Passé le viol de la Constitution, les jeux sont-ils faits pour le troisième mandat et la poursuite de la régression démocratique? Oui, si les opposants continuent à s’opposer les uns aux autres, faire cavalier seul, ou refuser d’aller au combat. Non, si les élites de bonne volonté et de «tendance révolutionnaire» se mobilisent autour d’un homme fort et crédible pour provoquer un «coup d’Etat électoral»  contre le clan d’Oujda.

Malgré tout, l’évolution politique de l’Algérie demeure un modèle à suivre pour les pays arabes et africains aux régimes archaïques. Le viol à huis clos de la Constitution est un coup très rude porté à l’expérience démocratique algérienne, mais comme dans un match de football, nos voisins supporters ne désespèrent pas et s’attendent toujours à une réaction d’amour-propre de ces vaillants algériens fiers et belliqueux pour renverser le rapport de force.

Il est écrit dans le préambule de la Constitution : «Le peuple algérien est un peuple libre, décidé à le demeurer.  Son histoire est une longue chaîne de luttes qui ont fait de l’Algérie de toujours une terre de liberté et de dignité. Placée au cœur des grands moments qu’a connus la Méditerranée au cours de son histoire, l’Algérie a su trouver dans ses fils, depuis le royaume numide et l’épopée de l’Islam jusqu’aux guerres coloniales, les héros de la liberté, de l’unité et du progrès, en même temps que les bâtisseurs d’États démocratiques et prospères dans les périodes de grandeur et de paix.»

Le clan d’Oujda au pouvoir a beau faire semblant de travailler, le pays reste bloqué, désespéré, cintré dans son carcan répressif. Mais avant chaque élection, le pouvoir a toujours su mobiliser les karkabous du tribalisme folklorique des comités de soutien «pouvoiristes» pour se donner l’impression et l’image d’une réelle popularité.

Mais la population n’est pas dupe et peut participer massivement à la bataille présidentielle contre le «candidat du pouvoir» si un candidat courageux apporte une réelle volonté de réformes radicales pour construire une nouvelle République. Le civisme patriotique et toute la société ne peuvent s’émanciper que par la «démilitarisation» et la «déconcentration» de l’Etat. Voici quelques propositions.

Démilitariser la gestion de l’Etat

La première mission du nouveau Président sera de mettre fin au pouvoir anticonstitutionnel exercé par le DRS en prononçant sa dissolution et l’abrogation immédiate du Décret d’état d’urgence instauré en 1992. C’est ce décret qui a permis au DRS de contrôler tout le pays en plaçant ses hommes dans toutes les institutions de l’Etat, les banques et entreprises, les partis et la société civile. Il censure les responsables politiques, civils et associatifs en les empêchant d’exercer leurs fonctions en toute légitimité et autonomie.

Les services secrets doivent être réorganisés, en prenant soin de séparer les structures, les responsabilités, et en leur imposant des contrôles parlementaires. Les trois volets de la sécurité, extérieure, intérieure et militaire doivent être cloisonnés dans trois structures différentes dont les trois responsables rendront compte directement au président qui les nomme, et à une Commission de Défense du Parlement qui contrôlera leur fonctionnement et leur budget.

La nature même de leur métier impose aux agents des services l’anonymat et une discrétion absolue au lieu de cet exhibitionnisme d’autoritarisme, d’affairisme, de corruption et de débauche.

Le poste de Ministre de la Défense n’a pas lieu d’être. Le Président, Chef Suprême des Forces Armées, se suffira pour le seconder d’un Chef d’état-major des armées. Le président sera garant du partage des responsabilités dans l’organisation matricielle de l’ANP en nommant tous les chefs d’états-majors, de région, des unités opérationnelles et logistiques, des divisions fonctionnelles. Il exercera l’autorité opérationnelle qu’il ne déléguera qu’en situation de crise grave ou de guerre.

Le Président veillera à la non-ingérence de l’armée dans la gestion civile et politique de l’Etat. Il nommera un Secrétaire d’Etat chargé de coordonner les relations de l’Armée avec les institutions civiles, et auquel seront rattachées la gestion des anciens combattants en supprimant le Ministère des Moudjahiddines.

Décongestionner l’Etat par la Régionalisation

Il est évident qu’un gouvernement centralisé ne peut plus gérer la complexité d’un grand pays de 2,5 millions de km2 à partir d’un ministère ou d’une administration centrale. Le système politique local conçu après l’indépendance est largement dépassé par la démographie, l’urbanisme, la croissance économique, les changements politiques internes et internationaux. L’heure est à l’émergence d’une nouvelle génération au pouvoir local pour une réelle «démocratie de proximité».

Les APW superflues doivent être supprimées et remplacées par des Gouvernorats Régionaux élus (Algérois, Oranie, Constantinois, Mitidja, Titteri, Kabylie, Aurès, M’Zab, Saoura, Touat, Oasis, Hoggar, Tassili, Tindouf, …). Regroupant plusieurs wilayas, l’avantage de cette décentralisation est d’adapter la gestion gouvernementale locale aux spécificités ethno-géographiques des régions, l’homogénéité de leurs populations, cultures et traditions.

Il faut augmenter le nombre de wilayas et confiner le corps des walis dans leur rôle de responsables de la sécurité publique civile (réglementation, urbanisme, hygiène, circulation routière, force publique,…) en les déchargeant de la gestion de l’activité économique, culturelle et sociale, dévolue aux gouverneurs et aux présidents d’APC selon un partage du pouvoir et des prérogatives à définir. La collecte des ressources et des impôts locaux et la répartition des revenus et des richesses ne doivent plus être du ressort des commis de l’Etat mais dépendront des élus du peuple.

Les daïras doivent être supprimées pour renforcer les APC. Les daïras, dont l’existence se justifiait à l’époque du Tout-Etat et de l’immensité des départements, sont devenues aujourd’hui des structures coûteuses et obsolètes, alors que les APC sont livrées à elles-mêmes faute de personnel qualifié. Les effectifs et les prérogatives des daïras seraient partagés entre les wilayas et les APC. Les secrétaires généraux des APC seront formés dans un corps de «cadres territoriaux» constituant le vivier des futurs walis. La réception du public ne se fera plus au niveau des wilayas mais des APC, en avantageant la proximité.

L’opposition politique qui s’est résumée depuis 1989 à des revendications identitaires, culturelles, religieuses et idéologiques doit passer maintenant à un stade plus réaliste de gestion locale des affaires de la cité et des régions.

Dans quelques années, lorsque la gouvernance régionale sera bien adaptée, les wilayas pourraient être supprimées et leurs prérogatives attribuées aux gouverneurs.

Mettre fin au bicéphalisme à la tête de l’Etat

La nomination d’un chef de gouvernement ou d’un premier ministre se conçoit soit dans les monarchies, soit dans les régimes parlementaires avec des «présidents fainéants». L’expérience internationale a maintes fois démontré que le bicéphalisme à la tête de l’Etat n’a jamais été équilibré et diminue lourdement le pouvoir de l’un par rapport à l’autre. Par ailleurs, dans les pays démocratiques régionalisés, décentralisés et bien gérés, on ne retient même plus les noms du président ou du premier ministre.

Notre système politique est trop influencé par le modèle français, lui-même remis en cause, comme le montre l’hyper activité du président actuel qui a complètement étouffé son premier ministre, ou l’expérience passée de cohabitation.

Si on opte pour l’instauration des Gouvernorats régionaux, le gouvernement central sera allégé et donc le poste de premier ministre sera supprimé pour laisser place à un régime présidentiel «à l’américaine» contrôlé par un Parlement exerçant un réel pouvoir législatif.

La nomination du tiers présidentiel au Sénat par le président doit être supprimée. L’opportunité même de maintenir le Sénat doit être discutée. Peut-être qu’un Conseil Constitutionnel renforcé et dont les membres seront tous élus par le Parlement, selon des critères à définir, suffira comme «Conseil des sages».

Indépendance du pouvoir judiciaire

La forte dépendance de la Justice du pouvoir politique est une des failles profondes des dysfonctionnements de l’Etat et la société. Le Ministère de la Justice sera supprimé et ses prérogatives partagées entre :

– le Procureur Général de la République (PGR), choisi et nommé par le Président, dans le corps spécifique des procureurs, pour un mandat de cinq ans. Il aura autorité sur tous les procureurs, les greffes, les prisons, la logistique et le personnel des tribunaux et des cours, les huissiers, la police judiciaire. Les conservations foncières qui gèrent le «casier judiciaire» des actes de propriétés seront extirpées de la direction des domaines et rattachées au PGR qui nommera des greffiers en chefs juridiquement qualifiés pour les diriger.

– le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) présidé par le Président de la Cour Suprême élu par ses pairs pour un mandat de cinq ans. Le CSM gérera et nommera les magistrats de siège et d’instruction des tribunaux et cours, ainsi que les magistrats de la Cour des Comptes et du Conseil d’Etat. Les membres du CSM, remplissant les conditions d’ancienneté, seront élus par les magistrats en exercice pour un mandat de cinq ans.

Selon l’article 147 de la Constitution «Le juge n’obéit qu’à la loi». En vertu de quoi, le président de la République n’aura aucune autorité sur le CSM et ne nommera aucun de ses membres et ne sera plus considéré comme le premier magistrat du pays, rôle dévolu au président de la Cour Suprême. Cependant, le président de la république conservera seul le droit de grâce, après avis du CSM.

Indépendance du pouvoir monétaire

Les nombreux et coûteux scandales financiers sont la conséquence de chevauchements de prérogatives et d’ingérence politique dans la gestion monétaire et bancaire.

Le Ministère des Finances sera supprimé pour consacrer l’indépendance de la Banque Centrale, dont le Gouverneur, nommé par le président, exerce le pouvoir régalien de l’Etat et aura autorité d’agrément et de contrôle des activités monétaires, financières et bancaires.

Le gouvernement se suffira d’un Ministère du Budget chargé de gérer et contrôler les recettes et les dépenses de l’Etat (Trésor, Impôts, Douanes, Comptabilité, IGF). Ce ministère mandatera les administrateurs qui siègeront dans les Conseils d’Administration des banques publiques gérées selon les mêmes conditions que les banques privées.

Pour mettre un terme à la mauvaise gestion, aux spéculations et gabegies foncières, la direction du Domaine national, chargée de la gestion et la préservation du patrimoine foncier, sera autonome de tout ministère et son responsable nommé par le président.

Indépendance de l’autorité religieuse

Il faut mettre un terme définitif à l’instrumentalisation de la religion à des fins politiques en modifiant l’article 2 de la Constitution «L’islam est la religion de l’Etat» par «L’Etat garantit la liberté du culte religieux». On ne peut pas enfermer une religion dans le carcan d’un Etat profane. Le Ministère des affaires religieuses doit être supprimé et toutes ses prérogatives gérées par le Haut Conseil Islamique présidé par un Grand Muphti élu par ses pairs reconnus pour être des oulémas.

Le HCI gérera le patrimoine des Habous et des édifices religieux, nommera les imams, agréera les associations caritatives, les zaouïas, les lieux saints, gérera l’enseignement coranique, les pèlerinages. Il gérera aussi les relations avec les autres cultes et leurs agréments. Il définira et gérera le budget alloué par l’Etat.

Le HCI sera consulté par le Parlement et le CSM pour toute question législative ou judiciaire concernant l’exercice des cultes et des libertés religieuses.

Indépendance de l’Information et de la Culture

La chape de plomb qui s’est de nouveau abattue sur les médias publics et privés prouve encore à quel point la censure rend toute une population sourde et aveugle, donc incapable d’avancer. Tous les médias doivent être privatisés. L’Etat peut se suffire du seul Journal Officiel.

Le Conseil Supérieur de l’Information et le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, mis en veilleuse, récupéreront leurs prérogatives usurpées par le DRS et le ministère de l’Information qui doit être supprimé.

La façon dont l’érudit Amine Zaoui a été remercié de son poste de Conservateur de la Bibliothèque Nationale prouve en soi la nécessité de supprimer le ministère de la Culture pour laisser les personnalités culturelles évoluer en toute indépendance d’esprit.

Seule la Justice peut prononcer l’interdiction d’un livre, un journal ou une manifestation culturelle.

Le Président nommera parmi les universitaires reconnus par leurs carrières et travaux :

– Le Conservateur de la Bibliothèque Nationale, gardien des trésors littéraires, manuscrits et livres anciens.
– Le Conservateur des Archives Nationales, gardien du temple de la mémoire.
– Le Conservateur du Patrimoine qui nommera les Conservateurs de Musée.

Les conservatoires de formation musicale et artistique, écoles de danse, peinture, … seront rattachées au  ministère de l’Education.

Les Maisons de la Culture, cinémas, théâtres, bibliothèques, etc … seront gérées par les Gouvernorats et les APC.

Par contre, toutes les activités culturelles, artistiques, théâtrales, cinématographiques, musicales, etc… doivent être laissées à la libre initiative sans aucun dirigisme étatique, ni assistanat.

Réduction du train de vie de l’Etat

La multiplicité des ministères crée des surcoûts qu’il est devenu impératif de réduire en ces temps de crise. La création de gouvernorats régionaux permettra de diminuer drastiquement le train de vie du gouvernement central et de limiter l’activité des ministères à la production de lois, normes et réglementations. Des regroupements peuvent être opérés comme par exemple :

– Education, jeunesse et sport
– Agriculture, environnement, forêt, pêche
– Urbanisme, travaux publics, transport, énergie
– Industrie, PME, Artisanat, Tourisme, Commerce
– Emploi, Sécurité sociale, Famille

D’autres suppressions du «dirigisme ministériel» peuvent être opérées au profit d’organismes paritaires regroupant des professionnels comme :

– le Ministère de la Santé à remplacer par un Conseil National de la Santé,
– le Ministère des Sports à remplacer par un Conseil National des Sports,
– le Ministère du Tourisme à remplacer par l’Office National du Tourisme,
– le Ministère du Commerce à remplacer par la Chambre Nationale du Commerce,
– etc.

Des secrétariats d’Etat spécifiques peuvent être créés selon les besoins conjoncturels.

Quant à Sonatrach, elle doit être dirigée par un gouvernement d’entreprise et demeurer la propriété intégrale de l’Etat, car on ne peut tuer «la poule aux œufs d’or».

L’essentiel est qu’à l’avenir le Président s’appuiera essentiellement sur l’Armée et deux ministères de souveraineté (Intérieur et Affaires Etrangères) pour concentrer l’essentiel de sa souveraineté politique, aplanir les différents régionaux, œuvrer à l’édification du Maghreb et représenter dignement l’Algérie dans le concert des Nations.

Saâd Lounès
1er décembre 2008

2 commentaires

  1. intéressant
    Passant sur le préambule du texte, que je trouve un peu issue de cette tradition de l’opposition algérienne de toujours faire une critique des hommes basée sur des critères un peu douteux de généralisation; je trouve à contrario vos différentes propositions d’action d’un vif intérêt, notamment ce qui à trait à la décentralisation de l’état, que je pousserais moi jusqu’au fédéralisme, et qui est une nécessité pour libérer les énergies créatrices régionales de toujours vouloir porter la lutte au sommet de l’état, ceci afin de les réorienter vers des initiatives locales, plus profitables au commun des algériens. Je salue donc votre perspicacité.

  2. RCD
    C’est gravement grave :

    SAÏD SADI DEMANDE À OBAMA DE L’AIDER…

    La bourde de trop !

    On savait le patron du RCD intempestif, un peu trop porté sur les «excès». Mais là, toute raison a été abandonnée, sans doute sous l’effet d’une haine sourde contre un pouvoir que Sadi convoite secrètement et à n’importe quel prix. I ncroyable mais vrai. Dans un message mis en ligne samedi soir sur le site officiel de son parti, le docteur Saïd Sadi a tenté de s’adresser directement au nouveau président américain, Barack Obama, lui demandant de lui venir en aide. Même s’il ne le dit pas ouvertement, le patron du RCD semble lui suggérer de l’aider à « prendre le pouvoir », quitte à ce que cela se fasse par la force. Sachant sans doute que les Américains raisonnent le plus souvent par blocs, et non par États, Sadi propose même en filigrane d’être en quelque sorte le gendarme des Américains dans la région nord-africaine puisqu’il suggère à Obama d’instaurer la démocratie dans toute cette région. Ceci pour ce qui concerne l’info, quasi brute. Passons maintenant aux commentaires et aux analyses. Sadi, comme chacun le sait, avait annoncé officiellement le gel de son parti en guise de protestation contre ce qu’il a qualifié de « coup de force des présidentielles d’avril 2009 ». Ses députés, ont du reste déserté l’hémicycle depuis ce jour. On se demande aussi pourquoi ses élus locaux n’en ont pas fait autant. On se demande surtout pourquoi ce chantre de la démocratie, en réunissant le Conseil national de son parti, n’a pas annoncé à l’avance sa décision, ne laissant d’autre alternative aux autres que de le suivre. Tout le monde sait par ailleurs que ce « chantre de la démocratie », régulièrement et systématiquement lâché et dénoncé par ses « lieutenants », avait posé comme condition à sa candidature la présence d’observateurs étrangers, option que les organisateurs du scrutin présidentiel d’avril prochain ont adoptée. Sadi, après avoir vainement épuisé ses appels du pieds aux « décideurs », (comme il en a fait l’aveu dans son discours lors du dernier Conseil national du RCD), puis au FFS et aux anciens ténors du fameux groupe des dix, semble avoir craint de se ridiculiser en se lançant dans la bataille électorale alors que même son parti a fini par s’effilocher au fil de ses errements, égarements et retournements vestimentaires. On s’étonne également que Sadi, censé être en léthargie pour les quelques mois à venir, ait pris la peine et le temps de se « réveiller » l’espace d’une heure ou deux pour adresser un message à un homme qui n’entendra jamais parler de lui, et lui faire une sorte d’offre de service étalée au grand jour. Sadi, désormais aveuglé par la haine et les échecs successifs essuyés lors de ses campagnes politiques suivies de purges visant les « seconds » qui « menacent » de lui faire de l’ombre, est allé encore plus loin dans son offre. Il dépasse en effet les frontières algériennes pour se « faire » le « glaive justicier » de l’Amérique pour toute la région nordafricaine, un peu comme l’entité sioniste dans la région proche et moyen orientale. Il oublie, ce disant, qu’outre le fait qu’Obama n’entendra jamais parler (il a eu beau tenter de se rappeler à ses bons souvenirs lorsqu’il fréquentait les conventions démocrates) que l’opposition se mérite dans toute démocratie qui se respecte. Les adversaires des Républicains aux USA ont vécu stoïquement leur traversée du désert sans jamais éprouver ce besoin malsain de faire appel à des chars, des porte-avions pour les porter au pouvoir par la force, une fois échouée la voie des « urnes ». Ce n’est pas tout. L’Amérique a-t-elle été quelque jour un exemple de démocratie ou de respect des droits de l’Homme lorsqu’il s’agit de ses intérêts ou carrément de la nation arabe et musulmane ? Sadi, pour accéder à ce pouvoir qui le fuit systématiquement, est-il prêt à aller jusqu’à introduire le loup dans la bergerie ? Sait-il seulement qu’il en serait la première victime ? Alaoui en a fait la triste expérience en Irak, n’est-ce pas…

    Mohamed Abdoun Haut

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    SADI L’AMERICAIN

    Il s’est tu un siècle et le jour où il s’est remis à parler, il a blasphémé. Ce proverbe tiré du florilège de la sagesse arabe, s’applique in extenso, et dans le fond et dans la forme, au chantre de la laïcité en Algérie en l’occurrence le leader du RCD, Saïd Sadi. En effet, ce dernier après avoir usé, sans succès car à chaque fois les urnes en décidaient autrement, de tous les moyens légaux pour accéder au Palais d’El Mouradia, voudrait cette fois ci aller à l’assaut de ce dernier, qui n’est autre que le symbole de la souveraineté nationale, sur un char américain à défaut d’y être parachuté par un B 52. Sadi qui a de tout temps choqué le peuple par ses sorties dont la plus connue est le concept de laïcité, vient cette fois de demander à Obama, on ne sait s’il s’adressait à Hussein ou à Barack, de l’aider à instaurer la démocratie en Algérie ! Mieux encore ! Et en Afrique du Nord en général. Dans une lettre adressée au 44 ème président des États-Unis d’Amérique, Saïd Sadi fait une offre de service au leader de la première puissance politique dans le monde en écrivant : « Nous sommes nombreux à avoir noté votre disponibilité pour contribuer à l’émergence d’une gouvernance transparente et au respect mutuel des peuples. Sur ce chantier particulièrement, la nouvelle Amérique trouvera de nombreux partenaires fiables et déterminés dans nos contrées. » Ainsi, il lance un appel à l’ingérence pure et simple dans les affaires de pays souverains. Dans ce contexte, le défenseur des droits de l’Homme Sadi se propose de faire le travail à la place des « boys » américains. Ainsi, entre les lignes il se dit prêt à mettre en exécution, les plans que Langley (siège de la CIA) pourrait lui concocter dans ses laboratoires. Sadi oublie que l’Algérie n’est pas une république bananière où l’on peut installer et destituer un président au gré des allégeances. Il oublie surtout que l’Algérie a retrouvé son Indépendance en 1962, une indépendance pour le recouvrement de laquelle elle a payé un lourd tribut. Donc elle n’est pas prête pour satisfaire les désirs politiques de Sadi de remettre en cause cet acquis, qui depuis 1990 n’arrive pas à convaincre le peuple algérien de la justesse de ses visions, en dépit des concessions faites tel que le retrait du mot laïcité de son discours politique. Saïd Sadi, qui s’est trompé en 1991 de peuple, s’est trompé cette fois ci de destinataire. Car le tout nouveau président américain a fort à faire, avec le lourd et épineux héritage légué par son prédécesseur. Sa priorité est de redorer le blason de son pays terni par tant d’ingérences dicté par le complexe militaro-industriel. Il n’a nullement besoin d’une action similaire en Afrique du Nord car même si les États-Unis et la France se disputent la sphère d’influence qui est l’Afrique par groupes de rebelles interposés, il est dans l’intérêt des deux à ce que l’Afrique du Nord reste et pour longtemps en dehors des zones de turbulences.

    B. M.

    Articles parus dans « Le Courrier d’Algérie » du 26/01/09

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