : on désigne comme langue officielle une langue morte que nous parlons avec effort, et nous appelons une langue vulgaire, la langue de nos mères et de nos femmes, celle qu’elles utilisent pour nous consoler et que nous utilisons pour aimer, haïr, raconter, se rencontrer et qui nous rappelle nos racines et pas les turbans des autres. La décolonisation horizontale ? Elle est en marche. Elle se fera dans la douleur et la violence. Ceux qui se croient «Arabes» là où les autres pays arabes parlent leur langue, traduisent les livres dans leurs vulgates, «doublent» les dessins animés de leurs enfants dans la langue de leur pays, ces «Arabes» assimilés finiront par se réveiller : l’arabe n’est ni la nationalité de l’Islam ni une nationalité. C’est ce qu’on nous a mis dans la bouche après l’Indépendance, après des siècles de colonisation qui nous ont presque tout volé, tout détruit et qui nous ont laissés désemparés, cherchant qui mimer. Etrange trébuchement de l’identité : en voulant savoir qui nous sommes, nous sommes remontés à plus loin que la colonisation française pour retomber dans les travers d’une colonisation plus ancienne et que nous avons confondu avec notre portrait que nous renvoie notre terre.

18 commentaires

  1. Islamophobie et Arabophobie, même combat.
    «  »Krazatou-lauto ou ram-msouh morceau-ouates » » – il a été écrasé par une voiture et ils l’ont ramassé en morceaux – telle était le genre de phrases aberrantes, forgées par ce véritable « créole algérien » qu’on rappelait volontiers, aux tenants de l’arabe dit « dialectal » quand, au début des années 70, la généralisation de l’emploi de la langue arabe dans l’Administration publique avait suscité des « résistances » sournoises et souterraines de la part des monolingues francophones dont beaucoup occupaient des postes de premier ordre. Quelques uns parmi eux s’enhardissaient jusqu’à parler – en petit comité il est vrai – de « langue morte », en parlant d’une langue Arabe qui venait de traverser douillettement, plus de huit siècles d’Histoire, seulement pour sa période islamique, sans qu’il soit besoin d’aller s’enfoncer dans la période ante islamique où elle se confond en termes de millénaires, avec ses origines cananéenne, araméenne et phénicienne.

    Mon propos ici, n’est pas d’apporter la contradiction à M. Lahouari ADDI pour qui j’ai beaucoup d’estime. Pas plus qu’il n’est, de défendre le point de vue de M. Djamel Labidi que je n’ai pas l’honneur de connaître personnellement. Encore qu’il faille souligne que son brillant article est tout de même beaucoup plus qu’un simple plaidoyer pro domo comme semblent le percevoir quelques uns puisqu’il est largement partagé, en ceci qu’il pose les vraies motivations politiques, culturelles et morales qui sous-tendent la concrétisation sur le terrain du statut constitutionnel de la langue Arabe en tant que langue nationale et officielle. En effet :

    1°) – Au plan politique, la généralisation de l’usage de la langue arabe dans notre pays doit être perçue par chaque citoyen comme étant un attribut incontestable de la souveraineté nationale. Et ceci, même si les flambées d’ « arabisation » des débuts des années 70 et 80 ont connu des fortunes inégales, en particulier dans l’Ecole, par maque d’encadrement et dans l’Administration Centrale, pour cause de mauvaise volonté des monolingues francophones, souvent francophiles….avec tout ce qui va avec ;

    2°) – Au plan culturel, l’usage de la langue arabe n’est rien d’autre qu’un retour aux sources, après ce long hiatus de 132 ans où la langue dominante du colon s’était brutalement substituée à l’usage courant de la langue arabe dans tous les secteurs d’activité de notre pays, grâce en particulier à l’enseignement séculaire, souvent pluridisciplinaire, dispensé par les écoles coraniques disséminées à travers l’ensemble du territoire national ;

    3°) – Au plan moral enfin, il y a un point que beaucoup font mine d’ignorer, c’est que la langue arabe EST la langue sacrée pour tous les Musulmans, en tant qu’elle EST l’expression et le véhicule du Coran. Et il est patent aujourd’hui, que les nouvelles formes de Croisade menées contre le monde arabo-musulman par l’Occident dit « judéo-chrétien » sous la conduite des Etats-Unis et d’Israël, ont forcément intégré dans leurs stratégies de déstabilisations de nos pays, la dimension linguistique vectorielle que représente la langue arabe dans l’Islam. Ils ignorent seulement ou font mine d’ignorer ce Verset du Saint Coran qui dispose que :

    «  »إنا نحن نزٌلنا الذٌكر وإنا له لحافظون » » – 9 / 15 الحجر –

    «  »Nous avons révélé l’Invocation [le Coran] et Nous le protégerons » »

    C’est en cela que réside la force de la langue arabe, c’est-à-dire son double caractère d’Universalité et de Sacralité qui fait de cette langue, la propriété culturelle et liturgique, consubstantielle à chaque musulman pris individuellement.

    Ce n’est donc pas pour demain que l’arabe sera hiéroglyphé, en Algérie ou ailleurs dans le monde arabo musulman. Pour la simple et bonne raison que cette langue n’a été peinte ni en couches verticales, ni en couches horizontales, sur les faciès des Musulmans. Il faut aller l’extirper dans les profondeurs de l’âme…de ceux qui en ont une. N’est ce pas Monsieur…je-ne-sais-plus-qui-déja ?.

  2. Grandeur et décadence de la notion d’arabité
    Grandeur et décadence de la notion d’arabité

    « Le monde est du côté de celui qui est debout » est, paraît-il, un proverbe arabe. Il date probablement du temps où le Monde Arabe était lui-même debout et pendant lequel la notion d’arabité était synonyme de modernité, de savoir et de progrès.

    La littérature contemporaine, les médias et les assemblées savantes n’ont de cesse de nous ressasser cette époque glorieuse, unique phare lumineux de notre histoire. Il est vrai que l’être humain -même l’Arabe- a besoin d’un passé glorieux et des héros à profusion pour entretenir aussi bien son ego que son appartenance sociale. Les manuels scolaires d’histoire de tous les pays foisonnent de personnages plus grands que nature et de récits épiques quasi-mythologiques. Cependant, l’être humain -surtout l’Arabe- a singulièrement besoin d’un présent plus serein et d’un futur tangiblement radieux. Est-ce le cas en ce qui nous concerne? Non. Le monde arabe est à genoux. Que dis-je? À plat ventre serait plus juste.

    Savez-vous, par exemple, que chacune des langues des pays scandinaves (suédois, danois, norvégien, finnois) publie autant que la vingtaine de pays arabes réunis ou qu’un Québécois francophone publie proportionnellement 30 fois plus de volumes qu’un arabophone [1]? Que la Grèce traduit cinq fois plus de livres que tous les pays arabes réunis ou que dans le monde arabe l’analphabétisme atteint 50% des femmes? Que les pays arabes ont les niveaux de financement de la recherche les plus faibles au monde [2]?

    Au « désert culturel » [3] s’ajoute un désert économique, politique et social. Un désert aride qui fait fuir aussi bien les lettrés via les visas d’immigration que les simples citoyens via de frêles barques, vidant ainsi les pays arabes de leur substance vitale: l’Homme.

    À l’exil géographique s’ajoute, de surcroît, un exil identitaire. Ainsi, bon nombre d’immigrants arabes musulmans donnent des prénoms chrétiens occidentaux à leurs enfants comme si l’appartenance à la Nation Arabe était une maladie qu’il fallait honteusement cacher. « C’est pour mieux les intégrer dans la société d’accueil », semble-t-il (sic).

    Même les Arabes chrétiens vivant en Occident, s’acharnent pour prénommer leur progéniture avec des noms typiquement occidentaux. Je me rappelle ma stupeur lorsqu’un de mes élèves, syrien chrétien, m’a demandé s’il m’était possible de l’appeler Joseph au lieu Youssef, son réel prénom comme si le seul fait de s’affranchir de la « tare arabe » audible à la prononciation de son prénom le rendait heureux. Quand on pense que les Arabes chrétiens ont été historiquement les plus grands promoteurs de l’arabité!

    L’exemple le plus flagrant de cette aversion de la notion d’arabité m’a été donné à plusieurs reprises par certains citoyens algériens d’origine berbère. En se présentant aux Québécois, ils se disent Algériens, mais ajoutent toujours, à brûle-pourpoint, « mais pas arabe, berbère! ». Ils se sentent l’obligation de faire cette précision comme s’ils allaient en tirer un profit quelconque, un statut plus enviable que celui d’un Algérien «arabe». Un Québécois ne lui dira jamais son origine française, irlandaise ou autre. Quelle qu’elle soit, il est fier d’appartenir à sa nation et à sa culture québécoises actuelles.

    Pourtant, les Berbères et les Arabes ont vécu ensemble, au Maghreb, des siècles avant même que Jacques Cartier n’accoste sur les rives du Saint-Laurent.

    On peut aussi citer le cas de ce jeune étudiant de prénom arabe, qui, à la fin d’un show estudiantin a tenu à « clarifier » qu’il était iranien et non arabe; de ce jeune adolescent turc qui a demandé qu’on l’appelle Alexandre au lieu d’Iskander; de ces jeunes libanais chrétiens qui se disent phéniciens et non arabes… Les exemples de cette volonté d’affranchissement maladive de la notion d’arabité sont nombreux et révélateurs d’une inimitié profonde. Cette situation est d’autant plus déplorable qu’elle touche de jeunes étudiants, qui, naturellement, sont plus ouverts aux autres cultures et ne s’évertuent pas à gommer des pans de leur histoire.

    On est loin du temps où l’arabe était la langue du savoir et où les chrétiens et les juifs se donnaient des noms arabes. Citons, à ce titre, quelques exemples. Surnommé « maître des traducteurs de l’Islam » Hunayn ibn Ishaq (809-873) était médecin et scientifique arabe chrétien important, surtout connu pour avoir traduit des ouvrages grecs en arabe. L’évêque Johannès de Cordoue s’appelait aussi Asbag Ibn Abdallah [4]. Les mozarabes, chrétiens ayant conservé leur religion sous la domination musulmane en Andalousie, parlaient l’arabe et beaucoup adoptèrent des noms et des coutumes arabo-musulmans. Leur liturgie était dite en arabe et leurs femmes avaient l’habitude de sortir voilées [5]. Frédéric II de Hohenstaufen (1194-1250), roi de Sicile, de Germanie, de Jérusalem et empereur du Saint Empire était un fin connaisseur de la langue et de la culture arabe [6]. Il avait été éduqué par un juge musulman de Palerme et aimait s’habiller à l’orientale. Il fut excommunié pour, entre autres, son admiration de la civilisation arabo-musulmane [7]. Des croisés célèbres comme Renaud de Châtillon ou Baudouin d’Ibelin ont appris l’arabe et adoptèrent les habitudes de vie orientales [8]. Dans l’Espagne musulmane, des philosophes de confession juive comme Yehuda Halevy ou Maïmonide écrivaient en arabe. Ce dernier était connu sous le nom de Mussa bin Maimun ibn Abdallah al-Kurtubi al-Israili [9]. Avenzoar (1091-1162), le célèbre philosophe et médecin juif andalous (un des maîtres d’Ibn Rochd) se nommait : Abu Merwan Abd Al-Malik ibn-Zuhr [10].

    Faut-il aussi rappeler que le célèbre scientifique Ibn Sina (Avicennes) était ouzbek? Que l’illustre médecin Al Razi (Rhases) était iranien ? Ou que le mathématicien Thabit Ibn Qurra (Thebit) était turc?

    Cette conception de l’arabité comme synonyme de décadence et de médiocrité n’est pas un phénomène récent. Il n’y a qu’à se rappeler les « réformes occidentalisantes » de Mustafa Kemal Atatürk qui remplaça l’alphabet arabe par l’alphabet latin. Le « père des Turcs » ne saura malheureusement jamais que, 69 ans après son décès, l’occidentalisation de la Turquie et son adhésion à l’Union Européenne ne sont, plus que jamais, que des chimères.

    Un second exemple nous parvient de Malte dont la langue, à forte consonance arabe, ressemble étrangement à l’arabe dialectal maghrébin. En maltais, le poulet se dit «fellus», la pastèque « dulliegha », l’eau « ilma » et le marché « is-suq ». De 1860 à 1940, la scène politique maltaise a été dominée par un farouche débat linguistique. L’origine arabe du maltais posait problème à ce peuple catholique. Elle était fortement associée à la religion musulmane ce qui était inacceptable pour les élites qui préférait l’utilisation de l’italien. L’invention d’une origine phénicienne à cette langue a été un argument prôné par les partisans de l’adoption du maltais comme langue nationale. Cela était plus acceptable que «l’odieuse» origine arabe.

    Finalement, le maltais et l’anglais ont été adoptés comme langues nationales de l’île. Comme le turc, le maltais s’est conçu un alphabet latin adéquat. Ce débat centenaire n’est, de nos jours, pas encore clos car bon nombre de citoyens continuent de souhaiter l’abandon du maltais au profit de l’anglais : cela ferait d’eux des européens et non des orientaux [11].

    Ce n’est malheureusement pas en optant pour un prénom chrétien occidental que l’on s’intègre dans une société d’accueil ou en effaçant à tout prix, de la mémoire collective, une appartenance culturelle à l’arabité. C’est plutôt en montrant, en tant qu’être humain, notre capacité à jouer un rôle actif, positif et concret dans cette société que l’acceptation sera effective.

    En ce qui me concerne, ma fierté d’être algérien, arabe et musulman n’a d’égale que celle de la non négligeable proportion de sang berbère qui, comme tous les Algériens, coule probablement dans mes veines.

    Le soleil d’Allah brille sur l’Occident écrivait Sigrid Hunke [12]. Faudrait-il qu’il brille d’abord dans nos cœurs.

    Ahmed Bensaada

    Quotidien d’Oran du 9 août 2007

    Références :

    1. Trésor de la langue française au Québec. (Page consultée le 12 juin 2007). L’expansion des langues, [En Ligne]. Adresse URL: http://www.tlfq.ulaval.ca/AXL/Langue…_expansion.htm

    2. Rapport arabe sur le développement humain 2002. « Créer des opportunités pour les générations futures ». Programme des Nations Unies pour le Développement.

    3. Expression utilisée par Abdelwahab Meddeb dans « La période la plus noire de l’histoire des Arabes », L’Histoire, N° 272, janvier 2003, p. 76-77.

    4. Institut du Monde Arabe. (Page consultée le 11 juin 2007). L’apport des arabes à la civilisation, [En Ligne]. Adresse URL: http://www.imarabe.org/portail/monde…e/docs/45.html

    5. Wikipedia. (Page consultée le 12 juin 2007). Les mozarabes, [En Ligne]. Adresse URL: http://fr.wikipedia.org/wiki/Mozarabe

    6. Français et Monde Arabe. (Page consultée le 12 juin 2007). L’Orient dans mon assiette ou le dialogue des cultures, [En Ligne]. Adresse URL: http://www.francais-mondearabe.net/spip.php?article568

    7. Hadj Habib Hireche. 2007. « Rapport entre foi et raison dans les traditions chrétienne et islamique (2ème partie)». Le Quotidien d’Oran, 11 juin, p. 8.

    8. Marie-Adelaïde Nielen. (Page consultée le 12 juin 2007). Ensemble_mais chacun chez soi, [En Ligne]. Adresse URL: http://nonnobisdominenonnobissednomi…iam.unblog.fr/

    2007/05/10/ensemble…mais chacun chez soi/

    9. Wikipedia. (Page consultée le 12 juin 2007). Maïmonide, [En Ligne]. Adresse URL: http://fr.wikipedia.org/wiki/Maïmonide

    10. Medarus. (Page consultée le 13 juin 2007). Avenzoar, [En Ligne]. Adresse URL: http://www.medarus.org/Medecins/Mede…/avenzoar.html

    11. Wikipedia. (Page consultée le 13 juin 2007). Maltais, [En Ligne]. Adresse URL: http://fr.wikipedia.org/wiki/Maltais

    12. Hunke, Sigrid. Le soleil d’Allah brille sur l’occident : notre héritage arabe, Paris, Albin Michel, 1963, 414 p.

  3. Les « Lumières » d’ Addi .
    Les «Lumières» d’Addi .

    A propos de Mr D.Labidi, Mr Louhouari Addi écrit :

    «…..mais il oublie l’essentiel : dans les Ecoles Normales françaises, ce n’était pas Saint Augustin et Saint Thomas d’Aquin qui étaient enseignés, mais plutôt Descartes, Montesquieu, Rousseau… Ce qui a porté atteinte à la langue arabe, c’est le contenu qu’elle véhicule. La langue arabe, par sa beauté, est un patrimoine de l’humanité et les Algériens y sont attachés. Ils seront encore plus attachés à elle lorsqu’elle offrira à la jeunesse étudiante la pensée de Hobbes, Kant, Foucault, Geert… Les Algériens font partie de l’Humanité et leur élite a besoin de débattre des idées des plus grands penseurs de la modernité. Avec la langue arabe seule, ce n’est pas possible de mener une telle réflexion. A qui la faute ? »

    ———————————————-

    Certainement pas la faute à Voltaire, ni à Rousseau d’ailleurs. Plus sérieusement.

    Je trouve que Mr Addi est quelque peu «sévère» de nous présenter Mr D.Labidi comme un «ignorant» ou,à tout le moins,désireux «feindre» ne pas connaître l’histoire de la IIIème République laïque et la loi de 1881 puis celle de 1904 (1).Non,il n’oublie rien et il a bien raison: c’est la fameuse loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat :

    ‘ les religieux n’ont plus de prise sur l’instruction et n’accèdent plus à l’école laïque,

    le catéchisme n’est plus enseigné, le crucifix disparaît de l’école et les très nombreux enseignants congrégationnistes qui enseignent dans le public doivent y être remplacés dans les 5 ans. C’est pour cela qu’un grand effort de formation des instituteurs est organisé dans des Écoles normales primaires dont les enseignants sont eux-mêmes formés dans les Écoles normales supérieures à Saint-Cloud et Fontenay’.

    (http://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_séparation_des_Églises_et_de_l'État#)

    Exit donc, tous les Saints de la planète,

    fussent-ils Saint Augustin ou Saint Thomas

    d’Aquin.Dehors, la «soutane»! »Écrasons l’infâme » comme dirait Voltaire.

    Mais, continuons donc à mettre l’accent sur le passage ci-dessus mentionné.Que lit-on ? :

    «Ce qui a porté atteinte à la langue arabe, c’est le contenu qu’elle véhicule».

    Diable ! Quelle est donc cette «nuisance» dont il nous parle?! Quelle en est donc la cause principale? Il ne nous en dira pas plus.Il n’en souffle mot.Mais, par une pirouette langagière, il nous en indique «le remède» pour enrayer cet étrange et dangereux phénomène.Mr L.Addi,de bonne grâce et condescendant,nous éclaire de ses «Lumières» et de celles des «plus grands penseurs de l’humanité».Ces célèbres philosophes rationalistes, métaphysiciens, qui nous

    «guideraient » et nous «sauveraient»,pauvres brebis égarées que nous sommes,«pour bien conduire sa raison et chercher la vérité dans les sciences».Leurs sources politiques nombreuses se construisent en critiquant et en s’inspirant de Lucrèce, de Hobbes, de Locke, des théoriciens du droit naturel.

    Le droit naturel. Les premières formulations du concept de droit naturel viennent de l’école de Salamanque, et ont ensuite été reprises et reformulées par les théoriciens du contrat social (Hobbes, Locke, Rousseau).

    Au sens large, le droit naturel désigne toute recherche objective de normes de droit en fonction des seules caractéristiques propres à l’être humain,indépendamment des conceptions du droit déjà en vigueur dans les sociétés humaines.

    Et,il est utile de préciser que, Rousseau, Montesquieu,Kant pour ne nommer qu’eux,font partie des plus illustres philosophes du siècle des «Lumières».Bref,le matérialisme athée précurseur des idéologies de la théorie des

    «droits de l’homme» sans Dieu,du Libéralisme et du Communisme.

    Pour conclure pour cette fois-ci,cette stupéfiante profession de foi,qui nous éclaire et nous montre la disgrâce dans laquelle traine la langue arabe,ce péremptoire «intellectuel» occidentisé et donneur de leçons :

    «Avec la langue arabe seule, ce n’est pas possible de mener une telle réflexion. A qui la faute ?»

    Ah !, vraiment !

     » Quand on se rend compte de toute l’étendue des domaines que les Arabes embrassèrent dans leurs expérimentations scientifiques, leurs pensées et leurs écrits, on voit que, sans les Arabes, la science et la philosophie européennes ne se seraient pas développées à l’époque comme elles l’ont fait. Les Arabes ne se contentèrent pas de transmettre simplement la pensée grecque. Ils en furent les authentiques continuateurs. Lorsque vers 1100, les Européens s’intéressèrent à la science et à la philosophie de leurs ennemis sarrasins, ces disciplines avaient atteint leur apogée. Les Européens durent apprendre tout ce qu’on pouvait alors apprendre, avant de pouvoir à leur tour progresser eux-mêmes.  » ( Montgomery Watt, universitaire, spécialiste de l’Islam).

    Sans commentaires.

    —————–

    Notes :

    (1) Les congrégations religieuses interdites d’enseigner.

    7 juillet Le Président du Conseil Emile Combes fait adopter une loi interdisant à toutes les congrégations religieuses d’enseigner. Près de 2500 établissements religieux sont contraints de fermer.

    ((http://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_séparation_des_Églises_et_de_l'État#)

  4. C’est marrant
    Mon commentaire ne concerne pas le contenu du débat, vu que je suis un peu d’accord avec Labidi, avec Addi, mais pas avec Daoud qui pour moi est inculte. Un journaliste quoi ! Tel que Derrida les définissait.

    Et si c’était moi qui avait raison ? Je suis arabe, je suis berbère.

    Je ne suis pas arabe parce qu’à l’étranger ( occident ) on me traite d’arabe. Je ne suis pas berbère parce qu’à l’étranger ( certains pays arabes ) me traitent de berbère ..

    N’est-ce pas Mr Labidi…l’étranger aussi il faut bien préciser lequel !!

    Ce qui me fait rire c’est que Hoggar titre cette polémique « Débat sur l’identité ». Exactement ce que dénonce Labidi.

    Sinon, il manque une contribution à ce débat, parue elle aussi sur le QO.

    • Elle y est
      Merci d’attier notre attention sur de nouvelles contributions au débat qui peuvent nous échapper.

      Si vous avez un titre général plus approprié, veuillez le proposer…

    • Une seule urgence : abattre les régimes de la tra
      Ce qui n’est pas marrant en revanche, c’est que pendant que la « Bête Immonde » est à nos portes et qu’elle avance pas à pas, en direction de nos territoires, de nos ressources, de nos populations, de notre culture, de notre religion, nous trouvons du temps à consacrer aux discussions byzantines, au lieu de nous mobiliser contre la dictature de nos régimes traitres et corrompus qui nous ont vendus à l’Occident, moyennant leur maintien comme de vulgaires gauleiters au service de leurs maîtres.

      Je trouve personnellement le titre, en parfaite adéquation avec le sujet en débat. Cela étant dit, le contenu du texte, j’allais dire de l’assiette, importe beaucoup plus que le titre qu’on veut bien lui donner. C’est comme ces menus aux énoncés aussi abscons que saugrenus, figurant dans les cartes de quelques grands restaurants gastronomiques – et accessoirement attrappe-nigauds – du style, « frivolités de caneton en sauce trompette » ou « consommé de frisettes en sauge »….etc …etc qui noient de banales soupes prosaïques dans un torrent de bouillons lyriques frôlant l’escroquerie.

      Maintenant, à y regarder de près, tout cela n’a plus vraiment d’importance aujourd’hui, je veux dire au point où les choses sont en train d’évoluer dans notre pauvre monde. Un monde où, pendant que le Nouvel Ordre impérialiste judéo-chrétien et sioniste – très provisoirement triomphant – cherche précisément à niveler les « identités » entre dominants et dominés, la dernière vague de fond de l’Histoire de l’humanité est en train de se former. De se former dans le tréfonds des âmes de tous les hommes qui refusent de plier devant la tyrannie et l’injustice dictée par d’autres hommes qui prétendent à une supériorité autre que spirituelle et morale.

      • Continuez à dormir…
        -Article sur alterinfo.net.

        Pierre Hillard – « L’Islam est le dernier rempart contre le N.W.O »

        -C / [VIDÉO] Pierre Hillard sur la radio FM «ici et maintenant».

        Publié le 12 janvier 2010.

        Pierre Hillard :«L’Islam est le dernier rempart contre le nouvel ordre mondial»

        A visionner sur: http://www.egaliteetreconciliation.fr/

        Un Commentaire d’un internaute,que j’ai bien apprécié et que je voudrai faire partager.Le voici :

        23.Posté par Larguet le 12/01/2010 17:11

        ——————–

        « Ce qu’ils veulent faire de nous est innommable. Ils veulent réduire l’humanité à sa plus simple expression. Ne pensez plus, ils pensent pour vous, ne plantez plus ils plantent pour vous, ne produisez rien, ils vous servent tout à domicile prêt à cuisiner.

        Avez-vous vu des vaches laitières dans une étable. Ils veulent nous rendre ainsi

        Avez-vous vu une vache laitière tirer une charrue, labourer, servir de monture.

        Ils veulent que nous soyons à leur merci comme des esclaves, les ilotes et serf du bon vieux temps.

        Quand un seigneur ne veut pas faire la guerre il envoie un esclave mourir à sa place, et actuellement ils sont en train de le faire. (Combattre en Irak ou Afghanistan pour avoir l’insigne honneur de porter la nationalité américaine, qui avec le temps va devenir une tare de la posséder)

        Cependant ils veulent obtenir de nous plus que ça, ils veulent la soumission totale corps et âme.

        Actuellement ils prélèvent des organes sur des humains, et ceci, ne s’est pas passé uniquement en Palestine, cela se fait tous les jours à travers le monde entier,aucun pays n’est à l’abri de leurs méfaits.

        Et ils veulent qu’à l’avenir faire de nous des banques d’où ils prélèvent des organes comme bon leur semble.

        Continuez à dormir, le jour ou vous réveillerez ce sera sur une table d’opération. »

        ————————

        Note:

        Peut-être devrions-nous proposer à nos mousquetaires de la plume,comme autre « sujet » à débattre,ce « mystérieux phénomène »,cette « énigme scientifique de « la migration des crevettes dans l’oued Chélif »?!

        Et dire que,pendant ce temps là,un « haut » fonctionnaire du ministère de l’Éducation nationale,proche de Benbouzid,vient tout benoitement déclarer sur la chaine TV francophone algérienne,le jour de l’Aid,que: »

        « l’école n’est plus un lieu de transmission du savoir » !!!

        Bigre!Mais alors,dites-moi,que devient-elle?! Je vous le donne en mille: »l’APPRENTISSAGE DU COMPORTEMENT CITOYEN ». C’est de lui!

        A ce jour,point de lever de boucliers,ni le moindre commentaire sur cette extraordinaire « profession de foi » qui veut en réalité,nous fabriquer, »l’Homme nouveau » et « Citoyen du monde ».

        L’ élevage délibéré d’un « homme nouveau »,c’est-à-dire d’un être appartenant à l’humanité et en rupture avec son propre passé ou le passé historique. L’idée que l’homme puisse évoluer et devenir autre que ce qu’il est par nature et, plus encore, que l’on puisse le changer, est une idée très récente qui date des temps modernes.La Révolution française,le « siècle des Lumières » a, inauguré un mouvement laïque de refonte de l’homme, où l’utopie devient anticipation puis mise en pratique.

        c’est un concept qui est utilisé par tous les fascismes européens de l’entre-deux guerres, ainsi que par le communisme. La figure collective de « l’homme nouveau » régénéré,un idéal-type dévoué au régime,moralement(comportement citoyen) et physiquement irréprochable symboliserait alors plus généralement la société utopique de tous les totalitarismes. Un régime qui modèlerait la société pour créer « l’Un à partir du multiple » selon Hannah Arendt et éliminerait l’individualité pour créer l’être collectif . On en vient alors à faire de la MATRICE idéologique des « Lumières » un programme, et donc à adopter une vision programmatiste de l’histoire de la Révolution française.

        Il serait curieux de savoir ce qu’en disent nos « zintellos » en robe de chambre.

  5. De la « géopolitique » loufoque.
    Trouvé ce texte sur: http://takelsertit.pbworks.com/

    ——————————–

    Anṣuf yes-wen γer udeg n Takelsertit.

    Takelsertit (géopolitique) d tussna ay yeqqaren γef wassaγen (relations) gar tmura/akal ed nnfeε ay yellan deg-sen(t) akked tsertit (politique), am wakk-n ay teqqar γef wassaγen gar Yiwunak (Ddulat) ed temsizzelt gar-asen akk-n yal yiwen deg-sen ad yaweḍ γer nnfeε-nnes deg kra n tama n umaḍal.

    Adeg-a ad tafem deg-s imagraden (articles) γef tkelsertit (géopolitique). Ad teγrem deg-s γef tedyanin timeqranin ara iḍerrun deg umaḍal ed deg yal tamurt.

    Adeg-nneγ yettḍafar, daγen, tasertit n ussemḍel (mondialisation) ed lateṛ ameqran ay yes d-tgellu γef yiγerfan (ccuεub) n umaḍal. Ad neḍfer, deg udeg-nneγ tilufa n yal tamurt, yal aγref, i wakk-n ad nefhem ugar ay-n la iḍerrun deg umaḍal n wass-a.

    Adeg-nneγ nga-t s tmaziγt akk-n ad nesnerni iles-nneγ ed ad t-nessezg akk-n ad nessiwel yes-s γef tγawsiwin yerzan amaḍal. Nnig way-a, nebγa ad neg ifadden i medden akk-n ad qqaren ed ad ttarun s tmaziγt.

    Tanemmirt

    Omar MOUFFOK

    ——————————

    Remarque: Non!,ce n’est pas un message codé. Ni du Navajos ou de l’Inuit d’ailleurs. Tout faux! C’est du berbère latinisé selon Mr Omar Mouffok.Bien.

    Mais voilà:je suis moi-même berbérophone et j’avoue humblement y perdre mon….kabyle! Sans jeu de mots mais,n’est-ce pas un peu « loufoque » que tout cela? Si d’aventure,il se trouve quelque « expert » de passage pour traduire,par simple curiosité,j’aimerai bien savoir de quoi il retourne! Ugh !

    • Je suis kabyle de Mekla et sincèrement je ne me reconnais pas dans ce « berbère » écrit dans le message précédent. Comme avait dit un internaute, je perds mon kabyle ! Arrêtons de transformer nos langues en laboratoires d’expérimentation.

    • langue initiatique
      Un ami à qui j’ai transmis le lien et qui maîtrise parfaitement la langue amazighe, m’a fait la même réponse que celle de Mohand Ouvalwa : il n’a pas compris grand chose à ce « langage initiatique » qui ne ressemble à rien. Ce doit être la future langue du futur Etat de Mehenna, du nom de son fondateur….

      Au lycée, on avait un brave professeur de math qui ne cessait pas de nous répéter : « On ne fait pas boire un âne quand il n’a pas soif ». Personne n’est en effet obligé de connaître, ni d’apprendre la langue du Coran…

      « إنـك لا تـهـدي من أحـبـبـت ولـكـن الله يـهـدي من يـشـاء,,, »

      • Besoin de plus de commentaires
        Bonjour !

        Les commentaires tels que celui de M. Dehbi où il parle de langue initiatique est très intéressant à mon avis, moi qui préparerai non sans plaisir un petit texte narquois pour célébrer le 30e anniversaire de l’interdiction de la conférence de feu Mammeri, et qui pourrait m’offrir l’occasion de rendre hommage à feu Kamal Belkacem, récemment décédé. Je pourrais intituler mon texte ainsi : « 30 ans d’écrits infectes sur Tamazight » 🙂

        A vos plumes !

        Bien cordialement,

        Tahar Hamadache.

    • A part ça …
      A Mohsen:

      A part vos commentaires qui se veulent loufoques, que pouvez-vous apporter à votre langue kabyle ?

      • A Kaci Tizi-Ouzou
        Vous avez déjà posté le même commentaire intitulé « De la ‘géopolitique’ loufoque » sur un autre site d’un journal algérien. A quoi rime ceci ? Omar Mouffok prend au moins la peine d’écrire dans sa langue et d’accompagner les mots difficiles à comprendre (néologismes qui, pour la plupart ont été proposés par Mouloud Mammeri) avec des mots kabyles courants. Et des clowns de l’internet qui passent leur temps perdu à émettre des commentaires insensés, à votre image, que font-ils pour contribuer au développement de leur langue ?

      • LATINISER LE BERBERE-ACTE POLITIQUE
        Amastan a dit – « A part ça … » le 29-11-2010
        A Mohsen:
        « A part vos commentaires qui se veulent loufoques, que pouvez-vous apporter à votre langue kabyle? »

        —————————————
        @Amastan
        Je prend connaissance aujourd’hui même de votre commentaire et vous répond bien volontiers, blague à part.

        “En politique,rien n’arrive par accident.Si quelque chose se produit,vous pouvez parier que cela a été planifié de cette façon.”
        Franklin Delano Roosevelt (1882-1945),32e président américain.

        Et ce n’est pas un président « loufoque » qui nous le dit! Cette citation célèbre m’a incité à aller plus en avant et chercher à savoir si derrière cette volonté de LATINISER la langue de nos ancêtres, il n’y avait pas une raison occultée pour qu’il en soit ainsi.

        Le merveilleux outil de recherches qu’est le Web, m’a permis de découvrir une sérieuse piste de réflexion que je vous livre bien volontiers. Il s’agit d’un fameux précédent historique où l’impérialisme soviétique militaire mais aussi et surtout CULTUREL offrait à notre étude, un cas d’école gigantesque d’acculturation de masse de populations asservies et contraintes à renoncer à leur identité linguistique et religieuse(islamique) ancestrales.

        La voici :

        Latiniser l’écriture russe: un projet plus que linguistique

        Elena Simonato Kokochkina (université de Lausanne)
        Irina Kokochkina (université Paris XIII)

        « Il faut considérer toutes les réformes d’écriture chez les peuples (1) de l’URSS, à commencer par la réforme de l’orthographe russe, comme des processus d’origine et de caractère révolutionnaire. Elles font partie de la révolution qui se déroule dans le domaine étroit de la culture spirituelle ; dans le domaine des moyens techniques de la communication culturelle. ET LE LIEN DE CES « REVOLUTIONS GRAPHIQUES » AVEC LES MOTS D’ORDRE POLITIQUES DE LA REVOLUTION NE FAIT AUCUN DOUTE » (Polivanov, 1924). A Lire absolument le très intéressant article dans son entier sur:
        http://cid.ens-lsh.fr/russe/lj_simonato.htm

        Note : (1) L’URSS était un état multiethnique, où vivaient plusieurs centaines de nationalités et groupes ethniques et religieuses en partie musulmanes(Caucase).

    • I wengif Mohsen
      M. Mohsen ce n’est pas par ce que vous êtes un inculte qu’il faut généraliser votre cas aux autres. L’article de Omar MOUFFOK est très bien écrit et le contenu est parfaitement compréhensible pour celui qui connait le Kabyle, et qui a minimum d’initiation au système de transcription.
      Je trouve parfaitement indigne de s’attaquer, comme vous le faites, ici et ailleurs sur le net sous d’autres pseudo, à une personne que vous ne connaissez même pas. Je connais Omar Mouffok, un jeune homme mouman ,honnête et bien élevé . Alors que vous le « nationaliste » parisien vous n’avez pas hésité à changer votre religion pour celle de Khomeini.
      ———————-
      Ceci est l’extrait de la nouvelle de Amar Mezdad écrite en Kabyle et dont la traduction , sous le titre « Eux, le Corbeau et Nous  » est publiée à la NRF (Gallimard, Paris) n° de Juin 1996.

      Amar Mezdad est médecin de profession ( établit à Bgayet ), romancier ( 4 romans, un recueil de nouvelles et de poésie) et poète d’expression Kabyle. Il est natif de l’Arba Nat Yiraten . Sa famille a tout donner pour l’Algérie .

      Pour la nouvelle originelle
      http://www.ayamun.com/Novembre2003

      Pour la traduction :

      http://www.ayamun.com/Mai2000
      —————————————————–

      D TAGERFA I Ɣ-Ţ-IGAN

      (ukkis seg wedlis Tuɣalin d tulluzin nniḍen, ayamun2003)

      _ Ihi, uggaɣ ur teẓriḍ ara acimi, seg wasmi tebda ddunit, Nutni zwaren-aɣ ɣer tmussni, zgan asurif ɣer zdat, nekkni asurif ɣer deffir ?

      Nek nniɣ-as :

      _ Ur ak-ţzuxxuɣ ara aql-i bateɣ, a Dda-Muḥ, wissen, ma d ssebba tella tella.

      _ Amek, ur teẓriḍ ara daɣen acimi berriket tgerfa ?

      Dɣa, yebda la yi-d-yesseftuy acimi akka i ɣ-yuɣal ddkir s aɛrur, xerben-aɣ lexyuḍ, neggumma ad nezdi aqerru, yezga fell-aɣ uzaylal, armi i ɣ-zwaren ɣer tal tama n tmussni. Kra yeḍran yid-neɣ armi tella ssebba : yak d tagerfa i ɣ-ţ-igan !

      Tuɣal dayen d tannumi, kra n tikkelt ara d-nemlil, ad d-yaf ɣef wacu ara d-igerrez inan. Mi ara yeɣli deg umeslay, ulac win ara t-id-yeṭtfen, win yellan zdat-s i yas-d-yeggran d asefled. Yebda yeţţawi-d awal winna ifazen ɣur-s, ɣef teqsiṭ n tgerfa akked leQbayel d iRumyen.

      Tamacahuţ-a, kemseɣ-ţ awal awal, yak ahat nnig 100 iberdan nek selleɣ-as, acu, iwakken ur as-tedduɣ ara di nnmara, ilaq ad rreɣ iman-iw amzun ass-a kan ara ţ-id-yawi : yak tura Dda-Muḥ, texreb ṭtbiɛa-as acemma kan akka ad yennuɣni. Ussan i s-d-yeggran, lxiq yegget fell-as, degmi limer ad yaf ur yuɣal yiles ger tuɣmas. Ihi, ata-n neţţa yeţmeslay nek smuzguteɣ, ccwi kan yehwa-yi-d wesmuzget ɣur-s, i-mi tarewla ulac.

      Dda-Muḥ, inan i d-yeţţawi, ad as-tiniḍ d axiḍi i ten-yeţxiḍi. Tal tikkelt irennu-yasen kra neɣ itekkes deg-sen : awal, tawinest, imesli neɣ araqi (*), ha ad ɣlin ha ad rnun. Daɣ taqsiṭ-a, mačči akken i ţ-id-yeţţawi ass-a ara ţ-id-yawi ass nniḍen. Tideţ yellan, ameslay n Dda-Muḥ lhejna yid-s tezga.

      Abrid-a, tilkin i d-tezreɛ fell-aɣ tgerfa, ur d tid n menwala : tiqejjirin-nsent ţţarwent-d aman sebken neṭden ugaren addad unebdu. Am wakken aglim nnulent, dayen ur as-ṭtixirent, deg-s ẓzunt. Yerna, llazuq-a i d-ţţarwent, s usuget mačči d kra, mi d-yeɣli kan, s taɣert ; ineṭteḍ ɣas inuda wemdan ad t-iwali ur yeţţaf amek, i-mi deg tiɣmi amzun d aman n tala. Yerna llazuq-nni, aglim yennul din ara ireṣsi, yeṭtafar aẓar idammen, wa yeţţaǧǧa-t-id i wa, teţţaf-it-id dderya. Aqcic ara d-ilalen yeţţawi-t-id yid-s akken i d-yeţţawi tiɣmi n wallen neɣ teɣzi n wanzaren-is. D ayen ur ntekkes, d ayen ur neţbeddil ma ulac aweddeb, ad iɣellel akken ara tɣellel tudert, tasuta yezrin tayeḍ ad t-id-taf.

      _

    • I wengif Mohsen
      M. Mohsen ce n’est pas par ce que vous êtes un inculte qu’il faut généraliser votre cas aux autres. L’article de Omar MOUFFOK est très bien écrit et le contenu est parfaitement compréhensible pour celui qui connait le Kabyle, et qui a minimum d’initiation au système de transcription.
      Je trouve parfaitement indigne de s’attaquer, comme vous le faites, ici et ailleurs sur le net sous d’autres pseudo, à une personne que vous ne connaissez même pas. Je connais Omar Mouffok, un jeune homme mouman ,honnête et bien élevé . Alors que vous le « nationaliste » parisien vous n’avez pas hésité à changer votre religion pour celle de Khomeini.
      ———————-
      Ceci est l’extrait de la nouvelle de Amar Mezdad écrite en Kabyle et dont la traduction , sous le titre « Eux, le Corbeau et Nous  » est publiée à la NRF (Gallimard, Paris) n° de Juin 1996.

      Amar Mezdad est médecin de profession ( établit à Bgayet ), romancier ( 4 romans, un recueil de nouvelles et de poésie) et poète d’expression Kabyle. Il est natif de l’Arba Nat Yiraten . Sa famille a tout donner pour l’Algérie .

      Pour la nouvelle originelle
      http://www.ayamun.com/Novembre2003

      Pour la traduction :

      http://www.ayamun.com/Mai2000
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      D TAGERFA I Ɣ-Ţ-IGAN

      (ukkis seg wedlis Tuɣalin d tulluzin nniḍen, ayamun2003)

      _ Ihi, uggaɣ ur teẓriḍ ara acimi, seg wasmi tebda ddunit, Nutni zwaren-aɣ ɣer tmussni, zgan asurif ɣer zdat, nekkni asurif ɣer deffir ?

      Nek nniɣ-as :

      _ Ur ak-ţzuxxuɣ ara aql-i bateɣ, a Dda-Muḥ, wissen, ma d ssebba tella tella.

      _ Amek, ur teẓriḍ ara daɣen acimi berriket tgerfa ?

      Dɣa, yebda la yi-d-yesseftuy acimi akka i ɣ-yuɣal ddkir s aɛrur, xerben-aɣ lexyuḍ, neggumma ad nezdi aqerru, yezga fell-aɣ uzaylal, armi i ɣ-zwaren ɣer tal tama n tmussni. Kra yeḍran yid-neɣ armi tella ssebba : yak d tagerfa i ɣ-ţ-igan !

      Tuɣal dayen d tannumi, kra n tikkelt ara d-nemlil, ad d-yaf ɣef wacu ara d-igerrez inan. Mi ara yeɣli deg umeslay, ulac win ara t-id-yeṭtfen, win yellan zdat-s i yas-d-yeggran d asefled. Yebda yeţţawi-d awal winna ifazen ɣur-s, ɣef teqsiṭ n tgerfa akked leQbayel d iRumyen.

      Tamacahuţ-a, kemseɣ-ţ awal awal, yak ahat nnig 100 iberdan nek selleɣ-as, acu, iwakken ur as-tedduɣ ara di nnmara, ilaq ad rreɣ iman-iw amzun ass-a kan ara ţ-id-yawi : yak tura Dda-Muḥ, texreb ṭtbiɛa-as acemma kan akka ad yennuɣni. Ussan i s-d-yeggran, lxiq yegget fell-as, degmi limer ad yaf ur yuɣal yiles ger tuɣmas. Ihi, ata-n neţţa yeţmeslay nek smuzguteɣ, ccwi kan yehwa-yi-d wesmuzget ɣur-s, i-mi tarewla ulac.

      Dda-Muḥ, inan i d-yeţţawi, ad as-tiniḍ d axiḍi i ten-yeţxiḍi. Tal tikkelt irennu-yasen kra neɣ itekkes deg-sen : awal, tawinest, imesli neɣ araqi (*), ha ad ɣlin ha ad rnun. Daɣ taqsiṭ-a, mačči akken i ţ-id-yeţţawi ass-a ara ţ-id-yawi ass nniḍen. Tideţ yellan, ameslay n Dda-Muḥ lhejna yid-s tezga.

      Abrid-a, tilkin i d-tezreɛ fell-aɣ tgerfa, ur d tid n menwala : tiqejjirin-nsent ţţarwent-d aman sebken neṭden ugaren addad unebdu. Am wakken aglim nnulent, dayen ur as-ṭtixirent, deg-s ẓzunt. Yerna, llazuq-a i d-ţţarwent, s usuget mačči d kra, mi d-yeɣli kan, s taɣert ; ineṭteḍ ɣas inuda wemdan ad t-iwali ur yeţţaf amek, i-mi deg tiɣmi amzun d aman n tala. Yerna llazuq-nni, aglim yennul din ara ireṣsi, yeṭtafar aẓar idammen, wa yeţţaǧǧa-t-id i wa, teţţaf-it-id dderya. Aqcic ara d-ilalen yeţţawi-t-id yid-s akken i d-yeţţawi tiɣmi n wallen neɣ teɣzi n wanzaren-is. D ayen ur ntekkes, d ayen ur neţbeddil ma ulac aweddeb, ad iɣellel akken ara tɣellel tudert, tasuta yezrin tayeḍ ad t-id-taf.

      _ Ihi, a mmi, tamsalt-a gar-aɣ yid-sen, mačči n wass-a kan, bu sin-iḍarren meskin ur as-d-yeţţaf ixef-is : ur as-tezmireḍ ad ţ-tekkseḍ keč, ur as-zmireɣ nekkini, ur as-yezmir wayeḍ. Seg wasmi tebda ddunit, nutni zdat nekkni deffir. Win i k-yeǧǧan yeǧǧa-k, ulac xali-k di tessirt ! Azzel neɣ qim, d aḥerḥer ara d-tagmeḍ i iman-ik, Daɛwessu tenteḍ di twenza, ẓzayet mačči d kra, nekkni deg-s la neţbibbi, limer nezmir meqqar ! Baba-k yeǧǧa-yak-ţ-id, keč daɣen ad d-teǧǧeḍ tasennant i warraw-ik.

      _ Yak, a Dda-Muḥ, ɣileɣ tennumeḍ teqqareḍ : ulac aṭtan ur yurǧi usafar-is, ulac taluft ur nferru. Ula d taluft-a, yiwen wass daɣen ad as-d-naf ixef-is. Akken i d-teɣli lada ara yili ddwa-s. Yelha usirem, dir win yeţţaysen !

      _

      • RE: I wengif Mohsen
        @Muhand

        Disqualifier l’autre, celui qui ne partage vos idées, est une méthode classique de bas-étage et qui ne grandit nullement ceux qui s’y adonnent.

        J’affirme à nouveau haut et fort que,LATINISER LA LANGUE BERBÈRE EST UN ACTE HAUTEMENT POLITIQUE.Acte conscient ou pas qu’une poignée de militants berbéristes francophones et francophiles assume au nom de toute une population qui ne les a certainement pas mandatés pour agir en leur nom.

        Ce CHOIX POLITIQUE qui n’engage que ses partisans,n’a pas fait l’objet au niveau national,à ma connaissance,de réunions et débats CONTRADICTOIRES PUBLICS entre spécialistes, et d’aucune CONSULTATION POPULAIRE menée auprès de la population concernée en premier chef. Une aussi grave question identitaire aurait voulu que très DÉMOCRATIQUEMENT la question ait été l’objet d’un LÉGITIME REFERENDUM et qui aurait permis au plus grand nombre de trancher en toute conscience, en faveur ou contre la LATINISATION DE LEUR LANGUE.

        Nous constatons,hélas,que ces groupuscules de militants de « grande culture » sûrs d’eux-mêmes et dogmatiques ont,avec une orgueilleuse légèreté,fait fi de l’opinion de l’autre,de ceux dont ils s’arrogent le droit de les représenter. Ce sérail(dont certaines vedettes parisiennes médiatisées) qui  » connait le Kabyle, et qui a un minimum d’initiation au système de transcription « , s’évertue encore et toujours de monopoliser la parole du plus grand nombre et ce,en violation du sacro-saint droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

        Par ailleurs,il n’aura échappé à personne que, à l’appui de mes dires, je produis des faits et des documents de tout premier ordre,un cas historique émanent d’universitaires hautement spécialisés issus de la Sorbonne. Les avez-vous tout simplement lus? Dans l’affirmative, pourquoi donc ne pas les commenter et pourquoi vous contentez-vous de verser dans l’invective et le propos fort discourtois en lieu et place d’argumentaires?!

        Pour conclure, je vous affirme que je n’ai rien contre la personne de Mr Omar Mouffok dont vous vous faites l’avocat.Je suis moi-même issu de la région d’Aît-Yala dont la population a,elle aussi,payé un lourd tribut à la guerre de libération. Je ne m’attarderai donc pas sur la légitimité du droit du sang versé pour m’exprimer sur un grave sujet d’ordre culturel dont une minorité non représentative a exclu péremptoirement la majorité car infantilisée et réduite à subir les prétentions politiques de quelques-uns.
        C’est Mr Omar Mouffok le spécialiste qu’il affirme être,et lui seul que je critique.Quand on écrit,on doit savoir que l’on peut-être sujet à la critique de la part de ses lecteurs et que ce que l’on écrit relève du domaine public.Quant au reste de votre réplique qui manque de politesse,je me ferai l’économie d’y répondre car tout ce qui est excessif est insignifiant.

        Cordialement.

  6. ecrivassier
    certes m K Daoud est une assez bonne plume qui sait écorner , écorcher tout ce qui a trait à l’Islam et l’arabité avec les chroniques les seules que j’aie pu terminer de lire tant j’avais la nausée .En effet pour ce quidam « l’arabité » est le tribut de « la colonisation horizontale » trouvaille lexicale qui semble le rendre assez fier , et « le Coran » chez lui est recueils de textes épars glanés ça et la par le Prophète de l’Islam ‘Hachah » pour en faire un livre sacré.Qui peut etre ce minus pour juger ainsi un texte sacré pour tout ce que l’algerie et le monde musulman peut porter de croyant.Et que pense du « MYTHE BERBERE » de Charles André Julien . certes vous avez le droit d’etre incroyant mais aller jusqu’a se gausser ainsi de la foi des millions de lecteurs qui payent votre pitance , voila un parangon d’ingratitude incarné par une personne qui « p…plus haut que son c… ».Quant à faire le beau , museau plus bas que le paillasson devant la brute sioniste ,il n’hésite pas un instant à implorer le sanguinaire bourreau en l’appelant « MON FRERE » (confer. chronique de janvier 2009). J’en suis persuadé , le fantasme de ces gens là (Hirsin , nasreen,rushdie, sansal, meddeb et consorts) c’est faire de l’autoflagellation , donner des coups canifs à la religion de leurs ancetres , se renier et le faire savoir pour mériter les félicitations condescendantes de leurs maitres et les Goncourt et Renaudot DE LA TRAITRISE.

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