Comme toujours et lorsqu’on aborde la question lancinante du rassemblement des Algériennes et Algériens, toutes tendances confondues, autour d’une plateforme commune de principes et de valeurs, le débat s’anime, ce qui est normal. Mais ce qui nous parait plus que suspect c’est l’apparition des « chargés de mission » qui s’excitent, frisant l’hystérie pour parasiter le débat et le détourner. C’est ce qui se passe aujourd’hui avec l’article de notre frère Djamaleddine Benchenouf.

Nous avons connu cela à plus grande échelle, un certain janvier 92, lorsque notre brave « ghachi » croyait avoir signifié sa retraite à ce régime honni, en légitimant les 3 Fronts pour diriger le pays. Nous avons tous en mémoire la campagne hystérique menée par les « services » qui avaient mobilisé les médahines et les guezanates de leur « société servile » pour servir de vitrine civile au pronunciamiento des putschistes avec la précieuse collaboration des intégristes « démocrates » et de la frange extrémiste du FIS, pronunciamiento qui allait plonger le pays dans les abysses de la terreur et de l’horreur.

Nous avons également connu cela début 95, lorsque la classe politique représentative de l’époque avait signé le contrat national dit de Rome, sous les auspices de l’association Sant’Egidio. Et nous avons là aussi en mémoire la « mobilisation » des troubadours politiques et les honteuses « marches spontanées » pour dénoncer les « traîtres » et les « complices des égorgeurs » dont le seul crime avait été d’appeler à une véritable réconciliation nationale et à une résolution politique de la crise née de l’arrêt du processus électoral. Les « Maîtres » de l’Algérie n’hésiteront pas à louer les services d’un ‘Alem (ou plutôt un ‘Amil) syrien, un certain El Bouti pour venir traiter ce Contrat National sur Yatima-TV de « Kofr » car réalisé sous les auspices d’une association …..Chrétienne.

Donc nous sommes habitués à ces provocations crasseuses et grossières. Et plus il y a de provocations, plus nous sommes rassurés que nous sommes sur la bonne voie du rassemblement et du changement.

Ces « chargés de mission » viennent se défouler dans l’anonymat derrière l’écran de leur PC pour porter atteinte aux valeurs civilisationnelles de leur Nation, ou à la dignité d’Hommes qui ont le courage de signer de leur nom leurs articles ou commentaires. D’autres, du haut de leur piédestal, avec leur morgue méprisante et hautaine envers celles et ceux qu’ils considèrent comme du « ghachi » viennent doctement nous asséner mordicus leurs « vérités » et parler au nom d’un peuple (ghachi) qu’ils méprisent et qui les méprise. Il n’est pas de plus facile et de plus lâche que de jouer à ce jeu puéril et stérile. Pensent-ils ébranler par leur lâcheté les fortes convictions et la Foi inébranlable d’Hommes et de Femmes Libres qui œuvrent au véritable changement ?

Ils ne sont en réalité qu’une infime minorité mais qui se prend maladivement pour la majorité. C’est pour cette raison que j’invite les sœurs et frères à signer avec leurs noms réels. Ceux qui craignent le Créateur, doivent-ils craindre les voyous névrosés de la police politique ? JAMAIS !

Ce débat nous a confirmé aussi que l’extrémisme n’était pas l’apanage d’une certaine frange « d’islamistes » seulement, mais aussi celui d’une certaine frange de « laïcs » et de « démocrates », ceux que j’ai toujours appelé les démocrates non pratiquants.

Cette parenthèse fermée, je voudrais aborder encore une fois cette épineuse question du rassemblement des Algériens autour de valeurs et de principes dans le cadre d’un compromis politique historique. C’est une idée qui a germé depuis plusieurs années et qui est arrivée au stade de maturation après de très nombreux contacts avec nos compatriotes de divers horizons politiques.

Nous sommes arrivés à la conclusion que la grave crise politique qui secoue le pays depuis près de 18 ans ne pouvait être réglée que politiquement après l’échec cuisant de la politique dite sécuritaire et de son bilan accablant et criminel se chiffrant à des centaines de milliers de morts. Et la liste macabre reste hélas ouverte !

Que ce règlement politique ne peut venir que du peuple guidé par ses véritables élites intellectuelles et politiques. Il est illusoire d’attendre une solution de l’intérieur du système miné par ses propres contradictions et ses luttes claniques. Mais nous n’éliminons pas le ralliement de certaines forces plus ou moins saines au sein du système (qui n’ont pas les mains tâchées de sang de leur propre peuple) pour participer à ce changement radical et pacifique et à cette transition vers un État de Droit.

Ce compromis politique historique pourrait se faire autour de valeurs et de principes intangibles qui sont :

• Les valeurs civilisationnelles de la Nation Algérienne (Islamité, Amazighité et Arabité), fondements de notre ALGERIANITE et socles de notre unité nationale.
• L’égalité de tous devant la loi.
• La sacralité des droits de la personne humaine.
• La souveraineté populaire : le peuple étant la seule source du pouvoir et de légitimité.
• La séparation effective des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire.
• Les libertés individuelles et collectives.
• L’alternance au pouvoir à travers le suffrage universel.
• Le respect et la promotion des cultures nationales.

Peut-on se proclamer démocrate et refuser de s’entendre sur ces principes fondamentaux ?

Une fois le terrain politique balisé et les principes acceptés et RESPECTES par tous, laissons le peuple choisir librement son projet de société et ses authentiques représentants.

Il est clair aussi que la véritable réconciliation passe par une véritable moussaraha (dialogue franc) où chaque partie doit reconnaître ses erreurs et faire son autocritique, qu’il s’agisse des intellectuels, des politiques, des militaires, des journalistes…. J’avais cité dans un précédent commentaire le courageux travail d’autocritique réalisé par l’institution militaire et la presse chiliennes. Il y a aussi l’exemple de l’Afrique du Sud et tant d’autres pays qui ont connu des conflits internes meurtriers.

Je ne pense pas que la politique d’exclusion soit la meilleure voie pour asseoir une culture démocratique et instaurer un État de Droit. J’avais repris dans l’un de mes articles une citation d’un Homme d’Etat occidental qui disait : « Il n’y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités ». Or une partie de nos élites semble construire sa « politique » sur du virtuel, sur ses propres souhaits, pour ne pas dire sur ses rêves et ses fantasmes. Déconnectée des réalités nationales, elle pense qu’il suffit d’importer des concepts d’ailleurs (démocratie, laïcité, interdiction du Hidjab …..) et d’exclure un pan socio-politique non négligeable pour régler la crise multidimensionnelle dans laquelle se débat le pays.

L’expérience nous a montré que toute démocratie se construit sur la base des valeurs civilisationnelles de chaque Nation, pour être viable. Comparons les démocraties britannique, allemande, scandinave, américaine. Sont-elles identiques ? Sommes-nous incapables de construire notre démocratie adaptée à nos réalités et à nos valeurs? Ou devons-nous toujours singer aveuglément les autres ?

Il est clair et pour revenir aux réalités du pays qu’il existe trois courants politiques essentiels : nationaliste, islamique et social-démocrate. Penser effacer administrativement et exclure par la force un courant est une grossière erreur politique. Le courant islamique est une réalité. Tous les hommes politiques sages et lucides reconnaissent cette réalité. Le FIS était le plus représentatif de ce courant et était la seule force à l’époque capable de venir à bout du régime. Mais malheureusement ses responsables ont commis des erreurs monumentales. Comptant sur la masse, faisant cavalier seul, sans tenir compte des autres forces en présence et dépourvu de stratégie politique, il tombera dans le piège du régime qui en fera aux yeux des citoyens et plus particulièrement de notre couche moyenne frileuse et khobziste, le bourourou national avant de l’entraîner sur le terrain de la violence politique qui lui sera fatale. Il est important que nos frères qui appartenaient à ce parti puissent s’exprimer sur ce site et nous donner en toute sérénité leur point de vue. Je profite de l’occasion pour répondre à notre cher frère signant sous le pseudo K. Abenceradj. Ni moi, ni Djamaleddine n’avons écrit ou dit que le FIS était un parti démocrate. Il existait cependant des démocrates en son sein mais ils ne représentaient qu’une minorité qui n’avait pratiquement pas droit au chapitre.

Il est important de tirer les leçons de notre drame.

La force et la répression utilisées par le régime n’ont absolument rien réglé, bien au contraire. Elles ont aggravé la situation tant politique que sociale.

La crise éminemment politique ne peut être réglée que politiquement et par tous les acteurs politiques représentatifs.

Il ne peut y avoir de véritable réconciliation nationale (moussalaha) sans moussaraha et sans Vérité et Justice concernant tous les crimes contre l’Humanité commis contre notre peuple sans défense.

Nous devons œuvrer à l’élaboration d’un compromis politique historique autour de principes et de valeurs communes où se reconnaîtront tous les Algériens sans exclusion aucune.

Tous les courants représentatifs, sans exclusion ni exclusive ont leur place pour peu que tous soient respectueux des valeurs civilisationnelles de la Nation et des principes démocratiques de gestion politique et de vie commune.

Le changement radical et pacifique ne peut être réalisé par un seul parti ou un seul courant. C’est l’œuvre de toutes et de tous. Ensemble, transformons ce rêve en réalité. Rappelons-nous de la lumineuse stratégie unificatrice de nos frères aînés Abane et Ben M’Hidi, qui ont eu l’intelligence de rassembler sous la bannière du FLN authentique, tous les partis et associations aux idéologies différentes (MTLD, UDMA, PCA, Oulémas et personnalités diverses) pour libérer le pays.

De très nombreux compatriotes ont développé avec pertinence et sagesse leurs points de vue concernant l’initiative de rassemblement et que je partage pleinement.

Ensemble continuons notre travail de rassemblement que nous avons commencé depuis quelque temps ici en Algérie mais aussi avec nos compatriotes exilé(e)s.

Ensemble continuons à œuvrer au compromis politique historique qui commence à voir le jour grâce à la volonté et au travail inlassable de nombreux frères et sœurs.

Soyons patients et persévérants. Le chemin reste certes long mais « lorsque le peuple veut la vie, force au destin d’y répondre, au jour de se lever et aux chaînes de se rompre ».

Fraternelles et respectueuses salutations.

Salah-Eddine Sidhoum
29 août 2008

Source: www.lequotidienalgerie.com

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